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06/10/2010

Olive Kitteridge

"Je ne vois vraiment pas pourquoi je pleurerais."

Tantôt personnage principal, tantôt juste mentionnée, Olive Kitteridge nous apparaît dans un portrait kaléidoscope la suivant de l'âge adulte à la vieillesse. Mais qui est-elle réellement? Pour les uns, une prof de maths qui terrorise ses élèves , pour d'autres une femme avec son franc-parler mais qui sait aussi faire preuve de déroutants élans de bonté . Étouffante pour son fils unique qui n'aura de cesse de la fuir , compatissante pour une jeune femme souffrant d'anorexie ou pour un ancien élève dépressif, Olive nous surprend toujours.9782359050066-G.jpg
La construction, perturbante au début, on a l'impression de lire des nouvelles sans lien entre elles, bâtit en fait, de manière subtile, tout un univers qui nous devient vite familier. On guette l'apparition Olive et très rapidement on s'attache à cette femme et à ceux qu'elle côtoie.
Elisabeth Strout nous montre avec aisance aussi bien les drames que les joies, la solitude et la vieillesse mais aussi le nouveau comportement amoureux des personnes âgées , leur manière d'affronter les surprises du coeur. Un roman généreux et tout en finesse.

Olive Kitteridge, Elisabeth Strout, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Pierre Brévignon. Ecriture 2010, 375 pages revigorantes.

Prix Pulitzer de Littérature 2009.

L'avis de Keisha.

05/10/2010

Wendy et Lucy

"Toi aussi, Benny, tu ne t'occupais que de toi. Sauf que tu n'as jamais été bien doué pour le faire."

Pour les personnages des nouvelles de Jon Raymond, il suffirait d'un rien pour qu'une amitié défaillante se remette sur ses rails, pour qu'un couple perdure : "C'était chouette d'être amoureuse de toi cette semaine" , lui dit-elle d'une voix sincère",pour qu'une vieille guimbarde tienne encore quelques kilomètres , sauvant ainsi sa propriétaire d'un destin semé d'embûches... L'amour, l' amitié , la fraternité sont si proches mais en même temps si ténus, si friables...Chahutés par la vie ses personnages n'ont rien d'héroïques mais ils font face aux aléas avec détermination.41joRKj0szL._SL500_AA300_.jpg
Pas de chute mécanique cependant, l'auteur stoppe son récit juste au bon moment, le laissant se poursuivre dans nos esprits et surtout dans nos coeurs qu'il malmène à loisir. Une écriture précise et remplie d'empathie, décrivant la nature avec poésie, des personnages qui se gravent dans nos mémoires et ne laissent pas de place au désespoir. Un grand et beau coup de coeur  !

Wendy et Lucy, Jon Raymond,  9 nouvelles* traduites de l'américain par Nathalie Bru, Albin Michel 2010. 284 pages emplies d'émotion.

Bon sang, je le savais, rien qu'en regardant la couv' que j'aurai les larmes aux yeux !

* dont 2 ont été adaptées au cinéma par Kelly Reichardt.

Merci à BOB et aux éditions Albin Michel.

04/10/2010

Tea-bag

"Pour survivre, je dois cesser d'espérer."

Un poète suédois , très centré sur lui-même, va se trouver brutalement confronté à ce qui constitue une partie de la réalité de son pays: les clandestins qui tentent d'y survivre.
Il y verra d'abord l'occasion de s'approprier les récits de vie de trois femmes aux identités fluctuantes avant que de s'impliquer en toute conscience.41f9DRmFYzL._SL500_AA300_.jpg
Alternant les récits à la fois rudes et poétiques des clandestines avec les démêlés économico-littéraires du poète engoncé dans son égo, Tea-bag est un roman tour à tour grinçant et drôle avec des personnages hauts en couleurs (comme la mère du narrateur), un roman où les femmes sont pleines de ressources et arrivent à se réinventer sans cesse pour préserver leur vie et leur dignité .
Beaucoup d'émotion et pas d'angélisme.

Tea-Bag, Henning Mankell, traduit du suédois par Anna Gibson, Seuil et Points Seuil.

Emprunté à la médiathèque.

L'avis de Kathel qui vous enverra vers plein d'autres !

Celui d'Aifelle.

01/10/2010

Le petit Gus fait sa crise

"Si elle est sévère avec moi pour ma console, c'est normal que je sois sévère avec elle pour les câlins. c'est vrai quoi."

Gus (tave) a dix ans, une mère qui a eu la fâcheuse idée de lire (et d'appliquer) les conseils d'Aldo Nouillerie( pédiatre de la pire espèce, le roi de la frustration), un père qui claironne les prix au supermarché, filant la honte à son fils, un grand frère qui a "des boutons d'apnée plein la tronche", et une grande soeur qui rêve d'introduire en fraude un rat dans la maison, pour faire style.41wQ9zZVPyL._SL500_AA300_.jpg
Mais lui Gus, a la délicieuse intention de ne pas suivre l'exemple de ses aînés :"Quand je serai un ado, j'éviterai d'être égoïste et feignant et j'aiderai ma mère à se taper les corvées de la maison. c'est la moindre des choses et je le ferai dès que je serai en âge de le faire." (Vite signe-là mon fils ! ).Remarquons  néanmoins au passage qu'il prend la précaution de ne pas préciser quand se situe cet âge bénit ...
Mais Gus ne se limite pas à son petit nombril, il chope au passage les faits d'actualités qui le touchent ou l'énervent et les commentent parfois dans un langage peu châtié (mais qui irait prétendre que nos chérubins s'expriment toujours de manière endimanchée ? ). Certains thèmes sont abordés de manière un peu maladroite mais globalement on se glisse avec délices dans la vie mouvementée de cette famille qui ressemble peu ou prou à la notre, chat compris !
Claudine Desmarteaux a su trouver  le ton et le langage de Gus, mêlant à-peu-près et néologismes, et le récit cavale à toute allure entre Tamara qui balance des coups de trousse et DS Lite.

Ne reste plus qu'à le faire valider par Mister Ferdi !:)

30/09/2010

Spéracurel

A travers une série de textes courts, nous entrons dans l'intimité d'une jeune femme, donnée on le devine , comme étant le double de l'auteure.

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Ses petits boulots, ses rapports avec sa famille, sa fille, une petite coquine, ses amis, ses amours sont racontés avec une fraîcheur réjouissante. Il n'en restera peut être pas grand chose au fil du temps mais c'est un joli moment de lecture.

Recueil découvert à la caisse d'une librairie-tartinerie, véritable petit paradis , ici.

Spéracurel, Anna Dubosc, Rue des promenades, 2010, 123 pages.

Antigone en avait parlé ici.

29/09/2010

La vie avant moi

"Avant moi, il n'y avait rien."Voilà, c'est péremptoire et définitif: le monde a commencé en même temps que Gaspard.41cPv8L6qSL._SL500_AA300_.jpg
Mais , pour ses sept ans, ses parents ont décidé de lui expliquer la vie, et donc de lui raconter leur rencontre. D'une manière passablement embrouillée, il faut bien l'admettre. Et comme les chiens ne font pas des chats , le petit garçon a une façon très personnelle et pleine d'humour d'interpréter les faits ...
Comment on fait les bébés ? Pas sûr que les lecteurs de ce roman illustré de manière fort gaie par Delphine Perret le sauront mais au moins ils auront appris qu' "Après moi, il y aura un petit bigleux qui bave et qui louche".

Un roman plein de verve qui ravira les enfants qui aiment déjà lire tout seuls.

La vie avant moi, Colas Gutman, Ecole des Loisirs, Collection  Mouche, 201038 pages à ,offrir en cadeau d'anniversaire, ou de non-anniversaire !

28/09/2010

Plan social

"Il faut jouer le jeu."Lorsque cette phrase est prononcée, la meilleure attitude c'est de s'enfuir en courant."

Ironiquement, Swift proposait comme solution radicale pour éradiquer la famine que les pauvres mangent leurs enfants. Ici, un bon patron à l'ancienne, en vient à projeter, pour sauver son entreprise, de se débarrasser du quart de ses salariés par le biais d'un système de climatisation 41cgPEEwb0L._SL500_AA300_.jpgdéfectueux...Paradoxalement, le délégué syndical CGT, moyennant quelques petits arrangements idéologiques ,en viendra à l'aider. Tous deux en effet se rejoignent dans leur volonté de contrer la bêtise crasse des consultants, qui à grands coups de discours creux, feignent -de manière fort onéreuse au demeurant- de gérer les crises d'un monde où le bon sens semble avoir disparu.
ça dézingue à tout va, tout le monde en prend pour son grade et l'intrigue cavale à toute allure, l'auteur balançant au passage sur tous ceux qui voudraient faire de ce monde un univers aseptisé où on nous réapprendrait à respirer pour 3000 000 euros , où prévaudrait le principe de précaution et où la seule échappatoire serait l'humour. Noir bien sûr et bien frappé .

Plan social, François Marchand, Le cherche midi, 120 pages à déguster d'une traite.

Cuné et Amanda ont apprécié elles aussi !

27/09/2010

Franchise postale

"J'ai admis le côté ludique de l'existence."

Fan de Pierre Richard depuis toujours,"...je n'ai jamais connu le monde sans toi. Tant mieux" Christophe Duthuron est aussi devenu son ami dans des circonstances... dignes d'un film ! Les deux compères ont ici pris la plume pour brosser un autoportrait par correspondance , l'acteur répondant à une quinzaine de lettres représentatives des courriers pour le moins incongrus envoyés par des gens aussi fêlés que sans gêne, l'invitant de manière impromptue à honorer de sa présence un anniversaire (le grand Gégé (comprendre Depardieu) n'étant pas disponible hélas, ou lui envoyant des scénarios aussi indigents que boursouflés de prétention.51H0Ntr8vIL._SL500_AA300_.jpg
Cela nous vaut aussi de savoureuses et hilarantes anecdotes de l'acteur qui se souvient ainsi qu'il a joué dans une mise en scène champêtre de Shakespeare avec,entre autres ,pour partenaire un âne et une grande comédienne économisant les piles de son sonotone, ingrédients qui ne pouvaient mener qu'au désastre ! Mais un désastre qui m'a fait me plier en deux , j'en pleurais tellement je riais !
Pierre Richard, tout lunaire qu'on le croit,  sait aussi se montrer rosse avec les fâcheux de tout poil, les irrespectueux qui croient qu'une vedette se doit d'être constamment disponible pour son public et il s'en explique avec une franchise (postale) qui l'honore.
Néanmoins, ce qui domine l'ensemble c'est cette volonté de prendre la vie avec enthousiasme , de préserver " Un appétit de vivre, un certain goût des premières fois, une capacité d'émerveillement." Un livre qui donne la pêche et l'envie de revoir tous nos classiques Pierrerichardiens !

Franchise postale, Pierre Richard, Christophe Duthuron, Le cherche midi 2010 , 259 pages pour battre en brèche la grisaille !

 

 

26/09/2010

Tout pour le mieux

Parfois on a besoin de sucré, de coloré,  au diable l'austérité  ! Alors on choisit un roman au titre prometteur:  Tout pour le mieux, avec une quatrième de couverture alléchante (car évoquant le plaisir sensuel de toucher les livres, joli hameçon pour les lectrices compulsives...41caTWQKSEL._SL500_AA300_.jpg)
Las , au bout de quelques pages on trébuche page 10 sur " elle gisait déjà balbutiante dans un plaisir insensé.", on vérifie bien qu'il ne s'agit pas d'une farce quelconque , d'un complot ourdi par un émule d'Harlequin , on poursuit sa lecture et patatras, on tombe page 11 sur "Et à chaque fois , le miracle se reproduisait, la laissant pantelante de bonheur et de reconnaissance". On ne s'en remet pas -de jalousie probablement- et on passe son chemin.

Je vous épargnerai les facilités sur le titre.

Tout pour le mieux. Catherine Siguret, Robert Laffont 2010, 248 pages garanties pleines de colorants mais sans conservateurs.

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25/09/2010

Alice Kahn

"Il n'est plus l'oeuvre de mon traquenard, je vais devenir la sienne."

La narratrice , dont nous ignorerons jusqu'au bout le prénom ,endosse l'identité d'une mystérieuse Anna et devient ainsi l'amie d'un photographe, William. A elle maintenant d'imaginer tout un arrière plan et une manière d'être correspondant à cette femme. Notre héroïne ne voit pas malice dans cette usurpation mais bien plutôt une manière de"mettre de la lumière sur ce qu'elle a de beau , et de l'ombre sur ce qu'il faut cacher."Elle deviendra donc la metteure en scène de ce pantin qu'elle animera. Un jeu artistique qui s'ajoutera à ceux dont elle est coutumière, nous le découvrirons au fil du livre.318lQHCq2-L._SL500_AA300_.jpg
Qu'est ce qu'un artiste, qu'est ce qu'une oeuvre d'art ? Porté par le style enlevé et poétique de Pauline Klein,  le très court roman Alice Kahn (encore une identité fallacieuse que je vous laisse le plaisir de découvrir) évoque ces questions avec malice et fantaisie. Un premier texte d'une apparente légèreté mais qui , tant par la construction, que par le style emporte l'adhésion du lecteur. Une réussite !

Alice kahn, Pauline Klein, éditions Allia, 126 pages.

 

Merci à Mirontaine qui fait voyager ce livre !

Il est allé chez Clara, Keisha.