15/01/2009
Un samedi soir sur la terre
"Dominique Périchon est un pseudonyme. Son vrai nom est Périchon Dominique." Le voyage aurait pu commencer sous des auspices moins souriants...Nous voilà donc partis en compagnie de Lydie et de sa copine grâcieusement surnommée "Chatte" (!) non pas dans un night-club mais une boîte de nuit car l'action se déroule" dans nos provinces". Les deux "greluches", je cite toujours , viennent chercher l'une sa part de rêve de pacotille , l'autre celui pour qui elle remplira sa fonction de "réservoir aux mâles du canton." Lydie repartira avec un Travolta à la petite semaine , ils écraseront une chienne, ce qui donnera lieu à des révélations grandguignolesques.Ellipse. Nous retrouvons tous ces fantoches quelques années plus tard en train de se Bidochonner tristement puis de partir en vrille, évoluant dans un monde où tout est faux, de la noyée au sauveteur.
Samedi soir et des poussières n'est pas un roman mais une pièce de Guignol même pas drôle. Les personnages n'ont aucune épaisseur psychologique et les tentatives d'humour tombent systématiquement à plat tant on ressent de mépris dans ce qu'évoque l'auteur. Dommage le style est souvent pétillant mais l'histoire est totalement insensée.Un de ces livres qu'on referme en disant "à quoi bon ? "
Merci à Cuné pour l'envoi !
L'avis de Laurence, nettement plus enthousiaste !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : dominique périchon, samedi soir et des poussières
09/01/2009
"J'ai rendez-vous avec une bombe. Si tu foires, je te fume!"
SEGPA, CPA autant de sigles inconnus* pour Chefdeville, auteur d'un unique roman policier (quinze ans déjà !), et qui va pactiser avec l'ennemi de toujours, à savoir l'Education Nationale, en acceptant d'animer des ateliers d'écriture dans des sections en difficulté.Même si l'animateur improvisé est un fameux lascar,"...je décidai que c'était le moment de mettre mon grain de sel. Mais moi je ne fonctionnais qu'au gros sel et je visais toujours entre les deux yeux.", la réalité va le frapper de plein fouet et il aura fort à faire pour que tout son petit monde prenne la plume entre deux conflits verbaux !
Tirant à boulets rouges avec une verve réjouissante sur les institutions , bien moins sur certains profs, derniers des Mohicans à tenter de préserver des îlots de culture, Chefdeville s'en prend aussi aux écrivains : " Ce sont souvent des gens prétentieux et nombrilistes, pas autant que les théâtreux, ça c'est impossible, mais ils en tiennent tout de même une sacrée couche."ça fuse de partout, c'est bourré d'énergie et ça m'a fait éclater de rire à de nombreuses reprises du début à la fin ! Un feu d'artifice pour qui ne craint pas l'écriture non académique ! Et, s'il vous plaît Monsieur Chefdeville, le prochain roman, pas dans quinze ans !
Un énorme merci à Cuné pour cet envoi revigorant !
*cachant des tribus bizarres et quelque peu laissées en friche par l'Education Nationale.
L'atelier d'écriture,Chefdeville, Le dilettante, 253 pages à dévorer !
06:05 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : chedeville, l'atelier d'écriture, ah que j'ai ri ! j'endemande, vite !
07/01/2009
...on n'a jamais fini de vous connaître, vous êtes comme le Bronzé d'Amposta."
Alexis, cinéaste en devenir et démiurge potentiel, s'acoquine avec Sammy, malfrat cinéphile qui veut faire de sa vie une oeuvre d'art à savoir bien évidemment un film, quitte à modifier son existence pour que le script "colle" mieux aux desiderata du réalisateur.Mais très vite, cette amitié se révèlera encombrante , voire dangereuse, pour Alexis qui découvrira à ses dépens que la réalité peut très rapidement dépasser la fiction...
Entrer dans Le film va faire un malheur c'est se laisser entraîner dans un récit au rythme endiablé, une mécanique de précision où chaque détail a son importance tôt ou tard, où les personnages , évoluant tour à tour dans les milieux de la pub, du cinéma, ou du crime ont comme point commun de chercher à manipuler, avec des résultats souvent fort drôles, leurs prochains.
Alexis, qui souhaite entretenir avec les autres des "rapports intermittents et irresponsables" pourrait être franchement imbuvable , mais le fait qu'il soit comme placé dans un shaker agité par un fou furieux du début à la fin le rend finalement plus supportable. Sammy , lui, s'échappe très vite du stéréotype dans lequelle réalisateur voudrait commodément l'enfermer et fait craquer le vernis littéraire de son coach cullturel. Quant à Clara, "plan cul" ou "fiancée" suivant l'humeur d'Alexis, elle se révèle bien plus forte et équilibrée que les hommes qui l'entourent et elle rendra coup pour coup car "La gentillesse de Clara était ce qu'elle avait de plus féroce."
Flirtant parfois avec le drame, le roman est néanmoins une comédie grinçante dont le style alerte, truffé de formules qui font mouche (mon exemplaire en est sorti tout hérissé!) nous emporte dans une frénésie intense .On se demande parfois comment Georges Flipo va s'en sortir mais il révèle ici une habileté diabolique et jamais son récit ne s'essouffle. A quand l'adaptation cinématographique ? !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : georges flipo, le film va faire un malheur, humour, cinéma, publicité, manipulations à gogo
30/12/2008
"Elle écrase son chagrin contre la vitre."
Ouvrir un livre de Françoise Lefèvre c'est pousser la porte d'une maison amie, entrer dans un univers où la douleur n'est pas exclue mais où elle est apprivoisée. L'écriture à la fois poétique et sensuelle de cette auteure nous accompagne tout au long du parcours de La grosse : son installation dans cette maison de garde-barrière, son amitié avec un vieil homme aux portes de la mort mais chérissant la vie. Pauvres tous deux mais riches d'amour et prodigues de cet amour, réussissant à créer une sorte de paradis en marge de la ville et de la mesquinerie de ses habitants...Mais tout va se dégrader et Céline connaîtra une Passion proche de celle de Marie-Madeleine...
Ce livre, très court, est riche de phrases qu'il faut laisser infuser, au hasard :
"Elle sent les arbres qui poussent dans sa tête. La pluie fine gonfle ses cheveux comme dans une mansarde d'amour. Les yeux dans le ciel, elle boit la campagne comme une liqueur verte."
"C'est inouï le nombre de gens qu'il faut chasser de sa route pour qu'ils ne viennent pas piétiner les joies minuscules d'une journée."
Un livre à chérir.
L'avis de Florinette qui a remis ce livre-voyageur sur les rails ...ce dont je la remercie chaleureusement !
06:05 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : la grosse, françoise lefèvre, poésie, sensualité
26/12/2008
Heureuse surprise !
Des a priori , j'en avais plein mes poches: l'histoire , dramatique au possible , cette femme qui veille,en Afghanistan ou ailleurs, sur un homme dans le coma; le style, que je craignais lyrique.Mais Papillon avait su me tenter, Aifelle aussi (pas de billet pour l'instant ? )et quand je l'ai trouvé à la médiathèque j'ai sauté dessus.
Bien m'en a pris car Syngué Sabour, pierre de patience fait voler en éclats tous les clichés que l'on pourrait s'attendre à trouver dans un tel texte. J'y aivu une tragédie se déroulant inexorablement en un seul lieu, cette pièce où l'homme est étendu, pièce qui fonctionne comme un aimant, attirant à elle tous les protagonistes. Peu de personnages,principalement bien sûr cette femme qui se libère par la parole devant ce corps masculin qui devient peu à peu pour elle une pierre de patience, "pierre magique que l'on pose devant soi pour déverser ses malheurs, ses souffrances, ses misères...".Cette femme, tiraillée entre rébellion et soumission,soigne son mari mais en même temps l'injurie et lui assène tout ce qu'elle n'a jamais osé lui dire: "Cette voix qui émerge de ma gorge, c'est la voix enfouie depuis des milliers d'années.". Peu à peu se reconstitue l'histoire d'un mariage arrangé, mariage qui a peu de réalité , sinon aux yeux de la loi et de la religion, tandis qu'autour la guerre se déroule et parfois s'immisce dans la maison. Cette épouse sauve ses filles mais parviendra-t-elle à se préserver ?
Il y a une telle vitalité dans ce roman qu'on a envie de crier : "Vas-y, fais ce que tu dois faire !",révoltée que l'on est devant la situation qui est imposée au femmes en Afghanistan et ailleurs . Rappelons par ailleurs qu'Atiq Rahini a écrit ce roman "à la mémoire de N. A.*-poétesse afghane sauvagement assassinée par son mari."
Dans une langue fluide et poétique le romancier célèbre la victoire-même de courte durée- de la sensualité sur l'oppression politique et religieuse. Un prix Goncourt qui restera dans les mémoires .
Syngué sabour. Atiq Rahini.POL.154 pages.
*Nadia Anjuman (25 ans)
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : prix goncourt 2008, syngué sabour, pierre de patience, atiq rahimi
17/12/2008
"...c'est l'antagonisme qui crée la beauté."
Ah, il l'a mauvaise Mohamed ! Non seulement sa fille "unique et préférée" Myriam poursuit ses études loin de lui à Toulon, mais en plus elle vient de lui forcer la main pour qu'il cohabite avec son amoureux, un nommé Gaston Leroux (comme l'auteur, pas la chicorée), un Gaulois pur jus ! Forcément, ça va faire des étincelles (d'autant plus que Mohamed est artificier...).
Alors, pour retrouver sa sérénité, le père bougon se réfugie dans les contes et légendes qu'ils partageaient avec sa fille quand elle était petite, des contes qui tissent un lien entre le passé de 'Algérie et le présent parisien. Mais attention, ces contes qui s'entremêlent savamment avec la réalité,il y parle "avec des mots d'aujourd'hui.ça va vite, il fait swinguer les phrases et les mots d'argot.", ils ne sentent pas la naphtaline !
Commencé sur un mode humoristique et léger, le roman,au fil des récits du passé algérien gagne en gravité et profondeur. On sourit d'abord de ce père qui ne veut pas admettre que sa fille n'est plus à lui tout seul. On a le coeur serré quand le roman se termine et on se sent un peu orphelin à l'idée de quitter ces personnages croqués avec la verve d'Akli Tadjer.
Akli Tadjer. Il était une fois peut être pas. JC Lattès.327 pages
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10/12/2008
Rhésus , reviens !
Shocking ! Non seulement les Vieux éprouvent des sentiments mais ils ont aussi une sexualité active ! L'irruption dans une maison de retraite d'un singe Bonobo érotomane et gérontophile va rendre l'atmosphère plus qu'électrique !
Héléna Marienské s'est visiblement beaucoup amusée à l'écriture de ce roman joyeusement iconoclaste où la diversité des narrateurs permet tour à tour de convoquer différentes formes d'écriture : journal intime, haïkus, poésie...sans oublier des références à Pantagruel, Ulysse, Homère (avec un Hector haut en couleurs!).
La Lectrice (désolée messieurs !) est parfois prise à partie de manière vigoureuse et féroce : "Récapitulons, depuis le début, des vieux et rien que des vieux ou des vieilles, eux aussi dans l'attente. Et l'on t'infligerait maintenant, Lectrice, une description en règle de corps décharnés et concupiscents se livrant à d'inconcevables débauches ? des mains tavelées, aux veines turgescentes, aux ongles incarnés, et secouées de hoquets plus ou moins parkinsoniens, vont donc , sous tes yeux horrifiés, s'agiter et précisément dans le sens du plaisir, Où va-ton ? "
On croise aussi un premier ministre et un ministre de l'intérieur qui se haïssent avec ardeur, plus vrais que nature ,et l'on se laisse emporter par ces flots agités , où l'on est d'ailleurs soi même souvent secoué de rire. Petit bémol, le dernier chapitre (dont je ne vous révèlerai pas la teneur) jette une éclairage un peu daté sur ce qui n'a été qu'un feu de paille médiatique et vient gâcher notre plaisir en donnant une dimension un peu trop terre à terre à cette lecture par ailleurs jubilatoire. Décapant et réjouissant !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : vieux, héléna marienské, sexualité, pastiches, bonobo, rhésus
06/12/2008
piqûre de rappel !
Ron l'infirmier s'appelle en réalité William Réjault, c'est du moins sous cette identité qu'il apparaît sur la couverture de La chambre d'Albert Camus et autres nouvelles qui vient de sortir en poche.
Billet ici !
20:18 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : ron l'infirmier, nouvelles, la chambre d'albert camus, william réjault
04/12/2008
Une pâle beauté
Commencée avec Les rois et les voleurs, récit d'une adolescence à cent à l'heure, mon immersion radieuse dans l'univers de Muriel cerf s'est logiquement poursuivie avec L'antivoyage, roman relatant ses périples en Asie.
Babel vient d'avoir l'excellent idée de rééditer ce premier roman de Muriel Cerf, l'occasion pour ceux qui ne la connaîtraient pas encore de se frotter à son univers bigarré et foisonnant.
Sa langue baroque et chatoyante charrie tour à tour l'or et la boue, son narcissisme séducteur fascine le lecteur, le tout nous entraîne dans un monde flamboyant. A découvrir absolument !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : muriel cerf, voyages, antivoyage, asie, quand va-t-on rééditer "les rois et les voleurs "?
28/11/2008
"Moi, c'est mon âme qui ne bat plus."
Celui qui parle ainsi c'est Slimane. Slimane qui admire et chérit son grand frère Maxence . Avec lui le quotidien est un peu plus doux car "il fait danser la vie. Il l'oblige à voler toujours plus haut, même quand elle n'en peut plus et qu'elle veut se fracasser sur le bitume." Maxence qui lui explique que les adultes "font des erreurs, et après , ils ont plus la force de tout recommencer." Comme leur mère qui les aime mais pas au point de les emmener loin du Démon, leur père qui explose en crises de rage incontrôlable, les roue de coups et fait régner la terreur. Maxence qui va préférer un jour partir au Pays sans adultes ...
En lisant le deuxième roman de Ondine Khayat j'ai plus d'une fois songé à Momo le héros de La vie devant soi d'Emile Ajar alias Romain Gary. Même émotion , même invention langagière mais ici la voix enfantine triture les mots pour mieux faire ployer le réel, pour s'en échapper ne serait-ce qu'un instant.
Partant d'une situation émotionnellement très forte, (j'ai eu les larmes aux yeux à plusieurs reprises),l'auteure tempère la violence par l'évocation du monde très imagé de Slimane. On frôle parfois le pathos et peut être aurait-il fallu un tout petit peu raccourcir certains passages afin de donner davantage de densité au récit mais il n'en reste pas moins que j'ai dévoré d'une traite ce roman très émouvant. Une vraie voix, intense et belle.
Merci à Suzanne de Chez les filles et aux Editions Anne Carrière pour ce "pur moment d'émotion."
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (24) | Tags : ondine khayat, le pays sans adultes, enfance fracassée, amour fraternel, violence