02/07/2012
J'habite dans la télévision
"ça n'a rien de plaisant, de glamour, ni de drôle. pour personne, ni pour moi. Mais quoi qu'il puisse en ressortir, quoi que ça puisse donner comme trace, je sais qu'il se passe quelque chose en moi, pour de vrai Quelque chose comme mon crâne qui se remplit tous les jours d'oiseaux morts qui n'y étaient nullement avant que ça commence. Quelque chose comme une forme de réalité imposée depuis longtemps à des millions de personnes. ça ne sert peut être à rien , mais je dois persévérer. ressentir mon cerveau qui devient disponible, neurone à neurone disponible, je sais que ça n'a pas de sens pour beaucoup et pour vous. C'est juste un témoignage éperdu comme tant d'autres, sans valur ni effet. Mais c'est un petit bout de vie ébranlée par une phrase* en juillet 2004, qui a voulu comprendre comment on la mangeait"
* Ce que nous vendons à Coca Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible, phrase prononcée par Patrick Le Lay,PDG de TF1. Cette phrase sera le point de départ d'une expérience menée par la romancière Chloé Delaume. 22 mois durant , toute la journée, elle s'est soumise au flux de messages publicitaires, de programmes de téléréalité, enregistrant ses mutations corporelles et celles de son cerveau. Ce pourrait être uniquement une tentative sociologique, voire scientifique, mais c'est surtout une expérience sur le langage comme le montre l'extrait ci-dessus.
Le vocabulaire, très précis, n'est pas toujours facile, les ruptures de tons sont fréquentes et le lecteur se perd parfois en chemin mais cela n'en reste pas moins un texte qui fait réagir et s'interroger , tant par le thème que par l'écriture. Un texte qui m'a donné envie de poursuivre ma découverte de cette auteure.
Merci Sébastien pour le prêt !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : chloé delaume
01/07/2012
Aujourd'hui , c'était musée...
...avec l'expo Babel, aux beaux Arts de Lille, expo dont avait parlé Brize.
Une pléthore d'oeuvres différentes qui réinterprètent ce mythe .Évidemment, les livres addicts seront particulièrement attirés par l'oeuvre participative de Jakob Gautel qui construit une tour héicoïdale de livres , sur quatre mètres de haut. Une oeuvre qui commence ici par l'Aleph De Borges (clic)...
Un coup de coeur aussi entre autres pour les photographies de Eric De Ville, artiste belge (clic).
Nous avons enchaîné avec une expo ludique et sportive : Sports Factory à l'ancienne gare Saint sauveur de Lille (clic), un lieu convivial (et gratuit) où toutes les générations de croisent , s'amusent et se cultivent , le tout avec un esprit bon enfant des plus agréables. Ici l'art n'est pas empesé mais interactif et l'on s'essaie avec bonne humeur à différents sports, sans toujours prendre le temps de lire les explications des installations mais bon, les artistes ne nous en voudront pas !
18:10 Publié dans je l'ai vu ! | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : lille, beaux-arts, gare saint sauveur
30/06/2012
Witch
"C'était une bonne âme honnête que l'intellect n'encombrait pas."
Les offres spéciales de l'été ont ceci de bon qu'elles nous permettent de découvrir des romans vers lesquels on ne serait pas allés spontanément...
Une jeune femme, terroriste internationale et travaillant aussi à son compte, est rentrée en Grande-Bretagne , de manière fort peu discrète. Aussitôt son "plus grand fan" Dominic Elder, reprend du service au sein des services secrets britanniques car un sommet international va alloir lieu à Londres. Quelle sera la victime de celle que personne ne peut décrire avec précision et qui a été surnommée Witch (sorcière )?
Witch de Ian Rankin a été le roman parfait pour cette fin d'année scolaire et les deux neurones qui me restent : un intrigue prenante, de l'humour, un style agréable qui nous porte tranquillement, pas de voyeurisme dans l'expression de la violence , des personnages attachants et une relation complexe unissant la femme fatale et celui qui la traque, que demander de plus?
En prime, le roman ayant été écrit dans les années 90 , on replonge dans un univers dépourvu de téléphones portables, ce qui paraît tout à fait exotique !
L'exotisme apparaît également dans la vision des françaises: Dominique, une jeune femme qui travaille à la DST roule ainsi en 2CV et porte un béret et des gants rouges (? *) en plein mois de juin à Londres !
Bref, un roman classique et agréable qui remplit parfaitement son contrat !
Gratuit pour deux livres de poche achetés en ce moment.
* Tatiana Golovin qui a créé le buzz avec ses gants quand elle commentait Roland Garros aurait-elle lu ce livre ? :)
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : ian rankin
29/06/2012
D'habitude, je zappe les pubs mais là ...
Déniché sur le blog de Katherine Pancol
06:00 Publié dans je l'ai vu ! | Lien permanent | Commentaires (9)
28/06/2012
Les oranges ne sont pas les seuls fruits
"L'incertitude était pour moi ce que l'aardvark* est pour les autres gens."
Paru pour la première fois en 1985 (et adapté pour la Télévision britannique en feuilleton), Les oranges ne sont pas les seuls fruits est la version romanesque de Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?**
Ce roman insiste davantage sur la dimension religieuse du personnage de madame Winterson (si obnubilée par ses pratiques religieuses qu'elle ne se rend pas compte que sa fille adoptive est devenue sourde !) et n'hésitant pas à organiser un exorciste quand elle se rend compte de l'homosexualité de cette dernière.
J'ai nettement préfé l'autobiographie de Jeanette Winterson, qui revient davantage sur sa "libération" grâce à la littérature et relate sa recherche de sa mère biologique.
Merci Sylvie !
*petit fourmilier d'Afrique.
**qui vient d'obtenir le prix Marie-Claire.
Jeanette Winterson à écouter ici.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jeanette winterson
27/06/2012
Le chauffe-eau (épopée)
"Dans un coin sombre du garage, le chauffe-eau existait, impénétrable et muet comme un Moloch stoïque."
Une épopée contemporaine en cinquante -six pages format poche, tel est le défi ,relevé haut la main, par Antoine Martin.
En lice, deux combattants : le chauffe-eau , dont le démon s 'éveille en plusieurs étapes, et un père de famille doté de deux mains gauches , d'une caisse à outils réduite à sa plus brève expression mais prêt à lutter jusqu'au bout :" ...le père hésita très peu avant de se lancer dans l'inégal corps à corps. Y avait pas , ça serait lui ou lui.
Il n'était pas au bout de ses peines."
Vous l'aurez compris les hauts faits dont il sera ici question sont des plus quotidiens et des plus triviaux. Mais Antoine Martin, à coups d'allusions littéraires, de vocabulaire volontairement excessif , tour à tour, familier ou soutenu, crée un décalage des plus efficaces pour faire naître le sourire.
Le style est impeccable, la dérision au rendez-vous et on suit, captivé, les péripéties de ce combat entre le chauffe-eau et l'homme. Promis vous n'ouvrirez plus votre robinet d'eau chaude sans avoir une pensée émue pour cet appareil ! Un délice à s'offrir dans plus tarder !
Le chauffe-eau, Antoine Martin, le Diable Vauvert 2012, 56 pages, 5 euros.
06:00 Publié dans Humour, romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : antoine martin, ah mon dieu quel bonheur d'avoir un mari bricoleur
26/06/2012
L'aérodynamique du porc
"J'aime assez cette sensation d'être rassasié et flapi."
Premier roman de mon chouchou Patrick Gale, L'aérodynamique du porc contient en germe des thèmes qui seront ensuite exploités et enrichis : les relations familiales, la découverte de l'amour homosexuel. Mêlant ici deux intrigues qui finiront par se nouer in extremis, ce roman, parfois un peu maladroit , parfois un peu bavard,fait la part belle à l'espièglerie et à la fantaisie un peu foutraque.
Comme d'habitude un très joli portrait de mère , avec laquelle je me suis trouvée un point commun : "Evelyn dormait la fenêtre ouverte car elle appréciait un lit bien chaud dans une pièce fraîche. Elle ouvrait toujours les rideaux avant de se coucher , de façon à être réveillée par le soleil. Ce matin-là , il se déversait à flots dans la pièce et elle s'éveilla au chant des oiseaux. elle s'habilla en vitesse et s'éclipsa."
Quant au porc du titre, il désigne en argot un policier (une des héroïnes est une jeune policière qui tarde à se reconnaître lesbienne) mais peut être compris de bien d'autres façons. à réserver aux inconditionnels sans doute.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : patrick gale
25/06/2012
Revue de presse
En vrac: une interview de Daniel Pennac et une autre de Delphine de Vigan (qui réalise son premier film cet été) dans Marie-France numéro de juillet-août.
Dans Muze de juillet-août-septembre :- un dossier sur l'Australie,( l'occasion de noter des titres de romans ou de films venus de ce territoire métissé) avec une interview de Sonya Hartnett (clic). - un autre dossier sur les sportives (avec , entre autres, une interview croisée de Joy Sorman et de Maylis de Kerangal , auteures de Femmes et sport). - une enquête sur les sorcières qui nous mène en particulier dans le seul musée qui leur est consacré en France (il se trouve dans le Berry, clin d'oeil à Keisha !)...Une rencontre avec Maryse Condé auteure de Moi, Tituba , Sorcière et avec , dans un tout autre registre Pascal Fioretto "artisan pastichier") qui évoque de manière précise et sans langue de bois "cette critique littéraire de l'intérieur" comme disait Proust. Du coup, son interview m'a donné envie de lire ses recueils de pastiches !
Enfin, pour celles qui auraient envie de se dégourdir les neurones et les doigts, Muze organise un concours d'écriture , rendez-vous ici (en principe) pour les modalités.
06:00 Publié dans Je l'ai lu ! | Lien permanent | Commentaires (5)
23/06/2012
les vacances d'un serial killer...en poche
"Rien que lui et les méduses. Ces bestioles, ça pique, mais au moins ça ne cause pas."
Veules, veilléitaires et vachement humains , tels sont les membres de la famille Destrooper que nous allons suivre en villégiature sur les bords de la Mer du Nord à Blankenberge, en Belgique. Dès le départ les catastrophes s'enchaînent et ils ont tôt fait de perdre en route leur porte-feuille et la grand-mère, "vieille carne" increvable. Mais la mamie n'a rien d'une chiffe molle et elle va bientôt entraîner toute sa petite famille dans une spirale de violence désinhibée et folledingue. Nous sommes ici à la croisée des Bidochon et des Simpson dans une farce qui flirte avec le grand guignol (une main gêne pour fermer un couvercle, adieu la main !). On aime ou on déteste , pas de demi-mesure !
Sur des airs d'Annie Cordy, Nadine Monfils nous entraîne dans une cavalcade effrénée, croquant le détail qui tue (les chaussettes blanches, soigneusement remontées) mais peignant aussi ,entre deux enterrements dans le sable ,une Mer du Nord pleine de poésie. On sent la jubilation de cette écriture qui s'emballe et on sort de là un peu étourdi mais ravi !
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : nadine monfils
22/06/2012
Les sortilèges du Cape Cod...en poche
"Il ne leur faisait pas assez confiance- au monde à elle, à lui-même et à leur belle vie-, ce qui l'amenait à comprendre les choses de travers."
Deux mariages comme autant de bornes entre lesquelles nous suivrons le parcours à la fois géographique (entre côte Est et côte Ouest des Etats-Unis), introspectif et temporel (retours dans le passé)de ce sympathique quinquagénaire, Jack, qui fait le bilan de sa vie , de son mariage qui commence à battre de l'aile) et de ses relations avec ses parents et beaux-parents.
Il apparaît perpétuellement écartelé entre deux visions de la vie , deux emplois (prof de fac ou scénariste) et deux familles (la sienne qu'il fuit et celle de sa femme qu'il snobe consciencieusement). Mais possède-t-il une juste vision des faits ? Il pourrait être exaspérant ce cher Jack mais il est juste humain et ô miracle, il est même capable de reconnaître- du moins in petto -ses torts !
Echappe-t-on jamais aux automatismes familiaux? C'est bien difficile , surtout si comme notre héros on est doté d'une mère à la fort personnalité : "La mère de Griffin était en très grande forme. Si on relevait une de ses vacheries, elle rebondissait sur une autre. Vouloir lui rabattre son caquet revenait à tenter d'enfermer un chat dans un sac : il restait toujours une patte dehors et on n'en sort jamais indemne."
Le roman prend plus son temps dans la seconde partie, la mélancolie pointe le bout de son nez, mais on n'abandonne pas pour autant l'humour vachard, marque de famille des Griffin quoi qu'il lui en coûte de l'admettre, et on en redemande ! La répétition du dîner de mariage est un spectacle à ne pas manquer, de quoi donner des sueurs froides aux futures mariées !
Un roman tendre sans être mièvre, qu'on a du mal à quitter .
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : richard russo