27/06/2024
#Surlîle #NetGalleyFrance !
"-L'île que vous avez dans la tête...Je ne pense pas qu'elle existe. "
Une île galloise (imaginaire mais inspirée de plusieurs îles au large de la Grande-Bretagne et de l'Irlande) en 1938. L'existence est rude pour les pêcheurs et leurs familles. Manod, 18 ans, aux côtés de son père et de sa plus jeune sœur, rêve d'une autre vie sur le continent. Elle est vive, intelligente et sait parler anglais.
La tranquillité insulaire est bientôt rompue par une baleine morte qui s'échoue sur le rivage et l'arrivée de deux ethnologues qui lui feront envisager, non sans cruauté, la possibilité d'un avenir loin de l'île. Au loin, des rumeurs de guerre, mais les îliens se préoccupent surtout de leur survie.
Par petites touches, nous découvrons la beauté de l'île, mais aussi et surtout la rudesse de l'existence des insulaires, rudesse que ne semblent pas vouloir admettre les ethnologues et leur vision biaisée. L'autrice laisse deviner les sentiments de son héroïne et fait confiance aux lecteurs pour combler les ellipses. Roman de formation et d'émancipation, plein de poésie et de délicatesse, Sur l'île génère une sorte de magie dont on sort un peu étourdi et mélancolique. Un grand coup de cœur.
Traduit de l'anglais par Claire Desserey.
JC Lattès 2024.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : elizabeth o'connor
21/06/2024
Les voyageurs du train de 8h05...en poche
"Franchement, si on m'avait dit qu'un jour, je confierais mon avenir à une lesbienne excentrique, je ne l'aurais pas cru ! Mais ça fonctionne plutôt bien, en fait. "
La règle numéro 2 de l'usager du train de banlieue , règle implicite, bien sûr, est de ne jamais adresser la parole aux autres voyageurs. Pourtant, quand un des habitués de la ligne allant de Hampton Court à Londres manque s'étouffer avec un grain de raisin, les interactions vont bien se mettre en place et les identité se dévoiler.
Petit à petit, ce sont les personnalités et les tracas de chacune et chacun qui vont se révéler, faisant de Iona , journaliste spécialisée dans les problèmes personnels, une sorte d'aimant dans le wagon où elle s'installe chaque jour avec sa fidèle, Lulu, bouledogue français.
Roman choral où chaque personnage prend à son tour la parole, Les voyageurs du train de 8h 05 concentre de manière un peu trop systématique des problématiques contemporaines qui vont du harcèlement scolaire à l'emprise. Le microcosme qu'est le train est certes bien exploité mais les situations se règlent beaucoup trop facilement . Et c'est bien dommage car les personnages, Iona en tête, sont pleins d'humanité et croqués à ravir.
Un bon moment de lecture juste un peu trop lisse.
08:10 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : clare pooley
17/06/2024
#VivaMolotov #NetGalleyFrance !
""Le secret c'est de chercher l'équilibre plutôt que la stabilité. " Cette pensée fait écho à sa propre expérience. Désirée réalise qu'elle est arrivée ici pour y construire une vie stable, sécurisante et qu'à la place, elle a trouvé un équilibre dont les ingrédients sont bien différents de ce qu'elle imaginait. "
Quand Désirée, infirmière de formation, revient à Troulou, le village de son enfance, elle ne s’attendait pas à une telle effervescence. Jugez un peu : des élections municipales anticipées ont réveillé tout à la fois les ambitions de certains et les vieilles rancœurs et chacun s'en donne à cœur joie pour essayer d'être élu... Des personnages hauts en couleurs, l'humour et l'énergie des 2 Freds alias Frédérique Martin et Frédérique Le Romancer font que dans un premier temps, on croit s'embarquer dans une plaisante comédie villageoise, mais très vite, on se rend compte que ce qui aurait pu être caricatural est beaucoup plus nuancé et plein d'humanité.
En effet, des thèmes graves sont eux aussi abordés (la dépression post-partum, le deuil, le corps et les désirs des personnes âgées, la politique dans le sens noble du terme, entre autres) et la comédie ne tourne jamais à la pochade. Un grand plaisir de lecture ! Dans la foulée, je me suis procuré le précédent volume : La méthode Molotov.
Éditions Fayard, 2024.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : frédérique martin; frédérique le romancer, les 2 freds
31/05/2024
Merci qui ? Merci mon chien...en poche
Avec tendresse, avec humour, le créateur de la Noiraude (la vache qui a des états d'âme et téléphone régulièrement à son vétérinaire ) rend hommage et remercie les animaux qui ont traversé sa vie, mais aussi tous les animaux en général (à l'exception des mites, mouches, moustiques et autres vecteurs de maladie).
Il fait appel à quelques auteurs (Tesson, Kundera, entre autres) pour appuyer ses propos mais ne tombe jamais dans le sentencieux.
C'est en apparence léger, pas toujours tout à fait exact (Je pense en particulier à la Suisse où en fait depuis 2008, la nouvelle loi sur la protection des animaux mentionne que les cobayes, tortues, lapins ou poissons rouges ne doivent pas vivre seuls , et non pas tous les animaux de compagnie comme il l'indique) mais ne chipotons pas, ne boudons pas notre plaisir et profitons pleinement de ce petit plaisir.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : jean-louis fournier
30/05/2024
Et d'une vie toute animale
"Elle prend conscience de ce qu'un animal domestique doit encaisser, endurer, ce qu'il reçoit du poids des âmes humaines, toutes ces émotions mal rangées qu’il a pour charge de porter , transporter, tout ce qui se loge en lui du dépôt sauvage de nos névroses."
Une femme ,dont la profession est de recueillir les paroles des personnes en fin de vie, a l'occasion d'occuper temporairement un atelier d'artisan sur le causse du Quercy. Elle ne va pas rester longtemps solitaire dans ce lieu désolé car elle recueille un chien errant, bien mal en point.
Commence alors une vie simple, au plus près de la nature et des rares personnes avec qui elle entre en contact, avec délicatesse et intelligence. Mais c’est la nature qui la part belle ici, car la narratrice se montre attentive au plus petit frémissement, au plus petit changement qui intervient dans son environnement et son écriture, lumineuse, est un pur régal.
Un texte apaisant, sous forme de fragments car "Elle pense, avec Cioran, qu'écrire par fragments empêche le texte de subir ou d'exercer un pouvoir", ce qui ne gêne en rien la lecture, bien au contraire.
Un grand coup de cœur ! Et zou, sur l'étagère des indispensables.
Éditions Cambourakis 2024. 206 pages à lire et relire.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : sandrine bourguignon
28/05/2024
#Quandlesfemmesétaientdesoiseaux #NetGalleyFrance !
" Quand nous n'écoutons pas notre intuition, nous abandonnons nos âmes. Nous abandonnons nos âmes car nous craignons que, sinon, les autres ne nous abandonnent. Nous avons été élevées à douter de ce que nous savons, à ignorer et à sous-estimer l'autorité de notre instinct."
A la mort de sa mère, l'autrice ouvre les carnets que celle-ci lui a légués. Or, ils sont vides.Tout au long des cinquante quatre courts chapitres qui constituent ce livre , Terry Tempest Williams va interroger la notion de voix, la sienne, celle de sa mère, la voix de chacun.e . Nos voix sont-elles empêchées ? Est-ce un choix que de se taire ?
Revenant sur des épisodes marquants de son existence, l'autrice nous livre un portrait pointilliste d’elle-même, parfois dérangeant, parfois surprenant et aussi, il faut bien l'avouer, longuet (je pense ici à la manière trop détaillée dont elle revient sur l'âpre lutte juridique et politique menée pour sauvegarder un territoire).
Scandé par le leitmotiv des métaphores désignant les carnets de sa mère , l'autrice mène une réflexion exigeante et intéressante sur la nécessité , ou non, de s'exprimer.
Phébus 2024. Traduit de l'anglais 'E-U) par Gaëlle Cogan.
08:10 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : terry tempest williams
16/05/2024
Je pleure encore la beauté du monde
Quand on parle de préservation, de sauver cette planète, il faut commencer par les prédateurs. Parce que tant qu’on ne les aura pas sauvés eux, on n’aura aucune chance de sauver le reste. »
Moi, je vois leur puissance subtile, leur patience immense et leur beauté incomparable.
Ayant beaucoup aimé le premier roman, Migrations, de cette autrice, je me faisais une joie d'ouvrir celui-ci. Il avait en effet tout pour me plaire: une histoire de réintroduction de loups dans une forêt des Highlands (une pure fiction , apparemment) et j'étais déjà ravie.
Hélas, le défaut que j'avais déjà évoqué comme bémol pour son précédent ouvrage se donne ici libre-cours: le pathos.
On accumule les personnages torturés, les situations prévisibles (voire invraisemblables) et à trop vouloir accumuler les thèmes (violence faites aux femmes, loups accusés de tous les maux, y compris de meurtre sur humains) l'autrice m'a totalement déçue. Dommage.Il n'en reste pas moins qu'on sent ci un véritable amour de la nature et des loups.
Éditions Gaïa 2024. Traduit de l'anglais (Australie) par Marie Chabin.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : charlotte mcconaghy
15/05/2024
Géographie de la peur
"Le pire n'est pas d'être quittée par tous ou par tout le monde. Le pire est de ne pas pouvoir vivre avec soi. "
Maureen, 19 ans souffre d'agoraphobie et de Trouble Anxieux Généralisé. A l'orée de l'âge adulte, alors qu'elle devrait aller à l'université, toute sortie devient une expédition dangereuse car son cerveau la maltraite et lui fait envisager le pire.
Petit à petit, l'incompréhension de ce qui lui arrive réduit le cercle de ses amis et/ou les incite à interpréter son comportement d'une manière totalement inappropriée.
Le roman relate de l'intérieur le ressenti à la fois psychologique, mais aussi physique , et ce de manière très réaliste. L'humour n'est pourtant pas absent car Maureen, mine de rien, alterne entre autodérision et auto-apitoiement.
Un roman qui permet de comprendre une pathologie qu'on aurait trop facilement tendance à prendre à la légère: il/elle n'a qu'à prendre sur soi.
Scripto, Gallimard 2024, 165 pages .
06:01 Publié dans Jeunesse, romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : claire castillon
14/05/2024
Je m'appelle Australie
" Le ton de sa voix provoque une secousse chez elle, quelque chose rompt, une corde usée, une digue, un château de sable, elle ne sait pas ce que c'est , ça se brise et autre chose prend la place, se répand dans son ventre. "
Dix nouvelles composent ce recueil. Dix nouvelles aux tonalités très différentes où des femmes, d'âges différents tentent de trouver leur place dans le monde. En ouverture, il y a cette adolescente qui s'est rebaptisée Australie à qui une sorte de sorcière bienveillante va confier un précieux conseil. Celle dont la fratrie se réunit autour d'un feu de camp pour évoquer, de manière impressionniste, des souvenirs d'enfance, évocation qui vire peu à peu au cauchemar. Celle qui aide sa tante à vider le chalet d'un oncle pour le moins particulier.
A chaque fois, on est saisi par l'écriture de l'autrice, par son acuité,sa capacité à susciter le malaise ou l'émotion de manière apparemment ténue mais diablement efficace.
Zoé Derleyn prête une attention extrême aux détails, détails que l'on retrouve en écho au fil des textes et son écriture , fluide, nous entraîne toujours plus profondément dans des zones inattendues. Un grand et beau coup de cœur. Et zou, sur l'étagère des indispensables.
Éditions du Rouergue 2024, 132 pages à lire et relire.
PS: dans la foulée, j'ai commandé les deux autres livres de cette autrice.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, nouvelles belges | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : zoé derleyn
13/05/2024
Ne jetez pas les sirènes avec l'eau du bain
"J'aimerais tellement, comme disait maman, qu'il pousse dans mon jardin ce que je n'ai pas semé."
Elles sont trois femmes, et un petit garçon, Elliott, sept ans, à se croiser dans une piscine municipale. La piscine comme une parenthèse dans leurs vies, parenthèse appréciée ou non. L'occasion de revenir sur leur enfance, dont Sidonie ne semble pas être sortie, mais aussi sur leurs corps (Laure n'a pas oublié qu'avant elle était dodue) ou leur relation avec leur compagnon (celui de Marion régente la vie familiale).
Rien de bien original ? Peut- être. Mais tout l'art de l'autrice de Du vent dans mes mollets, que nous retrouvons ici avec beaucoup de plaisir est de procéder par petites touches, de ne jamais forcer le trait et de doser au plus juste les émotions, sans oublier quelques traits d'humour dont elle est spécialiste.
Elle donnerait presque envie à ceux qui ,comme Sidonie,envisagent la piscine comme un enfer chloré d'aller y faire un tour. Un très agréable moment de lecture.
Robert Laffont 2024, 198 pages pleines de sensibilité.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : raphaële moussafir