12/12/2023
L'irrésistible appel de la vengeance
"Ce que je sais, en revanche, c'est que l'amour au temps d'internet est rapide et superficiel, autant dans les mécanismes que dans la prose: messages brefs, directs, clairs, transparents, pas de phrases complexes et surtout pas de ponctuation. Au mieux, un retour à la ligne.Imagine du Marcel Proust à l'envers et tu auras une idée assez précise de ce qui se passe à notre époque. "
Rien ne va plus pour Amanda , quinquagénaire un peu trop portée sur le gin, ni dans sa vie privée ni dans sa vie de romancière de polars , toujours pas adaptés sur Netflix, ce qui améliorerait singulièrement son niveau de vie.
Faute de mieux, elle anime un atelier d'écriture de polar devant un public hétéroclite , tant par son origine sociale que par ses objectifs cachés ou non. Amanda leur assène des règles d'écriture et tandis que la rédaction commune d'un polar classique se met en place, d'autres intrigues évoluent en dehors de l'atelier.
Double narration donc et avec de nombreux personnages mais Rosa Mogliasso ne perd jamais son lecteur en route et le divertit de manière efficace et très plaisante.
Éditions Finitude 2023, traduit de l’italien par Joseph Incardona.
06:00 Publié dans romans italiens | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : rosa mogliasso, joseph incardona.
12/11/2022
Impossible...en poche
"L'obsession d'être déclaré important par les autres ne me concerne pas. J'ai fait partie d'une génération qui a agi au nom du collectif. Je considère donc insignifiantes les individualités, les personnalités. "
Un duel verbal, en huis-clos, entre un juge et un accusé. Ils ne sont pas de la même génération, ne possèdent pas la même vision de la politique ou de la justice, mais le jeune juge veut selon l'accusé "fermer une parenthèse restée ouverte jusqu'à aujourd’hui. Car aucun de ceux qui ont trahi leurs propres camarades n'a été atteint par une vengeance. Le plateau de la balance reste incliné."
Quelle était en effet la probabilité pour que l'accusé, ancien révolutionnaire italien, signale la chute mortelle en montagne d'un homme qui se révélait être l'ami qui l'avait trahi quarante ans plus tôt ?
Les interrogatoires, parfois biaisés, souvent "sortis du sujet et du rituel", ainsi que les lettres d'amour (non envoyées) permettent d'explorer en profondeur le parcours à la fois politique et psychologique d'un homme resté fidèle à son idéal, tout en maintenant jusqu'au bout la tension dramatique. Du grand art.
Traduit de l'italien par Danièle Valin
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans italiens | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : erri de luca
04/10/2021
L'Assemblée des Animaux
Les animaux en ont assez : les catastrophes écologiques se succèdent et les hommes ne semblent pas réagir. Tout ce qui a plumes, poils, vit dans l'eau, les airs ou sur la terre prend la parole et une décision est prise: un avertissement sera envoyé aux hommes via une pandémie dont le pangolin et la chauve-souris seront à l'origine.
Toute ressemblance avec une situation contemporaine n'est évidemment pas une coïncidence.
Quelle frustration de ne pouvoir aimer ce qui avait tout pour me plaire . Mais les trop nombreuses allusions littéraires, clairement référencées à la fin de l'ouvrage , ont fini par entraver ma lecture. Trop d’érudition, pas assez d'émotions, voilà qui pourrait résumer mon ressenti.
Merci à Babelio et à l'éditeur.
Éditions Arthaud 2021, traduit de l'italien par Julie Terrazzoni
06:01 Publié dans romans italiens | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : filelfo
02/09/2021
Sans jamais atteindre le sommet...en poche
"La montagne me portait à l'essentiel."
"Je voulais voir si, quelque part sur terre, il existait encore une montagne intègre, la voir de mes yeux
avant qu’elle ne disparaisse. J’ai quitté les Alpes abandonnées et urbanisées et j’ai atterri dans le coin le plus reculé du Népal, un petit Tibet qui survit à l’ombre du grand, aujourd’hui perdu." Tel est l'objectif de l'auteur quand, accompagné de toute une expédition, nécessaire bien sûr, il part accompagné de deux amis et d'un récit de voyage, Le léopard des neiges.Bientôt, le récit de Matthiessen et celui de Conetti s'entremêlent, comme se tissent les références aux montagnes italiennes et locales, dont les modes de vie s’apparentent parfois.
L'écriture est toujours aussi belle, je n'ai cessé de souligner à tour de bras, mais l'émotion est moins présente, peut être parce qu'en arrière plan se lovait dans ma tête l'idée un peu gênante que mettre en branle toute une expédition pour un récit aussi court (176 pages) paraissait quelque peu disproportionné.
Traduit de l'italien par Anita Rochedy. Stock 2019
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans italiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : paolo cognettti
01/09/2021
#Lafélicitéduloup #NetGalleyFrance
"Mais qu'est-ce qu'il faisait là, un abruti de quarante ans sans famille ni travail, à part suivre son utopie ridicule du vis-là-où-tu-es-heureux ? "
Fausto, en instance de divorce, trouve un boulot de cuisinier dans un restaurant d'altitude au cœur du val d'Aoste. Là, il fait la connaissance de toute une galerie de personnages très variés qui , eux aussi, aiment la montagne et ne peuvent s'en passer.
Les amateurs de récits haletants passeront leur chemins, mais celles et ceux qui apprécient les textes en demi-teintes, les chapitres courts, les descriptions par petites touches d'un monde en pleine évolution à cause du changement climatique, un monde où la nature, plantes, arbres , animaux s'adaptent, sans doute plus vite que nous , trouveront leur content dans ce texte lumineux.
Stock 2021, traduit de l'italien par Anita Rochedy.
01:00 Publié dans Rentrée 2021, romans italiens | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : paolo cognettti
25/01/2018
L'essence du mal
"Gratte sous la surface d'un petit village de sept cents habitants et tu trouveras un nid de vipères."
Victime d'un accident en montagne, Jeremiah Salinger, auteur américain de documentaires se refait une santé tant physique que mentale dans le petit village du Tyrol du Sud d'où est originaire sa femme. Il décide bientôt de mener l'enquête, au grand dam des villageois, sur une mystérieuse tuerie qui a vu le massacre de trois jeunes gens du cru, trente ans auparavant.
Commencé façon roman montagnard, L'essence du mal se poursuit façon western avec notre héros, seul contre tous, en tant qu’étranger à la communauté qui resserre ses rangs. Cela nous vaudra même une bagarre dans la tradition du genre.
Si Jeremiah envisage puis élimine avec méthode les potentiels tueurs. On aurait aimé avoir autant de rigueur dans l'écriture qui pêche par excès de sentimentalisme (dans ses rapports avec sa fille) et de manière plus générale dans l'expression outrée des sentiments. Sans compter la Nature qui se déchaîne avec une belle régularité pour mieux dramatiser les scènes cruciales. L'auteur n'hésite d 'ailleurs pas à convoquer un monstre façon Nessie pour ajouter une touche encore plus dramatique à l'ensemble.
Commencé dans l'enthousiasme, ce roman a vite douché mes espérances .
Lu dans le cadre du Grand Prix des Lectrices de Elle.
06:00 Publié dans romans italiens | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : luca d'andrea
10/11/2017
Les huit montagnes
"Sur le petit pont de bois, quand je me baissai pour boire, je surpris l'automne train de jeter un sort à mon torrent: la glace dessinait des pistes et des galeries, mettait sous verre les blocs humides, piégeait les touffes d'herbe sèche ne les transformant en sculptures."
La montagne, ce sera d’abord pour le narrateur, l'occasion de suivre son père dans des randonnées en pleine nature ,quand la famille louera de manière régulière une petite maison spartiate dans la vallée d’Aoste. L'occasion pour le père d'échapper à la vie milanaise qui ne le satisfait en rien et aux difficultés relationnelles avec son épouse et son fils.
Ce sera aussi la naissance d'une belle amitié avec un jeune garçon du cru, voué à rester sur place, amitié qui perdurera par delà les années, même quand le narrateur aura voyagé et découvert d'autres montagnes.
Récit de filiation, d'apprentissage, Les huit montagnes est aussi un hymne superbe à la nature auquel personne ne peut rester indifférent. On retrouve avec bonheur les ellipses chères à l'auteur du garçon sauvage, son sens de la retenue dans l'expression des sentiments et sa poésie sans lyrisme. Un grand coup de cœur !
Éditions stock 2017.Traduit de l'italien par Anita Rochedy
Il vient d'obtenir le Prix Médicis étranger.
En poche clic.
06:00 Publié dans rentrée 2017, romans italiens | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : paolo cognettti
10/04/2016
Dix minutes par jour...en poche
"Parce que en effet, le meilleur de la vie est dans toutes les expériences intéressantes qui nous attendent encore : je suis en train de l'apprendre avec le jeu des dix minutes.
Et donc, il réside aussi dans les livres que tout le monde alu mais, pour un quelconque motif, nous pas encore."
Chiara est un tournant de son existence: on a confié sa rubrique hebdomadaire à une gagnante de la téléréalité, son mari, qu'elle a connu très jeune, l'a quittée et, cerise sur le gâteau elle habite Rome où elle se languit de son village natal.
Pour lui redonner de l'élan,sa psy lui demande de tenter chaque jour pendant dix minutes une nouvelle expérience. Chiara se prête au jeu de bonne grâce et, forte des liens qu'elle a su nouer avec tout un panel d'amis et de connaissances éclectiques et sympathiques, va repartie de plus belle et envisager sa vie sous un nouvel angle.
C'est plein de fraîcheur, léger mais jamais mièvre, et Chiara est diablement sympathique. Un petit plaisir qu'on ne se refuse pas !
Chiara Gamberale, Pocket 2016.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans italiens | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : chiara gamberale
20/10/2015
Dix minutes par jour
"Parce que en effet, le meilleur de la vie est dans toutes les expériences intéressantes qui nous attendent encore : je suis en train de l'apprendre avec le jeu des dix minutes.
Et donc, il réside aussi dans les livres que tout le monde alu mais, pour un quelconque motif, nous pas encore."
Chiara est un tournant de son existence: on a confié sa rubrique hebdomadaire à une gagnante de la téléréalité, son mari, qu'elle a connu très jeune, l'a quittée et, cerise sur le gâteau elle habite Rome où elle se languit de son village natal.
Pour lui redonner de l'élan,sa psy lui demande de tenter chaque jour pendant dix minutes une nouvelle expérience. Chiara se prête au jeu de bonne grâce et, forte des liens qu'elle a su nouer avec tout un panel d'amis et de connaissances éclectiques et sympathiques, va repartie de plus belle et envisager sa vie sous un nouvel angle.
C'est plein de fraîcheur, léger mais jamais mièvre, et Chiara est diablement sympathique. Un petit plaisir qu'on ne se refuse pas !
Dix minutes par jour, Chiara Gamberale, traduit de l'italien par Élise Gruau, Michel Lafon 2015
L'avis de Cuné, qui m'avait donné envie !
05:40 Publié dans romans italiens | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : chiara gamberale
13/09/2013
Supplément à la vie de Barbara Loden...en poche
"Barbara ne fait des films que pour ça. Apaiser. Réparer les douleurs, traiter l'humiliation, traiter la peur."
Barbara Loden, actrice des sixties mais aussi réalisatrice d'un unique film Wanda, dont elle incarne le personnage éponyme (car "Tout ce que je fais c'est moi." ) est le sujet de la notice que doit rédiger la narratrice du roman.
Mais, très rapidement, à force d'accumuler la documentation , cette dernière qu'on devine très proche de l'auteure, prend sa mission de plus en plus à coeur et laisse aller son texte vers l'autobiographie, quoi qu'en dise son éditeur. Elle approfondit son enquête, n'hésitant pas à contacter l'entourage de Barbara Loden, se laissant fasciner par la personnalité de cette femme troublante.
De la même manière que la notice se détourne de sa direction initiale, entrelaçant la biographie de Barbara, le film Wanda et les réactions de la narratrice et de sa mère, Nathalie Léger nous offre le portrait de femmes à la dérive. Son écriture est à la fois précise et hypnotique, elle tisse son texte avec maestria et envoûte le lecteur. Un texte qui reste longtemps en mémoire et résonne en nous.
Un extrait :
"A quoi puis-je reconnaître ce qui me lie à Wanda ? Je n'ai jamais erré sans domicile, je n'ai pas abandonné d'enfants, je n'ai jamais remis le cours de mon existence ou simplement celui de mes affaires à un homme, le cours quotidien de ma vie, je ne l'ai jamais confié à quiconque, me semble-t-il, j'ai abandonné des hommes, et parfois brutalement, avec la joie vibrante qu'o éprouve à bifurquer, à s'évanouir dans une foule, à sauter sans prévenir dans un train, à faire faux bond, le plaisir aigu et rare de se dérober, de se soustraire, de disparaître dans le paysage-mais pas celui de se soumettre. [...] mais il m'est arrivé surtout de me laisser faire, d'attendre que ça passe, de préférer le malentendu à l'affrontement-impossible dans ces moments de penser que la défense et l'illustration de mon corps puisse en valoir la, peine, et d'ailleurs qu'est ce que ça signifie "mon corps" , à quinze ans, seul signifie ne pas être seule, ne pas être abandonnée."
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans italiens | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : nathalie léger