01/04/2011
TENTACULES et manivelles
"Les voyelles, c'est toujours plus sucré."
Les mots, Béatrice Fontanel les écoute, elle les goûte, elle se les met en bouche, les faisant rouler, les faisant crisser. Elle les scrute aussi, se laisse envahir par eux de manière obsédante , véritable "pythie à palabres", jouant de la typographie et de l'espace pour mieux les mettre en scène.
Citation rimbaldienne tournant en boucle comme un mantra, ("le frais cresson bleu") et qui s'épuisera , portraits de mots en quelques vers, distiques , poèmes en prose courts ou longs , Béatrice Fontanel s'approprie de multiples formes pour célébrer les mots .
Ils partent en vrillent ou sont tenus serrés; de registre courant ou soutenu , tous ont droit de cité pourvu qu'ils suscitent une sensation de soudaine étrangeté. On redécouvre ainsi ces
"Mots, têtards sonores, qui frétillent
dans le cartilage des oreilles
Bulles d'écume, borborgygmes
minuscules."
Assonances et allitérations claquent au vent , Ecoutez..., Ecoutez..., nous conseille l'auteure .On renonce aussi à corner les pages,( autant tout corner, on ira plus vite ), et on savoure à toute allure ces 168 pages avant que d'y repiocher au hasard de nouvelles saveurs, mais aussi de prendre le temps de regarder plus en détails ces illustrations échappées de vieux dictionnaires qui donnent un charme fou à l'ensemble.
Un énorme coup de coeur, zou sur l'étagère des indispensables et dans la foulée, commande d'un autre recueil, plus ancien de l'auteure !*
Tentacules et manivelles, Béatrice Fontanel La petite vermillon 2011.
* moins convaincue par celui-ci, d'une toute autre tonalité : La ménagère carnivore.
06:00 Publié dans Humour, l'amour des mots, Poésie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : béatrice fontanel, pêché au salon du livre, il s'imposait en ce premier avril mais ce n'est pas un poisson c
23/02/2011
Les derniers planteurs de fumée
Nonobstant une solide allergie au tabac, j'ai feuilleté ce Librio à deux euros et, paf, je suis tombée sur une courte évocation de vaches ! Allez hop, emballé c'est pesé, je repars avec ce qui s'avère contenir des extraits de Partance et autres lieux, suivi de Nema problema. Deux amuse- yeux en quelque sorte pour découvrir (un peu) l'art de Guy Gofette.
Et là je suis tombée en amour. Ni plus ni moins. Un poète fou de voyages immobiles, qui, seul, entend la mer au bout du jardin de son père car "Brasseurs de ciel à longueur de jour, ces hauts arbres, par les nuits de grand vent, recrachaient la mer, la voix des sirènes et les chants des noyés.", cette mer qui finira par venir à lui dans une chambre d'hôtel de Bailleul...
Fils des Ardennes, sa route ne pouvait que croiser celle de Verlaine et de Rimbaud mais c'est dans une caravane baptisée Partance, solidement arrimée dans un verger ,que le poète ira vers l'apaisement du coeur.
Les mots sont simples , comme ces objets usuels qui ont été parfaitement conçus et s'adaptent impeccablement à l'usage, sans fioritures, allant droit à l'essentiel. Une magnifique découverte que je ne peux que poursuivre...
06:00 Publié dans Extraits, nouvelles belges, Poésie | Lien permanent | Commentaires (16)
20/12/2010
Dis-moi un poème qui espère
Bon sang, encore un recueil de chez Rue du Monde qui me plaît !
J'adore leur format à l'italienne, la richesse et la variété des auteurs rassemblés, sans compter ici une mise en page et une illustration qui renforcent le thème abordé : l'espoir .
En effet,à de magnfiques photos en noir et blanc qui insistent sur le côté parfois grisaille de la vie , répondent en vis à vis des illustrations pleines de vie et de couleurs tranchées de Laurent Corvaisier.
Certaines pages se déplient même, révélant ainsi des textes et illustrations "cachés" formant un panorama surprenant . Une totale réussite à lire et relire quand
"ll faut s'asseoir sur la margelle
du puits de l'ombre
pour y pêcher avec patience
la lumière qui s'y perdit."
Pablo Neruda
Emprunté à la médiathèque.
06:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : jean-marie henry, alain serres, laurent corvaisier
15/12/2010
Le rap des rats
Faites gaffe, le rap, c'est contagieux ! La preuve :
Fi des Ratatouilles
Et des Rapetout
Les rats se radinent
Et râlent un p'tit coup !
Des villes ou des champs
Ils veulent leur ration
De blé, d'affection !
Ras l'bol du poison !
Michel Besnier et
Henri Galeron
Rappent pour ceux qui
Sont pas rabougris.
Ils veulent sans ratés
nous rabibocher
Avec les ratons
Tout ravigotés !
Signé cathulu .
Plein de tendresse et d'humour ! à ne pas rater !
Editions Motus ,2000
Emprunté à la médiathèque.
06:00 Publié dans Jeunesse, Poésie | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : michel besnier, henri galeron, rats à toutes les sauces!
30/11/2010
Sac à dos
Et une anthologie de poésie, une ! Mon pêcher mignon ! En plus celle-ci est destinée aux enfants et offre un éventail très large et éclectique d'auteurs contemporains pour prouver aux "lecteurs en herbe" que les poètes et poétesses ne sont forcément des hommes et des femmes mort(e)s comme ils auraient- un peu- tendance à le croire !
Chaque "échantillon" de textes est précédé d'une notice biographique et bibliographique, le tout étant introduit par Jean-Michel Espitallier, une référence ,qui balaie les clichés attachés à la poésie et à au florilège. De quoi se plonger régulièrement dans des univers très disparates et allonger sa LAL...
Sac à dos, Editions Le mot et le reste, 284 pages à feuilleter régulièrement.
06:02 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : poésie, jean-michel espitallier, anthologie
08/09/2010
Poèmes à apprendre par coeur
Il y a toujours à piocher dans une anthologie de poésies et celle-ci établie par Hélène Fieschi ne faillit pas à la règle, y compris dans son introduction et son dossier (établis par le même auteur).
On lit rarement les introductions d'anthologie et on a souvent raison. Mais ici l'objectif d'Hélène Fieschi est de convaincre les lycéens , futurs lecteurs de ce recueil, des différents bienfaits de l'apprentissage par coeur de poésies. Et elle y parvient avec pertinence et élégance: "Connaître un texte par coeur , c'est en avoir pesé chaque mot (...). C'est un peu récrire le texte, se l'approprier, le digérer pour le faire sien...". Mais aussi "Pour avoir en soi, avec soi, des morceaux de musique qui chantent à notre oreille(...) Pour qu'un jour, elles jaillissent en vous(re) nées du hasard ou de la rencontre signifiante avec un moment qui vous appartient."
Viatique personnel mais aussi texte destiné à être lu, à devenir public , à devenir aussi partie intégrante d'un patrimoine culturel à prolonger ou à initier...
Les poèmes courent de Charles d'Orléans à Jacques Roubaud et chaque auteur est présenté dans un texte le situant de manière claire et concise.
Quant au dossier accompagnant cette anthologie il se compose d 'une anlyse très fouillée du tableau Le poète et sa muse (du Douanier Rousseau) figurant en couverture par Pierre-Olivier Douphis et d'une mise en perspective d'Hélène Fieschi, proposant aussi bien des regroupements de textes thématiques -dont un concernant la poésie comme moyen de lutter contre la déshumanisation - que des rappels historiques ou stylistiques. Bref, un mine d'infos pour seulement cinq euros ! J'en connais qui vont bosser dessus !
Poèmes à apprendre par coeur, Folio Plus classqiues, 2010.
06:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : hélène fieschi, pierre-olivier douphis
22/08/2010
Poésies des petit bonheurs
Surfant sur la vague des bonheurs du quotidien, ce recueil de morceaux choisis, organisés en chapitres aux noms évocateurs : Bonheur du câlin, bonheur de la sieste ...ne m'a pas vraiment pas convaincue ni par les illustrations, trop sages à mon goût, ni par les citations, bien trop courtes souvent.
J'en retirerai juste ce poème d'Emily Dickinson :Il faut pour faire une prairie, traduit par Pierre Leyris .
"Il faut pour faire une prairie
Un trèfle et une abeille-
Un seul trèfle, une abeille
Et quelque rêverie.
La rêverie suffit
Si vous êtes à court d'abeilles."
De quoi me donner envie de découvrir cette poétesse...*
Emprunté à la médiathèque.
* Du coup je viens de dévorer La dame Blanche, de Christian Bobin... Billet à venir bientôt.
06:01 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : virgine aladjidi, caroline pellisier, eric puybarte
28/04/2010
Inimaginaire
ça claque, ça roule, ça chuinte, ça siffle dans les poèmes de Pierre Coran. Assonances, allitérations, mots coupés , inversés, supprimés, suggérés font qu'on y voit voltiger un écureuil ou zigzaguer un lézard.
La musique des mots y est essentielle et le plaisir de la lecture à haute voix aussi. On s'en gargarise, on s'en amuse et on voltige dans les airs en compagnie de tout un bestiaire souriant !
Inimaginaire, Pierre Coran,Mijade, 124 pages souriantes et sonores.
06:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : pierre coran, jeux avec les sons, jeux avec les mots
20/03/2010
Couleur femme
Juste quelques notes pour vous signaler au passage trois livres de chevet (et/ou de sac) qui m'accompagnent en ce moment et viennent de paraître:
*Quelqu'un plus tard se souviendra de nous qui de Sapphô à Kiki Dimoula en passant par Emily Dickinson ou Sylvia Plath, regroupe des "tranches" d'oeuvres poétiques écrites par des femmes, parues aux Editions Gallimard. Rien de bien neuf donc mais un aperçu permettant de donner envie d'aller plus loin dans la lecture.
*Couleur femmes, bien plus intéressant car présentant des auteures francophones contemporaines dont certaines ont confié des inédits. Des textes écclectiques montrant la force et la diversité des écritures. Une très intéressante biobibliographie pour poursuivre la découverte. Un indispensable.
Poèmes de 57 femmes et une préface de Marie-Claire Blanquart, au Castor Astral.
* Pas revoir suivi de Neige rien de Valérie Rouzeau aux éditions de La petite Vermillon. Des textes très abordables qui disent la mort du père sans aucun pathos, en disloquant les phrases, en triturant les mots mais en livrant une émotion intacte.
Valérie Rouzeau a traduit Sylvia plath et a écrit des textes pour Indochine.
06:00 Publié dans challenge des saisons, Poésie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : printemps, femmes, poésie
29/09/2009
Les radis bleus
Même s'il réclame des mots simples pour la poésie, Pierre Autin-Grenier sait utiliser les mots précis qui disent le travail à la campagne,le passage des saisons, dans ce journal poétique. Tour à tour bougon et ironique, facétieux et grave, Pierre Autin-Grenier chahute son lecteur, ne le laisse pas en repos mais sait toujours le séduire au détour d'un paragraphe, le nombre de pages cornées en témoigne...
Juste quelques passages, histoire de vous donner envie à votre tour...
"Lundi 27 juin, St Fernand
Le bonheur toujours menace et parfois même d'obscènes bouffées de bonté m'amène comme une odeur d'ail rance dans la bouche. me voici à deux doigts de prêter cinq sous aux indignets et trouver bien du talent à tous mes amis.Mon Dieu ! comment se sauver de ces choses horribles ? !..."
"Jeudi 15 décembre Sainte Ninon
Dormir était un vrai chantier ambulant, on se roulait dans le sommeil comme dans un champ de patates douces, on se lovait au creux des souches en lérots rêveurs, on s'enveloppait dans des manteaux de marmotte pour voyager les yeux fermés dans des contrées immobiles. Il nous arrivait de dormir debout et cela nous allait bien."
D'autres citations chez Antigone, la vile tentatrice ! :)
Les radis bleus, Pierre Autin-Grenier, Folio.
06:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : pierre autin-grenier