19/09/2011
La femme et l'ours
"Dès que je sais si c'est un teckel ou un tueur, je lui apprends la politesse."
Bix, le narrateur, donné comme double de l'auteur, se tient loin des bistrots de son jeune temps, (d'ailleurs il sort très peu de chez lui ) entre une femme névrosée souvent sur le point d'exploser et un enfant très sage qui sait mieux que son père affronter les sautes d'humeur féminines. Rien de bien folichon donc. Une dispute conjugale va mettre le feu aux poudres et faire retomber Bix dans ses travers. Commence alors une sorte de descente quasi aux enfers, où l'épopée de Bix va prendre comme points de repère une histoire incroyable arrivée à un SDF de sa connaissance (racontée dans un premier chapitre qu'il vaut mieux passer) et une légende pyrénéenne mettant en scène le fruit des amours d' une femme et un ours. Bix suivra-t-il la même trajectoire que le clochard ou sera-til aussi valeureux que le héros du conte ? Les repères sont pour le moins étranges en tout cas...
Les noms évocateurs de ses compagnes, rencontrées au fil des jours ,Milka Beauvisage (idiote au corps sublime) et Pompe Tout (échangiste insatiable),donnent le ton. Le narrateur est un libidineux qui perd de sa drôlerie sous les flots de whisky et de bière qu'il ne cesse d'ingurgiter. On s'englue peu à peu dans ce récit qui perd toute drôlerie (et pourtant le début est un pur régal !), on est sur le point de baîlller même, bref on s'ennuie vaguement. La fin est télescopée (on se demande bien ce que vient faire là cette touche de thriller) , on patauge dans le graveleux, on frôle le pathos, bref on mélange un peu toutes sortes de tonalités pour terminer de manière assez plate. Dommage.
La femme et l'ours, Philippe Jaenada , Grasset 2011,311 pages qui partent en eau de vaisselle.
06:00 Publié dans je ne regrette pas de les avoir juste empruntés, rentrée 2011, romans français | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : philippe jaenada, schtroumpf grognon le retour
18/09/2011
Papier recyclés 1/2
Bauchette possède un univers bien à elle, composé de livres bien sûr, mais aussi de papiers qu'elle plie de manière à la fois poétique et élégante. Ses photographies sont sobres , pleines de douceur et j'aime aller les admirer.
Comme elle est aussi très méticuleuse, Bauchette a concoté un superbe écrin, raffiné dans les moindres détails (ah cette étiquette !) pour que ses réalisations voyagent confortablement. Elle sont arrivée en parfait état !
Merci Bauchette pour cette attention qui a ragaillardi mon p'tit coeur tout mou !
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (4)
Papier recyclés 2/2
05:55 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (5)
17/09/2011
Hiver...en poche
"C'est toujours le désir qui tue."
Sacrifice en hommage aux dieux vikings ou meurtre commis par un esprit particulièrement tordu ? Seul le cadavre nu, obèse et gelé se balançant à une branche de chêne pourrait répondre. Mais il se contentera de commenter l'évolution de l'enquête menée par Malin Fors , inspectrice de police.Malin qui a fort à faire avec son boulot prenant, ses amours en pointillés et surtout son adolescente de fille qui se lance dans sa vie amoureuse.
Affrontant le froid d'un hiver particulièrement rigoureux, un clan familial retors, Malin Fors démêlera cette "logique absurde des sentiments." Pour autant les mystères ne seront pas tous levés, juste de quoi attendre avec impatience le prochain volume de cette série "où chaque titre est articulé à une saison."
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : mons kallentoft
16/09/2011
L'antarctique...en poche
"Les gens ne comprennent pas, mais il faut regarder le pire en face pour être paré contre tout."
Quinze nouvelles aux tonalités très différentes constituent la mosaïque de L'Antarctique. La plus troublante étant sans conteste la première qui donne son titre au recueil et plonge abruptement le lecteur dans une atmosphère tour à tour chaleureuse, sensuelle et...glaciale."Chaque fois que la femme heureuse en ménage partait, elle se demandait comment ce serait de coucher avec un autre homme."Évidemment, elle va essayer...
Cette détermination, ce caractère bien trempé caché sous des dehors lisses ou juvéniles, les héroïnes de Claire Keegan, même plongées dans des situations extrêmes ou oppressantes depuis des années, savent l'exercer pour se préserver et couper net.
Chacun se débrouille vaille que vaille pour affronter l'adversité, affronter la folie d'une mère , ou d'une épouse, la jalousie d'une soeur...
Il suffit parfois de peu de choses: refuser de fermer une barrière,accepter de se lancer sur un grand toboggan, lutter ensemble contre une armée de cafards...
L'humour est également présent, par petites touches, dans "Drôle de prénom pour un garçon" par exemple. Il désamorce la tension dans un couple et permet d'envisager une situation rabâchée sous un angle totalement neuf et décalé.
Claire Keegan n'est jamais aussi à l'aise que quand elle observe les tensions familiales , soulignant au passage de petits détails qui seront scrutés et interprétés comme "Une paire rouge à hauts talons pour les embrouiller" ou une marque sur le poignet d'un enfant...
Chaque nouvelle constitue un univers à part entière,dense et lumineux, en parfait équilibre, et ces textes, ni trop longs, ni trop courts, ne créent jamais de frustration mais laissent souvent le lecteur pensif et envoûté...
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : claire keegan
15/09/2011
Petit éloge des amoureux du silence
"On traite de mal embouchés ceux qui détestent le bruit."
Hourvari, tapage, aboiements , marteaux-piqueurs en rafale, sifflotement incessant d'un voisin, voici quelques-uns des bruits contre lesquels s'insurgent Jean-Michel Delacomptée. Tous ces bruits qui pourrissent la vie de ceux qui les subissent à longueur de temps , "une cruauté qui jouit d'une impunité scandaleuse" selon lui. Car si les lois existent bel et bien, les autorités publiques mettent bien peu d'énergie et de moyens à les faire appliquer...
L'auteur remet cependant en perspective ce bruit qu'il fustige , le bruit d'autrefois n'est pas celui d'aujourd'hui et il varie aussi suivant les cultures.
Il n'en reste pas moins que, malgré la langue châtiée, ces nombreuses anecdotes manquent un peu de liant et que le titre est un peu trompeur : plus qu'un éloge des amoureux du silence, il s'agit plutôt d'une diatribe contre les méfaits du bruit.
06:00 Publié dans Je l'ai lu ! | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jean-michel delacomptée
14/09/2011
Premier bilan avant l'apocalypse.
Beigbeider l'annonce d'emblée dans son, je cite, "making of", après avoir commenté la liste des 50 livres préférés des français, il a eu envie d'établir "un autre "hit parade" du dernier siècle" plus subjectif, injuste, bancal, intime" et ce avant que la dématérialisation du livre (l'apocalypse du titre) ne soit advenue , dans l'indifférence quasi générale.
Ses critères de sélection sont pour le moinsprovocateurs et un tantinet acides : 1/ Tronche de l'auteur (attitude ou manière de s'habiller). 8/ snobisme, arrogance mais aussi présence d'aphorismes qui tuent,un point si j'ai eu envie de jeter le bouquin par la fenêtre. D'autres critères sont néanmoins plus classiques.
Quels sont donc les goûts de Beigbeider en matière de littérature ? On peut déjà établir qu'il préfère les écrivains aux écrivaines (très peu de femmes présentes et encore moins de contemporaines), les oiseaux de nuit urbains connus des happy few (l'occasion pour nous de (re)découvrir Guillaume Dustan ou Alain Pacadis), et porte aux nues Brest Easton Ellis, le grand vainqueur de ce hit parade littéraire .
Comme précédemment Beigbeider se livre en creux mais il fait aussi son show et ce côté cabotin peut fatiguer à la longue.
On lui reconnaîtra néanmoins des goûts éclectiques et la capacité de "vendre" ses chouchous. Une occasion supplémentaire de faire grandir nos listes à lire ou de s'énerver en constatant la présence de certains "écrivains" qui ne furent que feux de paille médiatiques...
Grasset 2011.423 pages (à attendre en poche? )
06:00 Publié dans Je l'ai lu !, rentrée 2011 | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : frédéric beigbeider
13/09/2011
Le diable de Milan
"-C'est la vieille question: qu'est-ce qu'on élimine, les symptômes ou les causes ?
- Ou les auteurs ? "
Une femme, Sonia, victime d'hallucinations depuis un "bad trip", échappe à un mari charmeur mais brutal. Elle se réfugie dans un grand hôtel des Alpes suisses où elle pourra exercer son métier de physiothérapeuthe.
Du calme, elle ne veut que du calme , afin de se reconstruire. C'est sans compter sur une série de faits étranges qui semblent corroborer une sinistre prédiction, celle du Diable de Milan.
Climat étouffant, personnages quasi isolés dans cette station où il pleut en continu, l'angoisse monte , à peine troublée par les pointes d'humour acariatre d'une vieille cliente exigeante qui balance des horreurs avec jubilation.
Avec ce personnage de femme complexe et plus fort qu'il n'y paraît de prime abord, Martin Suter est ici à son sommet ! Une grande économie de moyens pour une efficacité maximum, des rebondissements et des retournements de situation parfaitements huilés qui font battre le coeur du lecteur !
Le diable de Milan, Martin Suter, traduit de l'allemand par Olivier Mannoni Points seuil , 311 pages scotchantes !
Mon préféré de cet auteur avec La face cachée de la lune !
06:00 Publié dans romans suisses | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : martin suter
12/09/2011
Le premier été
"à partir de cet instant, je deviens sale et ignoble, je deviens une personne normale, je bascule du bon côté et je ne me le pardonnerai jamais."
Vider la demeure des grands-parents décédés, c'est aussi pour Catherine l'occasion de se rappeler un été particulier, celui de ses seize ans, d'évoquer un souvenir dont elle a honte. Un souvenir qu'elle n'a jamais partagé, même pas avec sa soeur aînée.
Commencé comme un évocation plutôt classique -la petite soeur qui se sent toujours déplacée par rapport à son aînée toujours en harmonie avec le monde , avec les autres-le roman prend bientôt une tournure nettement plus sensuelle et plus lourde de sens.
La description de l'éveil de la sexualité et de la sensualité est décrite d'une manière parfaite, à la fois non édulcorée et respectueuse. On vit cet été-charnière bruissant de chansons et d'insectes, étouffant, on est surpris par la révélation de la culpabilité possible de l'héroïne, ce qu'elle porte en elle et qui, on le devine à demi-mots, l'empêche d'aller de l'avant. La cruauté qui était de mise pour se faire accepter devient ainsi fardeau...
Un roman sensible et puissant qui confirme tout le talent et la sensibilité d'Anne Percin. à découvrir absolument.
163 pages , dont les dernières m'ont serré la gorge et mis la larme à l'oeil. Rouergue 2011.
06:00 Publié dans rentrée 2011, romans français | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : anne percin
10/09/2011
Si peu d'endroits confortables ...en poche
"-Oui, j'aime bien l'hiver. C'est une saison où on peut se blottir contre les gens sans qu'ils te demandent pourquoi. Tu te blottis parce que tu as froid et les gens n'ont pas besoin de savoir que le courant d'air est à l'intérieur."
Si peu d'endroits confortables, et tellement de manques, de douleurs, de tristesses. Paris n'est pas la Ville-Lumière où Joss espérait peindre, s'exilant loin de chez lui. Paris n'est que la ville triste et grise où Hannah erre en écrivant à la fille qu'elle aime et qui est partie, dans un carnet bleu qui déborde parfois sur les tables mais aussi sur tous les endroits où Hannah va laisser ce leit-motiv donnant son titre au roman , leit-motiv qu'elle ne va bientôt plus maîtriser.
Quand Hannah et Joss se rencontrent , chacun va essayer de réenchanter le monde pour l'autre mais leurs deux solitudes sauront-elles annuler l'absence de celle dont nous ne connaîtrons jamais le prénom ?
Alternant les points de vue, sécrétant une poésie à la fois douce et mélancolique, Si peu d'endroits confortables est un de ces textes un peu magique, qu'il faut prendre le temps de savourer pour se glisser dans son atmosphère si particulière. Une écriture qui prend le temps de réinventer le monde .
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : fanny salmeron