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05/01/2012

Arcadia

"Ce n'est pas rien, les souvenirs."

Arcadia, symbole d'un âge d'or pastoral, est ici le nom d'une communauté hippie de la fin des années 60. Ridley, surnommé Pouce en raison de sa petite taille, y a vu le jour, y a grandi, enregistrant au fil du temps les métamorphoses des gens et la disparition de cette utopie. La drogue, l'ambition personnelle, les tensions, l'arrivée d'une population trop nombreuse et peu sensible au principe de réalité, viennent en effet corrompre les idéaux. Pouce , qui n'a jamais connu que cette vie, quittera Arcadia, mais y reviendra, accomplissant un trajet circulaire, celui de la vie où les enfants et les parents échangent leurs rôles.
Roman d'initiation donc, mais porté par une personnalité exceptionnellement lucide et bienveillante, se préoccupant plus des autres que de lui même,observant aussi bien la nature que les êtres humains, sans jamais les juger.lauren groff,communauté
Un roman au charme certain, qu'il faut prendre le temps de savourer, un roman qui porte une attention aiguë aux sensations, aux sentiments, qui fait vivre ses personnages et l'on se prend à rêver de rencontrer un tel homme...
Le talent de Lauren Groff prend ici toute son ampleur, on sent qu'elle a pris on temps, qu'elle a mûri, a gagné en sérénité et c'est tant mieux !

Arcadia, Lauren Groff, Plon 2012, traduit de l'anglais (E-U) par Carine Chichereau, 313 pages apaisantes.

04/01/2012

Un territoire

"Le chat est comme elle est, au ras des choses."

La cuisine, le cagibi ,où elle dort, tel est Le territoire de la narratrice.Un espace où l'ont cantonnée deux tyrans :  le Garçon et la Fille, des enfants devenus grands qui, eux,  occupent le reste de la maison . Qui sont ces personnes ? Quels liens les unissent ? Nous le découvrirons peu à peu, au fur et à mesure des souvenirs de la narratrice, au fur et à mesure de sa réappropriation d'une nappe, vestige d'un repas où s'est noué le drame fondateur.angélique villeneuve,résilience
Ainsi se dessine une situation qui avait tout pour être sordide mais qui est transfigurée tout à la fois par l'écriture dense et sensuelle d'Angélique Villeneuve , "L'idée du couvre-lit enfle dans sa tête." et aussi par la manière dont la narratrice arrive à se frayer un chemin vers la liberté. Une liberté qu'elle s'invente au coeur même des tâches qu'elle accomplit, détachée de tout sentiment face aux remarques désobligeantes : "Lui inventent un coeur haché qui n'existe pas." En effet, "Elle est un coeur blanc, peut être. Une feuille de papier vierge de toute écriture."Et l'amour qu'elle a reçu enfant, ce viatique qu'on lui a transmis, elle va l'utiliser pour conquérir, sans violence, un espace où vraiment trouver sa place.
On a le coeur qui bat au fil des révélations qui scandent ce roman, au fil des émotions, des craintes que suscite le récit , on salive aussi devant la description de  ces cailles dorées qui ont "mariné l'après-midi entier dans du miel, du vin, des épices et des poudres secrètes.", on s'attache à cette narratrice jamais nommée, à la description d'un quotidien banal mais réenchanté

. Bref, on se régale de bout en bout et on fait durer le plus longtemps possible ces 152 pages denses et lumineuses.

Et zou, sur l'étagère des indispensables !

Un territoire, Angélique Villeneuve, Phébus 2012.

01/01/2012

Bonne année à tertous !!!

 

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28/12/2011

Légère contariété

"Faut pas vouloir un petit ami, parce que si tu l'as, tu finiras par le mettre sous le lit"

Pico Bogue est toujours aussi raisonneur et il semble que les seuls à pouvoir ocassionnellement lui river son clou soit son grand-père qui lui rappelle que "...pour honorer le dieu Baal, on jetait les enfants au feu" ou son père qui prend Pico à son propre piège ! Il faut dire que parfois Pico y va un peu fort et ne se rend pas compte de sa cruauté involontaire !dominique rogues,alexis dormal
Par contre, il a un talent fou pour essayer de culpabliser ses parents, qui, fil rouge de cet album, ont décidé de partir en vacances sans les enfants...Alors, se laisseront-ils manipuler ou tiendront-ils bon ?
Ferdi a été ravi de retrouver l'univers de ce pt'tit bonhomme à la mèche rebelle et moi aussi ! Un moment d'humour familial délicieux !

 

26/12/2011

Du pain et des mots

 "Blé: céréale dont on arrive ,non sans peine, à tirer un assez bon whisky et qu'on utilise pour faire du pain". Ambrose Bierce*

C'est à un programme bien plus alléchant que "Du pain et des jeux" que nous convie Apollonia Poilâne. Piochant dans la bibliothèque de livres sur le pain de son père, nourrissant son anthologie "des récits et trouvailles des co-pains", elle élargit ainsi notre vision d'un aliment qui fut autrefois sacré mais aussi "un élément symbolique fort de la contestation sociale." (voir "Le chant des chômeurs"), glanant les textes dans les cultures les plus diverses .
Le pain a inspiré aussi bien les romanciers (Giono, Le Clézio) que les poètes (le classique de Francis Ponge), les cinéastes que les comiques et sert à nourrir autant les estomacs que les esprits comme le prouve ce dialogue extrait du film Pain, amour et fantaisie:pain,apollonia poilâne,anthologie

"De Sica, à un paysan  assis sur une marche en train de manger: "Que manges-tu? "
Le paysan, l'air triste : "Du pain."
De Sica: "Et dans le pain?"
Le paysan: "De l'imagination."

Les chansons , les proverbes et les slogans publicitaires se relaient pour célébrer le pain, avec lyrisme, humour et sensualité. Un corpus éclectique original et riche !

Une anthologie, fort agréable et pratique à feuilleter en outre car le nom des auteurs apparaît  à la verticale sur le côté de chaque page. Une mine !

Du pain et des mots, Apollinia Poilâne, Editions du Cherche-midi 2011, 160 pages à savourer !

 

 

 

 

 

 

 

 

* in Le dictionnaire du diable, qu'il va falloir que je retrouve un jour pour relire ce chef d'oeuvre !

24/12/2011

Novembre à C*sto, Décembre aux travaux !

Joyeux Noël à tous !

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Version glamour : ici !

 

 

 

23/12/2011

L'école des saveurs

"-Si je la libère de l'emprise des livres, , je cuisinerai le restant de ma vie.Si je n'y arrive pas, j'abandonnerai pour toujours."

Les mets contre les mots, drôle de marché, passé par une petite fille face à une mère lectrice compulsive qui délaisse la cuisine ! Mais rassurez-vous cet "antagonisme " est traité avec humour: "Lillian, quant à elle, estimait que des oeufs brouillés cinq jours d'affilée, c'était de bonne guerre dans une semaine dominée par James Joyce" (La mère a en effet pour habitude  de lire à haute voix ses livres pour que sa fille en profite !).erica baurmeister,cours de cuisine
Devenue adulte, Lillian tient sa promesse et en plus de la tenue d'un restaurant, elle ouvre un cours de cuisine auquel vont assister des" élèves" très différents, par l'âge, la situation sociale et familiale qui, plus que des techniques, apprendront surtout à apprécier la sensualité des ingrédients et des plats et à (re) tisser des liens sociaux. Une trame simple donc mais une écriture allègre, 251pages qui filent bien trop vite ! Un livre qui vous remets sur les rails de la lecture quand on a envie d'un roman sans prise de tête mais bien écrit !
Ne faites pas comme moi, ne vous attardez pas sur une couverture ratée , ouvrez sans plus attendre ce roman qui vous fera encore plus apprécier les plats que vous allez bientôt déguster ! à (s')offrir sans plus attendre !

Un grand merci à Antigone !!

Clara est tout aussi enthousiaste !

22/12/2011

C'est officiel, c'est l'hiver !

"December will be magiiiiic again" nous annonçait Kate Bush en...1980 !220px-December_Will_Be_Magic_Again.jpg
Elle le confirme avec son album 50 words for snow (qui m'accompagne depuis novembre ! (Un album qu'il faut prendre le temps d'apprivoiser et qui, ensuite, envoûte)) et, en particulier avec la chanson qui donne son titre à l'abum où Stephen Fry égrène cinquante appelations poétiques et imagées de la neige (19 phlegm de neige, 34 sorbetdeluge, 24 terrablizza, 29 creaky-creaky...), ce qui m'a donné l'envie de vous faire partager quelques souvenirs, pas vraiment récents, mais garantis coups de coeur sur le thème de la neige !

Ainsi, le fascinant Smilla et l'amour de la neige de Peter Hoeg (adapté au cinéma)41DR50R18RL._SL500_AA300_.jpg

 

 

 

 

 

ou le film âpre mais émouvant en diable de Sandrine Veysset Y-aura-t-il de la neige à Noël? avec la trop rare Dominique Reymond et dans un rôle de salaud pur jus, Daniel Duval .

Alors neige ou pas neige, régalez-vous !

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20/12/2011

Moi, Eugénie Grandet

Du 3 novembre 2010 au 6 février 2011, s'est tenue à la maison de Balzac une exposition de "seize petit panneaux en hommage à la pâle héroïne de Balzac", ultime projet de Louise Bourgeois. L'artiste y renouait avec l'art de la broderie et du tissage, qu'elle avait pratiqué dans sa jeunesse, aidant ainsi ses parents qui rénovaient des tapisseries.louise bourgeois,jean frémon
La reproduction des oeuvres est précédée d'un texte de l'artiste, "Ode to Eugénie Grandet (suivi de sa traduction) et surtout d'une très pertinent essai de Jean Frémont, le premier à avoir présenté , en 1958, l'oeuvre de celle qui était encore une inconnue en Europe.
Ce dernier souligne d'abord les points communs entre les thèmes fondateurs entre Balzac et Bourgeois, tout particulièrement la maison ,mais aussi ,et de manière plus surprenante, ceux entre l'héroïne du premier vrai grand succès du romancier et l'excentrique artiste. à première vue en effet, tout sépare Louise qui quitta la France et l"ignorante fille sans cesse occupée à rapetasser des bas, à ravauder la garde-robe de son père, et dont la vie s'était écoulée sous ces crasseux lambris." Mais pour Jean Frémon "Victimes de la manipulation et de l'arrogance d'un père, Eugénie et Louise le furent toutes deux." Et d'établir des passerelles entre la biographie de Bourgeois et le roman de Balzac. Je le suis davantage quand il évoque "la lenteur et la résignation qui sont transformées en exercice spirituel, ces petits tableaux sont des mandalas, des prières [...] ces tableaux ne sont pas seulement des objets, ce sont des supports d'émotion, des reposoirs." Il souligne également que "Les torchons , les mouchoirs souvent usés, qui sont les supports de la plupart des oeuvres réunies ici sont ceux de son enfance, rapportés de France et entassés dans des armoires pendant toutes ces années en attendant le bonheur d'être recyclés en oeuvres d'art." Si Jean Frémont les envisage dans leur rapport au temps, "Quadrillages, symétries rassurantes, sentiment des heures qui passent.",j'y vois aussi la réappropiation des linges domestiques et la récupération/transformation d'éléments hétérogènes.
Des extraits d'Eugénie Grandet viennent illustrer cette brillante présentation , présentation qui donne envie d'approfondir la découverte de celle dont le" travail fut considéré comme implicitement mineur parce qu'il était celui d'une femme."

 Moi, Eugénie Grandet, Louise Bourgeois, précédé d'un essai de Jean Frémon, Editions Le Promeneur, 2010

 Cette exposition, Je ne suis pas Eugénie Grandet l'avait évoquée et je ne pouvais que craquer sur le catalogue de l'exposition. Celui-ci patientait sur mon bureau en attente d'un billet jusqu'à ce qu'un nouveau ricochet, en l'occurence un autre roman, le remette en lumière. Mais c'est une autre histoire...

PS: vu ta réaction enthousiaste, Angélique, je croyais que l'exposition avait été prolongée !!

19/12/2011

Je suis un no man's land

Philippe, chanteur, vient donner un concert (dont ne n'entendrons rien) dans sa région natale. Là tout va se liguer contre lui  : il ne pourra pas partir. Cette situation , traitée de manière poético-onirique, va lui permettre de renouer avec ses parents, incarnés tout en retenue par Aurore Clément et Jackie Berroyer, de solder ses comptes avec un ancien ami et même de faire la connaissance d'une ornithologue lunaire,  son alter ego, Julie Depardieu.thierry jousse,philippe katerine,julie depardieu
Très vite, Philippe Katerine va se dépouiller de ses oripeaux de chanteur déjanté (une tenue argentée) pour se glisser dans ceux de son adolescence, un peu étriqués, et donner la pleine mesure de son talent d'acteur. On y croit vraiment et onse glisse avec délice dans cette campagne où les mobylettes n'en font qu'à leur tête, tout comme les chevaux d'ailleurs, un univers poétique et enchanté.

Déniché à la médiathèque où se cache probablement un fan de Katerine ! (même ses premiers disques figurent dans le fonds!)