11/07/2019
La persuasion des femmes
"Parfois, il fallait abandonner ses convictions, ou les assouplir bien plus que vous ne pensiez le faire un jour."
Greer et Cory sont "deux fusées jumelles" qui brillent par leur intelligence et semblent promis à un bel avenir. La première est issue d'une famille quelque peu marginale qui semble peu soutenir la jeune fille timide. Le second vient d'une famille d’immigrés portugais chaleureuse et unie.
Ces millenials, qui à l'adolescence seront devenus un couple, vont partir dans deux universités différentes mais se projettent déjà dans un futur où ils pourraient mettre en pratique, via leur emploi, leurs convictions.
D'autant que Greer a fait brièvement la connaissance de Faith Frank, icône du mouvement féministe des années 70. L'admiration qu'elle voue à cette femme et aux causes qu'elle défend galvanise Greer.
Mais l'idéalisme de la jeunesse va bientôt se heurter aux aléas de l'existence et au pragmatisme de l’expérience...
Roman choral, La persuasion des femmes brosse le portrait nuancé de personnages d'âges et de milieux différents et montre leur évolution, parfois par le biais de simples détails comme l'utilisation ou non d'un canapé-lit, jusqu'à la période contemporaine où est survenue "la grosse calamité" ( l’élection d'un président jamais nommé dans le roman).
Analysant avec finesse et empathie l'influence que peuvent avoir certaines personnalités sur d'autres,Meg Wolitzer nous captive tout au long de ces 434 pages , sans jamais nous perdre en route. On s’attache à tous les personnages, principaux ou secondaires, on frémit, on s'identifie et on ne cesse de souligner les remarques pertinentes tout au long de ce roman écrit dans un style impeccable.
Et zou, sur l'étagère des indispensables.
Éditions Rue Fromentin 2019, brillamment traduit par jean Esch.
De la même autrice: clic
07:10 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : meg wolitzer
09/07/2019
#KillingEve1-CodeNameVillanelle#NetGalleyFrance
"Là où d'autres éprouvaient de la tristesse ou de l'horreur, elle ne connaissait qu'une froide sérénité."
Ayant adoré les deux premières saisons de la série Killing Eve, je me suis précipitée sur le premier épisode, qui façon Nikita de Besson, évoque l'origine, la formation et le premier crime de Villannelle au service d'une mystérieuse organisation.
L'écriture est efficace, le rythme soutenu, il est juste dommage que cet épisode soit si court, mais il éclaire bien le parcours de l’héroïne.
Traduction de l'anglais par Amélie Foulatier
06:00 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : luke jennings
07/07/2019
Bloganniversaire
13 ans déjà que , rompant la torpeur estivale d'un été sans départ prévu, je me suis lancée dans la blogosphère,( un peu décrépite, voire obsolète maintenant, mais tant pis !).
Je continue vaille que vaille, grâce à vous, à allonger mes Listes A Lire, à faire grimper mes Piles A Lire et à découvrir des romans, des autrices et des auteurs. Encore merci à vous toutes et tous !
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (26)
28/06/2019
Les soeurs Brontë...en poche
"La lecture permet de savoir où l'on veut aller, qui l’on veut devenir. Elle peut révéler, aussi, ce qu'on ne voit pas de soi-même."
Biographie centrée sur la fratrie Brontë, ce document est étayé par de très (trop?) nombreuses citations et , pour ceux qui ont déjà lu sur ce thème, n'apporte pas grand chose de nouveau.
L'écriture de Laura El Makki est discrète et n'apporte pas de souffle à cette biographie classique et efficace par ailleurs.
06:00 Publié dans Biographie, le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : laura el makki
27/06/2019
La joie du matin...en poche
"Elle a l'air simple, et même si enfantine quelquefois. Mais il y a quelque part en elle une barre d'acier."
Pendant un an , nous allons suivre les débuts d'un bébé-couple, fraîchement marié, à la fin des années 20 dans le Midwest. Si Carl est à université, Annie, elle n'a pas eu la chance de suivre des études et a dû travailler très tôt. Les deux familles respectives ne sont évidemment pas enchantées de voir ces très jeunes gens se marier alors que Carl n'a pas encore obtenu son diplôme. Pourtant, Annie, par sa candeur et une forme d'intelligence rafraîchissante, arrive même à séduire les profs d'université qui l'autorisent à suivre des cours de littérature,en auditrice libre. Voilà donc Annie qui se lance dans l'écriture...
Écrit au début des années 60, ce roman vintage réédité par Belfond m'a laissée très partagée: autant Annie est charmante et souvent touchante, autant les regards masculins portés sur elle sont empreints de paternalisme condescendant. J'ai donc oscillé entre agacement et tendresse pour ce personnage à l'orée de sa vie.
Traduit de l’anglais (E-U) par Gisèle Bernier
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : betty smith
26/06/2019
L'heure d'or...en poche
"La vie ne dépend peut être pas de toutes les décisions qu'on prend. Il y a tout un monde autour de nous. Nous nous faisons pousser, bousculer, que nous le voulions ou non. Nous sommes peut être comme des feuilles qui virevoltent au gré du vent. Nous allons là où on nous envoie."
Un été chaud dans le Sud de l'Angleterre (on ne ricane pas), un paysage champêtre et un couple de quinquagénaires, Henry et Laura, qui décide d'organiser un dîner samedi en huit pour réunir voisins et amis. Les invitations sont lancées mais les remous, les interrogations et les remises en question des uns et des autres vont peut être faire capoter l'harmonie dont rêve Laura.
Comme dans les précédents romans de William Nicholson, nous trouvons une galerie de portraits plus vrais que nature,(de l'adolescente qui s’amourache d'un garçon fascinant ,mais sans doute nocif , à la trentenaire qui freine des quatre fers à l'idée de s'engager, en passant par le sexagénaire qui veut changer de vie) mais toujours emplis de bienveillance.
Les rebondissements de l'intrigue sont plus liés à l'évolution psychologique des personnages et elle se fait tout en finesse. Ainsi on sent que l'auteur a autant de compassion pour la vieille mère tyrannique que pour la fille tyrannisée et il parvient à nous brosser de l'une comme l'autre des portraits nuancés. Quant au scénariste ulcéré qui découvre inopinément que son scénario est retravaillé par un autre, la confrontation avec son rival prendra une tournure beaucoup plus enrichissante que prévue.
Tous nous deviennent proches et l'on se sent plein de gratitude à l'idée d'avoir partagé ce repas. Un bon gros roman confortable comme on les adore !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : william nicholson
25/06/2019
Rome en un jour...en poche
Contrairement à ce qu'affirme le proverbe, "ils avaient fait Rome en un jour, toujours main dans la main, et au soir Paul avait demandé celle de Marguerite dans une trattoria...". Leurs amis attendent toujours le faire-part et surtout 10 ans plus tard, que Marguerite arrive à extraire Paul de leur appartement pour l'anniversaire surprise (et tardif) qu'ils lui ont concocté.
Même si Marguerite est convaincue "qu'on ne peut détruire Rome en une seule fois", il ne faudra bel et bien qu'une soirée pour mettre à bas leur couple, déjà bien miné, on va s'en rendre compte au fil du récit alterné entre les scènes (dans tous les sens du terme) se déroulant à l'appartement et l'attente des invités sur le toit d'un hôtel.
C'est à une comédie acide que nous convie Maria Pourchet avec Rome en un jour, mettant à jour tous les faux-semblants des relations humaines, grattant là où ça fait mal , soulignant la solitude qui mine les êtres et les moyens parfois pathétiques qu'ils mettent en place pour s'en sortir.
Sous des dehors bien policés, la violence couve car "Certains sentiments parce que trop longtemps contenus par les conditionnements sociaux et la règle comportementale, sont susceptibles de se manifester de manière inopinée dans un mouvement aussi souverain que destructeur, avec une intensité d'expression tout à fait inhabituelle."
Un roman dévoré d'une traite car d'une noirceur réjouissante.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maria pourchet
21/06/2019
Idaho...en poche
"Ce lent effacement, cette ligne blanche traversant l'obscurité de la mémoire de Wade, voilà ce qu'Ann suivra toute sa vie durant. Et à n'en pas douter, ce la mènera jusqu'aux porte de sa propre prison secrète."
Une jeune femme, Ann, a épousé un homme plus âgé , Wade qui a été au cœur d'un drame familial neuf ans auparavant.
La mémoire de son mari s'efface peu à peu et Ann prend en charge , via des bribes de souvenirs, cette tragédie, cherchant encore à retrouver l'une des filles de Wade, qui s'est enfuie le jour où tout a basculé.
N'importe quel autre auteur aurait fait de ce récit un roman cousu de fil blanc, avec toutes les étapes obligées au programme, facilitant ainsi la tâche de son lecteur.
Emily Ruskovich, dont c'est ici le premier roman, contourne tous ces écueils et ne donne quasiment jamais d'explications à son lecteur, ce qui ne m'a jamais frustrée car la vie nous offre-telle toutes les solutions aux énigmes qu'elle nous inflige ?
J'y ai surtout la volonté d’établir un pont entre deux femmes que tout aurait dû opposer et la découverte d'une magnifique écriture qui sublime tous les paysages décrits. Un grand coup de cœur.
Gallmeister Totem 2019, traduit de l’américain par Simon Baril.
Cuné m'avait donné envie. Clic.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : emily ruskovich
20/06/2019
Ariane...en poche
"Telle que dépeinte en ces lignes, mon existence avait pour unique objectif de me faire valider. Valider par les garçons, valider par les autres, admirer, applaudir. L'enfant mutique et invisible s'était développée en diva qui n'aspirait désormais qu'au regard d'autrui."
Dans les années 90, en Brabant wallon, la narratrice intègre"une école de riches", où elle se sent en total décalage, ne maitrisant ni les codes d'un univers qui n'est pas le sien, ni son corps en pleine mutation adolescente.
Là, elle rencontre Ariane qui semble posséder tout ce qu'elle n'a pas : beauté, richesse, assurance, et qui, ô miracle, l'adoube comme meilleure amie. Mais cette relation va vite tourner à l'aigre et Ariane prendra bientôt plaisir à torturer psychologiquement celle qu'elle ne chérit plus.
Tout pourrait s'arrêter là, mais Ariane réapparaîtra plus tard dans la vie de la narratrice et la perturbera de manière bien plus vénéneuse...
Il existe bien des romans sur les relations adolescentes toxiques, cet âge où tout se vit de manière exacerbée . Mais la manière dont Myriam Leroy envisage son récit, de manière crue, violente , sans pour autant tomber dans la volonté de choquer le lecteur, fait de la lecture de ce roman une expérience troublante. J'ai aimé les brusques coupes du récit, les réflexions de l'autrice/narratrice, la manière dont Myriam Leroy rend compte d'une époque. un premier roman coup de poing parfaitement maîtrisé.
De la même autrice, dans un registre différent : clic.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, Roman belge | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : myriam leroy
18/06/2019
Journal pauvre
"Se rendre compte à quel point la vie est fragmentaire, mouvante et jamais complète. Chaque action demeure inachevée. Chaque action n'est que la partie d'un tout lui même inachevé."
Abandonnant la fiction, et aussi pour une année sabbatique un travail qu'on devine pesant, l'auteure fait aussi un choix radical : "Expérimenter le dénuement, être attentive à ceux qui vivent de très maigres subsides, à ceux qui ont choisi de ne donner qu'un minimum de leur temps contre salaire, ou de ne se consacrer qu'à une activité peu rémunératrice."
Un cheminement qui la mènera au final à quitter définitivement le monde du travail salarié et à s’affirmer enfin "écrivain".
Journal pauvre car selon, l'auteure, "Il n'attrape qu'une infime portion de la richesse du monde.", ce texte dit aussi la solidarité, les rencontres, réelles, ou littéraires, et l'attention aux autres et au monde, dans ses plus infimes manifestations. J'ai été séduite par ce journal pudique, plus littéraire que psychologique, ainsi que par l'écriture de Frédérique Germanaud.
152 pages bruissantes de marque-pages où glaner aussi plein d'idées de lectures.
Et zou, sur l'étagère des indispensables.
Éditions de La clé à molette (j'adore ce nom !)2019.
Le billet tentateur de Sabine: clic.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, Récit de vie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : frédérique germanaud