20/08/2013
Le linguiste était presque parfait
"Hoosier: subst, étymologie obscure et ennuyeuse. Crétin de Blanc assorti d'une grasse épouse blanche qui mange des légumes verts, accroche un silencieux à son pot d'échappement à l'aide d'un cintre, et laisse traîner des réfrigérateurs dans son jardin pour que des enfants s'étouffent à l'intérieur."
Quoi de plus calme en apparence qu'un institut de linguistique étudiant le langage des nourrissons ? Et pourtant, outre leurs inimitiés, l'intérêt maniaque porté aux mots prononcés , ces charmants linguistes doivent aussi penser à l'avancement de leurs carrières professionnelles , de leurs projets amoureux, veiller au maintien des subventions qui leur sont accordées , voire même sauver leur peau. En effet, l'un d'entre eux vient d'être assassiné.Jeremy Cook va mener sa propre enquête sur le meurtre de son collègue de manière bien peu orthodoxe, utilisant ce qu'il connaît le mieux : la linguistique !
Le microcosme évoqué dans ce nouveau roman de David Carkeet n'est pas sans rappeler celui de David Lodge mais avec des personnages encore plus farfelus et déjantés qui parviennent à rendre la linguistique follement attrayante (ce qui n'est pas une mince affaire, vous l'avouerez !). L'auteur joue à merveille des oppositions entre ses personnages et nous entraine avec un sérieux imperturbable dans un monde où les énigmes dignes de Gaston Leroux sont résolues grâce à des signaux linguistiques ! Un monde fou fou fou qui nous distrait avec intelligence et bonne humeur !
Le billet tentateur de Clara.
Le linguiste était presque parfait, David Carkeet, traduit de l'anglais (E-U) par Nicolas Richard, Monsieur Toussaint Louverture 2013, 287 pages .
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19/08/2013
Profanation
"Il appela son ancien collègue et concurrent du commissariat de Station City, Brandur Isaksen, un type moitié groenlandais, moitié féringien et résolument arctique, tant dans sa personnalité que dans son comportement. On l'avait surnommé le Glaçon de Halmtorvet."
Deuxième volume de la série mettant en scène le tandem Morck et son assistant Assad, Profanation entremêle deux narrations. La première concerne un vieux dossier, celui d'un double meurtre mettant en cause des fils de grands bourgeois .Innocentés à point nommé par les aveux de l’assassin, ces derniers sont maintenant devenus des membres éminents de la bonne société. Qui tient absolument à ce que la police revienne sur cette affaire ?
Le second point de vue est celui d'une sans domicile fixe qui veut ,elle aussi , se venger et remuer le passé. Bien évidemment, les deux récits convergent vers le même but.
Le deuxième opus d'une série est à mon avis un tournant particulièrement difficile à négocier. En effet, les personnages sont en place et ils faut soit leur donner davantage de densité, les éclairer sous un nouveau jour, soit privilégier le récit. Jussi Adler Olsen a choisi cette seconde option en montant en intensité dans l'horreur. On croise en effet des personnages particulièrement malsains, des psychopathes, capables de donner le change en public mais qui sont de véritables monstres dans l'intimité. Il en résulte un certain malaise à la lecture, même si bien sûr on doit s'attendre à ce type de personnages dans ce genre de romans. Mais un chouïa de complaisance rend l'ensemble un peu trop racoleur.
Profanation, Jussi Adler Olsen, Albin Michel 2012. Traduit du danois par Caroline Berg.
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17/08/2013
Quand j'étais Jane Eyre...en poche
"Quelle est cette manie familiale d'aspirer à la célébrité et à la gloire ? Quelle folie !"
Intriguée par tout un pan de la vie de Charlotte Brontë resté dans l'ombre, celui pendant lequel elle a rédigé le roman qui la rendra célèbre et changera sa vie, Jane Eyre, Sheila Kohler a imaginé ce qu'avait bien pu vivre l'écrivaine durant cette période.
Avec sensibilité, elle brosse le portrait de cette famille marquée par la mort, la maladie, la pauvreté, l'égocentrisme d'un père mais aussi par ce lien formidable à l'écriture qui unit les quatre enfants survivants de la fratrie Brontë. Branwell, le frère chéri, gaspillera ses dons dans les opiacées et l'alcool, mais Charlotte, Emily et Anne qui ne feront que de brèves et malheureuses incursions dans le monde extérieur à celui de leur presbytère, sauront , à des degrés différents, braver les interdits de l'époque et rédiger des romans qui seront parfois jugés "choquants, brutaux, anti-chrétiens et anti-bourgeois" car révélant la violence de leurs frustrations.
Sheila Kohler a choisi de centrer son roman sur Charlotte (à qui je préfère largement sa cadette Emily, je le confesse), la seule qui aura pu accéder à un peu de bonheur, mais elle ne sombre jamais dans le pathos, évoquant avec sobriété la vie difficile de la famille Brontë. Des retour en arrière permettent d'évoquer les principaux épisodes de leur trop brève existence.J'ai beaucoup aimé la manière dont Sheila Kohler a tissé les liens entre leurs romans et la vie des soeurs, montrant bien leur esprit de revanche, mais n'omettant pas non plus la sourde rivalité (réelle ou imaginaire mais très plausible en tout cas) qui les a animées juste avant l'édition.Un éclairage intelligent, une écriture élégante, une lecture qui ravira les fans (dont je suis !) .
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : sheila kohler
16/08/2013
Les chroniques de Lady Yoga
"Parfois, ça simplifie la vie de ne pas créer de grandes attentes."
Il aura fallu que j'apprenne que derrière Rain Mitchell se dissimulait en fait Stephen Mc Cauley (dont j'avais adoré L'objet de mon affection) pour que je me lance dans la lecture de ces Chroniques de Lady Yoga, (dont le titre fait évidemment écho aux chroniques de San Francisco d'Armistead Maupin).
Pas besoin de pratiquer cette discipline pour se régaler de l'histoire de ces femmes qui fréquentent et/ou animent un cours de yoga dans un quartier "excentré et peuplé de prétendus artistes, fréquenté par une poignée d'excentriques qui ne regardent jamais la télé."de Los Angeles.
Satire du monde du yoga, discipline détournée par certains en une véritable industrie, ce roman girly, mais jamais trop futile, est rempli de bienveillance et d'humour. Un petit plaisir à s'offrir sans plus attendre et à dévorer d'une traite !
Dans la foulée, j'ai commandé le second !
06:00 Publié dans Humour, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : rain mitchell, stephen mc cauley
15/08/2013
Les Fuyants
"Son corps était en train de déclarer forfait. Jacob a mis du temps à réunir assez de courage pour être lâche . Ou l'inverse."
Dans la famille Hintel , les hommes ont une fâcheuse propension à se carapater et à fuir toute forme d'engagement sentimental. Le petit dernier de cette lignée familiale, Joseph, aidé par son oncle Simon, parviendra-t-il, en explorant le passé, à dépasser ce schéma transgénérationnel ?
Ils auraient tout pour qu'on les déteste ces Fuyants mais tout l'art d 'Arnaud Dudek, par une construction subtile du récit, par un humour parfois tendre, parfois féroce (ah la visite au beau-père potentiel collectionneur de tire-bouchons !) et surtout par son écriture , fertile en formules et en métaphores, est de nous les rendre sinon sympathiques , du moins diablement attachants. Car il y a beaucoup de tendresse et de délicatesse dans ce roman qui revisite, sans prendre la forme d'un règlement de comptes, les périlleuses relations père/fils. Un roman qui nous laisse un peu K.O, avec juste l'envie de le relire aussitôt pour encore mieux le savourer. Un pur délice !
Clara a elle aussi été conquise.
Le billet de Cuné !
Les Fuyants, Arnaud Dudek, Alma Editeur, 127 pages, un concentré de bonheur.
Du même auteur: clic !
06:00 Publié dans rentrée 2013, romans français | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : arnaud dudek
14/08/2013
BHL fait des choses...
Just for fun ! Clic !
17:53 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (6)
Mes meilleures amies : séance de rattrapage
Imaginez un peu : votre pâtisserie a fait faillite, votre petit ami en a profité pour prendre la clé des champs et votre nouveau boy friend est juste un goujat ! Heureusement, votre meilleure amie depuis l'enfance se marie et vous allez pouvoir lui organiser une méga fête !
Las , nouveau problème à l'horizon: vous découvrez que vous possédez une rivale qui tente de vous ravir le titre de meilleure amie et celui d'organisatrice de l'enterrement de vie de jeune fille. En plus cette ennemie en puissance est riche, sublime, juste parfaite ! Jetterez-vous l'éponge ?
La préparation d'un mariage, concentré de tensions , est ici utilisée, non pour régler des problèmes familiaux ,mais amicaux et donner l'occasion à une belle brochette d'actrices de montrer l'étendue de leur talent comique.
Kristen Wiig ,sur qui s'abat cette avalanche de calamités, a une énergie folle et, dans le rôle de la soeur du marié, Melissa McCarthy n'a rien à lui envier. La romance est assurée par un nounours craquant, Cris O' Dowd, ange gardien de la route devant qui l'héroïne va se livrer à un hilarant festival de délits routiers pour le forcer à réagir ! Attention, ces demoiselles ne font pas toujours dans la dentelle et c'est parfois un peu trash mais bon, le filles ont bien le droit aussi de se lâcher ! Un film bourré d'énergie que j'ai revu avec plaisir à plusieurs reprises ! à voir absolument en V O !
06:00 Publié dans je l'ai vu ! | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : paul feig, feel good movie
13/08/2013
Single & Single
"Il n'y a pas de blanc destrier, marmonna Oliver. Ce serait plutôt un genre de manège."
Tiger Single a bâti un empire financier auquel il a associé son avocat de fils, Oliver. Mais ce dernier, se rendant compte que son père a partie liée à des mafieux de l’Est de l’Europe, va le dénoncer aux autorités anglaises.
Commençant par une scène très cinématographique, Single & Single multiplie les rebondissements, joue avec les nerfs du lecteur, mais ne le perd jamais en route. Les personnages sont bien campés, et même si on n’échappe pas à quelques clichés, ils sont vite balayés par l’intensité dramatique du récit.
Je m’attendais à être paumée dans le labyrinthe des sociétés off-shore et autres combines ayant pour but d’échapper à toute légalité, mais non.
Ces manipulations financières sont en fait l’exacerbation d’une situation autobiographique que nous présente l’auteur dans son avant-propos. En effet, Single & Single décrit surtout les relations compliquées entre un père « imprévisible, irréformable et totalement incompréhensible », qui, à une échelle bien plus modeste , pratiquait lui aussi l’art des montages financiers plus que douteux, et un fils, obsédé par la figure paternelle. Un roman prenant même si, comme moi, on n’est pas un afficionado des romans d’espionnage. De la belle ouvrage.
Offert par ma libraire, yesss !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : john le carré, pèrefils
12/08/2013
Fugitives
"Mais à ce moment-là, les sentiments étaient altérés, l'homme éprouvait de la gratitude, elle de la bonne volonté, les deux une espèce de nostalgie décalée."
Une jeune femme sous l'emprise d'un homme plus âgé, un raté pur jus, ce qu'elle s'obstine à ne pas voir, va tenter d'échapper à son emprise dans la première nouvelle de ce recueil de huit textes. On a le coeur qui bat tout au long de notre lecture , on a envie de l'interpeller cette naïve amoureuse et on finit, le coeur broyé, à la fin du texte.
Nous suivons ensuite durant trois époques de sa vie, de la jeunesse à la maturité, Juliet qui possède, non une difformité physique, mais une maîtrise de lettres classiques, ce qui revient quasiment au même dans le coin paumé où elle a grandi. Aux prises avec des parents vieillissants, puis avec sa propre fille en quête de spiritualité, Alice Munro la décrit avec beaucoup d'empathie.
Jeunes ou vieilles, le point commun entre toutes les femmes évoquées est qu'elles sont toujours en décalage avec le monde et l'époque dans lequel elles ont eu la malchance de naître, mais ne présentent pourtant jamais en victimes : "Elle espère comme les gens espèrent sans se faire d'illusions des aubaines imméritées, des rémissions spontanées, des choses comme ça !".
Dans ces histoires, les hommes sont relégués au second plan, même si d'une manière ou d'une autre, ils influent sur l'existence féminine. Mais au final, ce sont elles qui choisissent, mènent leur vie comme elles l'entendent, s'en accommodent plutôt bien même si parfois la vie a été cruelle envers elles.
Une pointe d'humour, de l'émotions contenue et une lucidité aigüe, voilà qui rend particulièrement savoureux ces textes intemporels.
Fugitives, Alice Munro, oints Seuil 2009, traduit de l'anglais (Canada) par Jacqueline Huet et jean-Pierre Carasso.
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09/08/2013
Les femmes du bus 678 (séance de rattrapage)
Dasn les espaces publics, les hommes cairotes, profitant de la foule, pratiquent communément des attouchements sexuels sur les femmes, et ce , en toute inpunité. En effet, ces dernières, faute d'être protégées par la loi et craignant le déshonneur qui s'abattrait sur elles et leur famille, n'osent pas porter plainte. Ce qui, d'ailleurs ne serait pas d'une grande utilité ,ces faits n'étant pas considérés comme des délits.
Trois femmes, appartenant à des milieux différents, vont pourtant briser la loi du silence et oser se rebeller.L'humiliation et la peur changent de camp...
Malgré quelques maladresses scénaristiques, Les femmes du bus 678 est un film qui présente un panorama riche de la situation faite aux femmes dans la ville du Caire. De manière subtile, le réalisateur évoque la situation actuelle qui a empiré car avant les femmes s'habillaient court et n'étaient pas harcelées pour autant. La surpopulation urbaine, la flambée par conséquent des prix des logements, empêchant les jeunes couples de vivre ensemble sont peut être des explications partielles à cette frustration sexuelle des hommes. Pour autant les femmes sont niées dans leur identité, un dragueur avoue même en toute candeur qu'il n'accorde aucune importance au visage de la femme qu'il agresse ! Une scène, particulièrement éprouvante, montre même une foule masculine surexcitée qui s'en prend à une femme, juste parce que c'est une femme !
Dans l'espace privé, leur situation n'est guère plus confortable, les mariages d'amour ne semblent pas monnaie courante et le poids de la société est tel que même dans un couple aisé et moderne l'homme va réagir pour protéger son amour-propre et son honneur au lieu de prendre en compte la douleur de son épouse. L'espoir vient pourtant du couple le plus jeune qui,malgré les pressions, parvient à faire front et à transmettre un message d'espoir.
Cette lutte de trois femmes cairotes fait bien évidemment écho aux violences qui sont faites aux filles partout dans le monde mais n'est jamais désespérant, bien au contraire ! un film à (re) voir de toute urgence ! Un film nécessaire et jamais plombant !
Dasola en a parlé , la route du cinéma également. Aifelle, il me semble que toi aussi, mais je ne retrouve pas ton billet !
Déniché à la médiathèque .
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