13/03/2009
"Que voulez-vous, on s'attache à toute créature vivante au secours de laquelle on s'est portée."
Parfois déroutantes , souvent pleines d'un humour subtil, les nouvelle du recueil de Lydia Davis, Kafka aux fourneaux ,analysent en profondeur des situations du quotidien , apparemment banales. Mais l'oeil exercé que l'auteure porte sur chacune de ces situations est si aiguisé qu'il en donne parfois le tournis. Ainsi le narrateur de la nouvelle qui donne son titre au recueil se torture-t-il mentalement afin de réussir La soirée avec une jeune femme : "Certains homme s se battent à Marathon, d'autres dans leur cuisine."
Des situations embarrassantes sont passées au crible. Ainsi dans "Ces vents qui passent suivons-nous le raisonnement alambiqué d e la narratrice qui se demande qui a lâché un pet et cherche le moyen de dissiper la gêne si gêne il y a, quitte à accuser le chien, qui après tout est peut être le responsable...Beaucoup de narrateurs s'interrogent ainis scrupuleusement à propos de situations dérisoires et donc décalées.
Parfois très courtes, j'y ai alors retrouvé l'esprit d'un Jules Renard, ces nouvelles dissèquent avec enthousiasme nos luttes dérisoires pour trouver un certain équilibre sans cesse remis en question par la vie.Une Vieille dame lutte ainsi contre l'entropie et la destruction progressive de sa maison en un paragraphe magistral.
Flirtant parfois avec la fantastique "ces étrangers dans la maison", ces nouvelles nous montrent ainsi l'envers de nos vies , ce que nous cachons soigneusement sous une apparence sereine. ça carbure à toute allure, ça gamberge , on adhère totalement ou on passe à côté. Je suis entrée avec enthousiasme dans cet univers décapé et décapant !
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : lydia davis, kafka aux fourneaux, humour, et que je me mette la rate au court-bouillon
12/03/2009
schtroumpf grognon : the end ! (ouf !)
De temps en temps, ça fait du bien de se faire taper (gentiment) sur les doigts, de vérifier le sens ou l'utilisation fautive ou non d'un mot. Quand en plus, Le Répertoire des délicatesses du français contemporain paraît dans la collection dirigée par Philippe Delerm""le goût des mots", on se régale d'avance , en bon gourmand des mots que l'on est.
Mais d'emblée, la mention , en exergue ,que "Beaucoup des phrases "fautives" donnée en exemple dans ce livre proviennent du journal Le Monde, du Nouvel Observateur ou de France Culture", media connus pour leur grand sens de l'humour, aurait dû me mettre à puce à l'oreille : on n'est pas ici pour s'amuser !
Il ne s'agit pas ici de remettre en question le sérieux et la qualité de ces articles, loin s'en faut , mais j'aurais vraiment apprécié un peu moins de rigidité dans le jugement. Comme auraient dit mes élèves africains, je trouve Renaud Camus trop "cintré" dans sa manière de s'exprimer. A le lire , on a l'impression de retrouver le maître d'école qui martyrisait ses élèves, sanglé dans sa blouse grise, arpentant la classe à grandes enjambées. Ce qui n'est pas, avouons-le bien agréable !
Ce livre est en fait la réédition de Répertoire des délicatesses du français contemporain, paru en 2000 aux éditions POL.
Ceci explique peut être cela...
06:00 Publié dans l'amour des mots, très utiles! | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : répertoire des délicatesses du français contemporain, renaud camus, ça rigole pas, c'est rien de le dire...
11/03/2009
Schtroumph grognon, le retour...#2
Un recueil de nouvelles écrites par Colas Gutman,Florence Seyvos,Ellen Willer, Xavier-Laurent Petit et Valérie Zénatti, voilà qui était alléchant et dès que je l'ai vu en médiathèque, hop, il était pour moi ! J'espérais déjà y dénicher un texte susceptible d'intéresser mes élèves mais...rien n'a trouvé grâce à mes yeux, tout m'a paru convenu , prévisible et ennuyeux au possible. Mauvaise pioche donc.
L'avis de Bellesahi qui elle avait bien aimé.
Par contre, chez le même éditeur, je vous signale la réédition du livre de Sophie Cherer, Ma Dolto, que je vous recommande chaudement ! Vous ne croyiez tout de même pas vous en tirer à si bon compte !:)
06:00 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : il va y avoir du sport mais moi je reste tranquille
10/03/2009
Schtroumph grognon, le retour...#1
Après avoir adoré l'usure des jours (billet ici) je me suis précipitée sur un roman réédité car indisponible depuis longtemps et présenté comme étant"l'édition définitive",à savoir La démangeaison.
Las , j'aurais mieux fait de m'abstenir car je suis restée totalement en dehors de cette histoire d'une femme victime d'une maladie chronique et sans cause qui la force à se gratter jour et nuit tout le corps sans relâche. La 4 ème couverture annonçait que le lecteur ne pourrait s'empêcher de terminer sa lecture " en se frottant l'avant-bras, la paume, la joue." mais rien. De marbre je suis restée alors que Pars vite et reviens tard de Fred Vargas, m'avait obligée à prendre dade-dare une douche, persuadée que j'étais d'être dévorée par des puces.
Trêve de plaisanterie, je n'ai retrouvé ici ni l'intensité, ni le style du dernier texte de Lorette Nobécourt et les récriminations violentes de la narratrice quant au manque d'amour et d'attentions dont elle aurait souffert enfant m'ont plutôt fait soupiré. J'ai cherché en vain une structure, les répétitions du mot "couenne" pour désigner sa peau m'ont vite lassée et j'ai refermé ce roman abasourdie par cette violence verbale mais aussi déçue.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : la démangeaison, lorette nobécourt
09/03/2009
"Femme soigneuse, bonne jardinière, j'élaguais les rameaux porteurs du doute."
Cela commence de manière bien proprette, bien lisse, Pearlie, Holland, un mariage heureux un enfant , une vie bien rangée . mais comme le répète la narratrice, l'heureuse épouse : "On est seulement nés au mauvais moment.", comprendre dans les années 50 , aux Etats-Unis, dans une société marquée par la guerre de Corée, la ségrégation raciale et le maccarthysme.
Pearlie aspire au repos mais l'irruption de Charles Drumer dans leur vie de couple risque de tout faire voler en éclats.
L'histoire d'un mariage est un roman qui multiplie les surprises faites au lecteur, en se jouant de ses a priori. Le thème lui aussi va se révéler surprenant car la narratrice va se rendre compte qu'elle écrit -en creux- l'histoire d'une guerre, sans récits de combats, mais pas sans violence, une violence larvée et qui prend des formes multiples.
Fiction et réalité se mêlent en une troublante mise en abîme , "percevoir sa vie comme un roman qu'on a écrit et auquel on a cru." et si Andrew Sean Greer revient sur le thème classique "Nous en connaissons pas vraiment ceux que nous aimons", il l'aborde d'une manière originale même si le récit perd un peu de sa vigueur dans la dernière partie. le style est agréable , même si , à force d'avoir été induit en erreur, le lecteur en vient à s'inquiéter à chaque rétention d'information : Nouveau chausse-trappe ou pas ?
Un grand merci à Cuné pour l'envoi !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : andrew sean greer, l'histoire d'un mariage
08/03/2009
un livre qui ne sent pas la naphtaline...
Dans sa préface, l'écrivaine Régine Deforges souligne avec force la part congrue que les anthologies ont toujours réservé aux femmes.*
Ces Poèmes de femmes qu'elle a rassemblés ne visent pas l'exaustivité mais veulent "donner à aimer des poètes qu'[elle] apprécie" et dont beaucoup nous sont totalement inconnues , victimes d'un double ostracisme : ce sont des poètes et en plus des femmes.
Oui, Régine Deforges est féministe et se revendique comme telle, même si cela est passé de mode aux yeux de certains. Pour autant les textes qu'elle offre à notre lecture ne sont pas forcément militants, ils se révèlent éclectiques, tant par leurs thèmes que par leur écriture.
Ainsi s'ouvre à nos yeux tout un pan de la poésie ancienne mais surtout contemporaine . J'ai pu y faire de très belles rencontres : Louise Herlin, Odile Caradec,ou Claire Boitel, pour n'en citer que quelques-unes.
Pour célébrer tout à la fois la journée internationale de la femme et le printemps des poètes.
Régine Deforges, Poèmes de femmes, le cherche midi éditeur.
* On peut en dire tout autant des émissions littéraires à la télévision, enchaînant sans relâche des plateaux entièrement masculins,et, de loin en loin, un plateau totalement féminisé. Exception notable : Michel Field, dont l'émisson tardive hélas, s'avère un peu plus équilibrée...
06:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : régine deforges, poèmes de femmes
07/03/2009
Vient de sortir en poche...
Billet ici!
06:00 Publié dans Humour | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : commnent lui dire adieu, cécile slanka, ça peut toujours servir...
06/03/2009
"Ma phrase est un peu ampoulée, c'est l'intelligence qui veut ça."
Certes, il existe déjà toute une flopée de recueils de lettres à vocation humoristique mais Les belles lettres du professeur Rollin valent surtout par leur humour pince-sans -rire, leur absurde qui part en roue libre et leur digressions cultivées , instructives et bien souvent hilarantes!
Le lecteur fait ainsi le grand écart entre une "Lettre au pape pour exprimer des doutes sérieux quant à l'existence de Dieu" et une "Lettre à une adolescente à une autre" plus vraie que nature." S'avèreront aussi fort utiles, car le professeur Rollin veille à envisager toutes les circonstances de la vie quotidienne , celle adressée aux dirigeants d'un pays exportateur de pétrole et la "Lettre d'excuse à un gardien d'immeuble que l'on aura( un peu imprudemment) traité de "vieux phacochère répugnant"".
Au passage, le professeur Rollin nous gratifie du calendrier rollinien, peu usité mais fort utile qui commence à "rentrôse", pour se terminer par "vacançol" en passant par , entre autres," crêpor", que nous venons de quitter.
Ferdi et moi lui sommes aussi redevables d'une belle crise de fou rire grâce à la mention de la collection de mots du chanteur Francis Lalanne qui, enfant, avait marqué dans son carnet de trésors linguistiques, à la lettre Z , le mot "zouriche", tout droit venu de la chanson d'Enrico Macias, "Les gens du Nord"...
Un petit régal pour les jours tristouilles et pour les amoureux des mots !
Vient de sortir dans la collection Points-Seuil .
Les paroles c'est ici : "Et les péniches..."
06:01 Publié dans Humour | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : les belles lettres du professeur rollin, françois rollin, humour, calendrier rollinien, va donc hé pauvre zouriche!
05/03/2009
"Le margouillat qui connaît tous les secrets d'une concession finit par devenir trop bavard."
Dans un pays africain imaginaire (sorte de condensé de différents régimes et de leurs modes particuliers de fonctionnement), le secrétaire nationale du parti unique est la victime d'un attentat. l'inspecteur Colombo et son adjoint Sheriff se lancent aussitôt dans une enquête qui brasse joyeusement polititiens vérexs, prostituées, clandestins exploités dans une mine de diamants officiellement fermée, sans oublier un noce de Blancs usés par le soleil africain et quelques crocodiles affamés...
ça tire dans tous les coins, ça explose, ça tabasse allègrement, on pense parfois à "Fantasia chez les ploucs", tandis que Colombo, en digne émule de son homonyme, affronte avec panache les puissants qui tentent de se mettre en travers du chemin de la vérité.
Sous couvert d'une comédie déjantée,Alain Brezault nous convie avec sa Noce chez les blancs cassés à un portrait haut en couleurs et plein de verve de l'Afrique des années 80. J'y ai retrouvé avec plaisir le vocabulaire et la syntaxe si particuliers du français d'Afrique et je me suis régalée avec un récit qui ne s'embarrasse pas de psychologie mais où les péripéties se succèdent à un train d'enfer!
Alain Brezault, la noce des Blancs cassés.Fayard noir, 266 pages trépidantes !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : la noce des blancs cassés, alain brezault, humour, afrique rime avec fric
04/03/2009
Comment combiner gourmandise et amour des livres...
Attention ce livre est dangereux! Non seulement il va vous donner envie de vous précipiter dans votre cuisine mais en plus il vous fera faire un détour par votre librairie préférée !
En effet, Claude Deloffre, en grande collectionneuse de livres de cuisine qu'elle est nous présente ses petits larcins culinaires , comprendre ses recettes préférées, piochées dans un éventail d'auteurs très large allant de Jacky, le copain de Dorothée, à Pierre Hermé le célèbre pâtissier, le tout additionné de son petit plus perso.
J'y ai découvert, entre autres, qu'il existait un très chic Mon chien fait recettes, d'où Claude Deloffre a extrait des coquillettes au foie gras, recette qu'elle a servie lors de son mariage ! J'y ai retrouvé aussi un livre que j'avais feuilleté il y a bien longtemps: La cuisine est un jeu d'enfants de Michel Oliver, premier recueil de cuisine pour bien des gens, Claude Deloffre nous assure d'ailleurs utiliser toujours certaines des techniques qui y sont présentées !
Ce livre est aussi un joyeux melting-pot de recettes glanées autour du monde, de gourmandises venues de l'enfance(ah les tartines aux fraises!) ou témoignant des préférences acidulées de l'auteure qui n'envisage pas une journée sans citron.
D'habitude, le seul plaisir des livres de cuisine réside dans leur iconographie, ici elle est d'ailleurs très réussie, mais le texte reste bêtement utilitaire . Dans Petits larcins culinaires on sent vraiment la personnalité de l'auteure qui nous livre anecdotes et astuces, en toute amitié et l'on n'a qu'une envie : commencer, si ce n'est déjà fait ,une collection de livres...de cuisine !
Dans la même collection, j'avais aussi aimé Petits bouquets de cuisine ( billet).
06:05 Publié dans Gourmandises, très utiles! | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : petits larcins culinaires, balade dans ma bibliothèque idéale, claude deloffre, petit bonheur