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30/06/2015
Bilan de juin
Juin est pour moi un mois hybride, où, si la fatigue s'accumule, les vacances pointent le bout du nez...
Un seul coup de cœur cinématographique, vraiment pas prévu: Les combattants.
Une jeune femme éduquée, provenant d'un milieu relativement aisé, s'entraîne pour entrer dans un bataillon de l'armée réputé pour sa dureté car elle veut apprendre à survivre. Sa logique est implacable, sa volonté aussi.
Elle entraîne dans son sillage un garçon , plus motivé par la sportive que par l'armée dans un stage préparatoire où"la grande gueule", (sic) de la belle et ses diplômes lui nuiront plus qu'autre chose. Il est vrai que le langage formaté de l'armée, elle le pousse dans ses retranchements ! Une échappée non prévue dans la forêt sera une vraie occasion de se découvrir...
Un film qui opère de sacrés virages, nous entraîne sur des chemins de traverse, avec des acteurs formidables et quelques notes d'humour, noir forcément: il faut voir l'héroïne offrir un cadeau pas banal pour s'excuser à la mère de son copain !
La bande annonce: clic !
Par contre, j'ai tenu un quart d'heure maxi pour Un été à Osage County, Meryl Streep et Julia Roberts n'ayant pas réussi à me convaincre de suivre ce film formaté et outré.
Un peu déçue aussi par La propriété (vue, un peu partout sur les blogs), dont l'intrigue m'a paru un peu inutilement alambiquée même si le personnage de la vieille dame juive qui revient à Varsovie est très touchant.
à sa décharge aussi, je lis beaucoup sur ce thème en ce moment et sans doute m'attendais-je un peu à autre chose.
Très touchée, comme la totalité des auteurs de billets sur la blogo et ailleurs, par Ce n'est pas toi que j'attendais, roman graphique et autobiographique sur la naissance d'une petite fille atteinte de trisomie 21. L'évolution des sentiments du père-narrateur et auteur (doute, colère, difficultés à s'investir affectivement puis amour) est très bien rendue, sans pathos et sans angélisme (il ne nous cache pas ses souhaits les plus noirs mais n'embellit pas pour autant la situation).
La comparaison entre la situation des ces enfants au Brésil, pays dont est originaire l'épouse de l'auteur, permet aussi un autre éclairage. Quant aux photos qui concluent l'ouvrage, elles sont tout simplement craquantes ! Un grand coup de cœur !
Coup de cœur aussi pour cette histoire d'amour au temps du Sida, Pilules bleues. Elle et son fils sont séropositifs et prennent un traitement pour tenir à distance le virus. il est dessinateur de BD et raconte leur histoire d'amour, pleine de notations justes et avec un bilan treize ans plus tard, façon interview dessinées avec les principaux protagonistes , plus une ! Un texte qui résonne d'autant plus que jesuis en plein dans la lecture de Fairyland, un poète homosexuel et sa fille à San Francisco dans les années 70 (et au delà, j'en suis aux années 80 avec l'arrivée du Sida, alors considéré comme le cancer des homosexuels exclusivement).
BD dénichées à la médiathèque.
06:00 Publié dans Je l'ai lu !, je l'ai vu ! | Lien permanent | Commentaires (12)
29/06/2015
Comment je me suis débarrassé de ma mère
"Non seulement ma mère est moche et bête.Mais, en plus, elle est pauvre."
Mère intrusive et manipulatrice (les réseaux sociaux n'ont plus de secrets pour elle), mère prête à tout pour que sa fille remporte une compétition sportive, mère qui ne respecte plus les frontières entre son intimité et celle de son fils et "pète les plombs"; mais aussi mères qui subissent la cruauté de leurs enfants parce qu'ils ont honte d’elle ou veulent juste la faire souffrir, c'est tous les jours la fête des mères dans le recueil de nouvelles de Gilles Abier !
Le titre est à prendre au sens propre du terme et la manière de se débarrasser de sa génitrice est souvent violente ! Il est vrai que la plupart d'entre elles l'ont bien cherché mais la dernière nouvelle , De concert, qui réunit les principaux protagonistes à la fin du concert d'un groupe mentionné dans chaque texte, remet les choses en perspective et oriente cette catharsis vers une fin à la fois plus ambiguë et plus inquiétante.
Des textes crus,dérangeants, qui expriment toute la violence de l'adolescence, ses excès et sa fougue. Un auteur dont je vais poursuivre la découverte !
Comment je me suis débarrassé de ma mère, Gilles Abier, Actes Sud junior 2015.
L'avis de Jérôme, le tentateur, clic.
06:00 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : gilles abier
27/06/2015
Les évaporés...en poche
"Les soupçons, c'est une chose, c'est comme les probabilités, mais les images, la certitude, la vérité. Comment font les gens pour vivre avec la vérité ? "
Dans un Japon qui peine à se remettre de la catastrophe de Fukushima, vont se croiser trois trajectoires: celle d'un homme qui disparaît, s'évapore comme on dit dans ce pays, où ce phénomène est courant et n'entraîne aucune recherche par les autorités; celle de sa fille, depuis longtemps installée aux États-Unis qui engage son ex -petit ami détective privé et surtout poète et romancier, Richard B. pour rechercher son père; celle, enfin d'un adolescent qui tente de survivre dans les rues.
Dans un pays gangrené par les yakusas (la mafia locale), ces personnages se confrontent avec une douce mélancolie à la perte et cherchent des moyens pour se réinventer.
Avec poésie et délicatesse, Thomas Reverdy nous brosse le portrait de la face cachée d'un pays qui nous paraît encore très étrange, surtout en ce qui concerne l'identité (une simple carte de visite permet d"en attester). Mais ce que j'ai aimé par dessus tout, c'est l'idée formidable d'imaginer le retour au pays de Yukiko, accompagnée de celui qui fut son petit ami, le romancier Richard B(rautigan). Les lecteurs qui avaient eu un coup de cœur pour cet auteur atypique et hautement addictif lors de la première parution de ses écrits en France, peuvent ainsi le retrouver . Un très joli voyage au Japon que je vous recommande chaleureusement.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : thomas b. reverdy
25/06/2015
Le non de Klara
"Haine. je crois pouvoir avancer ce mot, le poids de ce mot. Si j'avais réfléchi au vocable haine, pour moi, la manifestation en aurait été passionnée, excessive, fracassante, convulsive, un sentiment qui se voit. Au lieu de quoi, sa voix raconte posément des choses brûlantes qui se refroidissent en sortant d'elle. Elle parvient, je ne sais comment, à exprimer sa haine froidement. presque légèrement. En permanence, il y a cette dichotomie entre ce qu'elle dit d'abominable et la façon dont elle le formule."
Aparté :Clara Dupont-Monod est une chroniqueuse dangereuse. Elle parvient, tout en révélant la fin du roman, à me donner envie de lire un texte dont j'ai beaucoup entendu parler , sans jamais me décider. Et je l'en remercie !
Klara, juive allemande, a survécu à Auschwitz et, après un périple à travers l'Europe ,rentre en France en juillet 1945.
Elle est accueillie par Angélika, sa belle-sœur et amie, qui commence alors un journal afin de mieux comprendre l'attitude de la survivante . Cette dernière refuse en effet de voir sa fille de trois ans et peine à se réadapter à la vie quotidienne. Par bribes parfois, par de courts récits souvent, s’élabore le récit poignant mais d'une dignité absolue d'une femme qui analyse cliniquement son attitude pendant et après le camp.
Le non de Klara est un roman d'une sourde violence et un récit très éclairant sur la société française de l'après-guerre vis à vis des survivants des camps. De maladresses en aveux troublants, Soazig Aaron peint de manière non manichéiste des Français ordinaires qui ne prennent pas la véritable mesure de ce que les déportés ont enduré. J
'ai lu quelque part que, aussi surprenant que cela paraisse, la majorité des Allemands , dans les années 60, ignoraient la réalité des camps. Un fait qui permet de mieux comprendre les attitudes dépeintes dans ce texte.
Un roman déniché à la médiathèque. à lire absolument, si ce n'est déjà fait.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : soazig aaron
23/06/2015
Sucré, salé, poivré
"Les vipères font de très bonnes mères."
Paru en Grande Bretagne en 1985, sorti pour la première fois en France en 1993, Sucré salé, poivré fait partie depuis cette date de mes romans chouchous de Mary Wesley .
Hébé, mère célibataire, un sacré défi à l'époque, choisit d'assurer sa subsistance de manière originale et audacieuse, faisant fi des convenances . De quelle manière ? Je vous laisse le plaisir de le découvrir dans ce roman délicieusement amoral !
Un pur délice british qui envoie valser avec jubilation les codes de la bonne société !
Les éditions Héloïse d'Ormesson font œuvre de salubrité publique en rééditant ce roman !
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : mary wesley
22/06/2015
Je, d'un accident ou d'amour
"Elle me soleil et m'étoiles, je me des astres à venir."
On pense d'abord aux contraintes de l'Oulipo devant ce texte privé de verbes. Puis, on se laisse emporter par cette histoire d'amour qui chamboule la vie et le Verbe du narrateur quand il rencontre Adèle.
L'absence de phrases "classiques" s'oublie très vite et l'on est au plus près des sensations, du ressenti de nos deux amoureux.
Rencontre, concrétisation, obstacles, les figures imposées de la romance s’enchaînent et gagnent ici en fraîcheur, en poésie et en humour. la forme et le fond se répondent de la manière la plus harmonieuse et originale.
Un grand coup de cœur pour un opuscule de 44 pages que l'on n'oubliera pas de sitôt !
Je, d'un accident ou d'amour, Loïc Demey, Cheyne éditeur 2014.
Merci à Clara pour cette découverte !
06:00 Publié dans Objet Littéraire Non Identifié | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : loïc demey
21/06/2015
Comme un avion
1981 , je ne dois qu'à l'épaisseur des murs de la résidence universitaire ou plutôt à l'absence quasi continue de mes voisins, d' écouter en boucle la chanson de Charlélie Couture "Comme un avion sans ailes" en toute impunité.
2015, le titre (amputé), l'acteur et réalisateur , Bruno Podalydès, Agnès Jaoui , Sandrine Kiberlain, et Vimala Pons (tous excellents), autant d'arguments qui me disposaient à apprécier le si vanté par la critique Comme un avion.
Las, le rythme languissant, le personnage central qui part ,suréquipé, faire sa balade en kayak, Le manuel des castors juniors comme livre de survie et Vol de nuit comme réminiscence de sa passion précédente (l'aérospatiale), coiffé d'un chapeau à la Indiana Jones, mais se révèle incapable de se tirer d’affaire dès qu'un obstacle surgit ,n'ont pas su me séduire.
Les rires étaient rares dans la salle et ce quinquagénaire, qui, comme le remarque Agnès Jaoui, sublime, aime se laisser porter, m'a plutôt agacée. Il se trouve un petit paradis et se contente de profiter des plaisirs qui s'offrent à lui, se délestant peu à peu des gadgets et de la "panoplie" dont il semble féru. Le voyage (quasi) immobile s'est donc révélé plutôt décevant.
En fait, je rêve d'un film ou ce serait une femme qui partirait ainsi à l'aventure, en toute sérénité,sans mettre son intégrité physique en péril et sans être jugée...
La bande annonce: clic.
06:00 Publié dans je l'ai vu ! | Lien permanent | Commentaires (4)
20/06/2015
Le club des pauvres types
"Société d'individualistes incapables de venir en aide à des personnes en délicatesse avec la vie."
Paul, le narrateur, parfait anti-héros,vient enfin de franchir un cap : il s'est installé avec son amoureuse, Claire.Les ajustements ne vont pas sans mal et le trentenaire peine à répondre aux exigences de sa compagne.
Les aléas de la vie vont lui faire rencontrer d’autres hommes, en couple ou non, ayant plus ou moins de difficultés avec l'engagement amoureux, et Le club des pauvres types va naître.
"Ce club est né spontanément, sans préméditation ni mauvaises intentions d'un regroupement d'hommes dans la fleur de l'âge voulant simplement faire connaissance, il s'est progressivement transformé en un lieu de débat, de lutte et de camaraderie militante."
Mesfames, si vous avez déjà rêvé de connaître la vie secrète des trentenaires masculins, précipitez-vous sur le roman de Jonathan Curiel ! Du décryptage des profils sur les sites de rencontres, au récit épique d'un Enterrement de Vie de Jeune Homme , en passant par les affres du choix du cadeau parfait, vous saurez tout sur ces pauvres hommes, accablés par la pression professionnelle et totalement déboussolés par les femmes et leurs requêtes: "Et veut-on des enfants ? Plutôt voudraient-ils de nous ? On a déjà du mal à apprivoiser et à se faire accepter par notre électroménager, est-on programmé pour gérer les caprices et les pleurs d'un enfant ? ".
C'est bourré d'humour, un peu superficiel parfois, mais le narrateur manie l’autodérision et l'hyperbole avec virtuosité. Son application du vocabulaire de l'entreprise au management du couple est un pur régal et l'on sourit sans cesse tout au long de ces 316 pages.
Le club des pauvres types, Jonathan Curiel, Fayard 2015.
06:40 Publié dans Humour, romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jonathan curiel
19/06/2015
LOL est aussi un palindrome*
"-Madame, mais en fait, Phèdre, c'est la première cougar, quoi"
Sous-titré, Journal d'une prof au bord de la crise (de rire), ce journal de bord consigne mois par mois les échanges parfois surréalistes, parfois désarmants, entre une prof de français et un vaste échantillon de ses élèves d'un lycée"réputé sensible du 93".
ça se lit très vite (un échange par page), c'est à la fois drôle et révélateur d'une société et de relations prof/élèves en pleine mutation. Le fossé culturel est souvent très profond mais vaille que vaille, parfois de manière surprenante et diablement futée, les élèves assimilent (ou pas ) les notions au programme.
J'ai apprécié la présentation de chaque mois qui recense le nombre d'élèves (fluctuant), l'état des troupes, celui du prof , les événements marquants et confirme bien qu'au mois d'avril le prof doit effectuer une "Tentative de spécialisation en gestion hormonale" (des élèves !).
Un recueil qui parlera forcément aux enseignants , mais pas que. De quoi nous rebooster pour terminer l'année et oublier la mine pleine de compassion d'une de mes élèves qui, m'ayant demandé depuis combien de temps j'enseignais (réponse :trente ans), m'a regardée, l'ai navré ,en disant "Mais alors , madame, vous avez raté votre vie !".
*mot qui peut se lire indifféremment de gauche à droite et de droite à gauche
06:00 Publié dans Humour | Lien permanent | Commentaires (8)
16/06/2015
Histoire d'une vie
"Plus de cinquante ans ont passé depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Le cœur a beaucoup oublié, principalement des lieux, des dates, des noms de gens, et pourtant je ressens ces jours-là dans tout mon corps. Chaque fois qu'il pleut, qu'il fait froid ou que souffle un vent violent, je suis de nouveau dans le ghetto, dans le camp, ou dans les forêts qui m'ont abrité longtemps. La mémoire, s'avère-t-il , a des racines profondément ancrées dans le corps. Il suffit parfois de l'odeur de la paille pourrie ou du cri d'un oiseau pour me transporter loin et à l'intérieur."
Ces mots terribles ont été écrits par Aharon Appelfeld, , un auteur majeur dont je différais sans cesse la découverte. Avec Histoire d'une vie, je viens enfin de me lancer et j'ai été subjuguée par l'histoire de cet enfant juif bourgeois qui parvient à survivre d'abord à la mort de sa mère, assassinat qui ne sera évoqué que par un cri, au ghetto, au camp (dont il ne parle quasiment pas) et dont il s'échappe. Survivant dans les bois, se faisant exploiter par des gens qui ont bien conscience de sa situation , il erre ensuite dans une Italie dévastée avant de rejoindre la Palestine.
Là, pour autant, les épreuves ne sont pas terminées car va se poser le problème de la langue. On lui enjoint de parler hébreu mais doit-il pour autant oublier sa langue maternelle, l'allemand ,qui est simultanément la langue des assassins ?
Viendra ensuite la question de l'écriture car, à l'époque en Israël, seuls les témoignages des survivants sont valorisés, la fiction n’ayant pas droit de cité.
Autant de douleurs qu'il évoque de manière non linéaire, parcellaire, sans aucun pathos, comme anesthésié, s'obligeant à oublier. Mais le corps lui n'oublie pas, et c'est là un des thèmes essentiels de ce roman magistral et lumineux. Prix Médicis étranger 2004.
Histoire d'une vie, Aharon Appelfeld, traduit de l'hébreu (Israêl) par Valérie Zenatti, Points Seuil.
05:55 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : aharon appelfeld