22/12/2020
Bon pour un jour de légèreté
"La Provence, 25 avril 2020 "Confinement: deux coiffeurs clandestins découverts dans des caves en Allemagne."
Au fil du premier confinement, la plasticienne et membre de l'Oulipo, Clémentine Mélois a tenu l'angoisse à distance en collectant des titres de presse et surtout en détournant avec tendresse, humour, irrévérence parfois, des images qu'elle nous livrait sur les réseaux sociaux.
Elles sont ici rassemblées en un parfait petit album qui déridera les plus ronchons.
Mention spéciale aux pochettes de disques détournées !
Grasset 2020, 10 euros.
06:00 Publié dans Humour | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : clémentine mélois
21/12/2020
Cher Père Noël Vraies lettres inventées
"Non ! Rien de rien
Non ! Je ne commande rien...
C'est payé, balayé, oublié
Je me fous de Noël[...]
Édith P."
Lipogramme (texte d'où une lettre est bannie) , en hommage à Georges Perec , pastiches de différents auteurs (Prévert, Madame de Sévigné...) , lettres de Sherlock Holmes ou d'Ulysse et autres fantaisies littéraires plairont aux amoureux des mots qui pourront s'amuser à les imiter.
Mais les membres de L'Ouvroir de Littérature Potentielle ont pioché également dans d'autres registres, plus ancrés dans la vie quotidienne : lettre de la Reudoute, lettre de refus (signée par la stagiaire du comité éditorial), lettres de réclamation, lettre d'amour (coquine , la lettre), chanson, textes utilisant des jargons divers , tout ceci brosse aussi, mine de rien, un panorama de notre société et de ses usages linguistiques.
Une mine de plaisirs à (s') offrir pour 5 euros.
Éditions Librio 2020
06:00 Publié dans Humour, l'amour des mots | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : oulipo
05/12/2020
Passe-moi le champagne, j'ai un chat dans la gorge...en poche
"Bernard Arnault c'est le A de LVMH."
Les revoilà, encore plus riches, encore plus déconnectés de la réalité, la langue encore plus acérée et peut être encore plus drôles: les gens du monde de la mode, dont certains travers sont certes spécifiques, mais dont les réflexions, glanées par Loïc Prigent, pourraient très bien concerner d'autres milieux.
On sourit, on rit franchement, on grince des dents parfois devant tant d'arrogance décomplexée mais on surligne à tour de bras ces réflexions dont on ne sait parfois si c'est elles sont l'expression d'une méchanceté assumée ou d'une bêtise irrémédiable.
un petit florilège: "Je suis un fou de la santé. Je fais de la respiration jusqu'à six heures par jour quand je peux."
"Elle est passionnante comme la photocopie d'une feuille blanche."
"C'est quoi sa formation ?
- Piston +4."
"Me regarde pas j'ai mon mauvais profil aujourd'hui."
"Je déteste les fleurs. Envoie moi un sac à la place."
"Elle est de quelle origine ?
- Conne."
"J'étais à un mariage où personne n'allait à la gym c'était affreux."
"Pour être heureux il faut jamais penser. Elle est hyper heureuse."
"J'ai deux rendez-vous dont deux ennuyeux."
06:00 Publié dans Humour, le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : loïc prigent
02/12/2020
Coquelicot et autres mots que j'aime
Elle nous laisse ses chansons mais aussi ses mots :
« Je suis une nomade empêchée. »
Les mots, elle les chante, elle les enchante pour les petits et pour les grands, mais c’est la première fois (merci, Philippe Delerm !) qu’elle nous les offre sous forme de livre. Un recueil savoureux où Anne Sylvestre , tout à la fois évoque , par petites touches, des souvenirs, des sentiments, des sensations mais aussi se montre malicieuse voire délicieusement critique quand elle personnifie et croque le portrait de « Baliverne et Billevesée », deux commères comme nous en connaissons tous !
Les mots, elle en savoure les sonorités et les couleurs, voire les odeurs (cf « Frangipane ») dans des textes jubilatoires où l’on sent le plaisir de les prononcer, de jouer avec eux, avec le rythme qu’elle leur imprime. Et les textes en prose de flirter avec la poésie…
Des textes qui célèbrent aussi la nécessité des petits mensonges, la lenteur des lectures et relectures de l’enfance, la chaleur de l’édredon, « cette caverne, ce terrier de marmotte pour survivre à la nuit. », la « doublure légère » des mots mal compris, détournés.
On sent l’âme à la fois légère et bien trempée de l’artiste qui a su tracer son chemin à l’écart des sentiers battus. 192 pages à déguster , bien au chaud, sous un édredon.
« En attendant la fin du monde et de nous, mentons mais avec délectation. »
Coquelicot et autres mots que j'aime, Anne Sylvestre, Points Seuil 2014.
06:00 Publié dans l'amour des mots | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : anne sylvestre
30/11/2020
Brûler Brûler Brûler
"Avions-nous déjà assisté à pareil ébrouement ? "
Voilà longtemps que je n'avais pas été autant emportée par un tel torrent poétique !
Ardeur de l'écriture qui prend à bras le corps tout ce qui fait la vie de ceux que l'on a relégués "aux derniers rangs" : toutes les formes de violence (harcèlements, homophobie, pauvreté, racisme...), qui dit la solidarité, le découragement, la sororité, l'amour maternel dans une langue qui brûle, dans une langue qui claque dans l'urgence de vivre, dans l'urgence de dire.
Elle décrit au plus près l'envie de liberté, le désir d'une très jeune femme qui se rebelle contre l'autorité du père et file à bicyclette rejoindre celui qu'elle aime, mais aussi celle qui martyrise son corps pour conserver l'homme infidèle, et ces figure de femmes se rejoignent dans ce cortège de guerrières hétéroclites, fatiguées, captées dans le plus petit détail révélateur, qui formeraient "...un majestueux animal collectif !
Un gigantesque poisson aux écailles métalliques avec
chaque écaille-femme, chaque écaille-fille,chaque écaille-mère armée à sa manière pour riposter contre la violence du système."
Un texte qui emporte , transporte, revigore et nous prouve que ,malgré ce qu'on en dit, la poésie est toujours vivante. Un putain de coup de cœur qui file sur l'étagère des indispensables et devient d'emblée un compagnon de route.
Lisette Lombé, Brûler Brûler Brûler, L'Iconoclaste 2020.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)
25/11/2020
Petite salamandre Le merle voisin du jardin
La revue des enfants curieux de nature (destinée aux 4-7ans) s’avère être une mine d'informations sur les animaux qui nous entourent (phasmes, lérots, crapauds...), mais aussi bien évidemment sur le merle, vedette de ce numéro.
De superbes photos et un poster permettent d'admirer cet oiseau et de le découvrir plus avant. On croirait presque l'entendre chanter !
Un foule d'activités (coloriage comptage, jeu d'observation...) permettent d'oublier le confinement et une histoire qui fera battre les cœurs complète le programme.
La mascotte de cette revue, Sam, la petite salamandre, accompagne la lecture au fil des pages et un logo P'tit web signale des surprises à retrouver sur le site web. De quoi allier papier et écrans...Bref, une revue très complète, très belle graphiquement et riche d'infos que je vais m'empresser d'offrir à une petite fille de 4 ans et demi !
Merci à Babelio et à l'éditeur pour cette belle découverte .
06:00 Publié dans Jeunesse | Lien permanent | Commentaires (0)
23/11/2020
La lectrice disparue
"La fonction primaire de la communication écrite est de faciliter l'asservissement."
Cette lectrice disparue, c'est Edda, dévoreuse de livres, mais aussi empêtrée dans tout ce qu'elle lit et ne parvient pas à oublier. Edda , qui peinant à établir des relations avec les autres, est soudain devenue une influence mettant en scène sa vie sur les réseaux sociaux avant que de s'enfuir aux États-Unis, plantant là son mari et son fils nouveau-né.
Son frère, Einar est plus habitué à pister le gibier qu'à rechercher des humains, mais il se lance à la poursuite de sa sœur, ce qui n'est pas une mince affaire pour ce dyslexique dont la sœur palliait souvent les difficultés avec l'écrit.
Un père, deux mères, deux enfants ayant chacun un rapport à la lecture très différent, tel est le schéma de ce roman à la croisée de plusieurs genres: roman familial, roman d'anticipation (qui semble juste très très proche), fable et roman policier avec cette lectrice disparue qui donne son titre au roman.
Titre français qui résonne d'un double sens , mais cela on ne le comprendra qu'à la fin du récit, récit qui se déroule en partie dans un pays , l’Islande ,où le livre est roi.
Ce roman est donc aussi une réflexion sur la lecture et l'écriture et son autrice n'hésite pas comme dans L'île à susciter le malaise, confrontant ses personnages, et ses lecteur par la même occasion,à des situations extrêmement dérangeantes.
Il n'en reste pas moins que le style, la composition , les personnages et les thèmes choisis font de ce roman une lecture forte et addictive.
Traduit brillamment de l’islandais par Eric Boury, Gaïa 2020,324 pages piquetées de marque-pages.
De la même autrice : clic.,
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : sigridur hagalin bjornsdottir
16/11/2020
La fenêtre au sud
"Certains jours sont en quelque sorte particulièrement misérables, quand le temps, la situation sociale, l'état physique et moral transforment tout en désert poussiéreux. Même la conjoncture actuelle a ici son importance, et la radio en donne des nouvelles avec une précision impitoyable."
Un écrivain, qui n'a plus écrit de poésie depuis des lustres, tente de rédiger un roman sur un couple , personnages auxquels il ne parvient à insuffler aucune énergie.Les saisons, du printemps à l'hiver, scandent son séjour dans un hameau de maisons noires , fréquentées uniquement en été, à deux pas de la mer, en Islande.
Notations sur la nature, les rares humains qu'il est amené à fréquenter, sur la littérature, l'état désastreux du monde viennent au fil de sa plume, tandis qu'il s'échine à frapper sur une vieille Olivetti dont les rubans n'impriment plus grand chose, reflet de son manque d'inspiration, sans doute.
Ici la frontière entre rêves et réalité devient poreuse, et, non, sans humour, le narrateur nous livre des bribes de sa vie familiale et amoureuse, de manière pas toujours fiable d’ailleurs.
Il se dégage de ce texte une véritable fascination, comme dans le premier volet de ce tryptique sur la solitude Au bord de la Sanda. (clic )Un coup de cœur. Et zou, sur l'étagère des indispensables.
La Fenêtre au Sud, Gydir Eliasson, traduit de l'islandais par Catherine Eyjolfsson, La Peuplade 2020, 161 pages pour un confinement poétique.
L'avis d'Aifelle: clic
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : gyrdir eliasson, catherine eyjolfsson
12/11/2020
Des vies à découvert
"On ne peut plus aller aux abris quand il n'y a plus d'abris."
Deux époques de profonds bouleversements, 2016 et 1871, un pays , les États-Unis et une même volonté de trouver un abri, réel ou métaphorique, pour des personnages auxquels nous nous attachons très rapidement, tel est le contenu du roman de Barbara Kingsolver Des vies à découvert.
Pour relier ces deux époques, une maison, mal conçue, mais qui agira comme un révélateur de déni ou au contraire incitera à des prises de conscience.
Barbara Kingsolver brosse ici le portrait passionnant de la famille Knox , intellos bohèmes rattrapés par la crise , un fils dans le monde de la finance, une fille plus atypique, mais qui se révèlera sans doute plus lucide et plus adaptée à la situation contemporaine, marquée par la crise climatique, sociale et politique.
Au XIXème siècle, c'est le personnage de Mary Treat, scientifique injustement oubliée, qui montre la voie vers une science plus moderne , loin des diktats obscurantistes.
Les relations familiales sont également au cœur des problématiques et l'humanité inquiète de Kingsolver s'épanouit ici avec beaucoup de finesse ,à son habitude. Un roman puissant où luit un peu d'espoir.
Traduit de l’anglais par Martine Aubert, Éditions Rivages 2020
06:00 Publié dans Rentrée 2020, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : barbara kingsolver
11/11/2020
à cinq ans, je suis devenue terre à terre
"à l'horizon rectiligne d'une conversation sans but, il arrive parfois qu'un mot fasse éclater la bulle policée du phatique."
Quelle bonne idée de demander à la chanteuse, autrice, compositrice, pianiste Jeanne Cherhal que d'écrire à propos des mots !
Reine des métaphores, elle les personnifie aussi et les célèbre parfois de manière synesthésique, associant un goût à leur sonorité, ce qui nous vaut ainsi un petit délice à l'entrée "Yoga", mot fort usité en ce moment: "Lacté, légèrement sucré, frais sans être glacé, mélange subtil et doux de confiture de rose et de colle Cléopâtre, yoga a le goût du zen. Non seulement, il n'agresse pas, mais mieux, il repose. Il recouvre le palais d'un édredon léger et invite à la contemplation." L’article se termine néanmoins sur une note plus malicieuse et prosaïque !
Car oui, de l'humour il y en a et de sacrés personnages aussi car Jeanne Cherhal nous dévoile un peu de sa famille, de son enfance, de sa jeunesse au fil des entrées. La tonalité se fait parfois plus sombre pour évoquer de manière délicate son père disparu ou le récit d'une amitié toxique illustrant le mot "Vampiriser".
"Sexy", "Féministe", "Sorcière" l’artiste multifacettes nous glisse aussi quelques conseils littéraires et une astuce pour se débarrasser de la lettre W au Scrabble. Ses textes sont de purs délices et certains confinent à la perfection, tel "Procrastiner ou "Cercle". Vite ,précipitez-vous sur ce recueil !
Points seuil 2020
06:00 Publié dans l'amour des mots, l'étagère des indispensables | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : jeanne cherhal