12/01/2024
#Premièresplumes #NetGalleyFrance !
"Désormais, Benzene est juste un oiseau comme les autres, et aucun oiseau ne sera plus jamais juste un oiseau. "
Quand le narrateur-auteur, Charlie Gilmour décide de prendre en charge le bébé-pie tombé (jeté ?) du nid dans une zone industrielle de Londres, il n'est pas conscient de ce qu'il va mettre en branle. Lui qui ne s'est jamais vraiment intéressé aux animaux , va être fasciné par cet oiseau accaparant, intelligent et sacrément tyrannique qui ira jusqu'à nicher des boulettes de viande dans ses cheveux !
Mais cet oiseau fait aussitôt écho à un fait marquant concernant son père biologique qui lui-même a élevé un choucas, autre membre de la famille des corvidés. Ce père, qui a fui quant Charlie était encore bébé, est un poète -magicien, expert dans l'art de s'esquiver et d'esquiver les responsabilités...
Le narrateur va donc , avec cet animal sauvage, expérimenter une forme de paternité (qui le préparera peut être à accepter lui-même de devenir père) , tout en cherchant à rétablir un lien avec son propre géniteur.
Dans ce roman autobiographique, l'auteur ne se donne pas le beau rôle , mais livre avec honnêteté ses questionnements, ses erreurs et décrit avec poésie, humour et émotion son parcours et les relations qu'il tisse avec cette pie, prénommée Benzene, mais aussi avec ses proches et en particulier avec son père adoptif, leader du groupe Pink Floyd.
Un magnifique roman autour de la paternité mais aussi des responsabilités de la prise en charge d'un animal sauvage qui lui a appris beaucoup et surtout que "Prendre soin des autres peut aller trop loin, devenir une captivité. "
Et zou, sur l'étagère des indispensables.
Éditions Métailié 2024, traduit de l'anglais par Anatole Pons.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : charlie gilmour
11/01/2024
Bivouac...en poche
"Comme les humains, les arbres isolés n'ont pas grand chance de survie. La résilience du bois vient avec la force du nombre , la prise de ses racines entortillées à une société de semblables. "
Quel plaisir de retrouver Anouk, Raphaëlle et Coyote, leur chienne ! Cette fois , les deux amoureuses vont se confronter à la vie en communauté , d'abord dans une éco-ferme communautaire puis , par la force des choses, au cœur d'une tribu de guerriers écologistes.
En effet, Gros-Pin , l’arbre préféré de Raphaëlle , est menacé d'être abattu et avec lui toute une partie de la forêt que les protecteurs de la nature voudraient protéger en en faisant une réserve faunique. Mais les intérêts économiques et politiques priment et la construction d'un oléoduc ne s’embarrasse ni de la biodiversité, ni des conséquences catastrophiques à plus long terme.
Gabrielle Filteau-Chiba, à son habitude, maitrise à la perfection l'art du récit et c'est pourquoi nous retrouvons un personnage,Riopelle, avec qui Anouk avait connu une liaison aussi brève que passionnée. L'occasion pour le lecteur de découvrir la vie de ces "eco-Warriors" qui ont fait le choix de sacrifier leur vie personnelle pour tenter de sauver la Nature. L'occasion aussi de confronter ses personnages aux fluctuations du désir et au polyamour.
La langue est toujours aussi belle, l'intensité dramatique aussi forte et le lecteur ne sortira pas indemne de cette lecture qui fait la part belle aux descriptions de le la forêt et des vies qui s'y déploient. Une réussite qui file sur l'étagère des indispensables.
PS: peut se lire indépendamment des deux volumes précédents , mais ce serait se priver de grands bonheurs de lecture.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : gabrielle filteau-chiba
10/01/2024
#SoupapesCie #NetGalleyFrance !
Quelle déception ! Moi qui avais adoré le roman de cette autrice Le dernier samouraï, je me suis sentie littéralement étouffer dans celui-ci. En effet, nous sommes enfermés dans les fantasmes (très répétitifs ) du narrateur, fantasmes, qui réduisent la femme à un objet dans lequel se soulager. Enfermés dans sa vie de vendeur à domicile qui échoue à vendre des aspirateurs. Ce qui nous vaut de nombreuses réflexions, peu passionnantes à dire vrai sur ce métier. Et quand le personnage met en place son idée destinée à éviter des soucis (accusations de harcèlement sexuel, voire pire) aux employés trop motivés des entreprises, j'ai touché le fond.
Le style , basé sur de nombreuses anaphores, contribue à cet effet d'enfermement et , pour le coup, il est efficace.
Sans doute suis-je passée à côté de ce livre. Dommage.
Éditions Du Cherche Midi 2024. Traduit de l'anglais (E-U) par Anne Le Bot.
06:00 Publié dans je ne regrette pas de les avoir juste empruntés, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : helen dewitt
09/01/2024
Nous étions le sel de la mer
" C'est facile d'aimer un rêve, un fantasme, une femme insaisissable, mais peut-être qu'au quotidien, dans l'au-jour-le-jour, Cyrille, comme n'importe quel autre homme, se serait fatigué d’elle, de son besoin d'indépendance, de son intensité. "
Catherine Day est venue à la recherche de ses racines en Gaspésie, dans une petite ville où les pêcheurs ont du mal à survivre.
La découverte du cadavre d'une noyée va provoquer bien des remous dans cette communauté soudée par le silence ,mais travaillée par les amours inassouvies. L'enquêteur Morales, fraîchement arrivé (et pas au mieux de sa forme), va se confronter à des personnages hauts en couleurs , mais pas forcément désireux de l'aider...
Jouant avec la temporalité et usant d'un style poétique, Roxanne Bouchard noue les fils de son intrigue avec maestria, même si l'enquête est bouclée de manière quelque peu expéditive, et l'on prend beaucoup de plaisir à cette lecture savoureuse.
L'Aube Noire Poche 2023.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : roxanne bouchard
04/01/2024
Le Roitelet...en poche
"" Tu devrais écrire un livre dans lequel rien n'arrive. " J'ai trouvé l'idée d'autant plus séduisante que j'ai sous la main, avec ma vie très banale, une grande quantité de matière à partir de laquelle travailler. "
Quel plaisir de retrouver ici l'auteur du Jour des Corneilles ! Ici, il ne s'agit plus d'un père et de son fils mais principalement de deux frères, dont l'un est écrivain (l'auteur) et l'autre travaille dans une jardinerie. Ah oui, il est aussi schizophrène mais il ne faudrait pas le ramener uniquement à cette maladie qui le fait souffrir et rend son comportement parfois difficilement compréhensible aux autres tant ses remarques sont parfois étonnantes et lumineuses.
Dans ce texte, il est aussi beaucoup question de nature, d'animaux , d'écriture et c'est de manière apaisée, mais sans occulter les difficultés que Jean-François Beauchemin avec une écriture d'une finesse incomparable évoque cette relation fraternelle hors-normes.
Un texte dont les pages se tournent toutes seules et qu'il faut prendre le temps de relire pour encore plus le savourer. Et zou, sur l'étagère des indispensables.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : jean-françois beauchemin
18/12/2023
Enfance: La Trilogie de Copenhague T1
"Istedgade est la rue de,mon enfance , son rythme battra toujours dans mon sang, sa vois résonnera toujours en moi et restera celle des temps lointains où nous nous sommes juré fidélité. La rue est toujours chaude et lumineuse, festive et palpitante, et elle m’enlace, comme si elle avait été inventée pour satisfaire tous mes besoins d’épanouissement. "
Un énième récit d'enfance pauvre et malheureuse ? Quasiment toutes les critiques concernant ce récit autobiographique de Tove Ditlevsen cite cette phrase : "L’enfance est longue et étroite comme un cercueil, on ne peut pas s’en échapper sans aide. " A plusieurs reprises d'ailleurs dans ce texte , l'enfance est associée si ce n'est à la mort, du moins à des champs lexicaux pour le moins négatifs.
Pour autant, ce qui transcende cette pauvreté, ce manque d'amour dont souffre la narratrice dans cette famille ouvrière danoise, est la certitude qu'elle doit écrire. Pour dépasser "la mélancolie grandissante" que Tove éprouve déjà . Pour exprimer ce qu'elle observe avec acuité dans cette famille où la solitude est un luxe . Il lui faudra surmonter les moqueries, les scandales que provoquent les poèmes qu'elle rédige pour l’instant et le fait d'être une femme ne viendra pas améliorer sa situation... Un ton vif , une écriture tantôt sombre , tantôt lumineuse et une narratrice au caractère bien trempé font de ce récit une réussite.
J'attends déjà avec impatience le second volume qui paraîtra en mars.
Un texte de Rosa Montero m'a donné envie de découvrir cette autrice... J'en parlerai demain.
Editions du Globe 2023, traduit du danois par Christine Berlioz et Laila Flink Thullesen
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14/12/2023
La maison des Tocards ( Slow Horses)
"La moitié du futur est enfouie dans le passé. Telle était l'idée qui prévalait dans le Service. D'où l'examen obsessionnel d'un terrain déjà retourné plusieurs fois pour tente de comprendre l'Histoire avant qu'elle ne se répète. "
Avouons-le c'est grâce à la série Slow Horses que j'ai découvert ce roman à la fois caustique et so british sur les services secrets britanniques , ce qui , à la base, n'est pas vraiment ma tasse de thé.
Mais l'histoire de ces agents dont, pour des raisons budgétaires , on n'a pas voulu se débarrasser mais qui , ayant sacrément merdé, végètent dans La maison des Tocards , sous l'autorité d'un chef crasseux, répugnant dernier vestige de la Guerre Froide a su m'embarquer.
On croit d'abord entrer dans un roman gentillet mais la violence est bien présente et le romancier n’hésite pas à sacrifier certains personnages auxquels nous nous étions attachés. La société britannique et ses services secrets sont dépeints de manière cynique mais avec un détachement de bon aloi. L'écriture est nerveuse et la série, si elle élague quelque peu l'intrigue, rend néanmoins justice à l'humour de l'auteur.
à lire et /ou à regarder absolument.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : mick herron
11/12/2023
Objectif zéro
"Il sait que, une fois sacrifiée, l'intimité ne pourra plus être reconquise[...]. "
Envie d'un bon gros roman addictif , intelligent et bien mené? Alors précipitez-vous sur Objectif Zéro. L'intrigue ? Le test d'une intelligence artificielle qui, pour assurer la sécurité des États-Unis, dispose de moyens insensés pour retrouver n'importe qui n'importe où . Grâce à votre démarche, vos habitudes, la possibilité de fouiner dans votre passé, de transformer n'importe quel objet en micro qui vous trahira? C'est ce qu'affirme en tout cas Fusion qui pour valider cette application de surveillance des citoyens doit avoir l'aval de la C.I. A et lance donc un Bêta test. Dix participants ,ayant accepté les règles du jeu, tentent donc de remporter la somme de trois millions s’ils échappent à l'équipe de Fusion, ses algorithmes, ses caméras de surveillance et ses drones. Celle qui paraît la moins bien placée pour gagner est une insignifiante bibliothécaire et pourtant c'est celle qui leur donne le plus de fil à retordre...
Si la première partie du livre m'a donné une furieuse envie de vite me glisser à nouveau dans le roman pour voir qui de David ou de Goliath allait l'emporter, la deuxième m'a nettement moins enthousiasmée, les enjeux étant totalement différents. Il n'en reste pas moins que ce roman évoque des thèmes d'actualité cruciaux, sait ménager le suspense tout en brossant des portraits nuancés de ses personnages. Il file donc sur l'étagère des indispensables.
Éditions Denoël 2023, 464 pages. Traduit de l’anglais par Frédéric Brumen.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : anthony mccarten
16/10/2023
#Cellesquontue #NetGalleyFrance !
"Rien de plus facile que d'apprendre à détester les femmes. Les professeurs ne manquent pas. Il y a le père. L’État. Le système judiciaire Le marché. La culture. La propagande. Mais ce qui l'enseigne le mieux, d'après Bia, ma collègue du cabinet, c'est la pornographie. "
L'Acre, l’État qui présente actuellement le plus fort taux de féminicides au Brésil, c'est là que se rend l'héroïne du roman, avocate envoyée par son cabinet pour documenter le cas d'une jeune indigène torturée, violée et assassinée dans des circonstances particulièrement atroces.
Très vite, elle va se rendre compte de l'ampleur du phénomène de ces féminicides impunis et empiler dans un carnet les noms et les circonstances dans lesquelles ces femmes sont mortes.
Cette violence faites aux femmes fait écho à celles faites aux indigènes et à la forêt amazonienne, qui couvre une partie de ce territoire, le tout dans la plus grande indifférence.
Celles qu'on tue est un roman puissant qui nécessite des pauses dans sa lecture tant les situations évoquées suscitent à la fois un sentiment de révolte et d'horreur. La grande force de Patricia Meo est tout à la fois de s'appuyer sur des faits documentés, mais aussi de créer du suspense et de susciter l'empathie avec la narratrice dont la mère a été elle aussi tuée par son époux. Une dimension hallucinatoire et onirique est apportée par le récit des prises d’ayahuasca par l'héroïne qui s'initie aux rituels ancestraux des indigènes. Un roman à l'atmosphère étouffante , mais dont la lecture est nécessaire.
Éditions Buchet-Chastel 2023
Traduit du portugais (brésil) par Élodie Dupau.
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14/09/2023
Zoomania...en poche
"Au cours des dernières semaines, il m'avait expliqué pourquoi . D’après lui, la plupart des gens étaient incapables de comprendre dans quelle situation désespérée se trouvaient les animaux. Ils étaient trop protégés pour le voir. Trop en sécurité. ils avaient beau connaître les faits et les chiffres , ils ne prenaient pas la mesure de l'ampleur de la dévastation."
La vie des Mc Cloud a été dévastée par une tornade de force 5 ne laissant comme survivants qu'une fratrie de 3 sœurs et un frère. Ne possédant plus rien, Darlène, l'aînée, fait une croix sur ses études à l'université et vend aux médias le récit de leur tragédie, stigmatisant ainsi leur famille, les marquant du sceau du malheur et de la tristesse.
Refusant cette situation, Tucker, garçon intransigeant s'enfuit. Il ne reviendra que trois ans plus tard, à la date anniversaire de la tornade, pour libérer de manière dramatique les animaux de laboratoire d'une usine de cosmétiques.
Blessé, pourchassé, il entraîne dans sa cavale, sa plus jeune sœur, Cora, neuf ans, et entreprend , au fil de leur périple, de lui expliquer la révélation qu' a été pour lui la tornade et l'engagement radical pour défendre la cause animale qui en a découlé.
Récit tour à tour poignant, haletant , Zoomania sait aussi ménager des moments de pure grâce, comme celui d'un animal incongru évoluant en bord d'océan, ou de tension extrême. Abby Geni manie en virtuose les métaphores et ne présente jamais de manière pathétique ses personnages. Elle peint des scènes hallucinantes ,en n'oblitérant pas leurs aspects dramatiques ou drolatiques, et l'on n'oubliera pas de sitôt l'ultime mission que s'est assigné Tucker.
Un livre palpitant qui fait la part belle à la Nature, sans la présenter de manière angélique, et montre différentes formes de résilience, parfois inattendues.
Un roman puissant qui marque les esprits. Et qui file sur l'étagère des indispensables ,bien sûr.
Traduction Céline Leroy. Actes Sud 2021, 357 pages magistrales.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : abby geni