28/05/2011
Zola Jackson
"L'eau n'allait pas manquer, ça non. L'eau croupie, l'eau corrompue, la pourriture."
Août 2005, delta du Mississipi, l'ouragan Katrina s'abat sur la nouvelle-Orléans. Zola Jackson, modeste institutrice à la retraite, refuse de quitter sa maison et organise sa survie et celle de sa chienne, Lady. Elle n'en est pas à sa première tempête et il n'y a pas grand chose qui lui fasse peur. Mais voilà les digues se rompent et l'eau envahit la ville... En attendant les secours, Zola remonte le temps et évoque sa vie et celle de son fils unique et adoré, Caryl.
Alternant passé et présent, dans une construction habile qui amène progressivement des révélations poignantes sur cette femme pugnace et chaleureuse, Gille Leroy brosse aussi le tableau apocalyptique et charnel de cette Nouvelle-Orléans sous les eaux. Il pointe également au passage les insuffisances et les incompétences des autorités de l'époque ainsi que l'exploitation éhontée de la catastrophe par les médias.
Une écriture très juste, un souffle puissant , qui ne verse jamais dans le pathos mais qui m'a mis les larmes aux yeux. Zola Jackson et Lady, je ne les oublierai pas de sitôt !
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : gilles leroy, katrina
27/05/2011
L'amour des Maytree
"Quand même, le nombre de vies qu'on vit !"
Parce que...
-Les romans d'amour, ce n'est vraiment pas ma tasse de thé.
-Ayant beaucoup aimé Pélerinage à Tinker Creek (que l'on pourrait ranger dans la catégorie Nature Writing), a-do-ré En vivant en écrivant (depuis 1997 sur mon étagère des indispensables), qui sont tout sauf des romans , j'appréhendais un peu la lecture de L'amour des Maytree.
Imbécilebête que j'étais ! Je me suis refusé pendant 3 ans un plaisir subtil ! En effet , Annie Dillard est aussi à son aise dans le domaine de l'essai que dans le romanesque.
Sur une trame en apparence toute simple, un couple qui se forme, un enfant qui naît, les amis, le flux et le reflux de l'amour, le passage des ans, Annie Dillard nous peint avec délicatesse la vie même.Ses personnages, dont on a envie d'emboîter le pas , ne se comportent jamais comme on pourrait s'y attendre. La grâce et l'harmonie, malgré les écueils, règnent en maître, tant dans les paysages décrits (ceux du Cape Cod) que dans le récit. Je me suis tout de suite nichée au creux de ce roman lumineux et puissant dont j'ai allègrement corné de nombreuses pages. Un roman qui flirte avec la poésie et enchante la vie.
L'amour des Maytree, Annie Dillard, traduit de l'anglais (Etats-unis) par Pierre-Yves Pétillon, Christian Bourgois 2008, 274 pages qui vont rejoindre vite fait En vivant, en écrivant sur ma "fameuse" étagère des indispensables.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : annie dillard, amour, temps qui passe
26/05/2011
Les yeux au ciel
Pour fêter l'anniversaire du patriarche, toute la famille se réunit en Bretagne dans la vieille maison où autrefois ils passaient leurs vacances. Souvenirs, souvenirs. Mais aussi blessures mal cicatricées , rivalités et alliances d'autrefois , toujours à l'ordre du jour, sans oublier un drame, soigneusement refoulé ,que la nouvelle génération va contribuer à débusquer.
Rien de tel qu'une réunion de famille, quel qu'en soit le prétexte, pour radiographier les relations entre les uns et les autres. Karine Reysset, sur un motif classique , joue ici une jolie partition, sans grain de sable cependant, ce qui rend le tout un peu trop lisse à mon goût.
Lena, jeune mère de famille harassée, tiraillée entre l'amour de ses enfants et la nécessité de souffler un peu reste trop sage dans ses bouffées d 'exaspération. On aimerait qu'elle se lâche un peu plus . Il n'en reste pas moins qu'on passe un très agréable moment avec ce roman.
Les yeux au ciel, Karine Reysset, Editions de l'Olivier, 190 pages pleines de bienveillance.
Merci Antigone !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : karine reysset, fratrie
25/05/2011
Le cortège de la mort
Et pourtant je l'avais attendu des mois à la médiathèque,ce Cortège de la mort ! Toujours emprunté ! Bon signe, non ?
J'avais hâte de savoir si Linley s'était remis du décès de sa femme et si le sergent Havers était toujours aussi mal fringuée et mal embouchée. Bref, j'avais envie de retrouver des personnages-amis , familiers et confortables, de prendre de leurs nouvelles.
Las ! Ils n'ont guère évolué jusqu'à la page 468 où j'ai baissé définitivement les bras. ça ronronne gentiment, le moteur crachote même un peu, on se surprend à feuilleter des pages en espérant un déclic mais non.
L'intrigue ? à part nous faire découvrir un superbe endroit où les poneys paissent en liberté (Elisabeth George aurait-elle été subventionnée par l'office du tourisme de New Forest Hampshire ? En tout cas, le lecteur amateur de verdure n'a qu'une idée: s'y rendre prestissimo ! ), elle m'a plutôt fait bâiller car inutilement tarabiscotée et ne présentant guère d'intérêt. Je n'ai même pas regardé qui était l'assassin, c'est dire !
Le seul intérêt de ce roman est de présenter, en plusieurs parties disséminées dans les 651 pages, aisément répérables car ayant une police de caractères différente, un récit s'inspirant très fortement de l'horrible faits-divers qui avait bouleversé la Grande-Bretagne : celle de ces assassins mineurs qui s'en étaient pris à un très jeune enfant... de quoi vous flanquer des frissons. J'avoue d'ailleurs ne pas avoir réussi à lire la description du meurtre. Le rapport avec l'intrigue principale ? Je l'ignore encore. Peut être E. George voulait-elle présenter un panorama de la société anglaise et des formes de violence qui s'y exercent.
à réserver à ceux qui n'avaient pas lus les précédents romans ?
06:00 Publié dans Lâches abandons, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : elisabeth george, schtroumpf grognon le retour
24/05/2011
Les rillettes de Proust
Si le sous-titre vous promet" 50 conseils pour devenir un écrivain", l'auteur , dans sa préface vous propose même d'obtenir grâce à cet ouvrage le label GRANTECRIVAIN. Rien de moins !
Mais c'est surtout à une promenade attentive et malicieuse que nous convie Thierry Maugenest qui prend un malin plaisir à souligner les bourdes d'auteur par ailleurs reconnus ,mais aussi à nous prouver par l'exemple l'importance de ce qu'il faut faire ou pas. Et les démonstrations sont on ne peut plus probantes !
On ne soulignera jamais assez l'importance du choix des prénoms des héros de roman et la réécriture d'un passage de Madame Bovary ,dont les héros sont respectivement devenus Ricky et Loana, prend tout à coup des accents harlequinesques du plus beau kitsch !
Quant aux Rillettes de Proust , elles donnent un aspect beaucoup plus rustique au texte proustien que la fameuse madeleine !
Un recueil où les profs pourront aussi piocher du réconfort les soirs de grande lassitude : non leurs élèves ne sont pas les seuls à écrire des horreurs syntaxiques: certaines sont même été éditées !
Les rillettes de Proust, Thierry Maugenest, Points, collection les goût des mots, 113 pages pour 5 euros, un petit plaisir à (s') offrir garanti zéro calorie.
06:00 Publié dans Humour, l'amour des mots | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : thierry maugenest, 50 conseils pour devenir un écrivain
23/05/2011
La vie très privée de Mr Sim
"On ne vous donne que l'illusion du choix, c'est tout."
C'est à un double voyage que nous convie Mr Sim : une épopée moderne et dérisoire (aller à l'extrémité la plus septentrionale de la Grand-Bretagne pour vendre des brosses à dents écologiques) où l'aventure est totalement balisée par les satellites et autres objets de communication qui nous situent dans l'espace et un voyage dans le temps qui va l'amener à revisiter son passé.
Pélerinage ? Pas tout à fait car à chaque étape , des vérités dérangeantes se font jour sur ses proches (pas si proches d''ailleurs) et sur lui même.
Alors , il se raccroche à la voix de féminine de son GPS, seul bouée de secours dans un monde en plein changement, où règne une uniformisation qu'il juge réconfortante et où la solitude est de plus en plus aiguë.
Looser magnifique Mr Sim ,et attachant par dessus le marché, qui n'hésite pas à reconnaître ses faiblesses dans un univers où l'artifice est de mise, un monde qui repose sur du vent.
Les pirouettes sont nombreuses dans ce roman qui brosse un portrait juste et acide de notre époque et qui ne sacrifie pas l'art du récit à la démonstration virulente. Une parfaite réussite !
La vie très privée de Mr Sim, Jonathan coe, traduit de l'anglais par Josée Kamoun, Gallimard 2011, 449 pages à dévorer cul sec !
Raflé à la médiathèque au nez et à la barbe de M !:)
Le billet de Cuné qui m'avait donné envie de le lire.
Celui de Sassenach qui vous enverra vers plein d'autres !
L'avis de Brize.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : jonathan coe, mondialisation, uniformisation solitude
22/05/2011
Mister Hugh Lurie et Dr House
"Ce salopard est le meilleur médcin que nous ayons."
C'est dimanche, c'est permis...Bon c'était plutôt samedi à la médiathèque, où après avoir raflé une nouveauté de justesse (promis, je t'envoie un courriel, M., dès que j'ai terminé ce roman que tu étais si déçu de ne pas avoir vu avant moi , le privilège de porter des lunettes sans doute !) , je me suis emparé d'un document que je n'aurais sans doute jamais acheté ni en librairie, ni d'occasion d'ailleurs mais là mon côté midinette pouvait se donner libre cours alors...
Grâce à Cuné, j'ai découvert il y a quelques saisons Dr House et comme lui gobe ses comprimés de vicodine , je gobe ses "houseries" avec bonheur ! J'en ai retrouvé quelques unes glanées au fil de ma lecture (mais difficiles à replacer sauf peut être celle-ci : "Vous sentez? Je crois renifler le parfum de l'hypocrisie."). Sinon rien de bien neuf sous le soleil, un doc classique, biographie, filmographie, et enfin réflexions de Laurie sur son personnage .Mais un excellent moyen pour ceux qui comme moi ont pris la série en route de faire le point et d'envisager les saisons dans la continuité. Plus qu'une (soupirs !).
Petit bémol : Mark Lucas aurait pu se dispenser de ses réflexions "humoristiques" qui neuf fois sur dix tombent à plat.
Précisions: quelques photos dont certaines pas du tout indispensables...(celle avec le top modèle estonien nue sous une combinaison de cuir ultra moulante, bon c'était pour la Croix Rouge mais quand même ...)*
*Nan je suis pas jalouse, y en marre des clichés sexistes !
Emprunté donc à la médiathèque.
07:20 Publié dans Document | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : mark lucas, dr house, hugh laurie
21/05/2011
Hypothermie...en poche
"...un décès discret, une mort presque polie."
Maria, une femme fragilisée par le décès de sa mère, se suicide. Suicide confirmé par la police. Rien qui justifierait une enquête et pourtant, alerté par une amie de la défunte, Erlendur va découvrir que Maria avait tenté d'entrer en contact avec sa mère par l'intermédiaire d'un médium. En outre, le mari médecin n'est peut être pas aussi éprouvé qu'il le paraît.
En parallèle, en vieux limier obstiné qu'il est, Erlendur , toujours marqué par la disparition de son frère, poursuit ses investigations sur de vieilles enquêtes non résolues , faisnt preuve d'une compassion sans pareille auprès des familles des disparus.
Il doit aussi faire face aux sollicitations de sa fille qui veut à toutes forces lui faire rencontrer son ex-épouse.
Le croisement des diffrentes intrigues fait toute la saveur de cet opus subtil et fertile en rebondissements. L'auteur est ici au meilleur de sa forme. A ne rater sous aucun prétexte.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : arnaldur indridason
20/05/2011
L'armée furieuse
"Quand une alarme vitale se déclenche, la réplique humaine est impondérable et foudroyante."
Une armée furieuse , tout droit sortie des fins fonds du Moyen- Age, composée de chevaux et de cavaliers spectraux, a été vue dans un village normand. L'effroi s'empare aussitôt de la population car cette apparition annonce une "fameuse secousse", à savoir des décès de gens ayant l'âme mauvaise...
C'est évidemment Adamsberg "[le] rustre,[le ] montagnard, [le]pelleteur de nuages" qu'on appelle et qui va devoir composer avec la manière particulière de s'exprimer des Normands pour élucider le mystère de cette Grande Chasse. Non content de s'étonner de l'immobilisme des vaches dans cette région écrasée par la canicule, il devra aussi frayer avec une fratrie pour le moins singulière tout en essyant de "trouver "un passage obscur"pour affronter "l'aigre réalisme d[une] affaire polico-financière" qui lui met de sérieux bâtons dans les roues.
Si l'on retrouve ici" la composition de chimères et d'illusions"qui plaît tant au commissaire Adamsberg- et au lecteur par la même occasion-, celle-ci est nettement plus crédible que dans l'épisode précédent (Un lieu incertain) et nettement moins embrouillée. Je m'attendais à ce que les liens père /fils s'étoffent davantage mais c'était sans compter sans la légendaire lenteur d'Adamsberg ! Néanmoins on retrouve dans cet opus tout ce qui fait le charme de l'univers de Fred Vargas: des personnages atypiques , qui, se montrant solidaires, arrivent à adapter à leurs singularités un monde par trop normé, un policier plein d'humanité qui attache autant d'importance à la mort d'une vieille obsédée du ménage qu'à l'entravement d'un pigeon et qui se réjouit (avec nous) de "triomphe[r] contre les colosses" !
L'armée furieuse, Fred Vargas, Vivaine Hamy 2011,427 pages à dévorer puis à relire pour mieux en savourer l'humour et la densité !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : fred vargas, du sucre, des vaches, un pigeon
19/05/2011
Pourquoi les oiseaux chantent
Ouvrir Pourquoi les oiseaux chantent c'est voir s'envoler Fringilles ou Gros-Becs, surprendre des bandes de linottes et de verdiers qui s'émiettent ,entendre le "petit cri un peu métallique" de la mésange bleue et oberver le "trop plein vital " qui jaillit au printemps . Bref, c'est prêter attention aux hôtes des haies et des arbres, aux migrations aviaires, aux chants et à leurs différentes significations, balayer les idées toutes faites concernant les femelles (non, elles ne sont pas de vulgaires trophées remportées par le mâle le plus fringant ! ), bref s'intéresser à un monde que nous côtoyons trop souvent avec indifférence.
Jacques Delamain, éminent ornithologue, (la première édition de cet ouvrage date de 1930 et il a été réédité à plusieurs reprises) sait conjuguer à la fois érudition et style élégant
On pense parfois à Colette devant de superbes descriptions mais on se sent aussi quelques fois étouffé sous le poids d'énumérations de volatiles que l'on n'arrive pas forcément à visualiser, faute de les connaître tous! Mieux vaut avoir à portée de main un guide des oiseaux, même succinct !
Le recueil se clôt par un très surprenant ""Journal de guerre d'un ornithologue" où Jacques Delamain ne se départit jamais de son sens de l'observation, notant scrupuleusement tous les oiseaux qu'il repère, leurs réactions face à l'artillerie et notant très sobrement dans le chapitre intitulé"1918. Oiseaux de Verdun." : "Et là deux Moineaux piaillent sans entrain au coucher du soleil, le seul petit brin de vie et de gieté dans cette mort." On a l'impression que l'auteur s'est volontairement concentré sur sa passion pour se retrancher du monde belliqueux.
Un ouvrage à savourer à petites doses ! En tout cas, après la lecture de ce livre je me suis surprise à essayer de démêler les chants d'oiseaux de la cacophonie matinale ...
Pourquoi les oiseaux chantent, Jacques Delamain, Editions Parallèles 2011, 2020 pages bruissantes.
06:00 Publié dans Document | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : jacques delamain, oiseaux