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17/03/2015

Americanah

"Alexa et tous les autres invités, peut être même Georgina, comprenaient tous la fuite devant la guerre , devant la pauvreté qui broyait l'âme humaine, mais ils étaient incapables de comprendre le besoin d’échapper à la léthargie pesante du manque de choix."

Parcours surprenant que celui d 'Ifemu : alors que de nombreux africains rêvent d'aller aux États-Unis, après quinze ans  passés dans ce pays, elle rentre chez elle à Lagos.
Si j'ai beaucoup aimé le parcours social de cette héroïne, sa lutte pour se faire une place en Amérique, son regard sur la société américaine, sa langue (bravo à la traductrice) que j'entendais chanter à mes oreilles avec ses interjections ponctuant chaque fin de phrase, son retour et son ascension sociale au Nigeria, j'ai moins été convaincue par plusieurs éléments.chimamanda ngozi adichie
D'abord par les son blog, à l'écriture simpliste, même si les fait détaillés sont intéressants. Ensuite son parcours amoureux aux États-Unis où elle semble juste collectionner des spécimens lui permettant d’étudier un large éventail de cas de figures. Quant à son amour de jeunesse, inversement on frôle le sirupeux. Mais bon, je ne suis pas une grande sentimentale !
Il n'en reste pas moins que , nonobstant ces quelques petites réserves, j'ai beaucoup aimé ce récit et les descriptions particulièrement vivantes et bien croquées de la vie quotidienne,tant aux États-Unis qu'en Afrique.

Tout le monde l'a lu !

Merci aux tentatrices, Clara et Cuné (plein d'avis en lien) !

Papillon a comme moi quelques réserves.

12/03/2015

La fille...en poche

"Je ne suis peut être pas née capitaine de ce bateau, mais je suis née pour le secouer."

Sa mère l'appelle "Sunshine" le matin et "la fille" le soir. Malgré les défaillances-pointées avec lucidité par la narratrice- de cet univers de petits blancs vivant dans un trailer park (parc de caravanes) à Reno, beaucoup d'amour circule dans la famille essentiellement féminine de la jeune Rory.
Cette dernière, faute de modèle familial conforme à la "norme", puise dans un manuel de scoutisme de quoi avancer dans la vie. tupelo hassman
Elle compile journal intime, dont des passages sont parfois totalement caviardés pour mieux rendre compte de l’indicible et rapports "linéaires et catégoriques" des travailleurs sociaux parlant "ouvertement de vérité et de culpabilité."
C'est cette relation aux mots, que Rory excelle à épeler à l'école, se plaçant ainsi en dehors des limites de ce que la société attend d'elle, que j'ai particulièrement apprécié dans ce roman revigorant et lucide.
Rory porte un regard incisif sur deux univers complètement différents, là où le mot "maison" ne recouvre pas la même réalité, là où des gens considérés comme "arriérés" ne bénéficient pas de leurs droits. Devenir ce que l'on attend d'elle, suivre l'atavisme familial en quelque sorte , ou s'insérer dans un monde qui la rejette ? Rory trouvera une troisième voie , plus conforme à sa personnalité, riche et intelligente. Un roman qui échappe à tout misérabilisme ainsi qu'à tout angélisme et qui sonne juste. Un coup de cœur et ce n’était pourtant pas gagné d'avance.

09/03/2015

Ce qui était perdu ...en poche

”Il faut le dire dès le début, sinon on t'apporte toujours plus de bols.”

1984.  Une petite fille qui  joue les détectives en herbe disparaît.2003.Un agent de sécurité  du centre commercial Green Oaks à Birmingham aperçoit sur un écran de  contrôle une  fillette et sa peluche. Cette image furtive  lui permettra de nouer le contact avec Lisa, employée surmenée d'un magasin de disques. A eux deux, ils mèneront une enquête dans les couloirs de service du centre commercial, autant sur Kate, la petite fille disparue ,que sur eux-mêmes,  renouant les fils d'un passé où régnait peut être l'innocence... Au coeur de ce  récit, fascinant et menaçant, un immense centre commercial.
Tout cela semble sinistre à première vue mais se révèle un mélange subtilement dosé d'émotion , d'humour, de suspense, de critique de la société de  consommation, où les gens sont bien contents d'aller faire un tour au centre commercial le dimanche pour combler le  vide de leur existence, où l'on assiste à une hilarante formation commerciale. Sans compter que Catherine O'Flynn , dont c'est ici le premier roman , possède tout à la fois l'art de rendre  ses personnages attachants, Kate la première, mais aussi de maîtriser totalement l'art de  la narration.  Rien n'est gratuit, tous les détails ont leur 51fgeW29QjL._AA160_.jpgimportance  mais tout se met en place harmonieusement, comme les  pièces d'un puzzle.  Quand la date 1984 est  réapparue dans la dernière partie du livre, j'ai eu le souffle court tout en tournant les pages... Quant à la polyphonie des narrateurs,  elle permet  aussi bien de donner le point de vue de  chacun des protagonistes que  de mimer les voix peuplant cette tour  de Babel qu'est  le centre commercial.Jusqu'au bout du récit , les éléments s'imbriquent  pour le plus grand plaisir  du lecteur qui sort de ce roman, ravi, le coeur battant  la chamade et le sourire aux lèvres devant une telle réussite.  Magistral ! Voilà longtemps que je n'avais pas connu une telle émotion de lecture !

02/03/2015

Quand vient le temps d'aimer

"La beauté est un état éternellement hors de portée."

Vacances d’hiver à Erdenfield, petit village du Sud de l'Angleterre. Les étudiants, harassés, rentrent dans leurs foyers, les adultes règlent des problèmes domestiques mais tous,quelque soit leur âge, se débattent avec des problèmes amoureux.
Qu'ils soient tiraillés par le démon de midi, découvrent l'infidélité d'un conjoint , souhaitent se venger, tombent amoureux de la mauvaise personne ou tentent de briser une solitude qui leur pèsent, tous les personnages sont envisagés avec la même bienveillance par l'auteur. william nicholson
Les portraits sont bien campés, du chirurgien esthétique au scénariste en butte aux demandes les plus absurdes en passant par la femme au foyer qui souhaite renouer avec une vieille flamme (ce qui nous vaut une scène de  sexe hilarante dans un hôtel !) jusqu'au vieil artiste atrabilaire dénonçant le vide de l'art conceptuel.
On retrouve avec bonheur les personnages de L'intensité secrète de la vie quotidienne (clic) (qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu), la capacité de l'auteur à inscrire ses personnages dans un quotidien criant de vérité, son humour parfois vachard (les hommes ne sont pas épargnés ! : "-[...] que suis-je censée offrir à Tom pour Noël ? Une ceinture de chasteté ?
- Je ne crois pas que cela existe pour les hommes.
-Si je lui achetais une gaine  ? Ce ne serait pas mal pour lui tenir le ventre. Sans compter que j'aimerais le voir porter une gaine  avec une tr... bien raide.")
 et on passe un excellent moment dans ce roman 100 % british !

Quand vient le temps d'aimer, (All the Hopefull Lovers), William Nicholson, traduit de l'anglais par Anne Hervouët, Éditions de Fallois 2015, 333 pages délicieuses.

23/02/2015

Chers voisins...en poche

Ils étaient réunis sous le lustre central, les hommes discutant football et voitures pendant que les femmes bavardaient sur ce ton faussement intimes des gens qui ne s’aiment pas beaucoup et sont néanmoins obligés de se fréquenter."

Pepys Road, une rue de Londres d'un quartier autrefois peu élégant a maintenant grimpé dans l'échelle socio-économique. En décembre 2007, y résident aussi bien Petunia Howe, qui y a toujours vécu que des familles de traders où les enfants sont "gâtés mais négligés" ou encore une famille pakistanaise dure au labeur.. L'argent semble couler à flots dans Londres mais pas forcément pour tout le monde. Et dans Pepys Road ne font que passer des réfugiés apatrides, coincés dans d'inextricables situations administratives, des ouvriers du bâtiment polonais ou encore un petit génie du football sénégalais. Bref, un microcosme représentatif de la société londonienne dont la tranquillité va être mise à mal par de mystérieux courriers avertissant: "Nous voulons ce que vous avez"... john lanchester
John Lanchester dans ce bon gros roman de 567 pages où alternent les points de vue nous dépeint avec acuité une société  sur le point de basculer. Des personnages attachants, une écriture sans fioritures mais efficace font qu'on ne s'ennuie pas une minute dans ce roman qui tient ses promesses, même s'il lui manque une pointe d'originalité. Idéal pour un dimanche d'hiver

19/02/2015

J'aimerais tellement que tu sois là ...en poche

"Devenir le propriétaire de l'exact opposé de cette ferme profondément enracinée."

Jake a troqué la ferme familiale du Devon contre un parc de caravanes sur l'île de Wight, qu'il administre de manière plutôt débonnaire. L'instigatrice de ce changement radical ? Ellie, à qui il était promis depuis l'enfance.graham swift
Pourtant, cette vie en apparence plus douce semble avoir viré à l'aigre : Jake se retrouve seul avec un fusil à attendre l'hypothétique retour de sa femme.
Le roman de Graham Swift possède le rythme placide des vaches et son personnage principal en a l'apparence rustique. Mais s'il mâche et remâche-comme les bovidés- les événements passés, c'est pour les analyser avec une finesse quasi chirurgicale. Les relations familiales, les non-dits, les jalousies tues mais vivaces, tout ceci constitue la matière de cette rumination qu'il faut prendre le temps de savourer.
Un roman qui analyse aussi l'évolution des campagnes anglaises et la disparition de tout un pan de sa population. très subtil et prenant.

18/02/2015

7 jours...en poche

"Tellement plus facile quand la cible ne bougeait pas.ça ne venait pas du fusil.ça venait de lui."

Une avocate d'affaires assassinée. Un tueur qui menace d'abattre un policer par jour tant que le meurtrier n'aura pas été arrêté. Et qui commence à tenir sa promesse.
Benny Griessel , héros  de 13 heures et de Le pic du diable, tout en se débattant avec des problèmes personnels et une piètre estime de soi va devoir faire face à la situation.deon meyer
Roman classique, efficace et c'est tout. Je n'ai aps retrouvé la tension des précédents épisodes etc 'est un peu dommage. un très beau personnage de femme alcoolique néanmoins, traité sans pathos ni voyeurisme: "Vous devez savoir, Alexa va essayer de vous manipuler.Elle va se mettre en colère, elle va pleurer, elle va tenter de vous amadouer, elle va user de tout son charme. Elle aura des symptômes de manque cet après-midi, elle va vous crier dessus, elle va essayer de vous faire du chantage émotionnel. (Il vit les yeux d'Alexa qui lançaient des éclairs) Ce n'est pas Alexa, c'est l'alcool. Vous devez comprendre ça ."

16/02/2015

Kentucky Song

"Susanna était la personne la plus malheureuse de son entourage, et peut être le malheur était-il normal, peut être était-ce ce dont le reste du monde se contentait. Ronnie en voulait plus."

Roma, une petite ville du Kentucky. Tranquille, jusqu'à ce que ce que Ronnie, jeune femme aimant profiter de la vie à sa manière, disparaisse.holly goddard jones
La première à donner l'alerte est sa sœur cadette, Susanna, qui mène une vie bien rangée de professeure et de mère de famille. Mais tous ceux qui, de près ou de loin, ont croisé la route de Ronnie, vont voir leur existence bouleversée par cette disparition.
Le roman de Holly Goddard Jones confirme tout le bien que j'écrivais déjà concernant ses nouvelles (clic): l'observation fine et précise des plus légères variations psychologiques de ses personnages, qui, quel que soient leur âge ou leur situation social nous deviennent très rapidement proches et le style, élégant et précis. Les plus légers relents de racisme ou de "conscience de ses privilèges" sont captés par la romancière.
Quant à la structure du récit, elle est riche en manipulations , alternant thriller psychologique et suspense policier, nous ménageant de nombreux rebondissements subtils et parfaitement amenés. Les 478 pages se tournent quasi toutes seules et sont riches en émotions. Un pur bonheur de lecture !

Kentucky song, Holly Goddard Jones, traduit de l'anglais par Hélène Fournier, Albin Michel 2015.

 

14/02/2015

Dark tiger...en poche

"Les êtres humais se contentaient de s'entretuer."

 

Les nuages noirs s'amoncellent autour de Stoney Calhoun, toujours amnésique mais toujours doté de capacités qu'il a redécouvertes au fil des aventures précédentes.
Pour retrouver sa vie tranquille entre sa cabane au fond des bois et son travail à la boutique de pêche de son amoureuse Kate, le voilà contraint de remplacer un guide de pêche dans un  luxueux hôtel perdu en pleine nature, afin d'enquêter en toutes discrétion sur la mort d'un agent gouvernemental.william  g tapply
La donne a donc changé car dans les précédents volumes, c'était bien malgré lui que Stoney se retrouvait à mener des enquêtes, ce qui donne une tonalité plus sombre au roman, le héros étant soumis à davantage de tension.
J'ai retrouvé avec une certaine mélancolie les personnages de William G Tapply, sachant que l'auteur était décédé en 2009, juste avant la sortie aux Etats-unis de ce volume. Peut être est-ce que ceci a influé sur ma lecture car , même si les magnifiques paysages sont là, l'aspect tout à la fois bourru et plein de charme de Stoney aussi,même je ne me suis pas ennuyé une minute en lisant ce roman  le charme n'a plus opéré avec autant de vigueur.  J'y ai trouvé des redites (concernant les relations entre les chiens et je cite "la bouffe") et Stoney , toujours stoïque face aux emportements de Kate a fini par me laisser de marbre. Peut être ai-je aussi été aussi contaminée par le certain désenchantement qui imprègne ce livre...
Un adieu en demi-teintes.

12/02/2015

La femme d 'un homme... en poche

"ça ne sert à rien de construire un mur de mots. Les mots sont comme des outils, facilement convertibles en armes, qui bâtissent des clôtures là où elles ne sont pas  essentielles. La vie ne se résume pas aux mots. Les gens, par nature, baignent dans l’ambivalence, entraînés par des vents capricieux et agités."

Beaucoup de non-dits dans le couple en apparence idéal que forment depuis vingt ans, Todd, promoteur immobilier ambitieux, et Jodi, thérapeute à mi-temps. Un élément perturbateur, dont Jodi veut à tout prix minorer l'importance, va rompre cette belle harmonie et entraîner le couple dans un maelstrom d'émotions et de situations qu'ils ne parviendront plus à maîtriser. ASA Harrison
The silent wife, titre original du roman, rend bien compte de la manière si particulière de l'héroïne de gérer ses émotions et sa vie. Tant de perfection,( elle est très classe, veut faire de sa vie un modèle de perfection et pour cela sélectionne soigneusement ses patients pour ne pas sortir de sa zone de confort et de compétence ),  des apparences aussi  lisses, ne peuvent évidemment que cacher un grand bazar intérieur que le lecteur découvrira progressivement, même s'il ne sera jamais clairement nommé.
Et c'est ce que j'ai aimé dans ce thriller psychologique où, à mon avis, la psychologie domine largement: si comme l’écrit Cuné, on flirte avec les clichés, les personnages sont beaucoup plus fouillés qu'il n'y paraît et cette volonté de ne rien nommer précisément est extrêmement efficace du début à la fin. Une narration fluide, des rebondissements surprenants, un pur régal piqueté de marque-pages !