26/10/2010
Une heure dans un supermarché
"...il est très mystérieux, finalement. Eux aussi."
Dans une construction éclatée, une nouvelle mettant en scène un personnage pricipal à la fois , mais jetant des ponts subtils entre eux, un peu à la manière du film de Robert Altam Short cuts, Christine Jeanney brosse le portrait de ces gens que nous croisons chaque jour au supermarché.
Des gens de peu aurait dit Pierre sansot, des gens ordinaires en apparence , certains d'entre eux sont très prévisibles-la jeunette amoureuse d'un homme marié par exemple- mais qui ne s'est jamais dit de certaines personnes croisées: "C'est un stéréotype ambulant ! "? , mais beaucoup sont peints avec sensibilité , humour et finesse. Ainsi le chat qui endosse sans broncher une double identité car il y trouve son compte ou le pélerin de Compostelle qui voudrait rebrousser chemin : "Qu'est-ce que tu vas lui dire, Gaubert , ce soir au téléphone ? Jeannine ,je rentre parce que j'ai perdu Dieu ? Jeannine, je reviens tondre la pelouse et pulvériser du désherbant dans l'allée, je rentre, je suis un peu enrhumé, rien de grave, je suis un peu athée aussi, sans doute à cause du froid, viens m'attendre à la gare."
De jolies rencontres qui confirment tout le bien que je pensais déjà du premier roman de Christine Jeanney mais où j'aurais aimé sentir moins de maîtrise et plus d'enthousiasme.
Une heure dans un supermarché, Christine Jeanney, éditions Quadrature , 2010 , 127 pages sensibles.
L'avis de Clara,
06:00 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : christine jeanney, quotidien
25/10/2010
Le camp des morts
"Certains poèmes sont un peu noirs."
Un décès dans une maison de retraite, quoi de plus naturel ? Et pourtant le vieux mentor de du shérif Longmire s'obstine: cette femme a été assassinée ! Commence alors une enquête fertile en rebondissements , où notre ami shérif, toujours aussi séduisant malgré lui, devra slalomer entre passé et présent , le tout dans un paysage enseveli sous la neige. Le lecteur se régale tout autant des intrigues annexes : Longmire tombera -t-il dans les filets des jolies femmes qui gravitent autour de lui et surtout surtout donnera-t-il un nom au chien qui l'a adopté ?
Craig Johnson joue en virtuose des possibilités que lui offre l'écriture d'être toujours en avance d'une longueur sur le lecteur, multipliant ainsi les effets de surprise. L'humour est aussi au rendez-vous et comme Longmire sait aussi s'entourer de nouveaux alliés prometteurs, on en redemande !
Le camp des morts, Craig Johnson, Gallmeister2010, 311 pages à savourer au coin du feu.
Emprunté à la médiathèque.
L'avis de Papillon.
In cold blog a été séduit.
L'avis de Mathilde.
Le camp des morts est la suite de Little Bird mais peut se lire indépendamment.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : craig johnson, enquête policière, les basques sont partout !
23/10/2010
En poche et ...droit au coeur !
"Plus je me relis et plus je me relie à lui."
"Père adoptif", "père biologique", ces expressions n'ont pas cours dans l'univers d'Eric Fottorino. Pas plus que demi-frères d'ailleurs. seul compte l'amour qui circule entre l'auteur et celui qui lui a donné son nom en 1970 et qui s'est suicidé en 2008.
Pas de "tombeau" au sens poétique du terme dans L'homme qui m'aimait tout bas. Mais un livre empli de chaleur, d elumière, celle dela Tunisie d'où était originaire Michel Fottorino, ce kiné "aux mains d'or" qui "préféra toujours le silence aux paroles". Empli d'amour et d'admiration pour cet homme que le romancier fait apparaître sous différentes formes dans ses romans, rejouant ainsi de multiples façons LA scène fondatrice, cette scène originelle d'adoption proposée. Michel sera aussi cet "accordeur de corps , une des figures centrales du superbe roman Un territoire fragile, riche d'humanité et dispensant son don sans compter. Et pourtant fragile cet homme l'était aussi mais il dissimulait soigneusement ses fêlures ou ses gouffres...
Un texte magnifique qui se joue des mots pour mieux les faire vibrer . Et nous avec.
L'homme qui m'aimait tout bas, Eric Fottorino, Gallimard 2009, 148 pages emplies d'émotion.
06:04 Publié dans le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (17)
22/10/2010
Dans les rapides
"-mais Kate Bush d'un coup de pied, vient d'enfoncer un coin dans notre trio. "
Le Havre, les années 80. Un trio de filles qui par la magie de Blondie puis celle de Kate Bush, vont découvrir un univers où les femmes sont puissantes.
Une très jolie évocation, pleine de sensations poétiques et intenses, de l'adolescence. Un peu trop de retenue à mon goût mais un style chatoyant et prometteur.
Dans les rapides, Maylis de Kerangal, Naïve 2006, 113 pages à lire en réécoutant ...The kick inside bien sûr !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : maylis de kerangal, kate bush, blondie, années 80, z'avez de la chance que je sache pas insérer de music...
21/10/2010
Non, vraiment pas pour moi...
En vrac:
* Un jour en mai, George Pelecanos, points seul 2010, en lice pour le prix Polar des lecteurs de Points .
Je ne sais pas si c'est un polar ou pas mais c'est un roman garanti 100 % testostérone et au bout de seulement 36 pages, j'avais déjà l'impression d'avoir vu les scènes décrites une bonne centaine de fois alors, stop.
*Le féminisme au masculin, Benoîte Groult, Grasset 2010, réédition discrètre d'un livre paru en 1977, seul indice, à part vérifier la date d'impression, l'indication "Nouvelle préface". j'étais tentée par l'idée de découvrir ces féminstes masculins mais trop de citations in extenso ont eu raison de ma bonne volonté. J'ai donc abandonné ce catalogue insipide page 80.
06:00 Publié dans Lâches abandons | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : george pelecanos, benoîte groult
20/10/2010
L'art difficile de ne presque rien faire
Il est des livres et des auteurs qu'on aimerait apprécier mais rien n'y fait, il faut savoir se faire une raison. Encensé par la critique il y a quelques années, j'avais tenté la lecture du Petit traité de désinvolture . Il ne m'en était pas resté grand chose.
Denis Grozdanovitch ayant décidémment le génie des titres tentateurs, je me suis retrouvée avec L'art difficile de ne presque rien faire , recueil de chroniques parues dans Libération. J'y ai glané quelques infos intéressantes mais surtout l'impression que l'auteur tourne autour de son sujet , l'effleure, et s'en sort par une pirouette, terminant quasi systématiquement ses billets par une longue citation philosophique. Alors oui c'est cultivé, classieux et compagnie mais ça n'a pas fait mon bonheur.
05:30 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : denis grozdanovitch
19/10/2010
Plage
"Mais samedi existerait-il ?"
Une femme encore jeune attend sur une plage bretonne l'homme marié et en âge d'être son père qui a promis de la rejoindre dans une semaine.
"Encombrée par [ses] souvenirs", Anne observe les gens autour d'elle et leur comportement, leurs paroles font écho et la renvoient à sa situation de petite fille tiraillée entre un père, aimant mais volage, et une mère aigrie et mal aimante.Le temps de l'attente sera finalement celui de la réflexion et quoi qu'il arrive, Anne aura enfin grandi, se sera frottée aux autres et aura pris la mesure de ses possibilités.
Il ne se passe presque rien en apparence mais jamais le lecteur ne s'ennuie en suivant le parcours de cette femme en dormance qui va peu à peu explorer son univers mental et s'ouvrir aux autres, délaissant les romans , aux titres évocateurs, qu'elle avait emportés...
Le style, tout en précision de Marie Sizun accompagne cet éveil sans tambour ni trompettes mais avec beaucoup de délicatesse. Une très jolie découverte !
Plage, Marie Sizun, Arléa 2010, 262 pages sensibles et balayées par les embruns.
L'avis de Sylire qui vous mènera vers d'autres (le froid me rend paresseuse...)
Ps: comme Sylire, la couv' ne me plaît pas du tout car elle fait verser le roman vers la guimauve, ce qui n'est absolument pas le propos du texte de Marie Sizun.
06:00 Publié dans rentrée 2010, romans français | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : marie sizun, solitude, amour
18/10/2010
Contrepoint. Anna Enquist #7
"Dans la boîte crânienne dominerait l'harmonie, rien que l'harmonie."
Une femme décrypte les variations Goldberg et, ce faisant , laisse affleurer à sa mémoire les souvenirs de sa fille, aujourd'hui disparue.
Le pouvoir de la musique, celui des mots sont des thèmes chers à Anna Enquist qui les revisite ici avec une intensité très maîtrisée dans ce texte autobiographique. Et c'est cette maîtrise même qui , dans un premier temps ,m'a fait ruer dans les brancards . Pourquoi nommer les personnages "la mère", "la fille", les tenir autant à distance ? Cette volonté de contenir l'émotion à tout prix correspond au cheminement de la mère qui , au fur et à mesure de ses interrogations sur l'interprétation des variations Goldberg cherche une restauration, une remise en ordre de son monde intérieur totalement bouleversé par cette catastrophe qu'est la mort de sa fille. Elle établit aussi un pont par delà les années entre la vie de Bach , marquée par la douleur et la sienne.
J'avoue que toute une partie des interrogations concernant la musique m'est passé par dessus la tête mais l'émotion portée par l'écriture a su l'emporter et ce texte, tout corné qu'il est, je le relirai j'en suis sûre.
Contrepoint, Anna Enquist, traduit du néelandais par Isabelle Rosselin, Actes Sud 2010, 228 pages fortes et sensibles.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : anna enquist, deuil, mort d'un enfant, musique
17/10/2010
Fakirs...en poche !
"Un monde d'hommes se tenant maladroitement debout sur des tapis de clous, courant et se fuyant les uns les autres."
Un lieutenant,Guérin,flanqué de son fidèle stagiaire, Lambert,tous deux honnis par le restant de leurs collègues, sont chargés d'enquêter sur les suicides. Loin de se plaindre de la situation , nos deux anti-héros barbotent la-dedans quasiment avec bonheur, ce qui ajoute encore à la répulsion des autres policiers.
La mort en direct d'un "fakir" américain qui donnait en spectacle ses souffrances sur une scène parisienne spécialisée dans le sado-maso va amener à paris un franco-américain retranché à la campagne dans un tipi, Alan Mustgrave. Fatalement les trajectoires des trois hommes vont se croiser , surtout quand Guérin et Lambert vont trouver des similitudes à toute une vague de suicides soigneusement mis en scène...
Ne vous fiez pas à la couverture ni à la quatrième de couv': Fakirs n'est pas du tout un énième roman policier glauque . Même s'il y est question de suicide, de torture, ce n'est jamais présenté de manière malsaine, l'auteur ayant le chic pour balancer, mine de rien , quelques assertions déroutantes: "Un chien peut-il faire interner son maître ? " ou donner à toute une liste de suicidés les identités d'auteurs de romans policiers ( Sylvie Granotier ou J. B Pouy, entre autres). Autant de clin d'oeils qui détendent- un peu -l'atmosphère.
Avec son "Columbo", tout aussi dégarni que son ara Churchill, nanti d'un imperméable jaune , qui prend frénétiquement des notes et balance sa vérité au moment où on s'y attend le moins, Antonin Varenne nous donne un personnage paradoxalement falot et haut en couleurs. Beaucoup d'humanité et d'empathie dans un texte qui ne ménage pas ses rebondissements. Un grand bonheur de lecture.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : antonin varenne
16/10/2010
Madame la présidente ...en poche
La présidente des Etats-unis, en visite officielle en Norvège vient de se faire enlever. Evidemment, la planète toute entière est en émoi et les conséquences politiques et économiques ne pourront être que gravissimes...
Partant de ce postulat, Anne Holt qui a été ministre de la justice, procureur, avocate, et journaliste nous embarque avec délectation dans un monde qu'elle connaît bien, celui des intrigues , des trahisons et des secrets, tempérant l'aspect politique qui aurait pu être rébarbatif par un traitement plein d'humanité de ses personnages.
L'intrigue est parfaitement menée, bien structurée pour nous tenir en haleine, Anne Holt manie l'ellipse avec brio et l'on espère une seule chose, retrouver dans un prochain opus toute la petite famille de l'enquêteur Yngvar Stubo et de son épouse et coéquipière, Inger Johanne.
De la même auteure, j'avais déjà lu et bien aimé (pas de billets) La déesse aveugle* et bienheureux ceux qui ont soif...*
Cuné parle de la suite qui vient de sortir ici.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : anne holt