05/01/2024
Qui-Vive
"J'imagine une vie qui serait une éternelle errance où je m'arrêterais devant chaque personne croisée et l'écouterais quelques minutes. "
Parce qu'il y a eu les attentats; le Covid, les confinements; le retour de la guerre en Europe; la découverte de feuillets énigmatiques après le décès de son grand-père, Mathilde est devenue insomniaque, a perdu le sens du toucher ,est obsédée par des vidéos de Leonard Cohen. Bref, Mathilde ne sait plus où elle en est. Et c'est fâcheux pour cette professeure d'histoire-géographie.
Laissant son mari et sa fille, elle part sur un coup de tête en Israël, entame un périple où elle se frotte à des réalités contrastées, bien éloignées de son quotidien. L'occasion de retours en arrière, de changements de perspectives dans ce pays où sa famille n'a pas choisi de vivre mais dont elle parle néanmoins la langue. Un récit où L'Histoire affleure tout le temps. Un récit sensible et poignant qui prend une dimension encore plus grande au vu de l'actualité.
Éditions de l'Olivier 2024, 169 pages.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (7)
04/01/2024
Le Roitelet...en poche
"" Tu devrais écrire un livre dans lequel rien n'arrive. " J'ai trouvé l'idée d'autant plus séduisante que j'ai sous la main, avec ma vie très banale, une grande quantité de matière à partir de laquelle travailler. "
Quel plaisir de retrouver ici l'auteur du Jour des Corneilles ! Ici, il ne s'agit plus d'un père et de son fils mais principalement de deux frères, dont l'un est écrivain (l'auteur) et l'autre travaille dans une jardinerie. Ah oui, il est aussi schizophrène mais il ne faudrait pas le ramener uniquement à cette maladie qui le fait souffrir et rend son comportement parfois difficilement compréhensible aux autres tant ses remarques sont parfois étonnantes et lumineuses.
Dans ce texte, il est aussi beaucoup question de nature, d'animaux , d'écriture et c'est de manière apaisée, mais sans occulter les difficultés que Jean-François Beauchemin avec une écriture d'une finesse incomparable évoque cette relation fraternelle hors-normes.
Un texte dont les pages se tournent toutes seules et qu'il faut prendre le temps de relire pour encore plus le savourer. Et zou, sur l'étagère des indispensables.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : jean-françois beauchemin
03/01/2024
Passer à l'Ouest
Julien Solé, à l’instar de Larcenet dans son Retour à la terre, nous relate comment, avec femme et enfants, quittant la riante cité de Sevran, il s'est installé près de Brest.
Aimant beaucoup cette ville (et sa fameuse librairie "Dialogues" ) , je me réjouissais de la retrouver via cette BD. Las, à l'exception du passage sur les expressions brestoise hautes en couleurs, je me suis passablement ennuyée car cette BD manque cruellement d'enjeux narratifs. Les dessins sont beaucoup trop fouillés et nuisent à la lisibilité. Bref, un échec total, corroboré par une deuxième lectrice de mon entourage. Sans doute en attendions-nous trop...
Je remercie les Éditions Locus Solus et Babelio.
06:00 Publié dans BD | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : julien solé
02/01/2024
Le Jardin Nu
"Tout est plus vivant de devoir mourir. Tel est l'enseignement.Toute vie est dérisoire , et toute vie est en même temps unique, infiniment unique, infiniment fragile-la palpitation de la veine- précieuse en raison même de sa fragilité . "
D’Anne Le Maître, j'avais précédemment lu et adoré Sagesse de l'herbe (clic) .
Si je n'ai pas autant utilisé de marque-pages pour ce récit, il n'en reste pas moins que j'ai beaucoup apprécié ce texte de remontée vers la lumière après un deuil, par le biais d'un jardin et de sa faune.
L'autrice, par sa langue toujours aussi précise et poétique, sans pathos, nous fait partager ces moments fragiles et beaux , qu'elle observe avec une attention extrême et dont elle nous fait partager l'intensité. C'est ténu et pourtant d'une puissance folle.
Merci Aifelle pour cette découverte.
Editions Bayard 2023.
06:00 Publié dans Récit de vie | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : anne le maître
01/01/2024
108 voeux
...à ouvrir au hasard, à savourer, à détacher (ou non ) de leur anneau et à distribuer pour que la poésie infuse nos journées et nous fasse envisager le monde d'un œil neuf.
Et un pour commencer cette année nouvelle : "Que le chemin danse sous tes pas"
Mélanie Leblanc
Éditions Les Venterniers
00:00 Publié dans l'étagère des indispensables, Poésie | Lien permanent | Commentaires (12)
20/12/2023
Miettes moineau ribouldingue
"à quoi ça sert
un merle ?
à s’émouvoir d'un rien,
d'un soir qui tombe
sur un jardin
dans son chant modulé"
D'abord il y a l'objet-livre. Un 24.2 x 0.7 x 32.1 cm qu'on ne peut pas louper et qui sent bon le neuf. Le titre, ensuite, qui claque en rouge, avec son allitération en m et son facétieux ribouldingue , un mot familier et vieilli désignant une partie de plaisir une noce , qui s'avérera ici être le nom du chat qui clôture le livre et le plateau de jeu de ce jeu de l'oie sans oie mais avec un moineau , un ours qui sert à tout, un arrosoir pour faire la pluie, une ramassette pour "rassembler ses pensées éparses quand on cesse sa rêverie et qu'on retourne dans le réel. "
Bienvenue dans le monde facétieux et poétique d'aNNE herbauts qui multiplie les techniques (crayon, collage, découpage, papier déchiré...) et qui avec quelques couleurs (du blanc, du noir, du rouge, du bleu) nous fait entrer dans un album qui peut dérouter, faire sourire, réfléchir et donne surtout à rêver. La formule "à quoi ça sert" rythme la progression et, mine de rien , dynamite un univers où tout doit avoir une utilité.
Petits et grands y trouveront leur content que ce soit par la lecture seule de cet album magnifique ou par le jeu.
Un grand merci à Babelio et aux Éditions Esperluette pour cet album qui file sur l'étagère des indispensables.
Pour voir l'autrice au travail, c'est ici .
06:00 Publié dans Jeunesse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : anne herbauts
19/12/2023
Le danger de ne pas être folle
"La fiction est un voyage vers l'autre, et ce trajet est le plus fascinant que l'on puisse faire. "
En 288 pages, la romancière et journaliste Rosa Montero, forte de sa propre expérience et de sa formation en psychologie nous propose un voyage fascinant au cœur de la création littéraire.
Elle dégage les lignes de force communes aux créateurs que d'aucuns qualifient de "fous" en s’appuyant sur de nombreuses références littéraires (gare aux liste de lectures qui vont s'allonger ! ) et scientifiques . C'est d'ailleurs de manière tout à fait incidente qu'elle découvrira elle-même que l’euphorie qu'elle éprouve quand elle est satisfaite de ce qu’elle a rédigé n'est pas ressentie par tous mais seulement par celles et ceux qu’elle nomme les "junkies de l’intensité".
Par ailleurs, avec malice, Rosa Montero nous informe au détour d'une page que la fiction est elle aussi bien présente au cœur de ce qu'elle nous a présenté comme étant autobiographique. De quoi réaffirmer son goût de l'imaginaire... Un texte riche et enjoué qui file sur l'étagère des indispensables.
Éditions Métailié 2023.
Traduit de l'espagnol par Myriam Chirousse.
06:00 Publié dans Essai, l'étagère des indispensables | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : rosa montero
18/12/2023
Enfance: La Trilogie de Copenhague T1
"Istedgade est la rue de,mon enfance , son rythme battra toujours dans mon sang, sa vois résonnera toujours en moi et restera celle des temps lointains où nous nous sommes juré fidélité. La rue est toujours chaude et lumineuse, festive et palpitante, et elle m’enlace, comme si elle avait été inventée pour satisfaire tous mes besoins d’épanouissement. "
Un énième récit d'enfance pauvre et malheureuse ? Quasiment toutes les critiques concernant ce récit autobiographique de Tove Ditlevsen cite cette phrase : "L’enfance est longue et étroite comme un cercueil, on ne peut pas s’en échapper sans aide. " A plusieurs reprises d'ailleurs dans ce texte , l'enfance est associée si ce n'est à la mort, du moins à des champs lexicaux pour le moins négatifs.
Pour autant, ce qui transcende cette pauvreté, ce manque d'amour dont souffre la narratrice dans cette famille ouvrière danoise, est la certitude qu'elle doit écrire. Pour dépasser "la mélancolie grandissante" que Tove éprouve déjà . Pour exprimer ce qu'elle observe avec acuité dans cette famille où la solitude est un luxe . Il lui faudra surmonter les moqueries, les scandales que provoquent les poèmes qu'elle rédige pour l’instant et le fait d'être une femme ne viendra pas améliorer sa situation... Un ton vif , une écriture tantôt sombre , tantôt lumineuse et une narratrice au caractère bien trempé font de ce récit une réussite.
J'attends déjà avec impatience le second volume qui paraîtra en mars.
Un texte de Rosa Montero m'a donné envie de découvrir cette autrice... J'en parlerai demain.
Editions du Globe 2023, traduit du danois par Christine Berlioz et Laila Flink Thullesen
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : tove ditlevsen
14/12/2023
La maison des Tocards ( Slow Horses)
"La moitié du futur est enfouie dans le passé. Telle était l'idée qui prévalait dans le Service. D'où l'examen obsessionnel d'un terrain déjà retourné plusieurs fois pour tente de comprendre l'Histoire avant qu'elle ne se répète. "
Avouons-le c'est grâce à la série Slow Horses que j'ai découvert ce roman à la fois caustique et so british sur les services secrets britanniques , ce qui , à la base, n'est pas vraiment ma tasse de thé.
Mais l'histoire de ces agents dont, pour des raisons budgétaires , on n'a pas voulu se débarrasser mais qui , ayant sacrément merdé, végètent dans La maison des Tocards , sous l'autorité d'un chef crasseux, répugnant dernier vestige de la Guerre Froide a su m'embarquer.
On croit d'abord entrer dans un roman gentillet mais la violence est bien présente et le romancier n’hésite pas à sacrifier certains personnages auxquels nous nous étions attachés. La société britannique et ses services secrets sont dépeints de manière cynique mais avec un détachement de bon aloi. L'écriture est nerveuse et la série, si elle élague quelque peu l'intrigue, rend néanmoins justice à l'humour de l'auteur.
à lire et /ou à regarder absolument.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : mick herron
12/12/2023
L'irrésistible appel de la vengeance
"Ce que je sais, en revanche, c'est que l'amour au temps d'internet est rapide et superficiel, autant dans les mécanismes que dans la prose: messages brefs, directs, clairs, transparents, pas de phrases complexes et surtout pas de ponctuation. Au mieux, un retour à la ligne.Imagine du Marcel Proust à l'envers et tu auras une idée assez précise de ce qui se passe à notre époque. "
Rien ne va plus pour Amanda , quinquagénaire un peu trop portée sur le gin, ni dans sa vie privée ni dans sa vie de romancière de polars , toujours pas adaptés sur Netflix, ce qui améliorerait singulièrement son niveau de vie.
Faute de mieux, elle anime un atelier d'écriture de polar devant un public hétéroclite , tant par son origine sociale que par ses objectifs cachés ou non. Amanda leur assène des règles d'écriture et tandis que la rédaction commune d'un polar classique se met en place, d'autres intrigues évoluent en dehors de l'atelier.
Double narration donc et avec de nombreux personnages mais Rosa Mogliasso ne perd jamais son lecteur en route et le divertit de manière efficace et très plaisante.
Éditions Finitude 2023, traduit de l’italien par Joseph Incardona.
06:00 Publié dans romans italiens | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : rosa mogliasso, joseph incardona.