08/09/2011
Fiasco ! Des écrivains en scène
Joanathan Coe, Margaret Atwood, Julian Barnes sont quelques uns des écrivains qui se livrent ici à des confessions hilarantes concernant leurs revers en littérature ,côté média ou relations avec leur éditeur.
Rien ne leur est épargné: des repas payés en tickets restau, ce qui est un tue-glamour des plus efficaces, des conférences données devant un public souvent bienveillant mais extrêment clairsemé, sans compter ce que Claire Messud lors de ses débuts apprendra très rapidement: "Les gens ne veulent pas être des losers, ils ne veulent même pas en connaître."
Certains auteurs, non traduits en français, mériteraient de l'petre de toute urgence tant ils font preuve d'une autodérison des plus efficaces, que ce soit Matthew Sweeney qui apprendra à ses dépens qu'"Il est dangereux de surcharger un poème de "s". ou de se faire détartrer les dents d'un peu trop près avant une lecture." ou Simon Armitage qui concentre en une journée apocalyptique toutce qui peut arriver de pire à un écrivain !
Laissons le mot de la fin à Rick Moody qui conclut ainsi son texte : "La vérité crevait les yeux: ma carrière d'écrivain était lancée ! Et fondée sur négligence, déception, malentendu, rancoeur familiale et fautes de frappe."
Un régal qui donne envie de découvrir en totalité l'anthologie dont sont extraits ces textes:
Hontes. Confession impudiques mises en scène par les auteurs, réunis par Robin Robertson et traduits par Catherine Richard ( 2006).
06:00 Publié dans Humour, Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : anthologie, humour, robin robertson
21/06/2011
La première fois
"Est-ce que ton petit copain est un Danny ou un Eddie ?"
Même s'ils sont parfaitement informés de l'aspect technique de la relation sexuelle , les ados, garçons et filles, des nouvelles de ce recueil La première fois , sont néanmoins fort embarrassés quand il s'agit de franchir le pas.
"Mais ce que je ne parvenais pas à déterminer, c'était le moment où c'était devenu une compétition. le sexe et tout. Quelques années plus tôt , on évitait joyeusement les filles.", constate le footballeur héros de "But", la nouvelle de Keith Gray, qui sera confronté à un choix cornélien...
Trouver des conseils auprès des adultes ? Pas question ! Car même s'ils sont plein de bonne volonté, comme le père du héros de Sophie McKenzie, les parents sont souvent maladroits, voire ridicules . Sauf quand une vieille dame, affranchie de toute contrainte par son âge même ,décide de parler de sexe en plein milieu du repas dominical, au grand dam des parents et au grand plaisir des ados dans" La majorité sexuelle" de Jenny Valentine. On retrouve dans ce texte toute l'empathie et la malice de l'auteure de La fourmilière , qui a le chic pour peindre des personnages attachants qui établissent des liens par delà les générations.
Mais il y a des choses qui ne changent pas. ainsi le pouvoir de la poésie que va redécouvrir le héros de Melvin Burgess dans "Entrée en matière", pouvoir qui ira au delà de ses espérances...Beaucoup d'humour dans ce texte qui aborde le "problème" de la différence d'âge, quelques années qui représentent un gouffre quand on est ado.
Autre question, bien plus complexe, celle du choix sexuel car "ça se passe autrement pour les garçons" vont devoir accepter les héros de Patrick Ness, dans un texte où tous les mots crus ont été volontairement caviardés, sans pour autant ôter efficacité et sensibilité à ce texte.
Plus classique "Charlotte " de Mary Hooper nous rappelle qu'au XIXème siècel, en Europe, la virginité d'une jeune fille pauvre pouvait être une simple monnaie d'échange.
Tonalité plus grave également chez Bali Rai qui nous rapelle qu'une "serviette blanche" peut avoir de dramatiques conséquences pour une jeune mariée en Inde, même de nos jours.
Le dernier mot revient à Anne Fine qui résume la situation avec son "Faire l'amour ou le trouver" mettant en scène un cours d'éducation sexuelle plus vrai que nature, qui rappelle bien des souvenirs à une enseignante chevronnée , qui ne l'a pas toujours été dans certains domaines...
Les grandes plumes de la littérature britannique pour adolescents nous offrent ainsi un panorama complet d'une question qui nous a tarabustés et tarabuste nos ados, alternant les tonalités et les points de vue (j'ai particulièrement apprécié les nouvelles mettant en scène le point de vue des garçons) et dédramatisant la situation, sans pour autant tomber dans l'angélisme. Une réussite !
La première fois, Scripto, Gallimard 2011, traduit de l'anglais par Laetitia Devaux et Emmanuelle Casse-Castric , 245 pages à offrir ou à laisser traîner, mine de rien, dans des endroits stratégiques...
06:00 Publié dans Jeunesse, Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : burgess, fine, gray, hooper, mc kenzie, ness, rai, valentine
15/03/2011
Des nouvelles d'hier
"C'est l'information familiale, celle qui circule dans l'air que les enfants respirent."
Les personnages des nouvelles de Robin Black sont saisis à un moment de bascule subtil de leur existence , un moment où le mensonge n'est plus de mise, où il ne peut plus être utilisé pour épargner l'autre, ou soi même.
Sans pathos, de manière tout à la fois feutrée mais aussi fouillée, l'auteure nous peint avec beaucoup d'empathie ces personnages qui peuvent tout à la fois faire preuve de courage et de lâcheté, la différence tenant à si peu de choses.
Le passage du temps est un thème récurrent et les personnes âgées semblent tout aussi démunies que les jeunes pour affronter les trahisons et les épreuves. Pourtant chacun s'efforce de relever la tête et de faire preuve de dignité, qu'il s'agisse d'un père devant apprendre à sa fille de six ans ce que signifie le mot "jamais" ou cette femme qui lutte de manière dérisoire et poignante contre le temps qui emporte inexorablement à la dérive son époux bien-aimé. L'humour flirte avec la tragédie "Jeremy n'aurait pas donné cher d'un mari de Zoé à qui il aurait manqué un zeste de sainteté." et les relations humaines sont passées au crible avec finesse.
Beaucoup de maturité et de fluidité se dégagent de ces nouvelles que Robin Black a peaufinées 8 ans durant pour obtenir un résultat dans la lignée de Lorrie Moore . A ne pas rater !
Des nouvelles d'hier, Robin Black, Flammarion 2011, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Michel Marny, 320 pages bluffantes de vérité.
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : robin black, nan pas le chanteur! que je ne connais pas d'ailleurs, vive internet
11/01/2011
Le jardin de Machiavel
Si Voltaire nous enjoignait de cultiver notre jardin ce n'est pas avec lui mais en compagnie de Martin Amis, Bertold Brecht, Ibsen, Pablo Neruda , entre autres, que Marck Crick nous propose de rempoter une plante d'intérieur, ou de cultiver des pommes de terre.
L'auteur ayant été successivement jardinier, paysagiste et fleuriste, après avoir suivi des études de lettres, gageons que ses conseils en matière de plantes ne sauraient nous induire en erreur. Mais bien évidemment, c'est plus pour l'art subtil du pastiche que le lecteur s'empressera de feuilleter ce recueil à la recherche de ses auteurs favoris, pour découvrir comment Crick s'est emparé de leur style, de leurs "marque de fabrique", bref de ce qui fait tout leur charme.
Le hasard a voulu que je commence par Mettre des bulbes en terre à l'automne avec Sylvia Plath et ce fut un enchantement, j'avais vraiment l'impression de retrouver toute la sensibilté de cette auteure (texte traduit de l'anglais par Camille Laurens). Eliminer une salope (avec Bret Easton Ellis et un sécateur professionnel Felco modèle 7) , s'est avéré très convaincant et plein d'humour,( texte traduit de l'anglais par Brice Matthieussent). Faire proliférer une vigne vierge avec Mary Shelley (traduit par René de Ceccatty) fait aussi partie de mes chouchous, tout comme Regarnir une jardinière, où l'on retrouve tout le désenchantement de Raymond Carver (traduit par Geneviève Brisac). Le seul texte finalement qui m'a vraiment déçue, tout comme le pastiche pictural qui l'accompagne, est celui de Zola ,vraiment trop caricatural et excessif. Un petit bémol donc pour un recueil qui allie pastiches littéraires et artistiques (explicités à la fin de l'ouvrage), tous réalisés par Marc Crick qui s'avère vraiment un être aux multiples talents !
Du même auteur, j'avais déjà aimé ceci !
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : mark crick, pastiches littéraires.
01/06/2010
Le naufrage de la Vesle Mari
A quiconque m'aurait affirmé : "Tu vas éclater de rire en lisant des histoires de chasseurs au Groenland !", je me serais contentée de hausser les épaules et de passer mon chemin. Et j'aurais eu tort. Grand tort même car découvrir l'oeuvre de Jorn Riel, même en commençant comme moi par le dernier ouvrage paru, Le naufrage de la Vesle Mari, est une vraie cure de jouvence !
Cet univers faussement naïf, où l'on trinque avec un fantôme, où un bain de nouvel an peut devenir mortel, où une femme se venge d'un fiancé qui l' a éconduite à grands coups de pelle sur la tête, est aussi un monde où l'on ruse avec l'administration qui veut renvoyer tous ces joyeux lurons loin de chez eux, et chez eux c'est bien sûr le Groenland. A chacun de trouver sa solution...
Très vite on a l'impression d'avoir toujours connu Olsen, Bjorken et les autres et l'on se frotte les mains à l'idée de poursuivre cette découverte tardive !
Le naufrage de la Vesle Mari et autres racontars, Jorn Riel, traduit du damois par Susanne Juul et Bernard Saint Bonnet, Gaïa 2009, 251 pages à ne pas lire en public, sauf à ne pas craindre les éclats de rire intempestifs !
Ps: dans la foulée, j'ai déniché à la médiathèque La maison des célibataires, juste un peu trop court à mon goût !
06:01 Publié dans Humour, Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : jorn riel, jamais trop tard pour bien faire
31/05/2010
Le jour de la gratitude au travail
"Je viens dans ce bar acheter de la nuit."
La narratrice de la première nouvelle cumule: au chômage et célibataire alors que déjà trentenaire. Deux tares visiblement au Japon. La jeune femme s 'en prend avec véhémence contre cette société qui la rejette doublement en ce Jour de la gratitude au travail.
En effet, sa rébellion contre son patron qui, non content de la tripoter au bureau, s'en était pris à sa propre mère, a entraîné la perte de son emploi. Et ce n'est pas le prétendant proposé la voisine s'improvisant marieuse qui va arranger les choses...
Le ton est vif et parfois acerbe.
Changement d'atmosphère avec le second récit mettant en scène un fantôme, celui de son collègue et ami qui apparaît à la jeune Okawa.L'occasion de découvrir la part d'incongruité qui se cache même au sein d'un travailleur japonais.
Deux courts récits pour envisager le monde du travail sous un angle original et réjouissant.
Le jour de la gratitude au travail, Itoyama Akiko, traduits du japonais par Marie-Noëlle Ouvray, Picquier poche 2010 , 120 pages sans prétention mais agréables.
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : itoyama akiko, jeunes femmes, japon
25/05/2010
Antarctique
"Les gens ne comprennent pas, mais il faut regarder le pire en face pour être paré contre tout."
Quinze nouvelles aux tonalités très différentes constituent la mosaïque de L'Antarctique. La plus troublante étant sans conteste la première qui donne son titre au recueil et plonge abruptement le lecteur dans une atmosphère tour à tour chaleureuse, sensuelle et...glaciale."Chaque fois que la femme heureuse en ménage partait, elle se demandait comment ce serait de coucher avec un autre homme."Évidemment, elle va essayer...
Cette détermination, ce caractère bien trempé caché sous des dehors lisses ou juvéniles, les héroïnes de Claire Keegan, même plongées dans des situations extrêmes ou oppressantes depuis des années, savent l'exercer pour se préserver et couper net.
Chacun se débrouille vaille que vaille pour affronter l'adversité, affronter la folie d'une mère , ou d'une épouse, la jalousie d'une soeur...
Il suffit parfois de peu de choses: refuser de fermer une barrière,accepter de se lancer sur un grand toboggan, lutter ensemble contre une armée de cafards...
L'humour est également présent, par petites touches, dans "Drôle de prénom pour un garçon" par exemple. Il désamorce la tension dans un couple et permet d'envisager une situation rabâchée sous un angle totalement neuf et décalé.
Claire Keegan n'est jamais aussi à l'aise que quand elle observe les tensions familiales , soulignant au passage de petits détails qui seront scrutés et interprétés comme "Une paire rouge à hauts talons pour les embrouiller" ou une marque sur le poignet d'un enfant...
Chaque nouvelle constitue un univers à part entière,dense et lumineux, en parfait équilibre, et ces textes, ni trop longs, ni trop courts, ne créent jamais de frustration mais laissent souvent le lecteur pensif et envoûté...
L'antarctique, Claire Keegan, nouvelles traduites de l'anglais (Irlande) par Jacqueline Odin, Sabine Wespieser 2010, 271 pages magistrales.
A noter que Claire Keegan a été encouragée par Nuala O' Faolain, une référence !
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : claire keegan
07/05/2010
La châtelaine anglaise déménage
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"J'étais le singe"
"Je vous remercie infiniment de m'avoir conviée ce soir. je ne sais pas comment j'ai osé accepter; j'ai dû être aveuglée par la flatterie et puis, l'invitation étant arrivée il y a un certain, temps, j'étais certaine d'être morte avant d'avoir pu l'honorer."Ainsi débute le Discours pastoral au club des fermiers prononcé par la dernière des soeurs Mitford, l'inénarrable Deborah Devonshire.
Qu'elle nous décrive par le menu, le shooting de sa petite fille, la mannequin Stella Tennant (à qui elle vole presque la vedette) ou dresse une longue liste malicieuse intitulé "j'ai épousé..."notre duchesse préférée a toujours autant d'humour et de punch (notons au passage qu'elle est née en 1928 !) Néanmoins, il faut bien l'avouer, tous les textes ne sont pas du même acabit et l'on ne retrouve pas tout le charme et la malice de son précédent recueil. A réserver aux aficionados.
La châtelaine anglaise déménage, traduit de l'anglais et préfacé par Jean-Noël Liaut, Payot 2010 , 149 pages.
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"J'ai aperçu la duchesse dans le jardin. Elle a l'air tout à fait normale"
Dans la famille des extravagantes soeurs Mitford,* je demande la dernière en vie: Deborah Devonshire qui nous présente Les humeurs d'une châtelaine.
Ces chroniques qui parlent de son enfance si particulière , de sa vie, de ses rencontres,des emballages (on se croirait dans un sketch de Desproges !) , de la chasse au renard (ou aux enfants), des animaux, des plantes, sont à déguster dans une solitude absolue si vous ne voulez pas passer pour une folle comme moi qui ai hoqueté de rire en dévorant ce recueil ,hélas trop court .
Avec un humour délicieux, l'auteure nous fait partager sa vie et ses pensées. Elle élève des poules, les nourrit en robe de soirée et les utilise ,vivantes, en décoration de table. Pendant la 2nde guerre mondiale, devant quitter la petite île sur laquelle elle habitait, elle part avec chiens, chèvre et bagages, pour l'Oxfordshire et nous raconte avec le plus grand naturel son épopée en bateau, train et taxi,concluant son Odyssée dans un jardin rempli de roses:"Au bout de deux heures,il n'y avait plus rien à tailler avant très longtemps. Tous les propriétaires de chèvres et de jardins me comprendront".
La duchesse apprécie ceux qui s'adressent à tous de la même manière,sans faire de distinction sociale, gageons qu'elle fait partie de ceux-là, car elle discute sans chichis avec tous les ouvriers qui restaurent le Versailles anglais dont elle a hérité mais brocarde les consultants de tout poil.
Pour elle le luxe consiste en "un feu de cheminée, un quart d'hectare et une demi-vache" et si quelques jours après la publication d'un billet dont je vous laisse deviner le contenu , elle reçoit un scalpel anonyme par la poste , elle déclare: " avec lui le bonheur est dans la maison".
Saluons au passage la traduction et la présentation de Jean-Noël Liaut qui a su nous faire partager toute la sympathie que visiblement Deborah Devonshire lui a inspirée.
Je pourrais multiplier à l'envie les citations mais ce billet fait déjà offense à ma volonté affichée de briéveté, donc précipitez-vous sur ce livre et régalez-vous !
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : deborah devonshire, la dernière des soeurs mitford
03/05/2010
ça commence à faire mal
"...la vie fleurissant, fragile, entre deux éléments inhospitaliers."
Angoissés, craignant d'avoir raté leur vie, les personnages des nouvelles de James Lasdun se trouvent à un moment, apparemment banal mais en fait crucial, de leur existence, là où ça commence à faire mal.
Pourtant rien de mécanique dans la structure de ces textes, rien de répétitif ,et l'auteur ne s'amuse pas avec ses personnages comme avec des animaux de laboratoire. Non, il les considère avec empathie , mais sans rien dissimuler de leurs travers, nous les rendant ainsi plus proches encore.
Un style précis et lumineux, s'attachant aux détails révélateurs, une grande palette d'univers concourent à faire de ces textes de vrais plaisirs de lecture qu'il faut prendre le temps de laisser infuser pour mieux les savourer.
Quelques citations, juste pour vous donner envie: "La femme ôta ses gants en chevreau. Les traits de son visage, lisse et symétrique semblaient entièrement occupés à inscrire de force le mot "beauté" dans l'esprit de quiconque la contemplait."
"Les actions les plus significatives d'un homme se gravaient-elles dans son anatomie, pour n'être décelable que par l'inconscient d'autrui ? "
ça commence à faire mal, James Lasdun, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Pierre Charras, Jacqueline Chambon 2010 , 286 pages.
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : james lasdun
23/04/2010
Carnets intimes
Il m'a été bien plus facile d'écrire sur le magnifique roman Les femmes du braconnier qui évoquait la vie de Sylvia Plath que sur ces Carnets intimes qui regroupent à la fois des nouvelles et des extraits du journal de la romancière, novelliste, diariste et poétesse américaine.
Difficile en effet de se frayer un chemin à travers la broussaille de clichés attachés à cette jeune femme suicidée , rapidement devenue ce que nous appelons aujourd'hui une icône pour certains. Difficile aussi de se départir d'un sentiment de gêne à l'idée de lire ces carnets intimes , même si on se dit que chaque écrivain les écrit autant pour lui que pour la postérité.
Les extraits de son journal nous montrent une Sylvia exaltée et lumineuse, mais aussi apaisée quand elle vit à la campagne avec son mari. ce que l'on retrouve aussi dans certaines nouvelles , dont une reprend directement un épisode de vacances amoureuses en Espagne. Ce va et vient entre les nouvelles et la vie de l'auteure semble constant même si le travail de l'écriture vient sublimer le travail de la mémoire.
Mais la dépression rôde toujours et Plath nous libre ici dans Langues de pierre une nouvelle mettant en scène une jeune femme qu'on devine enfermée dans un hôpital psychiatrique, texte tout en légèreté apparente mais qui distille un sourd malaise, en particulier quand l'héroïne prépare son suicide avec une méticulosité annonçant celle dont fera preuve Sylvia pour épargner ses enfants quand elle décidera de mettre fin à ses jours. Les nouvelles ne sont pas toutes aussi pregnantes mais l'ensemble est toujours aussi fascinant.
Carnets intimes, Sylvia Plath, traduit de L'américain par Anouk Neuhoff.
Merci à BOB et aux éditions de la Table ronde .
L'avis de Lilly, tout aussi séduite!
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : sylvia plath