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08/05/2019
Tsun-dico
Nous pratiquons, toutes et tous,à des échelles différentes, avouons-le, le tsundoku, mot japonais désignant "l'accumulation de livres qui ne sont jamais lus"...Un mot qui mériterait d'entrer dans notre vocabulaire, non ? Il n'est pas le seul.
Sabine Duhamel s'est amusée ainsi à recenser 200 mots que le français devrait emprunter aux autres langues et c'est un pur régal pour les curieux et les amoureux des mots !
Ainsi voudrions-nous tous profiter du kwadi, terme issu d'un dialecte brésilien traduisant "le bien-être que l'on ressent lorsqu'on se réchauffe et paresse au soleil".
Faute de mieux, les finlandais ont un terme pour évoquer le fait de "se prendre une cuite seul chez soi et en sous-vêtements" (!) : kalsarikannit. Plus conviviaux, les Allemands pratiquent le fruhschoppen, soit le fait de "boire en bonne compagnie des boissons alcoolisées dès le matin", ce qui peut, mine de rien, si l'on enchaîne amener à la walk of shame britannique, soit littéralement "chemin de la honte" et désignant le fait de "rentrer chez soi en titubant parce qu'on a trop bu ou rejoindre son domicile au lendemain d'une soirée avec une énorme gueule de bois et ses vêtements sales de la veille". Ne reste plus qu'à offrir à sa douce (ou son doux )pour se faire pardonner un Drachenfutter allemand (littéralement nourriture du dragon), soit un cadeau pour l’amadouer.
Rassurez-vous tout ne tourne pas autour de la boisson , loin s'en faut , et c'est un pur régal que de découvrir ces termes hyper précis, révélateurs des particularités de plus de 70 langues et /ou dialectes !
Autrement 2019.
06:00 Publié dans l'amour des mots | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : sabine duhamel
07/05/2019
Nous sommes à la lisière
"Ses histoires à elle, pourtant, n’inventent pas d'autres mondes. Pas d'autres amours non plus. Il leur suffit d'être complices de quelques vies sauvages."
Cheval, fourmis, hérisson, écureuil, chat ou oiseaux, entre autres, peuplent les nouvelles de Caroline Lamarche.
En effet, ce sont eux les héros, dûment prénommés, donc dotés d'une identité propre, avec lesquels au moins un humain entre en interaction .
Cette dernière peut être brève, peut être en apparence anecdotique, mais elle fait résonner de manière un peu différente les existences en tous points ordinaires qui nous sont ici relatées en quelques pages poétiques et d'une précision extrême.
Qu'elle s'arrête pour aider un hérisson à traverser la route et l’amoureuse de la nouvelle Ulysse, reliera par des liens éclectiques, mais toujours pertinents, cette rencontre fugitive avec ses propres interrogations lors d'un repas où se révèleront des enjeux qu'elle n'était peut être pas prête à admettre.
La plus longue et la plus émouvante nouvelle, Frou-Frou, évoque une histoire d'amour hors-normes, à bien des égards et témoigne de l'art de l'auteure pour évoquer avec délicatesse et sensibilité des émotions intenses mais sourdes.
La nature est souvent en danger dans ces textes, mais ses habitants, aux vies parfois éphémères, témoignent d'une volonté de vie et de liberté qui émeuvent au plus haut point.
Un grand coup de cœur! Et zou sur l'étagère des indispensables !
Gallimard 2019, 165 pages en apparence simples.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, nouvelles belges | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : caroline lamarche
06/05/2019
#LaDanseDuTemps #NetGalleyFrance
"Elle avait éprouvé la même chose durant son enfance; elle avait l'impression d'être une adulte responsable dans le corps d'une petite fille."
Entre un père très (trop) doux et une mère psychiquement instable, Willa a très jeune fait le choix d'être pacifique.
Son existence sera donc une suite de renoncements apparents jusqu'à ce que la soixantaine atteinte, Willa qui devenue veuve s'est remariée et a deux grands fils qui entretiennent avec elle des liens sporadiques, reçoive un jour un coup de fil.
Une très ancienne petite amie de son fils a besoin de son aide pour s'occuper temporairement de celle qui aurait pu être sa petite fille. Voyant là l’occasion de se rendre utile, Willa quitte sa vie confortable et va découvrir une toute autre vie à Baltimore, au grand dam de son mari qui entend bien que l’expérience ne s'éternise pas.
Choisissant des moments marquants de l'existence de cette femme, Anne Tyler choisit la toute fin de son roman pour lui impulser une soudaine embardée, montrant ainsi que rien n'est irrémédiable.
Un roman confortable qui peut parfois agacer mais qui ne fait pas pour autant la part belle aux bons sentiments.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : anne tyler
05/05/2019
#MêmePasMoi #NetGalleyFrance
"Je ne veux réfléchir à rien. Je veux foncer, vivre. Y croire. Être une autre ou même moi. Quelque chose, un truc."
Pierre a quitté Elsa. Qui ne s'en remet pas. Alors, elle pense au suicide, tente la psychanalyse, la voyance par téléphone, le voyage au bout du monde, le lifting.
Elle qui s'est toujours sentie décalée repense aussi à son enfance, à son adolescence et à ses soirées au Palace.
Le synopsis est mince, j'ai cherché en vain l'autodérision et l'émotion. Quant à l'écriture, elle est souvent oralisée et se compose principalement de phrases juxtaposées.
Stock 2019.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : stéphanie murat
04/05/2019
Ponti
"Amisa considéra son nouveau mari. Elle n'arrivait pas à l'imaginer au-delà de trente ans, pas plus qu'elle-même d'ailleurs. La jeunesse semblait infinie, surabondante et nécessaire, comme un distributeur de mouchoirs inépuisable."
Dans ce premier roman, Sharlene Teo entrecroise les récits et les vies de trois femmes à Singapour : Amisa, jeune fille pauvre dont la beauté l'a amenée à incarner l'héroïne d'une série de films d'horreur devenus cultes qui vit maintenant recluse; sa fille, Szu, sorte de vilain petit canard, confite dans l'admiration d'une mère qui la supporte à peine et Circé, l'exact opposé de la précédente, adolescente bien dans sa peau.
Les deux jeunes filles vont nouer une amitié intense, même si tout semble les opposer.
Devenues adultes, elles vont se recroiser et , pour Circé, ce sera l'occasion de revenir sur la manière dont tout s'est soudain brisé.
Sharlene Teo dépeint à merveille l’atmosphère de Singapour et la manière subtile dont peut se déliter une amitié ,mais le roman perd en intensité dramatique dans sa dernière partie et c'est dommage. Une auteure à suivre néanmoins.
Traduit de l’anglais (Singapour) par Mathilde Bach, Buchet-Chastel 2019.
Cuné a adoré.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : sharlene teo
03/05/2019
Macadam Butterfly
"J'enterrerai donc deux fois ma jeunesse aujourd'hui. Une première avec ma petite chienne dans les dunes qu'elle aimait tant, et une deuxième avec ma grand-tante dans le village de bord de mer où elle a passé la fin de sa vie."
Être dans les toilettes d'un bar parisien quand une fusillade éclate au dessus de soi, se faire draguer par le petiote qu'on gardait autrefois (elle a bien grandi la petiote), courir à perdre haleine dans une ville la nuit à cause d'un texto, faire disparaître tout ce qui pourrait être gênant pour la famille d'un ami/amant décédé et dénicher des trésors de délicatesse bien enfouis, ouvrir la porte de l'appart de sa sœur et découvrir son choix irréversible...
Dans beaucoup des nouvelles qui composent ce recueil à dominante urbaine, Tara Lennart choisit d'envisager une situation sous un angle particulier et pertinent à la fois. L'écriture est parfois sensible, parfois crue et si certains textes sont plus prévisible et convenus dans leur volonté de courir vers une chute parfois crade, il n'en reste pas moins que j’ai globalement été séduite par ce Macadam Butterfly, plus délicat qu'il n'y paraît au premier abord.
Éditions Rue des Promenades 2019, 205 pages.
06:00 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : tara lennart
02/05/2019
En lieu sûr...en poche
"La jeunesse, ça n' a rien à voir avec l'âge chronologique. La jeunesse, ce sont les périodes d'espérance et de bonheur."
Deux couples, devenus amis dans les années trente, se retrouvent à l’occasion d'un anniversaire, alors qu’ils ont atteint l'âge de la retraite. Ces retrouvailles sont l'occasion de retours en arrière et d'analyses fouillées des liens complexes qui les unissent.
Les épreuves ne leur ont pas été épargnées, et ce qui aurait pu les séparer, à savoir les différences sociales, sont ici traitées avec finesse.
D'inspiration autobiographique, ce roman traite de l'amitié avec justesse et sans manichéisme. Les personnages sont envisagés dans leur complexité et leur évolution au fil du temps est passionnante.
Un roman autour duquel je tournais depuis longtemps et que j'ai enfin pris le temps de savourer.
Traduit de l’américain par Eric Chédaille, Gallmeister Totem 2017. 414 pages.
05:55 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : wallace stegner
01/05/2019
Mercy, Mary, Patty...en poche
"Quinze jours pour trancher qui est la vraie Patricia, une marxiste terroriste, une étudiante paumée, une authentique révolutionnaire."
Qu'ont en commun les Mercy, Mary, Patty du titre ? Ce sont des jeunes femmes kidnappées à des époques différentes, qui ont toutes choisi de rester-définitivement ou pas - avec ceux qui les avaient enlevées, tournant ainsi violemment le dos à leur éducation de filles soumises.
Centré sur la figure de Patricia Hearst, fille d'un milliardaire enlevée en 1974 par un groupuscule révolutionnaire, le roman de Lola Lafon analyse par le biais d'une universitaire américaine venue enseigner en France, Gene Neveva, et chargée de rédiger un rapport pour l'avocat de la jeune femme, toute l'affaire d'un point de vue féministe, original et extrêmement fouillé.On est bien loin ici du syndrome de Stockholm couramment évoqué ou de la manipulation évoquée par les avocats de l'héritière.
En outre, le roman imagine aussi la manière dont une jeune française, Violaine, chargée d'aider Gene Neveva, verra sa vie si tranquille et tracée d'avance, radicalement bouleversée.
Des destins de femmes qui résonneront longtemps dans nos mémoires, un style percutant, des phrases soulignées à la pelle font de ce roman un indispensable.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lola lafon