28/01/2012
L'héritage impossible...en poche
"L'ethnique atteint de tout nouveaux sommets ! cria-t-il."
Après une scène initiale forte et poignante, le dernier volet de la trilogie d'Anne B. Ragde perd un peu en puissance.
Si le personnage de Torunn, héritière de la ferme, aux prises avec un travail harassant dans un ferme délabrée, tout en s'occupant d'un vieil homme quasi mutique, est toujours aussi attachant, ses oncles, malgré leur bonne volonté apparente ne lui sont guère utiles et leur comportement frôle souvent la caricature.
L'auteure semble peiner parfois à renouveler ses thèmes et lance parfois son récit dans des voies de garage qui ne lui apportent rien. Néanmoins la peinture du monde agricole est comme toujours très réussie (ah, ces descriptions de porcelets !).
Ce n'est pas qu'on s'ennuie vraiment mais on a hâte de connaître le destin que va se choisir l'héroïne et en cela la fin est quelque peu décevante car je m'attendais à quelque chose de plus enthousiasmant pour elle. Une réussite en demi-teintes donc.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : anne b. ragde
27/01/2012
Retour à Reims
"...il me fut plus facile d'écrire sur la honte sexuelle que sur la honte sociale."
Après le décès de son père , Didier Eribon retourne à Reims et renoue avec l'histoire de sa famille, famille avec laquelle il a cessé partiquement toute relation depuis trente ans.
Il évoque ainsi le monde ouvrier de son enfance et son parcours intellectuel, son ascension, qualifiant de "miracle " la manière dont il a pu échapper au déterminisme social. Faute de famille ou de réseau, c'est le monde gay qui, selon lui, a ouvert les portes d'un univers qui, sans quoi lui serait demeuré inacessible.
Il analyse aussi les raisons du vote ouvrier en faveur de l'extrême droite, le fonctionnement du système scolaire, basé selon lui sur l'exclusion, et mêle réflexions et récit intime.Il dépeint ainsi les ajustements qu'il a dû pratiquer pour s'adapter aux valeurs du monde cultivé auquel il appartenait enfin, les détails qu'il fallait gommer, mais aussi la fatuité de ceux qui se considèrent comme détenteurs de droit de cette même culture.
On pense bien évidemment à Annie Ernaux, mais la parole est peut être ici plus crue, plus nue, mais l'on se réjouit de trouver quelqu'un qui ose enfin écrire de tels mots. J'y ai retrouvé , à une dizaine d'années de distance, un univers qui avait plein de points communs avec celui de mon enfance.
L'auteur se demande si les gens qui ont vécu le même parcours liront son livre, le succès de ce Retour à Reims doit le rassurer sur ce point. Un livre lu et relu aussitôt, tout hérissé de marque-pages.
Retour à Reims, Didier Eribon, Flammarion , collection champs essais 2010.
06:00 Publié dans Récit | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : didier eribon
26/01/2012
R & B Blitz
"Il n'y a pas d'endroits paisibles. Il n'y en n'a plus. Si tu veux la paix, porte un flingue. "
Les héros récurrents de Ken Bruen,les policiers londonniens Brant et Roberts au début de ce nouvel épisode de leurs aventures ne sont pas au mieux de leur forme, c'est rien de l'écrire ! Pourtant, il va bien falloir qu'ils se remuent car un serial killer des plus frustes, a décidé de s'en prendre aux flics...
C'était mon premier R&B et , même si j'ai l'habitude du cynisme et de la violence de Jack Taylor*, ici, ça dépote encore plus ! L'intrigue cavale à toute allure, ne s'embarrasse pas de fioritures, les personnages sont dessinés apparemmment à gros traits , mais de manière efficace ,et même si au début on est un peu sonné, on prend vite le rythme et même on se régale !
Il y a beaucoup d'humour, souvent noir, voire très noir, ainsi cette description brève mais des plus efficaces: "Mme Fox avait le visage affable que les thérapeutes en formation apprennent à se composer. Il disait : "j'ai tout entendu et rien ne me choque. mais surtout, je vous aime, sale ordure.""
Le tout est évidemment très politiquement incorrect et si "Brant ne tenait pas compte des règles et s'en sortait.", hé bien, de temps en temps, ça fait du bien... à lire !
R&B Blitz, Ken Bruen, traduit de l'angalis (Irlande) par Daniel Lemoine,Série Noire Gallimard 2007, 272 pages qui revigorent ! le tout émaillé de citations éclectiques et iconoclastes au début de chaque chapitre .
Déniché à la médiathèque !
*autre héros récurrent de Ken Bruen.
Ken Bruen, efficace en cas de panne de lecture !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : ken bruen
24/01/2012
Des vies d'oiseaux
"Les raisons pour lesquelles on reste ne sont pas toujours faciles à expliquer , a fait remarquer rêveusement Taïbo."
Deux femmes, Vida , la mère "la reine du déni", Paloma , sa fille, moins policée ,vont par des voies différentes prendre leur envol, se séparer mais se croiser, faisant fi de la sécurité matérielle: "Si tu voulais des garanties, ma douce, il fallait acheter un toaster."
Véronique Ovaldé plante l'action dans un pays d'Amérique latine moins touffu que celui de Vera Candida, aère également ses chapitres, parfois fort courts, en profite pour leur attribuer des titres imagés , comme autant de clins d'oeil à des films ("Attache-moi" ou à des romans "Le K").
Tout ceci confère beaucoup de luminosité à un récit enjoué, une écriture fluide, où les métaphores et les comparaisons s'épanouissent en toute liberté, où tout reste léger, subtil, jouant sur des tonalités différentes. On ne peut qu'être fasciné par ce roman chatoyant.
Tout le monde ou presque l'a lu !
...
Déniché à la médiathèque.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (19) | Tags : véronique ovaldé
23/01/2012
Printemps
"Son envie d'alcool, elle la combat par le danger et la souffrance, par l'épuisement physique."
Une explosion dans une petite ville tranquille de Suède touchée par la crise bancaire: la destruction d'un distributeur bancaire a provoqué la mort de deux fillettes et a grièvement blessé leur mère. Malin et ses collègues vont mener l'enquête mais notre policière favorite aura fort à faire aussi avec ses propres problèmes personnels. La tentation de briser son abstinence bien sûr d'autant que le secret lié à sa famille va enfin être livré au grand jour et va la bouleverser profondément. Mais aussi la solitude qui la touche de plus en plus.
L'intrigue est prenante même si elle utilise de grosses ficelles et joue un peu trop sur la note glauque. L'argent est ici vilipendé de manière un peu naïve et je me suis bien plus attaché au personnage fragile de l'héroïne qu'à ces réflexions intempestives et ma foi, plutôt inutiles
Ce Printemps sera-t-il l'occasion d'une renaissance pour Malin ? En tout cas il clot de manière satisfaisante la tétralogie des saisons.
à noter quelques coquilles et traductions approximatives qui m'ont quelque peu agacée.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : mons kallentoft
22/01/2012
Et devant moi, le monde...en poche
"à ses yeux, je suis quelqu'un à qui on a montré le chemin et qui s'en est délibérément détourné."
A dix-huit ans, Joyce Mainard écrit un long article qui fait d'elle la porte-parole de la jeunesse des années 70 aux Etats-Unis. Ce texte, et la photo qui l'accompagne, lui vaudront une lettre d'un certain J.D. Salinger. S'engage alors une correspondance qui débouchera bien évidemment sur une histoire de fascination et d'emprise entre la très jeune fille et cet écrivain charismatique de trente -cinq ans son aîné.
Quoi qu'en dise le bandeau accrocheur de l'éditeur "Dans l'intimité de Salinger", ce récit ne tourne pas seulement autour de cet épisode de la vie de Joyce Mainard.
C'est bien plutôt le récit d'une très jeune femme qui mettra énormément de temps à accorder sa vie (marquée par la honte et l'imperfection ) avec le récit édulcoré qu'elle en fait, en brave petit soldat désireux de plaire non seulement à ses parents mais aussi à tous ceux qui la liront. Mainard le reconnaît avec franchise, oui elle a été avide de reconnaissance et de succès, toutes choses qui ne pouvaient que déplaire à l'ascétique Salinger qu'elle a connu. S'il a été le premier à reconnaître en elle un écrivain, la leçon a été plutôt âpre à digérer car, placée sur un piédestal dans un premier temps, la chute n'en a été que plus rude pour Joyce.
Récit pudique mais sincère, Et devant moi, le monde, fait entendre la voix de celle qui s'est échinée pendant des années à écrire comme si quelqu'un regardait par dessus son épaule mais a enfin trouvé le courage d'admettre que non sa vie n'était pas parfaite et que oui elle avait le droit de mettre à mal le mythe Salinger. On pourra la trouver parfois naïve cette très jeune femme , mais jamais elle ne nous agacera et son histoire trouvera forcément de nombreux échos en nous.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : joyce mainard
21/01/2012
G 229 en poche
"Ils se demandent ce qu'ils vont faire de moi."
J'ai failli rester à la porte de la salle G 229 quant à la page 41, l'auteur évoque "le petit bois derrière l'école dans laquelle j'habitais quand j'étais enfant." Un prof d'anglais , fils d'instit, pfff , l'impression d'avoir déjà lu ça cent fois. Mais j'ai pioché plus loin avant de revenir page 41 et de boucler en un rien de temps ma lecture.
Car oui, ce roman, qu'on devine bien évidemment largement autobiographique, n'est pas un énième livre écrit par un prof visiblement accro à son boulot mais aussi le constat d'un homme qui n'en revient pas de voir filer le temps à toute allure, de voir grandir et partir ses élèves tandis que lui reste depuis 20 ans dans SA salle,celle qui donne son titre au roman.
L'auteur pêche parfois par excès de sensibilité mais on lui pardonnera volontiers ce défaut et on se régalera de ce roman optimiste et sincère.
J'ai entendu un jour Odon Vallet dire que les élèves avaient toujours le même âge tandis que le professeur vieillissait, c'est ici un peu l'autre côté de la pièce.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : jean-philippe blondel
20/01/2012
Biftek...en poche
"-Reprenez-la, dit-il, elle est végétarienne."
Fils-père de sept enfants , poursuivi par un époux jaloux, le jeune boucher breton, André, doit s'enfuir et quitter le plancher des vaches pour voguer, en compagnie de sa progéniture, vers la lointaine Amérique.
Commencé de manière classique Bifteck s'affranchit ensuite graduellement des contraintes du réalisme pour dériver de plus en plus vers le conte ou la fable.
Fable qui est une véritable ode à l'amour paternel,"Elle n'avait pas encore les mots pour le dire, mais elle savait déjà, comme eux, que l'amour d'un père a plusieurs visages , et que pas un ne l'empêcherait d'être heureuse." un amour absolu pour André qui nourrit, taille des vêtements, pétrit ses enfants, les absorbant pour ainisi dire dans un amour sans borne. Mais comme le rappelle Kahlil Gibran: "Nos enfants ne sont pas nos enfants" et le boucher qui leur tient à la fois de père et de mère devra apprendre à lâcher prise, à s'effacer...
Piochant dans les thèmes classiques du conte initiatique, Martin Provost les réinvente avec verve , nous régalant au passage d'une prose alerte et sensible. Seule la fin, trop réaliste pour le coup et trop explicative m'a laissé un arrière goût de déception. Une gourmandise néanmoins !
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : martin provost
19/01/2012
Les lieux infidèles...en poche
"Je me retrouvais à Faithful Place, comme si je ne l'avais jamais quittée."
Vingt-deux ans que Franck Mackey n'a pas remis les pieds dans ce quartier de Dublin où il avait grandi et où sa bien- aimée, Rosie l'avait abandonné, juste le soir de leur départ pour Londres. Il avait dix-neuf ans et voulait vivre son amour loin d'une famille complètement dysfonctionnelle, marquée par la peur et la violence.
Mais la valise de Rosie vient d'être découverte et Franck, devenu flic infiltré, va devoir à la fois reprendre contact avec les siens et revisiter son passé. Bien évidemment, il ne pourra s'empêcher de mener sa propre enquête car, c'est bien connu, les infiltrés ont un respect tout relatif de la loi.
Les lieux infidèles vaut aussi bien par les péripéties de l'enquête que par l'atmosphère dublinoise qui y est évoquée. Faithful Place est un quartier à la fois pauvre, populaire et chaleureux où chacun s'efforce de préserver ses secrets pour ne pas donner de grain à moudre aux voisins. On y boit parfois plus que de raison, ça chante, ça gueule, ça pleure...Tout un pan de l'histoire dublinoise, marquée par le chômage et les musiques des années 80 s'y donne à voir et c'est ce qui fait la saveur de ce roman, un tantinet trop classique dans la forme. De quoi passer un bon moment cependant.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : tana french
18/01/2012
Pour un matin pas chagrin...
07:10 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : haïku