23/06/2008
"Je t'offre une légèreté toute nue."
Sur un point de départ somme toute assez classique (un homme découvre à la mort de sa femme qu'il ne la connaissait pas vraiment), Véronique Ovaldé réussit le tour de force de créer un univers bien à elle, où les personnages semblent pris dans une sorte de gelée vacillante, un monde à la croisée du roman policier( dont ce roman emprunte un instant les accessoires) et de L'écume des jours de Boris Vian.
Un univers placé sous le signe de la poésie par le titre emprunté à Verlaine, où les meubles disparaissent sans que cela semble troubler Lancelot, caractérisé par son "inertie minérale coutumière"mais "Comment finir par ne pas se sentir offensé par un monde (ou des sens) aussi inconstant(s)? "
De rencontre en rencontre,Lancelot se rend compte que "le recours au mystérieux devient inévitable dans ce genre de circonstances." Et s'il "sent le monde se fendiller et se casser comme la coquille d'un oeuf", il constate que "L'absence d'Irina est aussi impressionnante que sa présence. C'est comme si son absence avait embouti l'air de l'espace exact et de la forme exacte de sa présence. Vous pouviez considérer être assis à côté de l'absence d'Irina."
Dans un style imagé très original, Véronique Ovaldé nous entraîne à la suite de Lancelot en quête de l'identité d'Irina et nous le suivons avec enthousiasme
L'avis de Cuné
De Florinette
D'Anne
06:00 Publié dans Prix Landerneau | Lien permanent | Commentaires (15)
20/06/2008
"On finit toujours pas faire ce pour quoi on est le plus doué."
Victime d'un "cambriolage cérébral",Fabrice Valantine va découvrir incidemment que, pour retrouver le plaisir de fumer, il doit tuer...Fume et tue sera donc sa nouvelle devise.
Sans le prix Landerneau, jamais je n'aurais lu ce livre dont la couverture me donnait envie de fuir, en bonne non fumeuse que je suis. L'aspect "les fumeurs sont les pestiférés de la société" m'a un peu énervée mais, très rapidement ,la découverte du monde de la grande entreprise et de ses comportements pas toujours logiques et souvent inhumains, la satire du monde de l'art moderne m'ont intéressée et fait sourire et je me suis prise au jeu. Jeu qui devient encore plus corsé quand,à la moitié du livre, de chasseur de têtes le héros devient meurtrier et en arrive à commettre non pas un mais quatre crimes parfaits et jubilatoires que je vous laisse le plaisir de découvrir...
Antoine Laurain arrive à mettre le lecteur dans sa poche et construit une parfaite mécanique pleine d'humour et de mauvais esprit.A découvrir sans tarder !
L'avis de Lily qui a fait remonter ce livre dans ma PAL !
06:04 Publié dans Prix Landerneau | Lien permanent | Commentaires (18)
18/06/2008
"Quand tu chatouilles le diable, il t'envoie ses démons."
La narratrice de La main de Dieu vit dans une famille aisée au Liban mais quand sa mère, française, s'enfuit, tout commence à se déliter. La famille paternelle tente de brider cette adolescente de 15 ans pour qui les jeux de l'amour ont beaucoup à voir avec la violence car" Dans mon pays, les rapports d'amour sont semblables à la guerre: partout s'introduire et saccager."
Cette équivalence, malgré la beauté de l'écriture de Yasmine Char,distille une impression de malaise persistant.Une lecture inconfortable donc, et il en faut.
Ce Livre vient d'obtenir le prix Landerneau. (officiel!)
L'avis enthousiaste de Stéphanie
06:03 Publié dans Prix Landerneau | Lien permanent | Commentaires (14)
16/06/2008
'"Elle se sentait forte de cette faiblesse qu'on lui attribuait d'office."
Plus qu'un roman sur une musicienne oubliée des musicologues, L'incroyable histoire de Mademoiselle Paradis nous parle de l'infirmité vécue non comme une tragédie mais comme un moyen différent d'appréhender le monde.
Rien en peut expliquer le fait que Maria Thérésa von Paradis soit aveugle et après avoir tout essayé pour la guérir , son père qui la chérit, va la confier aux soins du magnétiseur Messmer.
Ce dernier parviendra à lui faire recouvrer la vue mais pour Thérésa "Voir est une sensation agréable mais ouvrir les yeux sur la vérité des coeurs et des êtres est un spectacle que je préfère oublier. [...]Je préfère retrouver mon monde . Celui où chaque couleur a sa note et chaque intonation sa vérité, où je me sens en charge de mon destin."
Autant l'avouer tout de go: les romans historiques ne sont pas ma tasse de thé mais j'ai pourtant lu d'un traite et avec plaisir le roman de Michèle Halberstadt. Bien que le style en soit très différent, j 'y ai trouvé un écho du texte de Antoni Casas Ros .
Un texte vraiment agréable à lire mais que je risque de ne pas garder en mémoire...
L'avis très enthousiaste de Florinette
06:02 Publié dans Prix Landerneau | Lien permanent | Commentaires (11)
11/06/2008
Itinéraire d'une enfant pas gâtée
Même si elle a eu une enfance difficile, Madelaine s'accroche à son rêve, se tient droite pour affronter l'adversité et devient une des figures importantes du monde de la couture à Paris. Sa vie personnelle ne sera pourtant pas aussi réussie...
Claire Wolniewicz dans son roman Le temps d'une chute fait ainsi défiler sous nos yeux le XXème siècle, scandant son évocation des modèles imaginés et des couleurs choisies par son héroïne. On devine au passage que Madelaine emprunte certaines idées à Sonia Rykiel (les coutures sur l'endroit) on croise quelques grands noms de la couture et le récit avance à grandes enjambées de 1921 à la Seconde Guerre Mondiale ,de la conquête des droits des femmes jusqu'à nos jours .
Tout cela est bien trop rapide, à peine a-ton le temps de s'attacher à un personnage qu'il disparaît déjà ...Un roman agréable à lire mais qui ne laisse aucune impression durable. Dommage car j'avais bien aimé le recueil de nouvelles Sainte Rita patronne des causes désespérées
06:03 Publié dans Prix Landerneau | Lien permanent | Commentaires (9)
10/06/2008
"Le destin m'a fait le cadeau de me tuer très tôt pour que je commence à vivre."
Celui qui parle ainsi, nous le découvrirons progressivement, est Antoni Casas Ros. Défiguré à la suite d'un accident, le narrateur vit retiré du monde et réfléchit sur la solitude, la différence, le désir et cherche à découvrir s'"il ya une fête au centre du vide."
Le théorème d'Almodovar, roman de Antoni Casas Ros, est à la fois un roman qui s'écrit sous nous yeux, un texte où vont se glisser un transsexuel, un cerf, et le cinéaste Almodovar. Chacun à sa manière vont lui permettre d'évoluer,d'apprivoiser sa différence. Réalité, fantasme ? Peu importe ! Passé le barrage du premier paragraphe, nous entrons dans un univers à la fois déroutant et fascinant. Beaucoup de lucidité, pas une once de complaisance, quelques pointes d'humour "...La chirurgie réparatrice n'a pu enlever à mon visage son style cubiste. Picasso m'aurait haï car je suis la négation de son invention(...) Je suis une photo bougée qui pourrait faire penser à un visage."
A chaque page ou presque, une réflexion à souligner, un passage particulièrement juste sur la mort, les oeuvres d'art et leur puissance révélatrice...Une écriture à la fois aiguë et poétique: " Ecrire comme un guerrier pourfend le ciel en sachant qu'il coupe des mots, sectionne des liens douteux, remet en évidence la nudité extrême de l'être."
Une écriture puissante dont l'écho résonne longtemps après que nous ayons refermé le livre.
06:01 Publié dans Prix Landerneau | Lien permanent | Commentaires (15)
09/06/2008
"C'est l'école de la sénilité ici !"
Ambiguïté du titre d'abord : Nous vieillirons ensemble qui peut à la fois se voir comme une référence optimiste au titre du film de Pialat Nous ne vieillirons pas ensemble (où le couple interprété par Marlène Jobert et Jean Yanne se déchire) mais aussi comme une sentence implacable, les pensionnaires de la maison de retraite Aux Bégonias n'ayant pas de possibilité de sortir vivants de ce huis-clos à perpétuité...
Une journée dans une maison de retraite voilà ce que nous propose de départager le roman de Camille de Peretti. Unité de temps et d'action donc mais une multitude d'histoires, drôles, touchantes ou acides qui nous sont dévoilées avec une grande justesse de ton. Ni misérabilisme ni optimisme forcené. C'est avec plaisir que nous retrouvons le personnage à la fois fantasque et tragique de Nini, la marraine de Camille.
Visiblement Camille de Peretti connaît bien le monde des maisons de retraite et écrit avec pertinence et sensibilité sur le dur métier d'infirmière : "A l'école, on leur apprenait "l'accompagnement en fin de vie. A l'hôpital, on leur apprend à remplir des papiers administratifs. Caser les malades, cocher les morts. (...) Elle a presque hâte de perdre sa douceur et sa sensibilité."
Pour la structure, l'auteure a choisi de se référer aux contraintes suivies par Georges Perec dans la Vie mode d'emploi, nous en donnant le cahier des charges à la fin du roman.
Point n'est besoin de s'y référer pour apprécier le tour de force de Camille de Peretti : avoir su donner de la chair et de l' âme à ce qui chez Perec tenait davantage de l'exercice de style.Un beau roman tendre et cruel .
06:10 Publié dans Prix Landerneau | Lien permanent | Commentaires (18)
08/06/2008
C'est parti !
Recevoir un coussin (je collectionne les coussins prétend l'Homme qui est bien contents de les trouver à l'heure de la sieste...), mais un coussin bourré de livres, voilà qui est original et réjouissant !
Et quand en plus ces livres entrent en lice pour un prix littéraire voilà qui va faire du bruit dans le Landerneau de la blogosphère !
Papiillon en a déjà parlé ici,
Anne et
Lou sont aussi de l'aventure !
Un grand merci à Elodie Giraud pour avoir pensé à nous!
06:00 Publié dans Prix Landerneau | Lien permanent | Commentaires (15)