15/10/2010
Petit déjeuner avec Mick Jagger
"Parfois les malentendus allègent l'existence."
Et favorisent les belles découvertes. Car je croyais trouver en prenant ce Petit déjeuner avec Mick Jagger
une chronique proprette sur l'adolescence, nostalgie à tous les étages et admiration béate pour le chanteur des Pierres qui roulent en prime.
C'est évidemment tout l'inverse :un roman dérangeant car touchant à l'intime, à la fêlure d'une femme à différents âges de sa vie, âges qui reviennent parfois en vrac, de l'enfance à l'adolescence , rythmé par ces neuf petits déjeuners pris- ou non -avec Mick Jagger. Une femme qui côtoie la folie et qui tente d'organiser sa vie autour de son amour pour cet homme dont, dans sa recherche d'identité, elle envie jusqu'au nom ,qui la délivrerait de cette Nathalie Kuperman , patronyme dérangeant.Un puzzle éclaté dont l'intensité de l'écriture n'a rien à envier à celle d'une Jean Rhys par exemple.
Petit déjeuner avec Mick Jagger, Nathalie Kuperman Points seuil 2010, 104 pages pleines de vie.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : nathalie kuperman, adolescence, folie
14/10/2010
Fahrenheit
"Ce sont les livres qui nous possèdent."
Dans Fahrenheit 2010 (référence au livre de Bradbury Fahrenheit 451 - degré d'incandescence à partir duquel le papier brûle -), Isabelle Desesquelles raconte "l'anéantissement programmé" de la librairie où elle a "aimé habiter" . Rachetée en effet par une chaîne qui n'a pour objectif que de faire du chiffre mais pas de stock, la librairie dans laquelle elle avait tant aimé travailler et vivre devient une coquille vide , vite désertée par les clients fidèles.
Comment lutter contre l'absurde et l'inhumain érigés en lois ? Comment lutter contre les livres programmés pour être des best-sellers et laisser leur chance aux livres "nécessiteux", ceux à qui le libraire va faire une petite place pour qu'ils puissent respirer et exister ?
C'est une vraie amoureuse des livres qui s'exprime ici, de l'intérieur d'un système qui a voulu l'entraver, la formater, sa colère et ses frustrations, entremêlant son récit de citations de phrases ou de titres de livres aimés (une belle occasion de faire monter nos LAL !). Une voix qui dit la gangrène qui gagne de nouveaux pans de notre société.
Fahrenheit 2010, Isabelle Desesquelles, Stock 2010, 192 pages nécessaires.
Merci Cuné !
Un article fort éclairant ici.
06:00 Publié dans rentrée 2010, romans français | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : isabelle desequelles, librairie, entreprise
C'est jeudi, c'est librairie !
"Tu te verrais bien en ruminante de livres, la panse pleine de littérature."
Isabelle Desequelles, Fahrenheit 2010
05:04 Publié dans Extraits | Lien permanent | Commentaires (6)
13/10/2010
Le chuchoteur
Une histoire de tueur en série , voilà bien longtemps que je ne m'y étais risquée, après Hannibal Lecter, ils sentaient tous un peu le déjà lu.
Et puis est venu Le chuchoteur. Le choc.Le vrai. L'envie de ne pas lâcher le livre, d'hésiter entre le dévorer tout de suite ou d'en laisser un peu pour demain. Parce qu'une histoire comme celle-ci, écrite par un criminologue, qui se fend au passage de passages didactiques qui plairont aux curieux comme moi, qui parvient sans cesse à déstabiliser son lecteur et à le surprendre, voilà un bonheur qui ne se refuse pas.
Alors oui , arrivée à la moitié du livre je me suis dit qu'il y avait des incohérences, que l'on sombrait dans le gothique parfois, voire dans le gore (un soupçon) , que l'auteur martelait un peu trop lourdement des banalités (nous ne connaissons pas vraiment ceux que nous côtoyons) , que ses réflexions sur le mal ou le bien étaient souvent pataudes, que j'aurais bien aimé savoir une bonne fois pour toutes où se déroulait le récit (beaucoup d'indices plaident pour les Etats-Unis mais vu la mondialisation...) que l'auteur semblait avoir brûlé toutes ses cartouches en un livre pour faire un joli feu d'artifice (voyez ce que je sais faire).... Mais bon, tout ceci est compensé par la virtuosité et l'aspect malin du récit et je ne boude pas mon plaisir de lecture !
Le chuchoteur, Donato Carrisi, traduit de l'italien par Anaïs Bokobza, Calmann-Lévy 2010, 433 pages piégées.
Emprunté à la médiathèque.
L'avis de Stéphie.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : donato carrisi, tueur en série mais pas que..., enlèvement d'enfants
12/10/2010
Mes chères voisines
"On a tous pris un sacré coup sur la tête, pas vrai ? dit-elle avec douceur."
Une banlieue américaine proprette, des femmes au foyer parfaites qui voient débarquer un petit couple sans enfants (ça fait tache no kids) mais comme le mari est un médecin super beau gosse aux yeux verts, ça passe nettement mieux. Si on rajoute un cancer et un ado surdoué vous vous dites que la coupe est pleine et vous passez votre chemin.
Et vous auriez tort car Marisa de los Santos, qui semble craindre plus que tout la comparaison avec d'autres média vu le nombre de fois où ses héros s'écrient "si on était au cinéma..." possède un style agréable et enjoué et ses personnages (sauf à la toute fin un peu trop mélo à mon goût) tiennent la route.
De quoi passer un bon moment sans complication sans pour autant trop sombrer dans la guimauve.
Mes chères voisines, Marisa de los Santos, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Anouk Neuhoff, presses de la cité mars 2010.380 pages qui ne donneront pas de migraine.
Emprunté à la médiathèque.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : marisa de los santos
11/10/2010
La vie rêvée des plantes
"Le corps est plus franc, il fait savoir exactement ce qu'il veut."
Entrer dans La vie rêvée des plantes c'est pénétrer dans une réalité pétrie à la fois de violence crue et de délicatesse.
Cette famille coréenne où les parents ne s'adressent quasiment pas la parole, où les deux frères se déchirent,et où chacun vit claquemuré sur ses secrets ne donne guère envie. Surtout quand on apprend que le frère cadet espionne sa mère pour un mystérieux commanditaire. Et pourtant passé le choc de la scène initiale, on suit le narrateur dans ses pérégrinations apparemment erratiques( mais qui vont le mener à découvrir un secret de famille) et on découvre de véritables oasis de paix , des brèches où l'amour et la poésie se donnent libre cours et où les plantes sont les métaphores des souhaits des hommes.
Amours entravées , amours qui se vivent de multiples façons, le tout sur un arrière plan de violence politique, la délicatesse côtoie la bestialité mais le lecteur, même chahuté, conservera longtemps en mémoire certaines évocations de moments précieux, des parenthèses magiques dans le temps. A tenter absolument.
La vie rêvée des plantes, Lee Seung-U, traduit du coréen par Choi Mykyung et Jean-Noël Juttet, Folio2009.
L'a vis de Kathel qui vous mènera vers plein d'autres !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : lee seung-u, corée, frères, amour, plantes
10/10/2010
Comment résister ?
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (18)
09/10/2010
En poche...
"-Donc tu as quitté une guerre pour en retrouver une autre, commenta-t-elle."
En Grande-Bretagne, durant la seconde guerre mondiale, David vient de perdre sa mère. Ne pouvant accepter la nouvelle femme de son père et son demi-frère, il se réfugie dans le lecture dans une drôle de chambre où les livres lui parlent et où parfois il aperçoit rôder un bonhomme bizarre, vaguement effrayant...
Un soir, entendant des appels de sa mère, il se rend dans le jardin et découvre un passage vers un monde parallèle , peuplé de créatures cauchemardesques qu'il devra affronter avant de pouvoir trouver Le livre des choses perdues, unique clé pour regagner le monde réel.
Roman initiatique, ,Le livre des choses perdues revisite -avec irrévérence parfois (voir le portrait-charge de Blanche-Neige !) - l'univers des contes et légendes. Le héros, aidé d'auxiliaires qui ne veulent parfois le sauver que pour mieux le duper, va devoir affronter des créatures répugnantes et d'une férocité extrême (certaines descriptions sont d'une cruauté rare), résoudre des énigmes(ses souvenirs de lecture lui seront llors bien utiles!) et surtout se rendre compte que la limite entre le Bien et le Mal est parfois floue. Il devra accepter aussi la perte et le renoncement , quittant ainsi le monde de l'enfance.
Tout cela apparaît à première vue bien classique mais d'emblée, John Connolly excelle à créer une ambiance très particulière , où la menace rôde, où la végétation elle même apparaît menaçante, très cinématographique en fait. Quant au récit, il est impossible de le lâcher car même si on a l'impression d'avancer en terrain connu, l'auteur se joue de nous, multipliant les référencs pour mieux les détourner. Quant aux personnages, à l'image de ces créatures hybrides qui hantent le récit, ils ne sont pas monolithiques et savent à la fois nous émouvoir et nous faire sourire. Car de l'humour il y en a aussi, histoire de relâcher un peu la tension ! Bref, j'ai été captivée par ce récit que je n'ai pas pu lâcher alors que je ne suis jamais venue à bout du deuxième tome d'Harry Potter...
Le livre des choses perdues,John Connolly, traduit de l 'anglais (Irlande) par Pierre Brévignon.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (12)
08/10/2010
Bifteck
"-Reprenez-la, dit-il, elle est végétarienne."
Fils-père de sept enfants , poursuivi par un époux jaloux, le jeune boucher breton, André, doit s'enfuir et quitter le plancher des vaches pour voguer, en compagnie de sa progéniture, vers la lointaine Amérique.
Commencé de manière classique Bifteck s'affranchit ensuite graduellement des contraintes du réalisme pour dériver de plus en plus vers le conte ou la fable.
Fable qui est une véritable ode à l'amour paternel,"Elle n'avait pas encore les mots pour le dire, mais elle savait déjà, comme eux, que l'amour d'un père a plusieurs visages , et que pas un ne l'empêcherait d'être heureuse." un amour absolu pour André qui nourrit, taille des vêtements, pétrit ses enfants, les absorbant pour ainisi dire dans un amour sans borne. Mais comme le rappelle Kahlil Gibran: "Nos enfants ne sont pas nos enfants" et le boucher qui leur tient à la fois de père et de mère devra apprendre à lâcher prise, à s'effacer...
Piochant dans les thèmes classiques du conte initiatique, Martin Provost les réinvente avec verve , nous régalant au passage d'une prose alerte et sensible. Seule la fin, trop réaliste pour le coup et trop explicative m'a laissé un arrière goût de déception. Une gourmandise néanmoins !
Merci à Brize qui en a fait un livre voyageur passé par
La sardine
Les avis de Tamara
Biftek, Martin Provost*, Buchet-Chastel 2010, 125 pages garanties sans morosité.
* réalisateur de Séraphine (que j'avais adoré) et qui tourne actuellement l'adaptation de Mauvaise pente, Roman de Keith Ridgway (lu avant mon blog et beaucoup aimé) avec la grande Yolande Moreau ! un régal en perspective!
06:00 Publié dans rentrée 2010, romans français | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : martin provost, père enfants
07/10/2010
La double vie d'Anna Song
"Et moi j'ai bâti une chimère sur du sable..."
Récit d'une imposture, d'une falsifaction musicale( Anna Song , pianiste devenue culte après sa mort n'aurait jamais enregistré les disques ayant fait sa renommée), La double vie d'Anna Song est aussi le roman d'un amour fou voulant pacifier un passé douloureux.
De coupures de presse en confession à multiples niveaux, le roman de Minh Tran Huy évite le côté sensationnaliste et privilégie les émotions . On avance au fil du texte, au fil des illusions et des révélations et l'on ne cesse de tourner le prisme de la "réalité" pour l'envisager sous un nouvel angle. Passionnant et prenant jusqu'à la dernière ligne.
La double vie d'Anna Song, Minh Tran Huy, Actes Sud, 2009.
Emprunté à la médiathèque.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (11)