21/10/2008
Et le bébé était cuit à point
Une mère toxique,exhibant sa sexualité active, une fille trentenaire célibattante malgré elle. Entre les deux ,un chat, Harmonie, qui change de mains et va aussi transformer la vie de la bussiness woman, Blanche.
Ce félin ne serait-il pas un peu magicien ? Si l'on ajoute un prince charmant qui tombe à point nommé, nous avons ici tous les ingrédients d'un conte de fées mais ce serait compter sans l'humour grinçant de Mary Dollinger qui, dans ce conte ô combien cruel , rajoute soudain un bébé cuit à point qui va changer la donne...
Evoluant avec bonheur dans le monde de l'industrie agro-alimentaire , où les mots ont encore plus d'importance que les produits vendus, où mensonge et nourriture sont inextricablement liés, Mary Dollinger complote une nouvelle fois pour nous faire rater notre bus. Sa plume , trempée alternativement dans l'aigre et le doux, nous emmène dans un univers où pas un chat digne de ce nom ne hasarderait les pattes. Un petit bonheur de lecture à s'offrir pour 5 euros ! (61 pages)
Un grand merci à Mary et André !
L'avis de Joëlle
06:00 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : conte cruel, mère, nourriture, chat, mary dollinger, et le bébé était cuit à point
06/10/2008
De Anorexie à Zan.
Comment résister à l’appel d’un Abécédaire qui paradoxalement commence à Anorexie et se termine à zan ?
Michèle Gazier ne triche pas et n’omet aucune lettre nous faisant découvrir au passage que le kaki est le fruit du plaqueminier ou que le xangurro est un délicieux crabe farci servi dans un restaurant de San Sebastian.
Elle ne se contente pas de nous donner une folle envie de filer à Béziers goûter à la Biterroise, elle égratigne aussi au passage ses dîners parisiens où l’on se retrouve parfois le ventre vide à la fois de la soirée…
Entre Endive et Vins de champagne, nous croisons aussi Manuel Vasquez Montalbàn, « Père gourmet de Peep Carvahlo et as de l’improvisation culinaire » »déversant des flots d’huile, vin blancs et autres bouillons parfumés qui en manquaient jamais d’éclabousser meubles, murs et sols. » et qui « enchaînait avec quelques heures d’écriture dans son bureau. Le passage d’une activité à l’autre était naturel, comme une respiration. Il cuisinait les mots dans le parfum des plats. ».
J’avoue au passage que je me suis trouvé beaucoup de points communs avec Michèle Gazier, autre sœur d’Olive Oyl( la fiancée de Popeye),aux jambes maigres et véloces. Comment ne pas adorer un texte qui commence ainsi : « Trop de lait maternel ,trop de soins grands-maternels, trop de soins tout court .Marre, coupez ! (…) Je n’aime rien, je en veux rien, recrache tout. Je désespère les adultes qui cherchent d’autres nourritures-tortures. »
Mais c’est surtout pour des passages tels que celui-ci que je vais glisser cet abécédaire dans ma bibliothèque de secours anti-grisaille : « L’olive s’accompagne volontiers d’une image d’ascétisme : une poignée d’olives , une tomate, du pain, une larme de cette huile de lumière…Celui qui n’entend pas encore les cigales n’a jamais connu le Sud. » Un vrai rayon de soleil.
06:00 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : abécédaire gourmande, anorexie, gourmandise, michèle gazier
27/09/2008
Au pain sec et à l'eau.
Petit fourre-tout Régals du Japon et d'ailleurs nous promène du Japon à Singapour en passant par l'Est de la France d'où est originaire l'auteure, Dominique Sylvain. Las rien n'y fait , nous ne salivons pas, l'exotisme nous laisse de marbre , même la nouvelle où nous retrouvons les sympathiques Ingrid Diesel et Lola Jost se révèle digne du Club des cinq...
De quoi se mettre au régime sec.
06:00 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : régals du japon et d'ailleurs, dominique sylvain
22/09/2008
Y pas d'soucis!
Philippe Delerm avec Ma grand-mère avait les mêmes est allé à la chasse aux phrases touts faites, celles qui ponctuent nos conversations et sont "faussement anodines".
Il le décortique sans vergogne, débusquant l'implicite, traquant les sous-entendus où parfois affleure l'agressivité...
On retrouve ici la gourmandise de Delerm, sa tendresse aussi , mais parfois, on le remarque davantage dans ce recueil, sa lucidité quant aux rapports humains, cette sorte de bras de fer qui s'engage parfois mine de rien, avec le boucher du marché quand il pèse en en mettant un peu trop, par exemple... Une dimension sociale pointe aussi le bout du nez quand avec l'expression "Faut arrêter", il conclut : "Les décroissants ont du pain sur la planche. Car tous les passagers de seconde et première classe ont gentiment composté leur billet, le convoi est en route, un TGV qui va de plus en plus vite, emportant tous ces voyageurs qui voudraient arrêter."
Delerm n'est pas seulement celui qui a ouvert la voie d'un épicurisme du quotidien, de la vie ordinaire. La vie, il la brosse dans toutes ses dimensions. Y a pas d' soucis ! Chacun retrouvera avec plaisir des phrases qu'il entend ou utilise et promis-juré, on y réféchira à deux fois avant de les prononcer car nous ne pourrons plus prétendre être aussi candides... (94 pages, 11 euros)
06:00 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : delerm, phrases anodines, ma grand-mère avait les mêmes
20/09/2008
Petit éloge des éloges
Enfin ! Trois petits éloges qui valent le détour alors que leurs petits frères, arguant de jolies couvertures et de l'attrait irrépressible que suscite chez moi le mot "éloge" ne m'avaient apporté que déceptions !
Commençons par Didier Daninckx qui nous rappelle dans sa préface que la littérature a souvent eu comme point de départ des faits-divers, que les romanciers s'en prévalent ou pas. Pour lui "Le fait divers est le premier monument érigé à la mémoire des victimes, même si ce n'est qu'un pauvre monument de papier noirci." Cinq nouvelles ayant comme point de départ des faits-divers plus ou moins récents vont nous permettre de (re)découvrir par ce biais des morceaux de la grande ou de la petite Histoire. J'ai particulièrement apprécié celle évoquant, tout en retenue, un adjudant de sinistre mémoire, tueur en série, récit qui se termine par une pirouette jubilatoire...
Poursuivons avec Natalie Kuperman qui avec un titre un peu provocateur,Petit éloge de la haine, confirme ici tout le bien que je pensais d'elle à la lecture de J'ai renvoyé Martha.
Monde de l'entreprise ou d el'enfance, rapports de couples ou d'amis, tout passe joyeusement à la moulinette et une "Mini petite souris" faisant irruption de manière innocente dans un appartememt va déclencher une réaction en chaîne tout à fait réjouissante pour le lecteur. Mais je m'en voudrais de gâcher votre plaisir en en disant plus. Juste une citation au passage : "Un espace inoccupé accueille des possibilités déstabilisantes, c'est contre cela que l'on travaille, que l'on agit , que l'on pense."
06:08 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : nouvelles, humour caustique, éloge, didier daeninckx, petit éloge des faits divers, petit éloge de la haine, nathalie kuperman
15/09/2008
"les nouvelles , c'est comme les empanadas...
En tronquant le vers de Joachim Dubellay qui donne son titre au recueil, Georges Flipo donne le ton. Il n'est pas forcément heureux Ulysse et il n'a pas forcément fait un beau voyage.Dans ces quatorze nouvelles aux tonalités très différentes, l'auteur, plus que des pays ou des paysages, explore l'âme humaine, ses petitesses, ses noirceurs encore exacerbées par l'éloignement du pays natal. Comme si loin de chez soi, nos plus viles passions ou nos mensonges se donnaient libre-cours... Certains voyageurs se dépasseront pourtant en choisissant d'aller jusqu'au sacrifice pour connaître la rédemption...Mais tout n'est pas noir pour autant et de jolies bulles de nostalgie ou de tendresse viennent réconforter le lecteur embarqué dans un périple qui nous conduit en Amérique Latine, en Asie, à Venise ou bien plus près de chez nous...
On se dit que Georges Flipo possède le don , comme un de ses héros de susciter (et d'exploiter? ) les confidences, (comment autrement se glisser dans la peau de sept femmes quadragénaires? ), mais comme il a beaucoup de talent, il lui sera beaucoup pardonné...
Heureux Qui comme Ulysse , et beaucoup d'autres déjà, a lu, ce recueil .
Pour écouter une nouvelle, toute en sensibilité et en émotion, lue par Cuné, c'est ici !
L'avis de Cuné
Celui de Laure
N'hésitez pas à vous signaler pour que je mette votre article en lien !
06:06 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : voyages, nouvelles, qui comme ulysse, georges flipo
18/08/2008
Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil
A la suite de Georges Flipo , glissons-nous dans le monde de la grande entreprise (qu'elle soit de pub, d'assurance ou de ce que vous voudrez), jusqu'à L 'étage de Dieu,dans une pièce obstinément close, un peu à la manière de celle de Barbe-Bleue, où un patron olympien régénère sa puissance...
Patrons à l'égo démesuré, carrières fulgurantes qui peuvent très vite s'effondrer, sur un claquement de doigts, une chiquenaude, ad nutum, comme se plaît à le répéter un Président manipulateur à la petite semaine, qui répète à l'envi depuis 10 ans cette formule latine signifiant "d'un mouvement de tête ! Le Conseil d'Administration peut révoquer le Président d'un simple mouvement de tête. En clair: à son gré, sans motif, sans justification."
Patrons pour qui le merci est compris dans le salaire versé à leurs employés, qui pressurent les stagiaires sauf si ceux-ci sont les rejetons de gros clients de l'Entreprise.
Quant aux employés, ils ne valent pas mieux: le cerveau formaté par de grandes écoles , ils mènent la vie dure à ceux qui ne sont pas sortis du sérail et n'utilisent pas le bon code vestimentaire ou le bon jargon. Ils ont l'échine souple et adoptent sans hésiter les goûts culturels susceptibles de plaire à leur chef. Certains tentent de se venger, vengeances mesquines ou spectaculaires, habiles ou pataudes. Je remarque au passage que les personnages féminins tirent leur épingle du jeu avec plus de panache que leurs homologues masculins...
Vous l'aurez compris ces "Douze nouvelles à la gloire de la libre entreprise" sont aussi grinçantes et cyniques qu'une comédie de Jean Yanne des années 70. De coups de griffes" il n'y avait jamais eu de jolies filles au département comptable, la directrice administrative y veillait et montrait d'ailleurs le bon exemple." en réflexions lucides sur les relations humaines "J'ai alors compris que j'étais l'autre des autres: ils ne m'avaient rien expliqué du tout.
Bouteiller percevait très bien la situation. Ensemble, nous avons passé un long moment , peut être trois ou quatre secondes, à méditer sur la méchanceté de l'homme et sur la férocité du jeune diplômé [...]Non ce n'était pas pour moi qu'il le disait, c'était pour lui. Avoir embauché un chef de produit qui ne soit pas amateur de peinture, c'était une faute professionnelle". Le texte file, sans acrimonie ni aigreur, chacun reconnaît au passage un collègue où un chefaillon... Quelques bouffées de tendresse néanmoins dans ce recueil très équilibré où chaque texte m'a donné son content de plaisir. Un petit bonheur à s'offrir sans faute!
Prix littéraire 2006 "A la découverte d'un écrivain du Nord-Pas- de-Calais".
L'avis de Cuné
06:05 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (10)
15/08/2008
Microcosmes
Plutôt que de décortiquer en détail chacune des nouvelles composant ces recueils, juste quelques citations et la tonalité générale pour vous donner envie...
"Je n'en étais pas encore à m 'étonner, conscient que j'étais de voyager sur les lignes nationales françaises, ce qui implique,de la part de l'usager, une certaine patience et le sens de l'abnégation. En France, tout arrive, même les trains. Mais il faut du temps, c'est l'arme secrète. Personnellement,je n'ai jamais été pressé. je suis armé."
J'ai retrouvé avec plaisir l'univers de Franz Bartelt, ces personnages du quotidien , que l'on pourrait croiser dans Le bar des Habitudes,son humour à la fois tendre et cruel et ces dérapages incontrôlés. Pourtant certains de ces "treize brefs récits" comme les appelle la 4 ème de couv' (de l'art de ne pas écrire le mot qui fait fuir le lecteur potentiel !) m'ont paradoxalement paru trop longs et étirés...
L'avis de Val, à qui je dois la découverte de cet auteur.
Celui de Bellesahi
Les croissants du dimanche qui donnent son titre au recueil d'Annie Saumont, il faut bien les chercher pour les trouver. Ils ne sont qu'un détail d'une nouvelle, un rituel auquel se raccroche de toutes ses forces une femme pour redonner un peu de stabilité au chaos qui a bouleversé sa vie. Un îlot de stabilité dans un monde qui s'écroule. C'est ainsi que procède l'auteure, au plus près de l'émotion, par détails, par ellipses et l'on se retrouve cueilli par une phrase comme celle-ci , prononcée par un enfant: "Après, des fois, elle regrette. Alors j'ai un câlin."
L'avis de Clarabel que je remercie pour le prêt.
Nicolas Ancion n'est pas français mais belge et francophone alors incluons-le dans ce billet !
Dans Nous sommes tous des playmobiles, ça dézingue à tout va ! On entre d'emblée dans un univers proche du film "C'est arrivé près de chez vous,"où on offre une nouvelle carrière au couteau électrique des années 70 (ou à une agrafeuse),où on torture un académicien français à coups de solécismes...On suit des cours d'assassinat, non reconnus par l'Etat car "J'étais en avance sur mon temps, l'Education nationale n'était pas encore prête à subsidier ma filière de formation." Le lecteur jubile et se laisse secouer comme sur les montagnes russes ! Quelques moments de tendresse aussi, pour éclairer un peu ces vies pleines de non-sens. Ancion aime les mots et se dégourdit la langue avec des néologismes savoureux : "La zone de dépression reprit le dessus dès qu'il fut entabouretté au coin du bar."Bref, une savoureuse découverte !
Le site de l'auteur.
06:05 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (18)
17/07/2008
Un livre-montagnes-russes-des-émotions.
" Elle a un super souci, cette brave dame, elle a l'Alzheimer.
C'est une maladie vraiment conne, qui est comme le Canada Dry.
Tu as l'air d'être en pleine forme, tu parles comme si tu étais en pleine forme, tu marches partout, et tu peux même te promener dans la rue sans que personne ne s'en rende compte, mais c'est un leurre.
A l'intérieur, c'est du gruyère, c'est du brouillard, c'est du vent dans de la solitude, avec une odeur de souffrance". Celui qui écrit ainsi c'est Ron l'infirmier. Il sait de quoi il parle car il a roulé sa bosse de service psychiatrique en service d'urgence,de poste libéral ou en hôpital, il a soigné des enfants, des vieillards, des riches -qui collectionnent les tableaux comme d'autres les ennuis -aux pauvres dont les fenêtres sont murées.
C'est donc un tableau de l'Humanité qui nous est brossé ici, une humanité qui souffre de maladie, de solitude et surtout de la déshumanisation des soins de santé.
Comment ne pas être révolté devant une infirmière libérale qui annonce tout d e go à un malade qu'elle ne le soignera plus car il n'est pas rentable ? Que dire devant ce maire qui refuse une tombe à une personne de la Maison d'Accueil Spécialisée en se justifiant ainsi :"Humainement, c'est pas possible" ? Heureusement ,il y a des ilôts de tendresse,d'émotion, des moments où la connerie est battue en brèche, où l'infirmier se dit qu'il a été juste dans son approche, qu'on lui a donné le temps de faire son travail correctement, avec empathie.
La chambre d'Albert Camus et autres nouvelles, comme autant de petites fenêtres ouvertes sur l'émotion.
Merci à Amanda pour le prêt.
L'avis de Cuné
06:04 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (11)
16/07/2008
"Je saute du car comme un bouchon de champagne."
D'abord, couper les pages.Prendre son temps pour ne pas abîmer le papier lisse et doux.Prendre son temps pour découvrir ces "photographies de vie" comme les appelle joliment l'auteure dans sa dédicace.
Est-ce la même narratrice qui court de texte en texte,sont-elles multiples ou démultipliées comme les images d'un kaleïdoscope ? L'enfance en tout cas est au coeur de ces textes qui disent le quotidien, un quotidien charnel et sensible: "...voir leurs regards s'attarder sur mon pantalon bon marché, puis glisser sur moi comme sur une page vide."
Antigone, car c'est elle, met en lumière ces instants de vie , passés ou présents avec un charme tout particulier qui fait qu' aussitôt la première lecture finie,trop goulue, de Un jour, je serai grande ! ,nous n'avons qu'une envie : recommencer. Et cette fois savourer...
PS: Nous n'allons pas lui mettre la pression mais son texte "Si je devais...
écrire un roman, je commencerais par fermer les yeux un moment."
nous espérons qu'il lui donnera des idées...Ferme les yeux Antigone pour mieux ouvrir les notres.
16 pages précieuses à glisser contre son coeur, parues au Editions du petit véhicule.
Désolée, je n'ai pas retrouvé les billets d'Anne et Bellesahi :(
L'avis de Florinette
06:07 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (10)