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26/11/2024

L'agent

"Observant les convives, Anthony ne put s’empêcher de se dire que leurs vies valaient moins cher qu'une voiture d'occasion.  Ça sautait aux yeux, à leurs vêtements, leur façon de parler, leurs dents mal alignées, et au simple fait qu'ils passaient leurs vacances dans un camping à Vierzon. Des vies méprisées et bradées par la société. Comme sa mère autrefois, qu'on laissait poireauter des heures derrière un guichet administratif et qu'on regardait sans aucune considération. "

Que voilà un attelage bizarre : à ma gauche, Anthony, agent de tueurs à gages, forcé, après une opération calamiteuse de prendre la poudre d'escampette; à ma droite, Thérèse, soixante-quinze ans, directrice d'une agence matrimoniale au bord de la faillite , qui se remet d'un AVC ,  prête à tout pour échapper à l’Ehpad. pascale dietrich
Comment ils vont se rencontrer et aller se mettre au vert ensemble dans un camping à Vierzon n'est qu'une des nombreuses péripéties de ce roman à la fois drôle et caustique où ça défouraille à tout va entre des réflexions sur une société où "Les gens sont prêts aux plus viles manipulations du langage pour ne pas égratigner leur univers petit-bourgeois". Société où la vie de certains vaut largement plus que d'autres.
Il y est aussi question de solitude et de la nécessité de faire bloc, ensemble pou affronter le réel. Un bien joli programme mené tambour battant par Pascale Dietrich à son meilleur.

 

Liana Levi 2024, 190 pages à dévorer d'abord puis à relire attentivement, en n'oubliant surtout pas les nombreuses citations qui l'agrémentent.

05/11/2024

En Salle...en poche

"Sur l'écran des frites, les 27 more pending annoncent un rush qui n'en finira plus. L'heure de débauche est arrivée pour moi mais tout le monde tourne la tête , m'ignore et je continue d'implorer je peux rentrer maintenant ? Cinq minutes passent, vingt minutes, trente minutes. Ils m'ont oubliée là , dans l'affluence infinie. "

L'incipit de ce roman qui alterne, en séquences parfois très courtes, l’entretien d'embauche de la narratrice dans un fast-food et le souvenir d'enfance de sa famille se rendant dans ce type de restaurant, source de joie et d'excitation pour les enfants et d'angoisses pour le père , est extrêmement fort.  Tout est déjà dit  de cette inadéquation de cette famille modeste qui ne possède pas les codes et se trouve submergée par la mécanique précise du fast-food. claire baglin
Cette même oppression ressentie par le corps du père à l'usine et par la fille quand elle officiera  dans ce type de restauration rapide.
Horaires à rallonge, petits chefs jouissant de leur pouvoir, valeurs  faussées, tout est vu de l'intérieur avec acuité.  Cette même acuité dont fait preuve la narratrice quand elle analyse la maison que lui fait visiter un petit bourgeois de son entourage. Un premier roman qui nous fait ressentir ce que c'est que le travail abrutissant aussi bien les corps que les esprits.

22/10/2024

#Desmoutonspleinmachambre #NetGalleyFrance !

"J'étais une terre gagnée lentement par la banquise. "

Dire que ce roman a pour narrateur un enfant gravement  malade serait extrêmement limitatif car comme il le déclare lui-même à propos d'un projet de roman que lui suggère son cousin : "Il restait la maladie mais franchement je ne voulais pas lui accorder plus d'importance en racontant tous les mauvais tours qu'elle me jouait. "michael uras
Ce qui importe ici c'est d'une part le regard qu'il porte sur sa famille, ses amis, sa lucidité et sa manière nuancée d'aborder les sujets les plus graves, par petites touches non dénuées d'humour et de délicatesse. Mêlant les temporalités, l'auteur fait ainsi l'économie du pathos et nous livre un roman sans grands enjeux narratifs, qui paraîtra sans doute lent à certains , mais dont il faut prendre le temps d'apprécier les nombreuses remarques pleines de justesse. Une belle découverte.

 Merci à Netgalley et à l'éditeur : La Belle Étoile 2024. michael uras

 

21/10/2024

Le Buzuk

"Et alors, et s'ils étaient venus justement, pour ça, parler aux mouettes, défendre le lapin de garenne, le crabe tacheté ou le maquereau agile, ces jeunes sont nos alliés. Et puis je me suis dit, calme-toi, Joséphine ; si tu n'es pas une mouette, tu n'es pas Jeanne d'Arc non plus. "

Le Buzuk , c'est le nom du chien (mais pas que) dont a hérité Joséphine à la mort de son mari. Mari à qui elle s'adresse régulièrement, histoire de le tenir au courant non seulement des nouvelles de la famille, mais aussi de ce petit paradis breton où elle vit.
Mais justement ce paradis court le danger d'être transformé en golf. Par chance, de jeunes marginaux avec qui Joséphine va sympathiser vont décider de défendre cette zone contre vents et marées...marie kelbert
Très programmatique, ce roman fait passer un bon moment de lecture sans prise de tête, mais offre néanmoins l'originalité de nous offrir un narrateur non fiable, dont le manque d'exactitude se révèle progressivement...

Merci à Babelio et à l'éditeur .

 Editions Viviane Hamy 2024. marie kelbert

09/10/2024

#Bâtardes #NetGalleyFrance !

"Nous sommes donc les bâtardes,  mères de bâtardes,filles de bâtardes, perpétuant le cycle des mensonges et de l'obscurité. "

On estime le nombre d'enfants nés de mère française et de père appartenant à l'armée allemande  durant la Seconde guerre mondiale entre 10 00 et 20 000. L'occasion pour ceux qu'on a appelés "les résistants de la dernière heure", de tondre ces femmes coupables de "collaboration horizontale", de se venger sur elles de leurs propre lâcheté (voire pire) en les tondant sur la place publique.
L'arrière petite fille d'une de ces femmes va remonter le temps des silences et des hontes pour mettre à jour les mensonges qui gangrènent plusieurs générations d'une lignée de femmes de sa famille. rachel corenblit
Rachel Corenblit, avec beaucoup de sensibilité, donne la parole à chacune de ces femmes qui expriment avec beaucoup de lucidité leurs sentiments, mais aussi l'hypocrisie d'une société patriarcale.  Une belle réussite.

25/09/2024

#Mesenfantssontpartis #NetGalleyFrance !

"Parce que je veux que mes enfants s'affranchissent de moi. Je le veux vraiment. Je constate que cela me dévaste mais je n'ai pas une seule seconde envie de les garder à mes côtes toute leur vie. Il faut lutter contre des montagnes géantes, il faut trouver une place entre le désir de leur bonheur et ce deuil affreux qui m'attend. "

Cinquante ans au compteur. Les enfants qui s'envolent. Syndrome du nid vide qui survient brutalement dans la vie de l'autrice. L'occasion pour elle de faire le bilan de sa vie artistique (pas facile d'être une femme dans le monde de la musique surtout quand on n'est plus "fraîche"). La ménopause qui la guette n'arrange pas les choses dans une société qui invisibilise les femmes, une fois qu'elles ne peuvent plus être mères...julie bonnie
Heureusement, sa reconversion dans le monde de la santé lui permet de rencontrer d'autres femmes et leurs expériences , qui se tissent à son récit, offrent des portraits sensibles , parfois douloureux mais toujours pleins de vie.
On sourit, on compatit, on se reconnaît, un peu, beaucoup... Un roman tendre et sincère dont les pages se tournent toutes seules ou presque.

 Grasset 2024. julie bonnie

 

18/09/2024

Un printemps en moins

" Je veux me souvenir de Gabriel à dix-sept ans.
Je veux me souvenir de Gabriel à trente-trois ans.
Sinon il n'y aura plus de vrais dimanches. "

Trois voix alternent dans ce roman choral : Cellede Gabriel , treize ans, dans le coma, à l’hôpital ; celle de son père , Martin, qui n'a rien vu venir; celle de Romane enfin, une prof du collège où Gabriel se faisait harceler et qui a vu le corps de l' adolescent tomber dans la cour de l’établissement scolaire. 61Eh0l5OqyL._SL1500_.jpg
Trois points de vue pour mieux comprendre la violence exercée via les réseaux sociaux et dont les adultes ne veulent ou ne peuvent pas prendre la mesure. Mais un roman qui fait aussi la part belle à la poésie et à l'espoir, par petites touches.
On échappe ainsi au roman - dossier et on partage un peu de la vie des ces trois personnages attachants en diable, qu'on aimerait bien retrouver...

 

 les Avrils 2024. 122 pages.

 Merci à L'auteur et à l'éditeur pour l'envoi. Je n'ai pas été rémunérée pour ce billet.

17/09/2024

Après la brume

"Je les sens familiers de ce climat avec lequel je tâtonne encore. Les chemins de l'île, les marées sont inscrits en eux, comme en moi les rues parisiennes. "

Une île bretonne où une sortie scolaire perturbée par l'arrivée de la brume a mal tourné : la petite Raph a disparu. 
Tour à tour, des îliennes , des femmes de passage ou récemment arrivées prennent la parole et les histoires récentes ou anciennes se croisent, s'éclairent petit à petit.estelle rocchitelli
La nature est très présente et l'écriture de l'autrice, dont c'est le premier roman, en rend compte avec justesse et poésie.
Une intrigue solide, des personnages bien ancrés dans le réel, une écriture  puissante, voilà d’excellents ingrédients pour une lecture captivante. Seul petit bémol : je me suis parfois un peu perdue dans les personnages ...

 Éditions Dalva 2024. 

12/09/2024

Au bal des absents...en poche

"[...], tous ces gens-là qui la condamnaient à la mot sociale, la mort civile , la mort de faim, la mort de froid, la mort dehors, la mort de désespoir, l'avaient définitivement amarinée à la houle incessante, insondable de la cruauté humaine."

Au chômage, au RSA, bientôt à la rue, Claude, quarante ans, est contactée par un mystérieux juriste qui lui propose d'enquêter sur la disparition de toute une famille américaine dans une maison isolée en pleine campagne.
Notre héroïne ignore encore qu'elle va devoir faire face, totalement seule, à "tant de siècles de méchanceté embusquée dans un gigantesque manoir ". Mais  Claude a de la ressource car "le désespoir , c'est un luxe. Tu n'as pas les moyens", s'admoneste-t-elle. Et de se forger, grâce à une flopée de bouquins, de films, de jurons et de formules d'exorcisme, sans oublier les formations subies à Pôle Emploi,  toute une batterie d’armes, à laquelle elle adjoint une binette bienvenue.Catherine Dufour
Sous couvert de fantastique, d'horreur, Catherine Dufour nous peint ici le combat solitaire d'une femme contre la misère  à laquelle on voudrait qu'elle se résigne. Un combat social, féministe( j'adore la fin, à la fois drôle et horrifique). On sourit (quand on aime l'humour noir), on frémit et on apprécie de voir ici convoquées et détournées les figures imposées de ce genre de roman.
Claude est pugnace , intelligente et astucieuse et on jubile de voir comment elle apprivoise la situation à sa façon. Un roman hautement réjouissant même pour quelqu'un comme moi qui ne suit pas familière du genre fantastique et/ou horrifique.

06/09/2024

Le jour et l'heure...en poche

"Le monde qui semblait se refermer sur nous depuis des mois s'ouvrait enfin. Le monde que je croyais perdu à tout jamais me revenait grâce à l’art, aux traits, aux couleurs. "

Le temps d'un week-end, une famille va rejouer le scénario d'un départ en vacances d'enfance : les parents, les quatre enfants , devenus adultes, à l'arrière.
Direction la Suisse où la mère de famille, Edith, a décidé de se rendre pour qu'on puisse l'assister à mourir car elle se sait condamnée. Durant ce trajet, à cause de la situation bien particulière, mais aussi du temps qui a passé, la constellation familiale va évoluer et les rôles vont peut être se redistribuer. 41iUfDeCZcL._SY466_.jpg
Si j'ai apprécié , comme toujours, la manière dont Carole Fives scrute les familles et les interactions qui s'y mettent à jour, je suis restée un peu sur ma faim quant au thème principal.