11/04/2014
Le dernier vide-grenier de Faith Bass Darling
"Elle ne supportait pas de voir tout ce qui avait fait la gloire de cette maison disparaître pièce après pièce aux mains de gens qui y poseraient des bouteilles de bière, leur monnaie , ou un poste de télé. c'était un sacrilège."
Parce que Dieu le lui a ordonné, parce qu'elle sait qu'elle va mourir, Faith Bass Darling, septuagénaire excentrique, organise un vide-grenier le 31 décembre 199 au matin. Une occasion exceptionnelle pour le public de voir étalés sur la pelouse les biens que cinq générations ont amassés dans cette riche maison. L'occasion aussi d'évoquer les fantômes , les drames et la fuite de la fille de Faith, tous liés à des objets du passé.Une folle journée donc où les événements vont s'enchaîner, brassant tout un flot d'émotions et de non-dits.
Quelle relations entretenons-nous avec les objets ? Peuvent-ils être de véritables compagnons ou devons-nous apprendre à nous libérer d'eux ? Faith Bass Darling et sa fille devront rapidement trouver des réponses à ces questions avant que l'an 2000 ne pointe...
Premier roman des plus sympathiques, Le dernier vide-grenier de Faith Bass Darling paraît parfois un peu léger dans ses réflexions et sa volonté de vouloir à tout prix remettre le monde en ordre mais il procure néanmoins un bon moment de lecture, fluide et plaisant. Un bon gros roman comme on les aime !
Le dernier vide-grenier de Faith Bass Darling, Lynda Rutledge, traduit de l'anglais (E-U) par Laure Manceau, Babel 2014 , 347 pages qui se dévorent toutes seules !
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : lynda rutledge
10/04/2014
Changer de vie
""Les gens ont peur parce que c'est un défi, ils ont peur de ne pas trouver mieux, ils préfèrent rester dans ce qu'ils connaissent parce que c'est plus rassurant. Et là on est dans la souffrance parce qu'on va finir par avoir des regrets , parce qu'on ne saura jamais ce qu'il y avait derrière la porte, ah non, moi je suis trop curieuse, je veux voir, je veux savoir !""
Changer de vie , chacun y pense plus ou moins sérieusement, mais toutes les personnes, j'allais écrire personnages tant ils ont de densité, rencontrées par Géraldine Barbe l'ont fait. L'auteure elle-même , étant directement concernée par le sujet ,a choisi- et c'est fort réussi- de confronter les différents témoignages d'y mêler ses propres réflexions et tout ceci entre très joliment en résonances.
Pas de portraits figés donc et que ce soit ce policier qui a choisi le chemin des planches , cet artiste qui a changé de sexe ,cette femme juive orthodoxe qui est devenue écrivaine tout en assumant son homosexualité ou d'autres qui ont choisi des chemins plus discrets pour changer de vie, tous sont intéressants et nous deviennent proches tant ils sont riches d'humanité.
Aucun voyeurisme, beaucoup d'empathie et de sensibilité, voilà les ingrédients de ces histoires de renaissance qui font chaud au cœur.
Changer de vie, Géraldine Barbe, Éditions Plein jour 2014 , 140 pages piquetées de marque-pages !
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08/04/2014
Entre les jours
"Pendant au moins trente secondes, tout était resté parfaitement calme. Pendant au moins trente secondes, avant que les cris ne retentissent, que leurs vies ne basculent définitivement, le monde était resté parfaitement calme."
Une famille américaine bien sous tous rapports : un père architecte, une mère au foyer, un garçon et une fille qui poursuivent leurs études. Certes, le divorce parental a quelque peu déstabilisé ce microcosme propret mais c'est surtout le renvoi de Chloé de l'université, puis sa disparition sans explication qui vont tout faire chavirer.
Roman psychologique, Entre les jours possède un sens du rebondissement et du suspense impeccables. On découvre petit à petit les causes du renvoi de Chloé et surtout on observe, fascinés, comment cette constellation familiale va devoir se réorganiser face à l'impensable. L'auteur se glisse avec aisance dans chacun de ses personnages et son écriture sensible et maîtrisée ne nous permet pas de lâcher ce roman addictif. Une réussite !
Entre les jours, Andrew porter, traduit de l'anglais (E-U) par France Camus-Pichon, Éditions de l'olivier 2014, 400 pages magnifiques.
Clara a aussi été conquise !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : andrew porter
07/04/2014
Point de gravité
"Quelles paroles, quels gestes ? On sous-estime toujours le pouvoir des mots, le poids des actes, leurs empreintes dans le tissu du temps."
à sa sortie, elle l'attend. Florianne n'est plus une adolescente et , à son tour, elle emmène Loïc au bord de la Mer du Nord.L'occasion de faire resurgir différentes strates de souvenirs pour celui qui a besoin de temps "Pour [se] réaccoutumer au chaos du monde, [se] réconcilier avec ce millénaire qui pour l'heure ne [l'] a guère épargné." L'occasion peut être de renouer, aussi, avec la beauté du monde.
Un roman sec et nerveux où le personnage principal tombe de Charybde en Scylla, sans (auto) apitoiement , et une découverte au passage du métier d'éducateur, sans clichés ni tabous. Un métier qui nécessite attention, pour repérer les subtils changements d'ambiance, mais aussi distance afin de ne pas brouiller les règles de ce qui n'est pas un jeu. Un peu chevalier blanc, un peu paumé, souvent sur le fil du rasoir, Loïc cherche autant à éclairer sa vie que celle des autres.
Un premier roman sensible, doté d'une belle efficacité dans le récit et d'un style émouvant.Lu d'une traite car très prenant !
Point de gravité, Ludovic Joce, D'un noir si bleu 2014.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : ludovic joce
05/04/2014
Bernadette a disparu...en poche !
"Je crois que vous me confondez avec quelqu'un qui souhaiterait vous connaître."
Bernadette, sa talentueuse fille Bee et son mari, gourou chez Microsoft ,vivent à Seattle, dans une ancienne institution où la frontière entre l'extérieur et l'intérieur est devenue plus que poreuse.
à la veille d'un voyage en famille en Antarctique, Bernadette, rattrapée par ses névroses, disparaît. Sa fille décide de se lancer à sa recherche et découvre bientôt dans son courrier tout un ensemble de documents qui vont lui permettre de brosser un portrait à 360 ° de sa mère, constituant ainsi le texte de ce roman.
Qui est vraiment Bernadette ? La pourfendeuse des mères parfaites de Seattle qu'elle appelle "les bestioles" ? Une architecte qui a étouffé dans l’œuf ses capacités créatrices ? Une femme qui n'a pas su surmonter ses échecs ? On pourrait continuer longtemps la liste de ces questions tant est riche la personnalité de cette femme hors du commun qui nous devient de plus en plus proche (et diablement sympathique !) au fur et à mesure de notre lecture.
Bourré d'un humour féroce, ce texte ne ménage pas les rebondissements et nous propose une satire hautement réjouissante d'un monde qui se voudrait parfait et lisse. Les personnages ne sont pour autant jamais présentés de manière manichéenne et l'on ne lâche pas ce roman, sauf pour en retarder au maximum la lecture des dernières pages !
06:01 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : maria semple
04/04/2014
L'exception
"-La vie bifurque constamment. Il n'est pas de personne plus mûre que celle qui change sept fois par semaine sa façon de penser."
La nuit du réveillon, son mari annonce à Maria qu'il la quitte pour un mathématicien, spécialiste comme lui de la théorie du chaos. Pour le coup, c'est bien la vie de la jeune femme qui devient chaotique ! Aidée par sa voisine Perla, haute d'un mètre vingt, conseillère conjugale et familiale (et nègre d'un auteur policier à ses heures), la jeune femme aura fort à faire pour se reconstruire psychiquement face aux événements bouleversants qui s'enchaînent.
Truffé de réflexions sur l'écriture , les liens entre la fiction et la réalité, L'exception possède un rythme enjoué , un ton qui ne sombre ni dans le pessimisme ni dans l’optimisme à tout crin. "-Si ta vie était un roman, dit-elle depuis la cuisine, une telle saturation d'événements semblerait peu vraisemblable." Et pourtant nous savons bien que la vie est souvent bien plus surprenante que la réalité.
Pas de solution miracle, pas d'analyse sauvage, juste du bon sens et de la bienveillance, de l'empathie pour des personnages nuancés et pleins de vie. Un roman alerte et revigorant , plein d'humour, bref une réussite ! Et zou, sur l'étagère des indispensables !
L'exception, Adur Ava Olafsdottir, traduit de l'islandais par la talentueuse Catherine Eyjolfsson, Zulma 2014, 338 pages riches d'humanité.
Du même auteur : clic et reclic (le second sortira bientôt au format poche !)
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, Les livres qui font du bien, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (19) | Tags : audur ava olafsdottir
03/04/2014
Les fleurs d'hiver
"Elle se demande si toutes les femmes de combattants en sont là aujourd’hui. à respirer leurs peau en guettant un mari remplacé par un inconnu."
Jeanne, ouvrière fleuriste, en ce mois d'octobre 1918 sait que son mari, Toussaint est vivant. Pourtant, alors qu'il est depuis de longs mois hospitalisé au Val de Grâce, son époux a toujours refusé sa venue. Jeanne ,qui a travaillé d’arrache-pied pour assurer sa survie et celle de sa fille, Léonie, qui ne connaît de son père qu'une photographie, va devoir faire face au retour de celui qui se dissimule sous un pansement blanc. En effet, Toussaint fait partie de ce contingent de blessés qu'on appelle "les gueules cassées".
Comment renouer avec un être qui est devenu un étranger ? Comment réinstaurer le dialogue des peaux, des corps, trouver une place dans une famille qu'il a fallu si longtemps tenir à bout de bras, seule ?
En choisissant le point de vue féminin ,si rare dans les romans traitant de la première guerre mondiale, Angélique Villeneuve nous montre les émotions, de celles qui, bien qu'exploitées économiquement, ont su tout à la fois faire preuve de solidarité et de courage.
Son écriture est de plus en plus charnelle, poétique et pourtant le réel se donne à lire de manière précise, jusque dans les plus petits détails (je pense par exemple aux bandes de papier supposées protéger les vitres ), sans que pour autant cela sonne comme une reconstitution appliquée. Tout sonne juste et les retrouvailles de ce couple confèrent une très grande humanité à cette boucherie. Un coup de cœur !
Les fleurs d'hiver, Angélique Villeneuve, Phébus 2014, 150 pages fleuries de marque-pages.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : angélique villeneuve
01/04/2014
Julius aux alouettes
"Je suis un prince, un pirate, un artiste, un ange, le frère désiré. L'étrange étranger. Un voyageur sans bagage. Comme il vous plaira.
Je suis ce que vous désirez voir. Je suis le dépositaire de vos souvenirs.
Je suis votre miroir aux alouettes."
Un étranger à la peau d'ébène met pied à terre sur une plage bretonne (qu'on imagine bien finistérienne) lors d'une grande marée d’équinoxe. Chaque membre d'une famille du cru du père médecin , en passant par la mère galeriste, la grand-mère jusqu'aux deux enfants, vont être séduits par cet homme qui dit s'appeler Julius.
Un schéma narratif qui n'est pas sans rappeler le film Théorème de Pasolini mais emprunte aussi à la terminologie chrétienne puisque le roman commence par l'inhumation de Julius par ceux qui affirment tous l'avoir assassiné. Inhumation qui comporte des stations qui ne sont pas sans évoquer celles du Christ. Pourtant, on peut aussi y voir ,de manière plus large, une volonté de "déciller vos yeux à la lumière du monde", comme l'affirme Julius. Et de lumière il en est beaucoup question dans ce roman solaire , à la frontière de la parabole, empli de sensualité et qui rend compte du monde de manière charnelle.
Au lecteur de faire comme les membres de cette famille et de voir en Julius ce qu'il veut y trouver. Pour ma part, ce fut un grand bonheur de lecture.
Julius aux alouettes, Fabienne Juhel, La bruen aux éditions du Rouergue 2014, 206 pages lumineuses.
le billet de Clara, la tentatrice fan.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : fabienne juhel
31/03/2014
Bilan printanier
Plein d'envies cinématographiques mais trop peu de temps. Juste quelques séances de rattrapage
dont une seule mérite un coup de cœur :
* Mauvaise fille d'après le roman (non lu) de Justine Lévy, pour la folle énergie d'Izia Higelin (qui a obtenu le très mérité César de meilleur espoir féminin) et sa vraie complicité avec Carole Bouquet. Des liens mère/fille hors du commun.
*La cage dorée , un thème pourtant peu traité au cinéma: les Portugais vivant en France mais mollasson au possible: abandon.
* Et une nouveauté : The Grand Budapest Hôtel de Wes Anderson où un écrivain vieillissant se remémore sa rencontre avec le très romanesque Zero Moustafa propriétaire du Grand Budapest Hôtel quelque peu décati mais qui avait connu des jours meilleurs dans les années 30, sous le "règne "bienveillant mais exigeant de Monsieur Gustave (incarné par Ralph Fiennes). Mais le héros de ces récits enchâssés est bien évidemment l'hôtel aux couleurs de pâtisserie, truffé d'escaliers, de couloirs et d'ascenseurs qui permettent au réalisateur des cadrages jouant tour à tour sur la verticalité et l'horizontalité, à voir impérativement sur grand écran. L'atmosphère des années 30 , à la fois confortable et menaçante, dans ce petit pays d'Europe Orientale imaginaire, est parfaitement rendue. Les méchants sont menaçants à souhait mais l'humour est aussi au rendez-vous comme dans cette improbable course -poursuite dans la neige qui n'est pas sans évoquer James Bond ! Un film romanesque et plein de charme, un pur régal !
Pour les séries, la saison deux de House of Cards fait la part belle au personnage interprété par Robin Wright, aussi machiavélique dans un genre différent (tout en douceur) que son mari....Pour l'instant, c'est savoureux de voir certains personnages se jeter tout cru dans la gueule de la belle !
Et enfin :
*20 bonnes raisons de s'arrêter de lire, de Pierre Ménard. Sous les apparences d'un pamphlet, élégant et cultivé, un bel éloge de la lecture !
Le Cherche Midi éditeur, 2014.
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (10)
29/03/2014
Mes élèves sont formidables
200 perles entendues en classe
Qu'ils soient prudents comme Hédi , 10 ans s'enquérant : "-M'sieur, si on rigole quand vous vous fâchez, est-ce que vous pouvez avoir le sens de l'humour ? ", pleins de fraîcheur comme Lou, 9 ans "-Ma grand-mère, elle s' habille toujours en noir, mais je ne sais pas si c'est une gothique.", rapporteurs comme Florian , 17 ans "-M'sieur, faites gaffe Lui, c'est un vrai vicieux. Il travaille mais il ne le dit pas.", tous les bons mots recueillis de l'école primaire au lycée nous font bien rigoler !
J'avoue avoir tendance à préférer les réflexions candides des élèves plus jeunes, révélant parfois , involontairement, au passage des indiscrétions sur la vie de leurs parents (ou des difficultés économiques, malheureusement) que celles des lycéens car trop proches sans doute de ce que je peux moi-même entendre : "-M'sieur, vous avez de ces questions !" . Mais je me suis bien amusée et j'ai dévoré d'une traite ce collier de "perles" témoignant aussi d'une belle inventivité langagière et d'un regard souvent aigu sur le monde !
Un petit plaisir à (s')offrir
Mes élèves sont formidables, Dominique Resch, Éditions Autrement 2014 141 pages et des illustrations de Zep. (celle de couverture est particulièrement réussie !)
06:00 Publié dans Humour | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : dominique resch