19/08/2021
Ma meilleure amie
"Sans doute les femmes tolèrent-elles mieux que les hommes les mouvements souterrains."
Trois jeunes provinciales ,bien décidées à ne pas se laisser regarder de haut , partagent une colocation joyeuse, pleine de liberté , irriguée par l'amour des mots et des livres.
Helga, la narratrice ,a d'abord été séduite par Sambre, la lumineuse qui se destinait à devenir comédienne. A ce duo s'est vite ajoutée Rosie, qui de petits boulots en petits boulots, trace sa voie sans jamais se départir d'une belle énergie.
Las, un jour Sambre claque la porte et Helga se retrouve démunie, sans modèle auquel se référer.
Avec un tel aperçu, on aurait pu s'attendre à un schéma tout tracé (retrouvailles, déception, nostalgie blablabla), schéma qu'évidemment, Fabienne Jacob s'empresse de dynamiter pour mieux se concentrer sur les expériences de sa narratrice au fil du temps qui passe.
Si le temps est effectivement un thème central de ce roman, c'est pour mieux souligner l'immédiateté dans laquelle baigne la jeunesse, persuadée par exemple de ne pas avoir besoin de photographies pour se remémorer.
Les sensations sont aussi extrêmement présentes, en particulier les auditives et tactiles, ce qui nous vaut de superbes passages sur la peau de la personne avec laquelle on partage un lit ou bien encore l'addiction que peuvent faire naître des draps de lin...
Un roman d'apprentissage sensuel et lumineux où l'on souligne quasi à chaque page une remarque ou un passage , un roman qui file bien évidemment sur l'étagère des indispensables.
Buchet-Chastel 2021, 209 pages .
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, Rentrée 2021, romans français | Lien permanent | Commentaires (0)
18/08/2021
Monsieur Durant et autres histoires de couples
"Il ferait beau voir que nous accueillions une femelle- pas pour tout l'or du monde ! "
Dorothy Parker est connue pour sa langue acérée et quand elle s'en prend à d'apparents couples ou familles parfaites , c'est un pur régal pour celles et ceux qui apprécient une plume trempée dans l'acide.
Dans le premier texte de ce recueil de trois , "Monsieur Durant ", elle brosse le portrait d'un homme très satisfait de lui-même et de son rapport aux femmes, femmes qu'il traite de la manière la plus abjecte sans jamais y trouver à redire ,ni se remettre en cause. Il y avait longtemps que je n'avais rencontré un personnage aussi odieux !
Des textes courts et efficaces qui restent toujours d'actualité tant la vision de Dorothy Parkerexcelle à débusquer les faux-semblants et les hypocrisies dont beaucoup se satisfont.
Éditions Sillage 2021, 76 pages à dévorer d'urgence !
Traduction Martial Doré
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (4)
12/07/2021
Mrs Caliban ...en poche
"Il était toujours d'une politesse scrupuleuse. Maintenant qu'elle connaissait les méthodes brutales avec lesquelles on lui avait inculqué les bonnes manières à l’institut, ces petites marques de civilité lui paraissaient aussi poignantes que s'il s'agissait de cicatrices sur son corps."
Dorothy a perdu son enfant, son chien et son mariage est en train de sombrer.
Qu'est ce qui peut bien la sauver ?
Un monstre, répond Rachel Ingalls dans cet époustouflant roman de 138 pages où , sous des airs policés, elle dézingue à tout va la société américaine, son hypocrisie, sa duplicité , ses médecins qui entendent traiter les dépressions féminines à grands coups de petites pilules .
Il est aussi question du désir féminin, de l'altérité et ce n'est pas un hasard si la seule personne à comprendre Dorothy est le jardinier hispanique et écolo avant l'heure.
Un roman féministe et plein d'humour où l’héroïne porte un foulard pour protéger ses cheveux des odeurs de cuisine mais se donne avec un très grand naturel à un monstre vert qui adore faire le ménage . Dévoré en une bouchée. Traduction aux petits oignons de Céline Leroy.
Une écrivaine à (re) découvrir de toute urgence ! 10/18 2021
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : rachel ingalls
07/07/2021
15 ans déjà !
Le temps a filé, la motivation parfois aussi, l'énergie, mais bon, on verra !
Merci pour vos commentaires, votre fidélité et ...vos idées de lectures qui font grimper ma Pal !
08:54 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (20)
03/07/2021
Je préfère les génies aux abrutis
Selon ses dires, elle n'a eu qu'une couverture de magazine (celle de Télérama) mais Anémone, même à la fin de sa vie a toujours suscité un intérêt bienveillant de la part du public. Que ce soit pour ses rôles dans des comédies à succès ou dans des rôles plus dramatiques.
Pas du tout grisée par le succès, cette rebelle dès le plus jeune âge a bientôt pris es distances avec une profession dont les aspects négatifs lui pesaient trop, métier qui lui reprochait par ailleurs son franc-parler et ses prises de position en faveur de l'écologie.
Ces entretiens réalisés à lafin de sa vie avec Laurent Brémond lui auront permis de faire le point et de livrer ses vérités. On est heureux de la retrouver telle qu'en elle-même.
Merci à l'éditeur et à Babelio.
Robert Laffont 2021.
06:00 Publié dans Document | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : anénome, laurent brémond
02/07/2021
Mes 18 exils
"J'étais donc une française en mode-gruyère , avec des trous qui prenaient plus de place que la masse de fromage. L'histoire d'une vie n'est-elle pas remplie de lacunes, d'ignorance, d'insuffisance , d'humiliation, de vide ? "
Quel plaisir de retrouver Susie Morgenstern dans ces 18 exils qui pour certains sont prévisibles, au vu de son itinéraire et d'autres plus surprenants.
Susie, comme à son habitude, s'y livre à la fois avec beaucoup de franchise et de délicatesse, n'hésitant pas à évoquer des thèmes comme la masturbation ou le désir sexuel chez les femmes âgées. Elle y évoque aussi la maladie et sa manière , très souriante, d'y faire face alors qu'à l'intérieur l'angoisse rôde.
Éternelle optimiste en apparence, elle égraine néanmoins les regrets de sa vie et envisage même l'organisation de son enterrement. car le dernier exil n'est-il pas la mort ?
Un livre facile à lire mais bien moins léger qu'il y paraît.
L'iconoclaste 2021
06:00 Publié dans Autobiographie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : susie morgenstern
01/07/2021
L'été de la sorcière
"Son entraînement pour devenir sorcière était bien différent de ce qu'elle avait cru au début, mais tout était nouveau pour elle et amusant malgré tout. "
L'annonce de la mort de sa grand-mère, d'origine anglaise mais totalement intégrée à la culture japonaise, est pour la jeune Mai l'occasion de revenir sur ce séjour qu'elle avait effectué deux ans auparavant auprès de cette femme atypique, un peu sorcière selon les dires de la mère de la jeune fille.
Ce n'était pas une époque facile pour Mai, trop angoissée pour continuer à suivre ses cours au collège. Mais sa grand-mère avait su l'apaiser par un rythme de vie régulier au sein d'une nature tout sauf idyllique, où la mort avait autant sa place que la mort.
Grâce à une écriture en apparence simple, mais pas simpliste, des personnages aux caractères bien moins lisses qu'il n'y paraît à première vue, l'autrice réussit un tour de force: évoquer des thèmes puissants tout en apaisant ses lecteurs.trices. Voilà qui relève bien d'un peu de magie et donne bien sûr envie de découvrir d'autres œuvres de Nashiki Kaho.
Picquier 2021, traduit du japonais par Déborah Pierret-Watanabe.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : nashiki kaho
29/06/2021
#Pardonsijedérange #NetGalleyFrance
"Enquêter sur sa mort revitaliserait peut-être ma propre existence , et si je pouvais leur communiquer mes découvertes finales, cela fortifierait et faciliterait également l'existence de mes parents adoptifs."
Helen, jeune femme d'origine coréenne, a été adoptée par une famille américaine catholique dans son enfance. Vivant à New-York, loin de la ville de Milwaukee, elle a maintenant la trentaine et a coupé tout lien avec ses parents adoptifs. Pourtant, quand elle apprend le suicide de son frère adoptif, lui aussi d'origine coréenne, elle décide de revenir dans sa maison d'enfance et de découvrir la ou les raisons de cet acte.
Quel roman étrange et dérangeant ! D'abord par le thème abordé, mais aussi par la personnalité de la narratrice, dont on comprend rapidement qu'elle est pour le moins aussi perturbée que les jeunes en réinsertion dont elle est supposée s'occuper.
Le fossé existant entre la rigueur dont elle veut faire preuve et les catastrophes qu'elle déclenche sans même s'en rendre compte font que sans cesse nous devons réajuster notre point de vue sur Helen et sur les relations dénuées d'amour qu'elle entretient avec ses parents.
Les dernières lignes, très fortes, dissipent enfin le malaise et laissent la place aux émotions. Un roman qui passe ou qui casse mais qui mérite qu'on tente l'expérience.
Grasset 2021, Traduit de l’anglais (États-Unis) par Héloïse Esquié.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : patrick cottrell
28/06/2021
L'oasis
"Un véritable jardin de cocagne ! "
Il n'y connaissait pas grand chose en jardinage , mais Simon Hureau a pris le temps d'expérimenter et de faire la part-belle aux insectes, aux oiseaux et de manière plus générale à la nature pour redonner vie à ce qu'on ne pouvait pas encore appeler un jardin mais au mieux un "extérieur" plutôt tristounet et en friche.
Luttant contre ce qu'il appelle le béton vert , comprendre ces haies uniformes et sans vie de thuyas et autres cotonéasters, il observe, part des plantes qu'il trouve sur place, récupère, échange et peu à peu la vie revient, créant ainsi l'oasis du titre.
J'ai particulièrement apprécie la non-lutte contre les insectes, l'envie de partager les fruits de son labeur avec les oiseaux et autres animaux peuplant ce mini-éden. Pas de lutte acharnée, pas de volonté de maîtriser la nature, juste l'envie de s'y accorder.
Les magnifiques illustrations de papillons, d’insectes et de manière plus générale du jardin sont un enchantement dont on ne se lasse pas . Et zou, sur l’étagère des indispensables.
06:00 Publié dans BD, l'étagère des indispensables, roman graphique | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : simon hureau
19/06/2021
La vie en rose...en poche
"La scène a la beauté virile d'un clip de Michel Sardou, la profondeur de champ d'un film de Luc besson et la sauvage détermination d'un texte de Didier Barbelivien."
Ses parents partis en Polynésie, Rose se trouve en charge de ses frères et sœurs, cette famille qu'elle qualifie elle même de "dysfontionnante" . Famille qui va bientôt s'agrandir car la jeune femme se découvre bientôt enceinte des œuvres du lieutenant Personne avec qui elle s'est installée. Cette férue de Cervantès, Caldwell et la Boétie, arborant des tee-shirts Metallica va aussi se trouver au cœur d'un maelstrom d’émotions et d'aventures en tous genres dans lesquelles sont impliqués les membres sa drôle de famille, sans compter un tueur en série qui sévit dans le lycée de la ville.
Multipliant les intrigues en apparence accessoires, Marin Ledun réussit le pari de tout tirer en clair et d'harmoniser cet apparent chaos farfelu et plein d'humour. Les vacheries fusent : " - Mon dieu que vous êtes grosse, ma pauvre fille!
Je l'adore déjà."
Les références littéraires se ramassent à la pelle (et les Listes à Lire augmentent à vue d’œil), et même si l'identité de l'assassin n'est pas difficile à trouver, l’essentiel est de passer un excellent moment de détente avec ce polar enlevé et plein d'humour. Mission accomplie et on en redemande !
Ce roman est la suite de Salut à toi ô mon frère (clic) et il vaut mieux les lire à la suite, oui.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marin ledun