08/04/2019
#LaFemmeMystifiée #NetGalleyFrance
"Souvent, il suffit qu'une femme ait commencé à percer à jour les duperies de la mystique de la femme, qu'elle ait compris que ni son mari , ni ses enfants, ni tout le confort, ni la vie sexuelle, ni le fait d'être comme les autres femmes ne lui permettront d'être elle-même pour trouver la solution bien plus aisément qu'elle n'osait l'espérer."
Voilà longtemps que j'avais envie de lire ce classique de la littérature féministe, ce pavé de 560 pages, extrêmement documenté, nourri de témoignages variés, qui analyse avec méthode la manière dont les femmes, après la Seconde Guerre Mondiale, aux États-Unis (mais, on a envie d'ajouter, pas que dans ce pays), ont été plus ou moins insidieusement incitées à abréger leurs études pour ne plus croire qu'aux valeurs familiales.
Se marier jeune, faire des enfants, et seconder leur époux, tel était l'unique horizon que la culture patriarcale, via les magazines féminins, mais aussi les sociologues, psychanalystes et autres spécialistes parfois autoproclamés, réservaient aux femmes, faisant fi de leur intelligence .
Évidemment, cette situation ne pouvait générer que des frustrations, se manifestant par un mal être diffus.
Paru pour la première fois en France en 1964 et traduit par celle qui allait devenir ministre, Yvette Roudy, La femme mystifiée permet d'évaluer le chemin parcouru mais aussi, tout ce qui reste encore à faire pour dégager la femme des stéréotypes dans laquelle on veut toujours l’enfermer.
Belfond 2019
06:00 Publié dans Essai | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : betty friedan, yvette roudy
18/03/2019
Cours petite fille !#METOO#TIMESUP#NOSHAMEFIST
Sous la direction de Samuel Lequette et Delphine Le Vergos, une trentaine de femmes et deux hommes seulement (faute de chercheurs dans le domaine du féminisme...) font le point sur le mouvement de protestation féminine déclenché par" l'affaire Weinstein", tout en l'inscrivant dans le passé des luttes féministes précédentes.
Ce qui est extrêmement intéressant dans cet ouvrage c'est que s'y côtoient aussi bien des textes écrits par des chercheuses, des juristes , sociologues, artistes, une poétesse, une historienne ou des écrivaines ,de nationalités différentes.
Dûment argumentés, denses, ces textes s'ouvrent par le témoignage très fort d'Asia Argento, victime tout à la fois du triste sire à l'origine du scandale, et de l'opprobre générée par son témoignage. Il se clôt par un texte raisonnablement optimiste de Maîa Mazaurette, qui table sur la ténacité du combat des femmes, mais j'aurais plutôt tendance à estimer, comme Michelle Perrot que , comme le prouve l'Histoire, chaque avancée du droit des femmes est suivie d'une offensive réactionnaire. Il n'en reste pas moins que cette prise de parole est un acte collectif d'émancipation puissant.
Éditions Des femmes 2019
Merci à l'éditeur et à Babelio
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29/01/2019
Psychologie de la connerie
Cet essai sur la connerie, sous des dehors en apparence légers, investit des champs tout à fait différents et passionnants, allant de l'école, l'entreprise, la politique à plus étonnant : nos rapports aux animaux.
La connerie est partout, mais, c'est bien connu, nous pouvons tous être le connard de quelqu'un d'autre, mais seuls les vrais cons ne veulent pas s'en rendre compte car la connerie est en effet liée au narcissisme exacerbé.
Comment faire face aux cons ? De nombreux auteurs semblent quelque peu découragés devant l'ampleur du phénomène, accentué et amplifié par les réseaux sociaux.
Mais quelques uns nous offrent des solutions : la culture, la création voire même des cas concrets déjà appliqués par des compagnies aériennes ou des hôpitaux,et qui ont porté leurs fruits.
Un panorama éclectique et riche qui confirme ce qu' Audiard affirmait déjà : "Les cons, ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît."
06:00 Publié dans Essai | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : jean-françois marmion
20/03/2018
Maudits mots
"Comment s'y prend-on pour faire mouche ? Il s'agit, toujours et partout, de mettre l'accent sur une différence, fut-elle fantasmatique, et d'en faire un stigmate."
Dans son introduction, la linguiste et sémiologue Marie Treps, souligne le fait que maintenant en France les propos xénophobes sont punis par la loi mais que , néanmoins, des précautions langagières , des stratégies d'évitement (insinuations, périphrases, euphémismes...) permettent à ceux tenant des propos racistes d'échapper aux sanctions.
Elle a donc décidé de faire un état des lieux, inscrivant notre rapport à l'Autre dans la continuité historique, rappelant ainsi que des raisons politiques ou économiques (traites négrières, colonisations ...) sont à l'origine de ces appellations. Ses propos sont étayés par une brassée d’exemples tirés de textes aussi bien anciens que contemporains.
Par chapitres plus ou moins gros, suivant l’importance du corpus, de "Allemands " à "Polonais et Russes", elle scrute ainsi ces Maudits mots, avant que d'envisager dans son tout dernier chapitre "Retours de bâton" , la juste conséquence, à savoir les insultes dont nous bénéficions à notre tour, de "gaulois"à "fesse de craie" !
On sort de cet ouvrage très riche un peu nauséeux devant tant d'irrespect et de manque d'humanité. Un indispensable !
Merci aux Éditions Tohubohu et à Babelio.
06:00 Publié dans Essai, l'amour des mots, l'étagère des indispensables | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : marie treps
19/03/2018
Je ne sais pas quoi faire des gentils blancs
Regroupant des articles parus dans différentes revues, Je ne sais pas quoi faire des gentils Blancs revient sur les fondements du racisme aux États-Unis et souligne, par exemple, la différence de traitement par les médias d'un terroriste Blanc ou d'un agresseur (ou considéré comme tel ) Noir.
L'autrice revient plusieurs fois sur les types de violence commis sur les Noirs, hommes ou femmes, s'appuyant aussi bien sur des exemples concrets la touchant elle ou sa famille que sur des auteurs qui ont nourri son analyse.
Elle rappelle ainsi que Toni Morrison a dit qu"'il n'y a pas de mémorial approprié, de plaque, de couronne ou de petit banc au bord de la route " pour honorer la mémoire des esclaves. Ce qu'un pays décide de commémorer ou d'oublier n'est jamais un choix objectif ou apolitique."
Le recueil se termine par un constat plutôt amer mais à la conclusion néanmoins résolument optimiste par un article intitulé: "Je pensais que ce serait plus facile pour toi", une mère, une fille et le racisme en Amérique aujourd’hui .
Par l'autrice du Cœur Battant de nos mères clic.
Autrement 2018, traduit par Jean Esch, 108 pages.
06:00 Publié dans Essai | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : brit bennett
16/11/2017
La meilleure des vies
"Pourquoi vous parler des bienfaits de l'échec ? Tout simplement parce qu'il vous permet de vous dépouiller de tout ce qui n'est pas essentiel. "
Invitée à prononcer le discours de la cérémonie de remise de diplômes à l'université Harvard, la célébrissime J. K Rowling choisit d'axer son allocution sur les vertus de l'échec et de l’imagination. Paradoxal mais efficace pour marquer les esprits.
Elle s'appuie sur sa propre expérience dans ces deux domaines ,ainsi que sur la compassion que l'organisation Amnesty International lui a permis de découvrir quand elle était étudiante et travaillait pour eux.
Empreint d'humour, jamais pompeux, un discours comme on aurait aimé en entendre à la fin de nos études.
70 pages illustrées. Grasset 2017.
06:05 Publié dans Essai | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : j k rowling
25/10/2017
Libérées ! Le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale
"On tire du ménage une sensation de contrôle et de pouvoir rarement égalée dans la mesure où il est aussi un défi au temps."
Partant de son expérience personnelle, s'appuyant aussi sur de nombreuses études, Titiou Lecocq analyse finement et , avec son humour habituel, l'inégalité de la répartitions des tâches ménagères au sein d'un couple et plus particulièrement d'un couple avec enfants. car c'est souvent à ce moment- là que la situation dérape.
Rappelant les racines du problème, l'éducation principalement, l'autrice pointe aussi du doigt les motivations psychologiques plus difficilement avouables ainsi que les différences dans la manière dont hommes et femmes se répartissent cette fameuse charge mentale.
Les "torts" sont partagés, pas de miracle préconisé pour régler le problème, mais une manière saine et enjouée d'envisager la situation. De quoi repartir sur de bonnes bases ?
Fayard 2017
L'avis d'Antigone.
06:00 Publié dans Essai | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : titiou lecoq
10/10/2017
Je me promets d'éclatantes victoires
" C'est une des raisons pour lesquelles l'écriture de Charlotte Delbo dérange :par sa grâce, elle peut refuser de vivre en victime."
C'est par Marie-José Chombart de Lauwe, ancienne résistante et déportée à Ravensbrück, lors de la préparation de ce qu'elle n'ose pas encore appeler son roman (Kinderzimmer) que Valentine Goby découvre la vie et l’œuvre de Charlotte Delbo.
Survivante d'Auschwitz-Birkenau, Charlotte Delbo amoureuse, résistante et déportée ne connaît pas une grande notoriété de nos jours. Valentine Goby, fascinée par la puissance de cette écriture poétique s'interroge sur les raisons de cette situation et nous livre ici un bel exercice d'admiration.
Une magnifique manière de célébrer la puissance des mots.
L’iconoclaste 2017.
06:00 Publié dans Essai | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : valentine goby
30/08/2017
La petite danseuse de quatorze ans
"Sa statuette, qui emprunte aux techniques médicales et aux fabrications d'objets courants est donc aussi et avant tout une immense réflexion sur la puissance de la création et en particulier de la sculpture."
Nous avons tous en tête tous la sculpture de Degas, reproduite à de très nombreux exemplaires .Mais qui connaît l'identité de La petite danseuse de quatorze ans qui posa pour le sculpteur ?
Dans cette enquête, Camille Laurens s'attache à retracer la vie en en apparence "minuscule" de Marie van Goethem et, à travers elle,à brosser le portrait de toutes ces petites filles pour qui la danse représentait plus un moyen de survie ,via l'exploitation éhontée de leurs corps, qu'un art exaltant.
L'auteure s’attache aussi à la manière dont l’œuvre elle-même a été accueillie, de manière très violente au début, avant de connaître une renommée mondiale.
Très documentée , tour à tour émouvante et révoltante, cette enquête analyse aussi les relations entre l'artiste, son modèle et la manière dont une œuvre est reçue par le public. Un document passionnant qui se dévore comme un roman.
La petite danseuse de quatorze ans, Camille Laurens, Stock 2017.
06:00 Publié dans Essai, rentrée 2017 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : camille laurens
06/03/2017
Chère Ijeawele, ou un manifeste pour une éducation féministe
"Apprends à lire à Chizalum. Apprends-lui à aimer les livres.Le mieux est de lui montrer l'exemple au quotidien. [...] Si rien d'autre ne marche, paie-la pour lire."
Quand son amie lui a demandé des conseils pour élever de manière féministe sa toute petite fille, Chimamanda Ngozi Adichie a d'abord été prise au dépourvue. Puis, s'inspirant de ses expériences des enfants et de sa réflexion sur le féminisme, a enfin rédigé quinze suggestions toujours pleines de pragmatisme et parfois d'humour, sans jamais tomber dans le prêchi prêcha.
En creux, c'est aussi un portrait de la société nigériane qui nous est livré par le biais des relations entre hommes et femmes, une société où la mondialisation sévit aussi par le biais de cette distinction artificielle des vêtements pour enfants :rose pour les filles, bleu pour les garçons.
Sans tomber dans intellectualisme à tout crin, l'écrivaine nigériane nous livre ainsi des pistes, étayées de d'exemples concrets, où se lit aussi une revendication de l'identité africaine. Un livre tonique,généreux et plein d'humanité.
Chère Ijeawele, ou un manifeste pour une éducation féministe, Chimamanda Ngozi Adichie ,traduit de l’anglais (Nigéria) par Marguerite Capelle.
Gallimard 2017, 78 pages inspirantes.
06:00 Publié dans Essai | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : chimamanda ngozi adichie