05/03/2018
Ni tout à fait une autre
"La vie est faite de renoncements infimes, si minuscules qu'on ne les remarque que quand on en fait la somme."
Par amour, la narratrice s'est dévouée à Iggy, star de la musique hard-rock. Au fil du temps, elle a endossé tous les rôles , mais de moins en moins celui d'amante. Quand Iggy meurt d'une overdose, Iris, se retrouve meurtrie et vide. Un nouvel amour se profilant à l'horizon ,la quinquagénaire saura-t-elle sortir de ses schémas et vivre enfin pour elle ?
Iris n'a rien d'une femme soumise ni idiote, elle comprendra a posteriori les réactions d'Iggy et brossera d'elle-même un portrait sans concessions.
Le style est vif, souvent acéré (l'entrevue avec la future belle-mère est un pur bonheur de vacheries cash) et Iris sait nous entraîner à sa suite dans une vie d'épouse de rock- star sans jamais nous perdre. Attention la dernière partie du roman donne tout à la fois une furieuse envie de manger et d'aller au Japon !
Les escales 2018, 200pages qui se tournent toutes seules.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : caroline vié
04/03/2018
Quelle n'est pas ma joie
"Ce sont les abandonnés de l'amour qui doivent essayer de comprendre. Ce sont les délaissés qui doivent se montrer nobles et intelligents, pour saisir que l'autre, on ne l'a qu'en prêt."
Ellinor , soixante-dix ans, est veuve pour la seconde fois. Au grand dam des enfants de son mari, Georg, elle vend la maison familiale et retourne s'installer dans le quartier populaire de son enfance.
A ce moment charnière de sa vie, elle s'adresse, sans aucune acrimonie, à Anna, qui fut et demeure par-delà les années, sa meilleure amie. Celle qui fut aussi la maîtresse de son premier mari, Henning. Les deux amants sont morts accidentellement dans les années 60 et , insensiblement, un nouveau couple s'est formé, entre autres pour assumer l'éducation des jumeaux de Georg et Anna.
Une configuration singulière donc, tout comme le récit des origines d'Ellinor qui se découvre progressivement. Mais c'est une sensation de grand apaisement qui se dégage de ses pages où l'on retrouve l'écriture sensible de Jens Christian Grondhal. Un pur moment de bonheur. Et zou sur l'étagère des indispensables.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, Les livres qui font du bien, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : jens christian grondahl
02/03/2018
La solitude des femmes qui courent...en poche
"Ma vie n'est pas satisfaisante. Je suis seule, j'ai un travail qui me frustre. Adèle est mon unique réussite, la personne qui donne un sens à ma vie." Ainsi parle Justine Trévise , divorcée, la petite quarantaine, qui s'échine à courir dans Paris entre une entreprise qui bat de l'aile, ses amies fidèles et sa petite fille.
Revenir s'installer dans le village de son enfance lui permettra peut être de repartir de zéro, de retomber amoureuse et d'élucider les non-dits familiaux.
Romance fortement axée sur l'amitié entre femmes, La solitude des femmes qui courent est un roman qui obéit aux lois du genre, tout en ménageant un certain suspense. Si l'histoire est bien menée, les dialogues qui l'émaillent sonnent faux, ce qui enlève toute harmonie au texte. Dommage.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : julie printzac
01/03/2018
Cosmétiques / tout faire soi-même
Quel plaisir de retrouver Raphaële Vidaling aux commandes, avec Fanny Fardoit , de ce livre thématiques, agrémenté de nouvelles recettes nous assure le rabat, déclinaison d'un gros volume généraliste intitulé Tout faire soi-même.
Au siècle dernier, j'avais déjà acquis un ouvrage de ce type mais bien plus austère , plus dans l'esprit "retour à la terre". Rien de tel ici. La présentation est comme d’habitude avec cette auteure particulièrement réussie: claire, agrémentée de photos souvent bucoliques , bref ça donne envie rien qu'à le feuilleter !
Mais un joli plumage ne serait rien sans des recettes efficaces et ne nécessitant pas d'ingrédients difficiles à dénicher. On pioche dans les placards de sa cuisine et en un tour de main, c'est fait ! Pour les produits plus "pointus"un petit tour en pharmacie ou chez son magasin bio préféré et le tour est joué.
Pas de listes d'ingrédients longues comme le bras, ce qui facilite la vie des allergiques et nous garantit un temps de préparation limité.
Plein de petites astuces( quand on part en voyage et qu'on se rend compte qu'on a oublié son shampoing par exemple) ce livre bourré d'idées nous donne immédiatement envie de passer à l'action, pas forcément pour tout ( on n'a pas toujours une betterave sous la main pour remplacer son blush) ,mais au moins pour tester des alternatives aux produits "classiques".
Eana éditions 2018 9.95 euros
06:00 Publié dans très utiles! | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : raphaële vidaling, fanny fardoit
28/02/2018
mémoire de fille ...en poche
"Ce récit serait donc celui d'une traversée périlleuse, jusqu'au port de l'écriture. Et, en définitive, la démonstration édifiante que, ce qui compte, ce n'est pas ce qui arrive, c'est ce qu'on fait de ce qui arrive. Tout cela relève de croyances rassurantes, vouées à s'enkyster de plus en plus profondément en soi, au fil de l'âge mais dont la vérité est, au fond ,impossible à établir."
Récit dont Annie Ernaux s'aperçoit a posteriori qu'il est "contenu entre deux bornes temporelles liées à la nourriture et au sang, les bornes du corps.", récit longuement différé tant a été violente la honte ressentie en cet été 58 , l' épisode évoqué de manière elliptique dans d'autres textes , Mémoire de fille le raconte et comble ce vide.
Il s'agit de sa première nuit avec un homme, H., dont elle s'entichera, qui la rejettera,entraînant aussi les sarcasmes violents des autres moniteurs de la colonie où Annie Ernaux- alors Duchesne - fait l'expérience de ce qu'elle croit être la liberté.
Cette violence physique qui lui est faite, cette violence verbale aussi, elle est,en 1958, dans l'incapacité d'en prendre conscience et la retournera contre elle, essayant de se rapprocher le plus possible, tant physiquement que socialement, de la jeune institutrice blonde que lui a momentanément préféré H.
Cet épisode, elle a voulu à toutes forces l'oublier, mais ce n'est que deux ans plus tard, grâce à la lecture de Simone de Beauvoir qu'elle pourra mettre des mots sur ce qui lui est arrivé.
Ne possédant pas les codes sociaux, voulant à tout prix masquer son inexpérience, Annie Duchesne accumule les erreurs pour un comportement féminin qui, dix ans plus tard, deviendra acceptable, voire normal.
Se basant sur ses lettres, sur des photos, Annie Ernaux remonte le temps et interroge l'acte d'écrire : "Mais à quoi bon écrire si ce n'est pour désenfouir des choses, même une seule, irréductible à des explications de toutes sortes, psychologiques, sociologiques, une chose qui ne soit pas le résultat d'une idée préconçue ni d'une démonstration, mais du récit, une chose sortant des replis étalés du temps et qui puisse aider à comprendre -à supporter-ce qui arrive et ce qu'on fait."
Le travail de mémoire est mené avec acuité et sans complaisance, Annie Ernaux se désignant comme "la fille de 58", "cette fille", "Elle" dans un distanciation nécessitée par les décennies qui se sont écoulées. Mémoire de fille est un récit nécessaire où se lit l'inscription du corps féminin dans une réalité sociale et historique, ainsi que le destin d'une jeune femme qui semblait tracé d'avance. Un texte sans concessions, qui marque profondément son lecteur.
Et zou sur l'étagère des indispensables !
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : annie ernaux
27/02/2018
Aux petits mots les grands remèdes...en poche
"Ma mère était une spécialiste de la culture comme arme d'élimination massive."
Alexandre, biblio-thérapeute, a pour objectif de reconquérir Mélanie, qui vient de le quitter, et de soigner de nouveaux clients afin d'améliorer sa situation financière.
Nous le suivons donc dans cette double quête, émaillée de références romanesques, et entrons à sa suite dans des univers très différents.
Baigné d'une atmosphère douce-amère, le roman de Michaël Uras se lit sans déplaisir mais ne m'a pas enthousiasmée pour autant. Peut être attendais-je un héros plus charismatique..
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michaêl uras
26/02/2018
J'apprends le français
"Ce que je leur devais aussi, c'est de dire que non seulement, ils nous apportent mais qu'ils nous rapportent. Si ce livre ne parvenait à persuader ne serait-ce qu'un seul lecteur, je n'aurais plus à rougir ni à regretter de m'y être dévoilée. L'accueil de l'étranger n'est pas une charité mais un échange. Il nous ouvre un monde dont nous n'avons pas idée. Il démultiplie nos points de vue, enrichit nos perceptions. Nous en tirons bénéfices."
Marie-France Etchegoin, journaliste de profession, s'est improvisée formatrice en Français Langue Étrangère auprès de migrants venus d'Afghanistan, d’Érythrée, du Soudan. Elle s'est très vite investie et a beaucoup appris, autant qu'elle a enseigné.
Tout dans cet enseignement est fluctuant car les migrants, en plus des épreuves tant physiques que morales qu'ils ont dû affronter, sont en butte aux rouages d'une administration kafkaïenne qui risque de les renvoyer dans le pays qu’ils ont fui.
Tout dans cet ouvrage généreux et engagé est intéressant au plus haut point. L'auteure y dévoile son propre rapport à la langue, car elle ne veut pas se tenir en retrait, comme une ethnologue distanciée, l'enthousiasme de ses élèves, leur foi en la France et en sa langue. J'y ai aussi découvert avec effarement la situation politique en Érythrée, un véritable enfer sur terre. Un livre nécessaire et passionnant, piqueté de marque-pages.
06:00 Publié dans Document, l'amour des mots | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : marie-france etchegoin
25/02/2018
Une femme au téléphone...en poche
« Ah, j’en vire des hommes, qu’est-ce que je peux en virer ! j’en ai plein ma corbeille ! »
Une mère laisse des messages sur le répondeur de sa fille. Par le truchement de cette situation de communication perturbée ( autant que la narratrice !) se dessine le portrait d'une femme tour à tour dragueuse sur internet, mère envahissante, qui refuse de vieillir et fait preuve d'un humour, parfois noir « Il faut choisir, le cancer, la phlébite ou la dépression » , dévastateur.On devine très bien, en creux, les réactions des interlocuteurs invisibles et le procédé n’est jamais pesant, bien au contraire.
Les revirements de la mère vis-à-vis de sa petite-fille, ses tentatives de culpabilisation i la mélancolie, la dépression qui s’immiscent entre deux tout cela sonne très juste. L’émotion n'est pour autant pas oubliée, en particulier quand s'amorce une possible inversion des rôles.Ça cavale à toute allure et quand la fin arrive, on est tout étonné et un peu déçu car on aurait bien continué !
Carole Fives nous fait vivre des montagnes russes émotionnelles, c'est rondement mené, brillamment écrit (j'ai surligné à tour de bras) et ce roman file donc directement sur l’étagère des indispensables !
11:55 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : carole fives
23/02/2018
Le divan rouge
"Grâce à ce divan, nous nous posions dans la réalité de notre présent."
Une femme et ses deux enfants fuyant un homme violent, se réfugient dans un appartement où bientôt la mère de famille va installer un magnifique Divan rouge.
Ce récit très court (123 pages petit format) de résilience et de reconstruction fait la part belle au meuble personnifié, mais le manque d'épaisseur de cette famille, comme hors-sol, fait qu'un léger goût d’insatisfaction vient gâcher le plaisir qu'on se promettait en ouvrant cet opuscule.
Sur le même thème, j'ai préféré une nouvelle d'Anna Gavalda dans Fendre l'armure.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : catherine briat
20/02/2018
La fin d'où nous partons
"Il existe tant de silences différents, et seulement un mot pour les désigner. le silence dans la maiosn a mûri, de silence comme absence de bruit à autre chose, un silence texturé, granuleux, une épaisseur à traverser en trébuchant."
La narratrice vient juste d’accoucher quand Londres est envahie par les eaux.Elle, son mari R. et le nouveau-né, baptisé Z., vont devoir faire à cette catastrophe, d'abord ensemble, puis de manière séparée.
Entre la mère et l'enfant le lien se renforce, tandis que se déroule le scénario malheureusement connu de ce type de situations: camps de réfugiés, organisation des secours,le tout entrecoupé de violences évoquées ici de manière succincte et elliptique, en quelques mots dénués de toute émotion apparente.
On est ici à mille lieues des figures imposée et du style afférent à ce type de texte. Le récit est distancié, on assiste ici à une quasi dissociation de la narratrice, sans doute pour mieux tenir à distance les sentiments trop forts qui pourraient l'empêcher de mener à bien sa tâche essentielle: survivre afin que son fils survive aussi. Mais cette grande économie de moyens et le petit nombre de pages (167) rendent l'émotion d'autant plus puissante.
Un récit paradoxalement optimiste dont la discrète poésie ajoute au plaisir de lecture. Une parfaite réussite.
Cuné m'avait donné envie !
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : megan hunter