26/05/2015
Puissions-nous être pardonnés
"Mais à présent tout se passe comme si j'étais en chute libre, indéfiniment, la dégringolade n'étant interrompue et ralentie que lorsque je suis sommé de faire quelque chose pour quelqu'un d'autre. Sans les enfants, le chien, le chat, les chatons, les plantes, je me déliterais complètement."
Deux tragédies successives et familiales vont totalement bouleverser la vie de deux frères,opposés, "les deux faces d'une même pièce."
Si George a longtemps volé à Harold sa place d'aîné ,accaparant l'attention par son caractère explosif et violent, ce dernier se contentant d'une vie sclérosée et d'un rôle plus passif, les rôles vont changer. Harold, investissant la maison de son cadet, va prendre sa place de père de famille et, par là même s'autoriser à devenir enfin adulte.
Familles dysfonctionnelles et hautes en couleurs, personnages principaux attachants, personnages secondaires farfelus et joyeusement hors-normes , tout m'a enthousiasmé !
Les épisodes drolatiques (j'ai éclaté de rire à plusieurs reprises) et émouvants alternent dans ce roman de 500 pages qu'on quitte à regrets. A.M. Homes revient avec jubilation et profondeur sur ce thème de la famille et on la suit avec tout autant de bonheur dans cette Amérique qu'elle égratigne au passage . Un coup de cœur !
Puissions-nous être pardonnés, A.H. Holmes, traduit de l'américain par Yoann Gentric, Actes Sud 2015.
Ps: la quatrième de couv' en dit beaucoup trop !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : a.m. homes
25/05/2015
Si tu ne viens pas à....
...Penguin, Penguin viendra à toi !
Cadeau (en avance ) de ma fille, I'm happy ! Et je vais pouvoir faire ma poseuse comme dit mon fils ! avec la couv' de Une chambre à soi De Virginia Woolf en V. O. :)
06:01 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (15)
23/05/2015
Réparer les vivants ...en poche
Mais qui ne l'a pas lu ? !:)
"... c'est la première fois qu'ils nidifient une cavité de repli au sein de leur anéantissement..."
Réparer les vivants est "la somme des actions et la somme des mots, la somme des espaces et des sentiments" qui, partie du cœur de Simon Limbres, jeune surfeur de vingt ans, aboutira -ou non -à sauver la vie d'une receveuse en attente de transplantation.
Le roman de Maylis de Kerangal n'a rien d'un récit journalistique. Il acquiert une dimension quasi mythologique, brassant l'espace et le temps, replaçant l'organe dans sa dimension à la fois affective et symbolique. Il ne s'agit pas ici de réparer un organe défaillant mais bien de s'interroger sur les mots qui manquent pour exprimer l'émotion, les mots qui devront sonner juste pour convaincre les proches, mots qui parfois se mueront en chant pour mieux saluer le corps qui a encore une apparence de vie même si l'activité cérébrale a signalé sa mort, car il s'agit de creuser "ensemble dans cette zone fragile du langage où se déclare la mort.".
Cette trajectoire alterne les points de vue, y compris celui de la receveuse potentielle qui n'est pas sans interrogations, détaille aussi le ballet des intervenants médicaux, ne les réduisant pas à une fonction mais les inscrivant dans une humanité pleine de justesse.
Nous ressentons pleinement toutes les sensations , tous les sentiments qui bouleversent de fond en comble les personnages !
Le style précis, imagé et élégant,le récit tendu comme un arc et empli d'émotions sans jamais verser dans le pathos, font qu'une fois levés les a priori susceptibles d'entraver notre lecture, on ne peut quitter ce roman qui pulse et fait battre le cœur.
Et zou, sur l'étagère des indispensables !
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : maylis de kerangal
22/05/2015
Ce qui est arrivé aux Kempinski...en poche
"Une des particularités comiques de l'enfance est que l'on traverse une gamme infinie de sentiments dont on ignore les noms. Tant que le mot n'a pas épinglé la sensation, comme une aiguille perçant les thorax d'un insecte, les impressions papillonnent en liberté autour de nous et en nous, éblouissantes, féériques, mais aussi parfois menaçantes car nous n'avons aucune idée de leur trajectoire, de leur taille, de leur venimosité."
Dans les quatorze nouvelles composant Ce qui est arrivé aux Kempinski, la réalité fait un pas de côté et les rêves deviennent plus réels que la réalité. Le titre d'un roman apparaît différemment à sa lectrice, les identités sont faussées, fluctuantes. Usurpations, impostures, trahisons sont au rendez-vous et même le diable sera dupé par une femme.
Le familier révèle ses double-fonds, les sentiments inavouables (que faut-il faire des cadeaux rapportés de l'école, ces "offrandes [...]la plupart du temps ratées et mystifiantes de laideur" ?, se demande une mère de famille éprise de perfection). On sourit, on admire aussi l'écriture éblouissante d'Agnès Desarthe qui traque au plus près le réel qui se dérobe sous nos pas.
« Mon âme, dit-elle. Mon âme, que vaut-elle ? Mon âme est une liste de courses. Mon âme est une déclaration d’impôts, un bulletin de notes au bas duquel ne figurent pas d’encouragements. Mon âme est le mode d’emploi du lave-vaisselle remplacé depuis huit ans, un bordereau de la poste datant de trois mois (le paquet est reparti, mais où, et que contenait-il ? Une rivière de diamants, sans doute). Mon âme est pleine de “Bonjour, madame”, “Au revoir, madame”, elle est salie par les corvées, corrompue par la fatigue de jours sans héroïsme, sans passion, sans péril. »
Et zou, sur l'étagère des indispensables !
06:01 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : agnes desarthe
21/05/2015
Dieu me déteste...en poche
"Être mourant, si on regarde bien, c'est plutôt lassant.ce qui est vraiment intéressant, c'est de vivre ici, beaucoup plus intéressant que je l'aurais cru , quand on m'a amené ici de force et que je jurais et me débattais tout ce que je pouvais."
Celui qui s'exprime ainsi c'est Richard Casey, dix-huit ans dans quelques jours. Bien qu"otage des soins palliatifs" d'un hôpital New-yorkais, lui et son amoureuse Sylvie, quinze ans, malgré la maladie, la perte des cheveux, le corps qui lâche dans tous les sens, ont une furieuse envie de faire des conneries, de s'aimer malgré tout, de vivre quoi !
Halloween et l'intervention d'un oncle hors-normes vont précipiter les événements et entraîner nos héros dans un tourbillon joyeux, souvent émouvant, plein d'une féroce rage de vivre malgré tout. Roméo luttant contre le dragon qui veille sur sa bien-aimée, Richard nous fait vibrer et allume plein d’étoiles dans nos yeux.
Jamais de sensiblerie ni de pathos, le monde hospitalier est peint de manière très juste et la fin est juste époustouflante. Un livre bourré d'énergie , d'empathie et de pudeur qui glisse , zou, sur l'étagère des indispensables. On n’est pas prêts d'oublier cette galerie de personnages et cet amour ardent ! Un grand et beau coup de cœur !
06:02 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : hollis seamon
19/05/2015
La femme au carnet rouge
"Laurent se trouvait devant une femme-puzzle. Une silhouette floue, comme dernière une vitre pleine de buée , un visage semblable à ceux que l'on croise dans les rêves et dont les traits se brouillent dès que l'on tente de se les remémorer."
Laurent Letellier, libraire, découvre un jour un sac mauve, probablement volé, sans indication de l'identité de la propriétaire. Il décide alors de mener une enquête , placée sous les auspices de Modiano (que nous croiserons ! ) de Sophie Calle et de Pessoa, afin de le lui restituer.
Se tissent alors entre l'apprenti détective et la victime du vol des liens qui vont très largement dépasser le simple acte civique...
Si je n'avais pas acheté ce roman en format poche, il est probable que j'aurais moins ressenti le charme subtil, quelques fois un peu forcé, de ce roman agréable et léger qui fait un bien fou, car j'en aurais sans doute attendu trop. Mais là, nonobstant une couverture criarde (je sais que le jaune est à la mode cette saison, mais c'est définitivement non à cette couleur) , je me suis régalée à lre cette romance qui s'élabore quasi malgré les principaux protagonistes.
Des avis très tranchés sur Libfly !
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, Les livres qui font du bien, romans français | Lien permanent | Commentaires (11)
18/05/2015
Ce qu'il reste d'Alice
"Parfois, il est plus facile d'oublier, mais se rappeler est ce qui fait de nous des êtres humains."
Le corps d'Alice Salmon, vingt-cinq ans, a été retrouvé dans la rivière. Accident de beuverie, suicide ou meurtre ?
Un universitaire entreprend de reconstituer la vie d’Alice son ancienne étudiante pour laisser un portrait d'elle , composé de toutes les traces qu’elle a laissés sur internet, de son journal, de ses textos et des témoignages de ceux qui l'ont connue. Une manière aussi de tenter le lever le mystère que constitue la mort d’Alice, cette brillante journaliste à qui tout semblait sourire.
La structure , façon puzzle, ne facilite pas la lecture de ce roman, qui ménage peu de surprises et se contente d'effleurer trop de personnages. La résolution du problème m'a rappelé un roman d'Agatha Christie (dont je me garderais bien de vous donner le titre !). Trop de ressassements de thèmes, des personnages qui m'ont laissée indifférente, bref, un roman qui m'a déçue.
Cuné a été plus enthousiaste, clic..
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : t. r. richmond, schtroumpf grognon le retour
17/05/2015
Comment trouver l'amour à cinquante ans quand on est parisienne...en poche
"Et maintenant, se demandait Dimitri Diop, et maintenant, si c'est vraiment l'amour qui se présente à nous, sommes-nous capables de le vivre ? "
Six personnages, d'âge et de conditions sociales différentes, saisis à des moments clés de leur existence, élaborent , sans le savoir toujours, une chorégraphie qui les fait se croiser dans Paris. La capitale devient d'ailleurs un personnage à elle toute seule et symbolise aussi la problématique essentielle de ce conte: l'exil et ses différentes formes.
Ce roman, au titre faussement" chickenlittien", se lit sans déplaisir mais son style, quelque peu compassé, fait que je ne m'y suis pas toujours sentie à l'aise, un peu comme si j'avais endossé un habit trop étroit.
Les personnages sont attachants, en particulier celui autour duquel s'articulent tous les autres: Catherine, quinquagénaire prof de français résidant à Paris mais enseignant de l'autre côté du périph, mais on reste toujours un peu sur sa faim, l'auteur leur tenant la bride un peu trop courte.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : pascal morin
16/05/2015
Vacances à l'anglaise ...en poche
"Qu'avait donc cette maison ? Elle détraquait tout le monde."
Après le décès de leur mère, Richard décide d'inviter la famille de sa sœur, dont il n'a jamais été très proche, pour des vacances au Pays de Galles. Mais la combinaison de quatre adultes ayant peu d'atomes crochus, trois ados en pleine explosion hormonale et un enfant bourré d'imagination, le tout largué au milieu d'une campagne somptueuse mais dotée d'un réseau peu favorable aux portables risque de provoquer un cocktail détonnant...
Si l'ambiance de la maison de vacances est parfaitement bien rendue, le choix de l'auteur d’alterner les points de vue, même si l'on repère très vite l'identité du personnage ,donne au roman un côté par trop "haché", qui nuit à la fluidité du récit. Un bon moment ,mais rien d'exceptionnel.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : mark haddon
15/05/2015
ça aussi, ça passera
"Tout l'amour de mes amis et de mes enfants ne suffit pas pour que je puisse résister aux rafales de ton absence, j'ai besoin d'être agrippée à un homme pour ne pas être emportée dans les airs."
Bianca, quarante ans, vient de perdre sa mère . Elle part en vacances dans la maison familiale de Cadaqués, entraînant avec elle ses deux amies, ses deux ex-maris et ses enfants.N'oublions pas l'amant du moment qui rôdera aussi dans les parages, accompagné de sa propre famille. Une situation pour le moins atypique mais qui correspond bien à la narratrice, amoureuse éperdue de la vie.
Dans un paysage baigné de soleil, au bord de la mer, Bianca qui mène "une vie désordonnée et enfantine" s'adresse à celle qui vient de mourir entre deux considérations sur les relations hommes/femmes et un rendez-vous amoureux. La vie, la mort , tout est mêlé et Bianca , malgré sa douleur, est toujours prête à séduire,à aimer.
Ce pourrait être glauque, c'est lumineux, tendre et cruel à la fois,plein d'amour et d'apaisement. Une petite parenthèse de bonheur.
ça aussi, ça passera, Milena Busquets, traduit de l'espagnol par Robert Amutio, 176 pages ensoleillées.
06:00 Publié dans Les livres qui font du bien, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : milena busquets