10/05/2007
Thelma et Louise à la française ?
D'emblée, le ton est donné. A son neveu qui demande où ils se rendent et chez qui, la narratrice répond : Loin, chez personne.
"Personne
"est en fait le père qui a abandonné ses deux filles et chez qui elles
vont se rendre, après vingt ans de silence.
Etrange
road-movie que celui de ces deux soeurs très dissemblables, l'une
flanquée de deux fils, l'un autiste, l'autre qui essaie de voler (comme
Superman? ), qui quelquesfois même se demande si elle
"n'accumule pas les désastres pour qu'à défaut qu'il soit touché par
[elle], il le soit par ce qui [lui] arrive".
Etrange univers quasi
vide qu'elle traverse, croisant de rares humains, dont un hilarant
gérant d'hôtel qui les croit en cavale; étrange objectif que
celui de seulement pouvoir parler à ce père pour qui
"à l'échelle de l'univers on était insignifiants".
Un
roman très court mais très dense ,dont seule la fin est un tantinet
décevante, trop ambiguë, voire imvraisemblable, cassant le rythme et la
fascination de l'univers de Valérie Sigward, une auteure que j'ai envie
de découvrir davantage.
06:04 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (11)
09/05/2007
"gourgandine des steppes !"
Après un premier roman très court mais plutôt réussi, j'attendais
avec impatience de lire le deuxième opus de Cypora
Petitjean-Cerf (avec un nom aussi romanesque, comment ne pas
écrire de beaux textes ?! ).
Le corps de Liane
tient toutes ses promesses et nous entraïne cette fois dans un
univers presque exclusivement féminin car dans la famille de la jeune
Liane, les hommes ont une fâcheuse tendance à disparaître
"avec une rapidité incroyable", mais peut être n'est-ce pas
plus mal.
Dans ce gynécée évoluent donc trois générations qui se
cherchent et s'efforcent d'être de bonne mères, car "ça ne tombait pas
tout cuit".
Liane quant à elle voit son corps se transformer à toute
allure et elle en souffre. Il lui faudra donc l'aide de celle qu'elle a
élue comme meilleure amie parce qu'elle avait de plus gros seins
qu'elle, pour vaincre sa manie de faire des listes et sa peur de vomir.
Roselyne, mais aussi Eva, la femme de ménage, ainsi que
les héroïnes du feuilleton "Dallas" aideront Liane à s'accepter femme...
Tout
n'est pas rose cependant dans l'univers de Liane, on y croise aussi des
filles qui ne supportent pas -et à juste titre- leur mère, des
filles qui analysent très lucidement et finement le comportement de leur
génitrice mais chaque personnage évolue grâce aux autre, ce qui donne
une tonalité très chaleureuse à ce roman.
Une mention particulière
au personnage de la grand-mère qui sort des clichés habituels et à
celui de l'insupportable et très précoce Armelle qui
concurrence le capitaine Haddock en lançant à tout un
chacun des bordées de jurons pas piqués des vers (cf le
titre de ce billet).
06:08 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (16)
06/05/2007
"Les livres vous suivent et vous hantent"
Les personnages peuvent s'échapper de leur roman (comme chez T.Findley);
Thursday Next, chez Fforde peut à l'inverse entrer dans un roman, voire en changer un
épisode, mais chez Dominique Schneidre et Ce qu'en dit James , ce sont les romanciers qui, dans un entre-deux non précisé, discutent avec la narratrice à grand renfort de citations.
Alice,
soixante-dix ans, a vécu dans une tel compagonnage avec les auteurs,
qu'il est pour elle tout à fait naturel de réciter un poème à
l'électricien releveur de compteur ou de chercher chez James ou
Tolstoï,une solution à ses problèmes pécuniaires.
Elle observe ses
relations avec les livres par le biais de sa mémoire défaillante (mais
il ne faut pas attendre 70 ans pour oublier le contenu d'un livre ou
même le fait de l'avoir lu !) et son appartenance à l'Association pour
le Devoir de Vieillir dans la Plaisanterie est révélatrice de sa
manière d'envisager son vieillissement et sa quasi solitude. Tout la
ramène à la Littérature, "le moinde verre de vodka ouvre toute une
bibliothèque russe", elle connaît tous les problèmes des lecteurs
avides (stockage, rangement ...) et constate que "Toute activité, toute
émotion, tout événement a un double littéraire", ce qui ne peut que
nous séduire...
L'écriture est fluide et élégante. Dominique
Schneidre sait être cultivée sans être cuistre, elle l'art de la
formule (mon exemplaire est tout hérissé de bouts de papier !) et ce
livre témoigne de sa gourmandise des mots et des livres. La
deuxième partie s'essouffle un peu , faute de réelle "intrigue" mais
Alice est si charmante qu'on saura lui pardonner aussi une fin trop
abrupte.
L'avis de Lilly.
Voue en reprendrez bien une tranche ? C'est encore chez Lily !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (19)
14/04/2007
"...le privilège d'être partout chez soi comme les rois, les filles et les voleurs"
Pour répondre à la demande de Gambadou, voici quelques précisions concernat le roman de Muriel Cerf, Les rois et les voleurs .
Ce
livre,je l'ai lu et relu quand j'étais adolescente et à partir de lui,
les livres de Muriel cerf m'ont accompagnée pendant pas mal d'années. Je mentirais en prétendant que c'est toujours le cas car les thèmes abordés dans se derniers romans ne me tentent plus guère...
Muriel Cerf a,
dès son entrée dans le monde littéraire, été célébrée ou détestée. Son
style, baroque et châtoyant, utilise un vocabulaire tour à tour
recherché ou familier et ses longues phrase séduisent ou rebutent.
Les rois et les voleurs
met en scène une très jeune fille Lydie et nous raconte avec humour,
tendresse et vacherie son adolescence. Rien que du classique à première
vue mais le style fait toute la différence et l'on caracole à la suite
de Lydie dans le monde "des gens désespérements grisâtres, couleur de
muraille et de punaise écrasée" pour entrer dans celui , plus onirique
, de la révolte et de la liberté, un monde rempli de gourmandise...
06:23 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (16)
09/04/2007
"Au secours Mrs Dalloway"
"Si vous avez aimé "j'ai renvoyé Marta", vous aimerez "Au secours
Mrs Dalloway"". Ce commentaire m'a aussitôt lancée sur la trace du
roman de Mary Dollinger "passionnée de civilisation française, [qui]a
poussé l'expérimentation jusqu'à se marier en France où elle survit
depuis 1961...".
Quelques clics plus tard me voilà dans la lecture de ce roman.
Comment
dire, c'est vraiment décevant. Mary Dollinger a un joli brin de plume,
plein d'humour anglais, et dans ses meilleurs moments elle m'a fait
penser à Madeleine Wickam ( au temps où elle écrivait encore ces
comédies de moeurs gentiment acides et où elle n'avait pas encore
pris de pseudo pour écrire à la chaîne la série des
"accro du shopping").
Malheureusement, l'histoire, quasi
inconsistante, s'enlise très vite et l'auteure nous fait patauger dans
l'eau de rose, un registre où elle n'excelle guère.De temps en temps
surnagent quelques îlots d'humour où l'on reprend pied avec plaisir
mais cela ne dure guère. Ses personnages n'existent pas (ne pas
exploiter un mastiff de 92 kilos au potentiel comique
évident est un sacrilège!) et les rebondissements invraisemblalbles ne
parviennent pas à réveiller notre attention.
A un moment,
l'héroïne qui tente d'écrire un roman , s'en prend à une écrivaine qui
,à défaut d'être talentueuse, a du succès et lui déclare tout de go
:"J'admire la façon dont vous vendez des milliers d'exemplaires de
livres dans lesquels il ne se passe absolument rien etdont
les sujets sont d'une débilité profonde". Sans aller jusque là, on ne
peut que regretter que Marie Dollinger n'ait eu un bon éditeur pour
mieux encadrer son roman.
09:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (26)
03/04/2007
"Je priais pour que jamais mon mari ne découvre qui j'étais dans mes plis."
J'ai renvoyé Marta de Nathalie Kuperman est un drôle de petit
roman , un roman malin qui finit avant de commencer et où tout commence
à la fin. Vous me suivez ? Je ne suis pas claire ? Hé bien la
narratrice, jeune femme à la tête d'une famille recomposée non plus.
La
situation paraît bien pliée au départ : l'emploi du femme de ménage va
bouleverser le fonctionnement d'une famille et le roman pourrait
de venir lassant s'il ne basculait tout à coup vers une situation de
plus en plus surprenante et folle...De la comédie de moeurs,
prévisible et bien rôdée, on tombe insensiblement dans une
situation beaucoup plus acide.
Des phrases apparemment anodines vont prendre un nouveau sens et des idiosyncrasies révéler une nouvelle dimension.
Une lecture aisée pour ce roman à l'aspect lisse mais plus vénéneux qu'il n'y paraît...
06:03 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (18)
30/03/2007
Par un prof, pour les profs ?
Bardée d'a priori mais néanmoins titillée par la curiosité, j'ai attendu la sortie en poche d'Entre les murs de François Bégaudeau.
Au
début,j'étais plutôt hérissée , non pas par l'oralisation
(forcément vouée à l'échec comme le reconnaît l'auteur à la fin
de son texte), mais par la brutalité des échanges
verbaux. Il aura fallu le premier "S'il te plaît" pour que je me
détende et apprécie pleinement cet ouvrage.
Séries
heurtées de
scènes croquées sur le vif aux quatre coins stratégiques de cet
établissement scolaire du XIXème arrondissement: salle de classe,
salledes profs, salle deconseils, bureau du directeur. Bégaudeau
prend le parti de nous livrer essentiellement des joutes
verbales,décrivant très peu les personnages, nous livrant parfois des
copies mais nous laissant libres de notre jugement. Il prend le parti
de la répétition (les inscriptions des tee-shirts des élèves (ou
des profs) scandent ainsi le récit) car c'est ainsi que fonctionne
la routine scolaire.
Pourtant,
mine de rien, sans nous en rendre compte, nous nous attachons à tous
ces personnages et nous prenons à regretter de ne pas
savoir ce que sont devenus Aissatou, Sandra,
Hinda, Ming et tous les autres; parce que la définition que
donne Bégaudeau du rugby peut s'appliquer à l'enseignement : "Organiser le chaos pour fabriquer de la puissance , c'est passionnant."
05:59 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (18)
29/03/2007
Dédramatisons...un peu
Telle mère telle fille, voci une affirmation péremptoire qui
paraît annonciatrice du pire pour la narratrice du roman. En effet, sa
mère chérie,autrefois autoritaire et pleine de vie est maintenant
atteinte d'une forme de démence sénile.
La vieille damen'a
pourtant rien perdu de sa vitalité et fugue avec un chevalier servant-
tout aussi atteint qu'elle-de la confortablemaison où ils étaient
soignés. Commence alors pour la fille une plongée surprenate dans
le passé maternel afin de retrouver au plus vite les
deux vieux fugueurs (y a plus de vieillesse ! ).
Caroline Brun ne
m'a pas fait rire comme annoncé sur la 4 ème de couverture
mais au moins a-t-elle su dédramatiser une situation difficilement
supportable.Notons néanmoins que les personnages semblent n'avoir aucun
souci financier, ce qui doit bien aider dans la prise en charge
de telles affections.
Beaucoup detendresse et de rebondissements dans ceroman facile à lire qui fait passer un bon moment.
Merci Cath !
06:08 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (10)
27/03/2007
Qu'en pense Georges Chaulet ?
Grâce à un petit saute-mouton bloguesque, j'ai découvert ceci , puis
cela et finalement je me suis procuré ce livre au titre improbable:
Fantômette se pacse, bien évidemment édité au "Diable Vauvert".
Fans
de fantômette, ne vous arrachez pas les cheveux, ne pestez pas
contre Cécile Vargaftig, l'héroïne de notre enfance a un rôle très
fugitif dans ce"petit livre soi-disant d'imagination, un de ces
lesbo-polars qui n'intéressera pas les journalistes "(!) .
Fugitif mais essentiel puisque Fantômette sauve le personnage-narrateur
Cécile Vargaftig et finira dans ses bras.
Fantômette
n'est évidemment qu'un prétexte , tout comme le lesbo-polar dont on se
moque rapidement, intéressé que l'on est par les digressions drôles et
pertinentes de l'auteure. Amateur d'autoroutes bien balisées et bien
léchées, passez votre chemin.
Ce roman est le royaume du chemin
que l'on prend pour se perdre; pour mieux se retrouver, un peu sonné
mais le sourire aux lèvres car 'les idées, ça va cinq minutes. Les
histoires, c'est ça qui sauve le monde". Et ça tombe bien car la tête
de Cécile est pleine d'histoires et son roman fourmille de réflexions
sur ce qu'on écrit et qui advient, (l'auteure nous donne même sa
méthode(très particulière) pour commencer un texte...) , les
différences entre scénariste et romancier, bref ça cause de ce que nous
aimons: les mots et leur pouvoir et de manière plus globale des
artistes et de leur rôle dans la société.
Cécile Vargaftig a un nom
heurté mais son écriture est fluide, pleine d'humour ("Ma mère était
communiste, mon père juif, et moi homosexuelle. A nous trois, on
faisait un beau charnier"), elle joue avec la structure narrative
et l'on s'attache vraiment à ce roman si particulier, à la fois léger
et acéré.
Ps: même si vous menacez de chatouiller Boulotte et Ficelle (qui n'apparaissent pas ici), je ne révèlerais pas avec qui Fantômette se pacse, mais soyez rassuré(e),: elle a choisi une personne de qualité...
06:03 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (15)
22/03/2007
Processus inversés
Le titre du roman de Michel Luneau est explicite : Paroles d'arbre
. Et là on craint le pire: donner la parole à un arbre,
quel procédé enfantin, voire ridicule. Et pourtant pendant 208 pages,
l'auteur tient le pari et son écriture à la fois poétique et puissante
nous rend proches des préoccupations de cet arbre voué à l'immobilisme
mais dont la pensée est vive , ludique et parfois philosophique...
Dans Végétal
, d'Antoine Percheron, le processus est inversé : le narrateur humain
devient végétal. Le fantastique est pourtant ici supplanté par
l'émotion qui court tout le long de ce texte très court que l'auteur
n'a pu terminer.
Atteint d'une tumeur au cerveau qui a comme
caractéristique de pousser des racines au fond du cerveau, il a donc
vécu dans sa chair ce processus qu'il évoque sans pathos, dans une
langue très âpre mais très belle. A ne pas manquer.
06:02 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (13)