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10/01/2022
Bass Rock
"L'ambiance s'adoucit avec le thé. Les conventions sociales devenaient plus facilement négociables lorsqu'une bouche pleine pouvait légitimer un silence ou quand il était possible de complimenter quelque chose d'aussi neutre qu'un biscuit. "
Trois femmes, trois époques différentes mais une même région , l’Écosse, et surtout des femmes aux prises avec la violence protéiforme des hommes.
Que ce soit Sarah, jeune femme accusée de sorcellerie au XVIII ème siècle, Ruth qui endosser le rôle de mère de substitution auprès de deux orphelins après avoir épousé leur père, vétéran de la seconde guerre mondiale, ou , plus proche de nous, Viviane qui peine à trouver sa place et à faire face à ses émotions, elles doivent affronter un mode où les hommes imposent leur pouvoir, par des mots, ou de la pure violence, allant jusqu'au féminicide., le tout dans l'indifférence quasi générale.
Heureusement, la solidarité féminine ,mais aussi celle de certains hommes ayant dû affronter eux aussi des traumatismes ,vient alléger cette atmosphère souvent lourde.
Une construction juste parfaite fait qu'on ne se perd jamais au fil du texte et des époques et l'autrice a le chic pour rendre cette violence sourde dans les rapports sociaux dont les femmes ont été et sont encore souvent victimes. Quelques esprits viennent pimenter le tout avec un grand naturel et l'on prend beaucoup de plaisir à dévorer ce roman aux personnages très attachants.
Traduit de l’anglais par Hélène Vignol. Actes Sud 2022
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : evie wyld
08/01/2022
Le bonheur est au fond du couloir, à gauche...en poche
"Depuis l'enfance, on nous répète que nous sommes libres de réaliser nos rêves. On nous oblige à faire nos propres choix, à suivre la filière correspondant à nos vœux, et donc à assumer seuls nos erreurs et nos échecs.On nous a retiré la bouée de sauvetage de la faute à autrui. Merci du cadeau."
Le narrateur de ce nouveau roman de J.M. Erre est l’illustration parfaite de cette citation de Jean-Louis Fournier : "C'était un angoissé pour qui tout allait bien, jusqu'au jour où il est né."
Et angoissé Michel H. l'est d'autant plus que Bérénice vient de le quitter, lui laissant en cadeau une flopée de livres de développement personnel, traitant tous de l'art d'être heureux.
"Velléitaire", "timoré", "dépressif suicidaire", les qualificatifs ne manquent pas pour qualifier cet individu encore jeune , qui peine à trouver sa place dans une société où l'injonction au bonheur est devenue une véritable tyrannie , individu que son voisin peu amène, M. Patusse traite simplement de "raté".
Michel H. est persuadé que Bérénice reviendra s'il devient heureux et se lance donc dans une série de tentatives éperdues , loufoques, marquées par le déni le plus total de la réalité, déni qui le fera tomber de Charybde en Scylla.
L'occasion pour J M. Erre de dégommer tous les travers de notre société, en une série de raisonnements biaisés, de fausse logique , le tout assaisonné d'une bonne dose d'humour noir. Le récit file à toute allure et il faut prendre le temps de le relire pour mieux en apprécier toute la saveur. Un festival de citations à collecter et une mécanique imparable dans la construction font de ces 183 pages de la dynamite ! Un indispensable, bien évidemment !
06:00 Publié dans Humour, l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jm erre
07/01/2022
Encabanée...en poche
"Incarner la femme au foyer au sein d'une forêt glaciale demeure, pour moi, l'acte le plus féministe que je puisse commettre, car c'est suivre mon instinct de femelle et me dessiner dans la neige et l'encre les étapes de mon affranchissement ."
Quel beau mot que cet Encabanée qui donne son titre au roman ! Évoquant tout à la fois le refuge et la prison, fleurant bon la langue québécoise, il était juste parfait pour ce roman inspiré par le journal intime de l'autrice, enfermée dix jours dans son petit refuge du Bas-Saint-Laurent à cause d’une vague de froid .
Ici la narratrice , choisit de quitter une vie confortable pour s'acheter une cabane et un terrain à Kamouraska , dans une nature à peine troublée par le bruit de trains. Elle veut mener une vie plus frugale, plus proche de la nature , lire de la poésie et écrire. Il lui faudra aussi s'atteler à l'entretien de son poêle pour faire face à un hiver particulièrement rude. Pas de réseau pour le téléphone portable, tout peut donc devenir dangereux.
J'ai tout aimé dans ce roman, la langue, la démarche et la narration qui fait la part belle au romanesque et au corps ,avec l'irruption d'un intrus qui permettra de satisfaire les désirs charnels de notre narratrice.
Un grand coup de cœur pour ce roman qui peint et défend la nature canadienne avec brio et nous propose un point de vue féminin et féministe sur une expérience plus souvent racontée au masculin.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : gabrielle filteau-chiba
06/01/2022
Dehors la tempête...en poche
"Comme après une jachère amoureuse, je me sentais à nouveau disponible pour une rencontre avec un livre, un genre ou un écrivain. Mais c'était décidé, jamais plus je ne lirais d'histoires. C'est ainsi que la poésie est devenue ma méthadone."
Nombreuses sont les métaphores marines qui irriguent ce livre appartenant à la collection Le Courage. Normal, l'un des romans préférés de Clémentine Mélois est Moby Dick.
Dans son panthéon personnel figurent aussi Simenon et son héros Maigret dont elle analyse avec finesse la consommation alcoolique, qui l'amènera à consommer un alcool démodé, car lire entraîne bien des expériences sensuelles.
Au gré des ses humeurs, de ses souvenirs , de ses digressions, nous partageons son amour tant pour les livres que pour la lecture.
Les livres addicts ne pourront que craquer pour ce livre où beaucoup se reconnaîtront, en particulier dans une liste où elle confesse certaines habitudes liées aux livres...
06:00 Publié dans l'amour des mots, le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : clémentine mélois
04/01/2022
Legoûtdesgarçons #NetGalleyFrance !
"Nous avons reçu trop tôt un pouvoir dont nous ne mesurons pas l'ampleur, semblables en cela à ces jeunes monarques propulsés sur le trône à la mort du père. On les place sous tutelle pour éviter qu'il ne se brûlent le royaume en une seule nuit. Nous, nous sommes seules avec notre trésor. "
La narratrice , qui a treize ans, fréquente un lycée catholique d'une ville jamais nommée (mais qu'on devine être Beyrouth ) et, tout comme ses camarades de classe ,elle ne pense qu'à ça . Le sexe des garçons. "Nous en parlions sans honte: nous voulions d'un désir qui fasse perdre le contrôle." Elle et ses amies en parlent crûment, expérimentent, jaugent, se montrent parfois cruelles, même entre elles. Les amitiés se nouent, se dénouent au gré des fascinations et des intrigues. C'est tout un microcosme qui se montre à nous et que la narratrice analyse avec lucidité, "Il y a des bonnes et des mauvaises façons d'être une jeune fille" pointant les injonctions faites aux femmes en devenir : "Ce n'est que sur ces deux registres qu'il convient d'être une jeune fille. Réticente ou délicieuse. Jamais enflammée."
En lisant, que dis-je, en dévorant ce premier roman saturé de désir, saturé d'énergie, je n’ai pu m'empêcher de penser à une écrivaine aujourd’hui tombée dans l'oubli, mais qui avait fait une entrée fracassante en littérature , Muriel Cerf, en particulier à son roman Les rois et les voleurs.
La même vitalité, la même liberté, l'aisance dans l'écriture et la finesse de l'analyse de l'adolescence , voilà qui augure bien de l'avenir pour Joy Majdalani.
Grasset 2022
06:00 Publié dans romans étrangers, romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : joy majdalani
03/01/2022
Rose, de Botticelli à Christo
"Le bleu, l'or et le rose sont de même nature. " Yves Klein
Chair, rose poudré, cuisse de nymphe, incarnat, saumon, parme, vieux rose, bonbon ou fuchsia, le rose se décline en de multiples nuances pour mieux nous séduire.
D’abord considéré "comme inférieur, subordonné au rouge tout-puissant dont il ne serait qu' une pâle déclinaison" , il ne sera cité comme couleur à part entière qu'en 1837. Ceci ne l’empêche pas pour autant de devenir populaire dans la mode...masculine au XVII ème siècle comme le montre, entre autres, ce portrait d'Henri IV en Mars de Jacob Bunel que l'autrice étudie pour mieux en souligner l'aspect politique car le rose ici modère "l'intensité du rouge", le rend "diplomate".
Ce n'est qu'au XX ème siècle que le rose deviendra une couleur genrée dans la société de consommation.
Ceci étant, Rose balaie surtout un vaste panorama artistique, scindé en deux parties : les Incontournables et Les Inattendus, analysant de manière didactique et fort plaisante 40 œuvres, sans négliger l’aspect historique, géographique voire anecdotique. On se cultive de manière agréable et on prend un bon shot de roses qui donnent la pêche. Un livre à dévorer et à feuilleter tour à tour (car l'iconographie est superbe !) de quoi commencer l'année du bon pied.
Un ouvrage qui donne envie de découvrir les autres tomes de la collection !
Un grand merci à Babelio et aux Éditions Chêne.
06:00 Publié dans Art | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : hayley edwards-dujardin
01/01/2022
2022, tout ira mieux ! Ou pas ?
Que 2022 vous soit douce !
01:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (12)