21/09/2013
La part de l'homme...en poche
"Est-ce que vous pourriez changer le papier peint pour la prochaine fois ? J'ai rompu mes liens avec la nature."
Pour sept mille euros l'ancienne mercière à la retraite Salme Malmikunnas a vendu sa vie à un écrivain en mal d'inspiration.
Mais à quel usage destine-t-elle cette somme ? Le récit qu'elle confie est-il vraiment conforme à la réalité ? Dans une Finlande en proie au libéralisme le travail a bien changé et rare sont ceux qui privilégient aux euros le sentiment du labeur bien accompli.
Racisme, pauvreté , violence des mots encore plus que des gestes, ces mots auquel le mari de Salme semble avoir renoncé, ces mots dont sa fille Helena connaît bien le pouvoir, sont au centre de ce roman entrecoupé par les cartes postales que Salme adresse à ses enfants, petits messages foutraques témoignant de son amour , le tout composant une mosaïque sensible d'un pays en pleine mutation. La fin est tout à fait percutante , violente, symbolique et apaisante à la fois.
Un roman au style parfois haché mais un très joli portrait d'une famille qui pourrait être la notre au sein d'un monde qui est le notre.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : kari hotakainen
20/09/2013
Lady Yoga en posture critique
"Chaque jour, elle sent que quelque chose se réveille à l'intérieur d'elle, que de nouveaux sentiments germent, comme de jeunes pousses."
L'avantage quand on enchaîne la lecture de romans qui se suivent , c'est qu'on ne ressent aucune frustration, qu'on n'a pas besoin de se remémorer qui est qui, qui fait quoi. C'est donc de manière bien confortable que j'ai lu Lady Yoga en posture critique, la suite de Les chroniques de Lady Yoga (clic).
Pas de soucis, Stephen Mc Cauley tient bon la barre et, si l'effet de surprise a disparu, si le côté grand show du yoga aux États-Unis m'a plutôt laissée perplexe quant à ma propre pratique, c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai retrouvé Lee, Katherine, Imani et les autres.
Mc Cauley ,visiblement en terrain connu, en profite pour se livrer à une réjouissante satire du monde du cinéma. Il établit aussi une correspondance entre littérature et yoga qui devrait parler à plus d'une lectrice : "Lire, a décidé Katherine, c'est comme suivre un cours de yoga : on pénètre dans un autre monde, où l'on rencontre des personnages chaque fois différents, aux prises avec leurs propres problèmes, leurs propres défis; observer leurs tribulations nous tient à l'écart de nos soucis quotidiens et, lorsqu'on émerge de ce monde parallèle, on se trouve en possession de nouvelles informations-ou de bribes d'informations, plutôt-que l'on a collectées à notre insu, mais qui commencent à nourrir notre réflexion."
Un chouïa en dessous du premier mais fort sympathique néanmoins et toujours aussi addictif !
PS: pour "mettre le pied à l'étrier" à quelqu'un qui voudrait se mettre à la lecture un personnage conseille de lire chaque matin pendant dix minutes...
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : rain mitchell, stephen mc cauley
19/09/2013
Petit éloge des brunes
"Dans la teinte des cheveux se joue le passé d'une nation."
Petit éloge des brunes combine deux de mes péchés mignons: le genre de l'éloge et l'abécédaire. Elsa Marpeau nous fait bénéficier de sa solide culture générale , qui la fait fréquenter aussi bien la Bibliothèque Nationale de France que tourner les pages de Voici. Mais ce grand écart s'effectue pour la bonne cause car c'est dans les pages des magazines people que l'on déniche les Brunes contemporaines et celles à qui elles servent souvent de faire-valoir, les Blondes.
Quelques redites sur les stéréotypes qui ont traversé les siècles (du fait de la structure de l'abécédaire, sans doute) mais une mine d'informations et de réflexions sur les stéréotypes liés aux Brunes. Saviez-vous par exemple que "l'inégalable Betty Boop" est apparue sur les écrans "d'abord sous les traits d'un chien" avant de se muer en pin-up ?
Plein de références dans de nombreux domaines artistiques et une seule absence : celle de la chanson interprétée par Lio: "Les Brunes comptent pas pour des prunes". Une référence trop évidente ou trop triviale peut être.
Un petit plaisir à s'offrir pour deux euros, quelle que soit sa couleur de cheveux, bien sûr.
Ps: l'auteure est évidemment une très jolie Brune.
06:00 Publié dans Essai, le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : elsa marpeau
18/09/2013
Les touristes
"Murder is green" (tuer c'est écolo.)
Mieux vaut ne pas croiser le chemin de Chris et Tina ! Partis pour leurs premières vacances en amoureux à la découverte de l'Angleterre, ils enclenchent, sur un coup de colère, un dangereux engrenage et commencent à liquider tous les gêneurs qui encombrent leur chemin, avec une logique qui part rapidement en vrille !
Amateurs d'humour anglais et d'humour noir vous allez, comme moi, vous régaler de ces tueurs en série hors normes qui circulent dans une caravane des plus cosy, collectionnent les trophées les plus kitsch , le tout sur fond de tubes des années 80 !
Un énorme merci à Cathy et Laurent pour ce DVD jubilatoire, jusqu'à la dernière minute !
06:00 Publié dans je l'ai vu ! | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : ben wheatley
17/09/2013
Idiopathie
"Meilleure elle était dans l'exercice de son travail, plus les gens la détestaient. De l'avis général, elle excellait dans son travail."
Séparés après une liaison tortueuse, Katherine et Daniel vont devoir se rapprocher pour faire face au retour d'un fantôme de leur passé: leur ami commun Nathan.
Daniel a retrouvé l'amour mais il n' a jamais été et ne sera jamais de taille à affronter son ex , reine du cynisme et de la mauvaise foi. Les retrouvailles s'annoncent donc plutôt compliquées...
Trentenaires narcissiques et par certains côtés encore puérils, Daniel , Katherine et Nathan prennent tour à tour la parole dans ce roman présenté comme une comédie à l'anglaise .
Si Sam Byers manie les mots avec une profonde jubilation et atteint souvent son objectif,nous faire sourire, voire pouffer, (j'ai adoré en vilaine que je suis l'exploitation de Nathan par sa mère) il ne parvient pas toujours à donner de la densité à ses second rôles (j'aurais aimé que soient développés par exemple les personnages de la mère et de la sœur de Katherine). Il aurait sans doute fallu aussi tailler dans les discussions et les prises de tête intérieures entre les anciens amoureux (si je lui dis ça, elle va réagir comme ça mais...). Trop longues, elle ont failli m'occasionner un mal de tête et j'avais juste envie de dire à Daniel : Fais-toi une raison et tais-toi. Quant aux vaches, atteinte du syndrome du désœuvrement, elles sont le symbole d'une société en perte de sens. Elles n'en demandaient pas tant, les pauvres.
Bref, un premier roman presque réussi. ...,
Traduit de l’anglais par Nicolas Richard.
Le billet tentateur de Cuné, qui a bu du petit lait !
06:00 Publié dans rentrée 2013, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : sam byers, comédie à l'anglaise
16/09/2013
Faillir être flingué
"Il lui semblait parfois marcher pour dénouer ou atteindre en lui une place vide et douce, éloignée des courants, un apaisement."
Qu'elle s'attaque à bras le corps au roman épique médiéval (Bastard batlle) *ou au récit de science fiction Le dernier monde)* , Céline Minard a le chic pour s'emparer d'un genre et se l’approprier. Dans Faillir être flingué, c'est sur le western qu'elle a jeté son dévolu.
J'en vois d'ici certain(e)s faire la grimace, mais oubliez tous vos préjugés sur ce genre et précipitez-vous sur Faillir être flingué , un roman qu'on ne peut lâcher tant il est à la fois dense, fabuleusement écrit et fertile en rebondissements !
La romancière y alterne scènes contemplatives, scènes de genres (l'arrivée en chariot, l'attaque de la diligence , le héros solitaire dans la ville en butte à ses ennemis...) pour mieux les dynamiter et leur insuffler fraîcheur et énergie. Elle y observe aussi la sédentarisation de ses personnages ainsi que "la propriété, sa nature et sa circulation problématique". En effet, au gré des aventures, les objets passent de mains en mains, de même qu'amitiés et inimitiés évoluent au fil du temps. Nous sommes en territoire connu, du moins le croyons nous, mais Céline Minard se plaît à nous mener où bon lui semble et c'est tant mieux ! Purement jubilatoire !....,
*lus mais non chroniqués.
Du même auteure, clic !
06:00 Publié dans rentrée 2013, romans français | Lien permanent | Commentaires (22) | Tags : céline minard, western
15/09/2013
La vie domestique
Les femmes d’Arlington Park,clic, vont ressortir en poche et sont devenues La vie domestique, titre du film qui sortira le 2 octobre. à suivre...
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : rachel cusk
14/09/2013
Détournements de couvertures de livres...
...c'est ici (clic) par Clémentine Mélois
Difficile de dire laquelle je préfère, Duras, François Valéry ou Marx ?
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (9)
13/09/2013
Supplément à la vie de Barbara Loden...en poche
"Barbara ne fait des films que pour ça. Apaiser. Réparer les douleurs, traiter l'humiliation, traiter la peur."
Barbara Loden, actrice des sixties mais aussi réalisatrice d'un unique film Wanda, dont elle incarne le personnage éponyme (car "Tout ce que je fais c'est moi." ) est le sujet de la notice que doit rédiger la narratrice du roman.
Mais, très rapidement, à force d'accumuler la documentation , cette dernière qu'on devine très proche de l'auteure, prend sa mission de plus en plus à coeur et laisse aller son texte vers l'autobiographie, quoi qu'en dise son éditeur. Elle approfondit son enquête, n'hésitant pas à contacter l'entourage de Barbara Loden, se laissant fasciner par la personnalité de cette femme troublante.
De la même manière que la notice se détourne de sa direction initiale, entrelaçant la biographie de Barbara, le film Wanda et les réactions de la narratrice et de sa mère, Nathalie Léger nous offre le portrait de femmes à la dérive. Son écriture est à la fois précise et hypnotique, elle tisse son texte avec maestria et envoûte le lecteur. Un texte qui reste longtemps en mémoire et résonne en nous.
Un extrait :
"A quoi puis-je reconnaître ce qui me lie à Wanda ? Je n'ai jamais erré sans domicile, je n'ai pas abandonné d'enfants, je n'ai jamais remis le cours de mon existence ou simplement celui de mes affaires à un homme, le cours quotidien de ma vie, je ne l'ai jamais confié à quiconque, me semble-t-il, j'ai abandonné des hommes, et parfois brutalement, avec la joie vibrante qu'o éprouve à bifurquer, à s'évanouir dans une foule, à sauter sans prévenir dans un train, à faire faux bond, le plaisir aigu et rare de se dérober, de se soustraire, de disparaître dans le paysage-mais pas celui de se soumettre. [...] mais il m'est arrivé surtout de me laisser faire, d'attendre que ça passe, de préférer le malentendu à l'affrontement-impossible dans ces moments de penser que la défense et l'illustration de mon corps puisse en valoir la, peine, et d'ailleurs qu'est ce que ça signifie "mon corps" , à quinze ans, seul signifie ne pas être seule, ne pas être abandonnée."
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans italiens | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : nathalie léger
12/09/2013
Sondage au pif
" Je devine juste que je suis étrange."
Quelle drôle de bonne femme cette Irma! Se faisant passer pour une enquêtrice, elle s'introduit dans des foyers de la grande banlieue de Helsinki . Sans doute juste pour tromper sa solitude. mais très vite, afin de se dépêtrer de ses mensonges, elle va s'enfoncer dans des situations de plus en plus compliquées et absurdes qui culmineront dans une épique course poursuite à 50 kilomètres par heure sur l'autoroute , en plein hiver finlandais !
Jonglant avec des mots d'argot, créant des mots-valises et/ou des néologismes (bravo au traducteur!)) Mikko Rimminen éprouve semble-t-il beaucoup de sympathie pour son héroïne. Cette dernière accumule les bourde, malgré sa bonne volonté, manque de confiance en elle, ne maîtrise ni son corps ni le tacot qu'elle tente de conduire.
Mais la conclusion est des plus chaleureuse et optimiste alors, préparez vite du café, laissez Irma entrer chez vous et préparez-vous à beaucoup sourire !
Sondage au pif, Mikko Rimminen, traduit brillamment du finnois par Sébastien Cagnoli, Actes Sud 2013, 327 pages farfelues...,
Le billet tentateur de Clara !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : mikko rimminen, roman finlandais, déjantée