14/04/2013
Contrecoup / sur le mariage et la séparation
"Rien ne m'appartient plus.Je suis une exilée de ma propre histoire. Je n'ai plus de vie, lui dis-je. C'est une vie après la mort. Le contrecoup."
L'image du puzzle court tout au long de cette réflexion sur le mariage et la séparation, sujet universel traité ici de manière ni exhibitionniste ni fictionelle. Nous sommes bien loin de l'auto-fiction doloriste et nombriliste à la française.
Nous sommes ici dans l'après de la séparation et, à travers plusieurs situations de la vie quotidienne, l'on sent que l'auteure est sonnée mais qu'elle réfléchit simultanément à cette situation.
Rachel Cusk, avec lucidité et précision, analyse la répartition des rôles du masculin et du féminin dans lemariage et convoque les mythes anciens pour nourrir sa propre réflexion.
Nous sommes donc dans le domaine des idées mais aussi dans celui des émotions tant la langue est imagée et poétique. Huit textes denses , aux tonalités différentes, pour dire le choc de devoir affronter le chaos, de se sentir mal à l'aise car "L'effort nécessaire pour modeler la normalité est une sorte d'art du faussaire , si laborieux comparé à la facilité avec laquelle l'original a été créé."Le dernier texte, changeant de point de vue, met en scène une jeune femme étrangère engagée par le couple en train de se déchirer, exilée qui trouvera de manière symbolique et douce comment signifier cette séparation.
L'idée de Contrecoup pourrait rebuter mais, une fois ouvert, le style et l'angle choisi par Rachel Cusk font que le lecteur ne se sent jamais voyeur. On est fasciné par l'atmosphère créée mais aussi par l'éclairage si particulier de l'auteure et son analyse des mythes grecs. Un texte piqueté de marque-pages. Une réflexion nécessaire.
Contrecoup, Rachel Cusk,traduit de l'anglais par Céline Leroy, Editions de l'Olivier 2013, 173 pages à lire et relire.
06:00 Publié dans mémoires | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : rachel cusk
03/04/2012
L'arbre de l'oubli
"à nous , disait-elle, il n'y a personne comme nous . Et s'ils ont jamais existé, ils sont tous morts."
Alexandra Fuller a récidivé ! Pour notre plus grand plaisir elle a encore écrit un "Horrible Livre", comme sa mère se plaît à le qualifier, un livre dont cette fois sa mère est l'héroïne pleine et entière, elle qui a tout fait pour rendre sa vie "digne d'une biographie" !
La première partie, commencée sur les chapeaux de roues, nous brosse ainsi le portrait haut en couleurs, d'une femme à "deux cent mille pour cent écossaise" qui va tomber amoureuse de l'Afrique ", de cette époque et de ce lieu particuliers où aucune limite n'entravait le mode de comportement, bon ou mauvais, sensé ou déraisonnable, que devait adopter une personne blanche." Une femme qui assène sans sourciller à ses filles que l'une (l'auteure) doit avoir été adoptée, tant elle lui semble dissemblable, et à l'autre qu'elle a eu des lésions cérébrales !
Mais dans la deuxième partie, la tonalité se fait plus sombre car des drames familiaux vont assombrir l'atmosphère, tandis que l'Histoire se mettra en marche , obligeant la famille à s'adapter aux changements de régimes politiques, voire de pays. Un livre riche en émotions, qui nous prend par la main et qui ne nous lâche plus.
Un charme absolu se dégage de ces 329 pages qui se dévorent d'une traite !
L'arbre de l'oubli, Cocktail Hour Under the Tree of Forgetfulness, traduit de l'anglais (E-U) par Anne rabinovitch, Editions des deux terres 2012.
Keisha a elle aussi été séduite !
06:00 Publié dans mémoires | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : alexandra fuller, afrique, humour