« 2014-12 | Page d'accueil
| 2015-02 »
31/01/2015
Discount
Christiane, Gilles, Alfred, Emma, Momo et Hervé travaillent dans un hard discount. Petits salaires mais bonne entente entre ces gens modestes dont on sent d'emblée les fêlures.
La décision de les remplacer par des caisses automatiques va souder davantage la petite bande et les pousser à créer une épicerie "solidaire" destinée aux gens aux petits revenus, épicerie dont les produits seront détournés de leur lieu de travail. Dernier baroud d'honneur où les voleurs seront volés...
Discount est une véritable film choral, où tous les personnages possèdent la même densité, où la tendresse alterne avec les coups de gueule , et qui respecte profondément chacun d'entre eux, révélant par petites touches leurs parcours marqués par les coups du sort.
Pas de manichéisme non plus concernant la directrice du magasin, interprétée magnifiquement par Zabou Breitmann, elle aussi victime de la violence de sa hiérarchie.
Violence qui s'exerce sous forme de harcèlement humiliant et tatillon à l'encontre des employés ont on veut se débarrasser mais la solidarité va leur permettre , malgré tout de préserver leur dignité.
Inutile de se voiler la face, la présence de ma chouchoute Corinne Masiero (parfaite et généreuse ,comme d'hab') et le fait que le film ait été tourné dans le Nord ont beaucoup joué dans ma décision d'aller voir Discount ! Mais au final,c'est surtout Pascal Demolon qui m'a vraiment émue ! clic.
Coïncidence, quelques jours plus tard, je regardais un peu par hasard Divin enfant, une comédie où il jouait également et j'ai encore eu le coup de foudre !
06:50 Publié dans je l'ai vu ! | Lien permanent | Commentaires (6)
30/01/2015
Ultra Violette
"Parce qu'ils n'ont rien vu ni rien compris de ta vive couleur enfouie. Ultra Violette."
Violette Nozière ,jeune parricide, défraya la chronique dans les années Trente et suscita l'engouement des Surréalistes.
Ce n'est pas à l'héroïne du fait divers destiné " à croupir dans l'oubli" que s'intéresse Raphaëlle Riol. Son objectif est tout autre : "réhabiliter Violette dans son statut de personnage littéraire." Elle invite donc Violette par ces mots amicaux: "Viens entre mes lignes, tu seras chez toi, c'est promis. Tu t'y sentiras à l'aise comme à l'hôtel."Et Violette de s'installer et de commencer, mine de rien à manipuler la romancière, tout en vidant son compte en banque !
La relation entre le personnage et l'auteure est finement décrite et RapHaëlle Riol recrée parfaitement l'atmosphère de cette époque, n'hésitant pas à employer un lexique parfois précieux, parfois plein de gouaille pour mieux nous dépeindre ce Paris des années Trente.
Son style a pris de l’ampleur, de l'assurance et l'histoire vraie (face A) et les hypothèses (face B) donnent à voir les multi facettes d'une femme tour à tour haïe et célébrée , qui garde jusqu'au bout son mystère.. Un coup de cœur !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : raphaëlle riol
29/01/2015
la clôture des merveilles ...en poche
"Au bout du compte, nous sommes tous confrontés à cette liberté d'être contraints."
En 2012, le pape Benoît XVI proclame Hildegarde de Bingen, docteur de l'Eglise. Elle est la quatrième femme à obtenir un tel titre. C'est à celle qui dès sa huitième année est entrée au couvent, a eu des visions dès l'âge de trois, a inventé une nouvelle langue , toute hérissée de z, a su pénétrer les secrets de la nature , a créé son propre couvent ,que Lorette Nobécourt consacre un livre inspiré.Anecdotes avérées ou inventées se mêlent pour relater la riche vie de cette femme complète qui toujours se dresse face à l'autorité, "Aussi droite, et haute, solide et stable que l'échelle du H. de son nom. Ainsi se tient désormais Hildegarde de Bingen."
Dans un monde qui refuse toute contrainte, Lorette Nobécourt interroge cette notion de soumission et analyse les relations de H., c'est ainsi qu'elle la nomme à une exception près tout le long du texte, aux mots, à l'écriture. Un texte prenant et envoûtant qui donne envie d'aller encore plus avant dans la vie de cette femme du XII ème siècle qui, par bien des aspects, nous apparaît très contemporaine
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lorette nobécourt
28/01/2015
Un membre permanent de la famille
"Ils ne sont pas inquiets pour Ventana: maintenant qu'on l'a filmée pour la télé, elle a accédé à un autre niveau de réalité et de pouvoir, un niveau plus élevé que le leur."
De la permanence, voilà bien ce qui manque , entre autres, aux personnages des douze nouvelles de ce recueil de Russell Banks.
Saisis à des moments où leur vie vacille de façon ténue ou plus dramatique,l'auteur sait capter,toujours avec bienveillance, mais avec une lucidité extrême, les moindres oscillations de leurs sentiments.
Qu'il dépeigne les non-dits qui se révèlent dans une réunion d'artistes et d'intellos , l'effritement d'une famille entériné par un deuil imprévu,les espoirs d'une femme noire modeste ou les glissements de personnalité d’une femme rencontrée par hasard, il règne toujours dans ces textes une grande tension qui tient le lecteur en haleine, l’entraînant même parfois ( ce fut mon cas, en tout cas) à différer la lecture d'un texte, en l'occurrence, "Blue".
Un style magistral ,des récits d'une grande intensité dramatique font de ce recueil une totale réussite !
Et zou,sur l'étagère des indispensables !
Le billet de Clara, la tentatrice !
Un membre permanent de la famille, nouvelles traduite de l 'américain par Pierre Furlan, Actes Sud 2015, 239 pages denses.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : russell banks
27/01/2015
Buvard
"Je suis un objet de fascination pour tous les imbéciles qui n'ont pas compris que pour ce qui est de l'impitoyabilité, la vie ne laisse jamais à désirer."
Allez savoir pourquoi en lisant les résumés de ce roman , je m'imaginais, un jeune étudiant allant voir une vieille écrivaine, façon Marguerite Yourcenar à Bar Habour.
J’avais tout faux ! L’héroïne, Caroline N.Spacek, même si elle a vécu déjà plusieurs vies et connu la gloire très jeune ,n’a que 39 ans.
Qu’elle accepte de se confier à Lou et de retracer son parcours chaotique et mystérieux est déjà exceptionnel. Que ce magnifique récit d’emprise et de fascination soit un premier roman aussi réussi, tant par le style et l’atmosphère, que par l’intrigue, l’est tout autant.
Qu’il ait reçu le Prix Françoise Sagan est particulièrement approprié, tant la liberté et l’amour de la vie chers au cœur de l’auteure de Bonjour Tristesse semblent répondre à ceux de Caroline N.Spacek.
Merci à Cuné et à Clara qui ont fini par me convaincre !
Plein de billets un peu partout !
06:00 Publié dans Rentrée 2014 | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : julia kerninon
26/01/2015
Amours
"Pas une seule pensée pour Céleste, pas une seule sur la manière dont il l'a engrossée. pas un doute sur le fait qu'il soit le père. Non, une satisfaction totale dans laquelle il se prélasse."
Début du XXème siècle, en Province , une situation quasi banale: un notaire engrosse sa toute jeune bonne (17 ans). La solution serait de la renvoyer mais l'épouse du notable , stérile et peu portée sur le choses du sexe, découvrant la situation ,décide de s'approprier l'enfant, satisfaisant à la fois son mari et se dégageant ainsi de la pression sociale qui enjoint à chaque épouse de trouver son bonheur dans la maternité.
Là encore, rien d'exceptionnel pour l'époque. Ce qui l'est beaucoup plus c'est la manière dont ces deux femmes vont découvrir à la fois leur corps (la bourgeoise n'a pu le découvrir que de manière parcellaire avant son mariage et ne s'est jamais, corset oblige, habillée seule) et leur sensualité.
Le corps féminin , et en particulier la peau sont au cœur de ce roman roman , tout à la fois récit d'une émancipation sociale et sensuelle.
Leonor de Récondo souligne bien les différences entre ces deux femmes: l'une, la bourgeoise à qui l'on a menti. L'autre, la bonne ,qui sait d'avance que son existence sera difficile et tente de s'en accommoder avec ses pauvres armes.
Un roman édifiant , à l'écriture tantôt coup de poing, tantôt caresse, que je n'aurais pas découvert sans les deux villes tentatrices , Clara et Cuné ! Merci à elles !
06:01 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : leonor de récondo
25/01/2015
Un homme effacé... en poche
"Une menace pesait sur son identité. Quelque chose de visqueux prenait possession de lui. Ce suintement infiltrait ses veines, épaississait son sang, engluait jusqu'aux battements de son cœur."
Des images pédopornographiques ayant été trouvées sur son ordinateur Un homme effacé, professeur de philosophie dans un université cossue est embarqué par la police. Tout (paroles, comportement photographie banale) va alors être réinterprété à charge et bien que se sachant innocent, Damien North en viendra à plaider coupable sur les conseils de son avocat.
Cette première partie est déjà passablement effrayante (elle m'a fait penser aux premières images du film évoquant l'affaire d'Outreaux, "Présumé coupable") mais l'affaire se corse encore quand le roman envisage ce qui se déroule ensuite...
Mensonge, vérité, tout est ambigu dans ce roman à la mécanique implacable où le héros en vient à douter de lui-même mais qui pêche un peu par son style trop neutre. Un bon début néanmoins !
Prix Goncourt du premier roman.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : alexandre postel
24/01/2015
Amazones
"Finie l'aliénation. Je ne veux plus qu'on touche à mon corps, même gentiment. Qu'on le laisse en paix et aphone , vierge du bruit des caresses , voilà ce que je désire."
"Impitoyable en amour", "obstinée", "pas vraiment d'aplomb", voici quelques unes des épithètes caractérisant Alice, trente ans , veuve pas du tout éplorée d'un fiancé horripilant dont le sort l'a fort opportunément débarrassée et qui, sur une impulsion vient d'embarquer en cavale Alphonsine, quasi nonagénaire.
Les deux femmes ne se connaissent pas mais se sentent d'emblée qu'"un truc mystérieux et indéfinissable " les fascine réciproquement. Elles vont rapidement l'identifier: ce sont toutes deux , et de manière bien différente, des amazones !
Roman polyphonique, où même les morts prennent la parole, Amazones est un roman un peu foutraque, résolument féministe, empli de gaieté et d'une belle énergie ! Les lettres que l'héroïne écrit à ses sœurs pour les houspiller et les sortir de leur marasme sont hilarantes et pleines de justesse . Quant aux amazones plus âgées, elles ne sont pas en reste et nous offre une rétrospective à la fois triste et réjouissante de la place faite aux femmes aux tout débuts du féminisme, en province.
Alice, qui rue dans les brancards depuis l'adolescence parviendra-t-elle un jour à trouver son chemin ? On n'en sait rien mais ce qu'on espère pour elle c'est qu'elle parviendra à vivre jusqu'au bout à rester rebelle !
Un coup de cœur !
Amazones, Raphaëlle Riol ,Babel 2015, 216 pages qui m'ont donné envie de découvrir les autres romans de l'auteure.
12:55 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (10)
22/01/2015
Une plage au Pôle Nord
"Il se jugeait incapable de transmettre, d’enseigner: il déploie des trésors de patience et de pédagogie.Elle se croyait rouillée: ses progrès sont assez rapides.Ils se surprennent; ils se font du bien."
Une improbable rencontre: celle de Jeanne, veuve et septuagénaire avec Jean-Claude, jeune père divorcé.Et c'est beau, non pas comme "la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie" comme aurait dit Lautréamont mais comme "Le Pôle Nord et la plage de sable" d’où l'oxymore du titre.
Le plus beau est qu'ils s’épaulent et qu’autour d'eux gravitent des personnages fantasques, traités avec humour et un brin de moquerie : "Teint crayeux, dents grises, bouton suspect entre les sourcils, le libraire n'a sans doute pas rencontré de fruits et légumes depuis plusieurs années."
Un roman doux et tendre qui possède la parfaite longueur: juste de quoi nous laisser un tout petit peu sur notre faim...De quoi éclairer notre hiver.
Une plage au Pôle Nord, Arnaud Dudek, Alma éditions, 2015, 161 pages pleines de fraîcheur.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : arnaud dudek
20/01/2015
Le restaurant de l'amour retrouvé
"Et si jamais il m'était donné de cuisiner dans ce petit village paisible au cœur des montagnes, j'arriverais peut être à m'ancrer enfin dans la réalité, à vivre pleinement. Je le sentais, cette certitude jaillissait du plus profond de moi, comme un magma en fusion."
Rinco a tout perdu en une journée: ses meubles, ses instruments de cuisine (dont une cocotte Le Creuset !), ses économies, son petit ami et même sa voix.
La jeune femme se réfugie dans son village natal où vit encore sa mère, avec laquelle elle entretient des relations tendues. Là, elle va concrétiser un projet qui lui tient à cœur: ouvrir un restaurant très particulier, "Comme une grotte secrète où les gens, rassérénés, renoueraient avec leur vrai moi."
Rinco pratique une cuisine véritablement inspirée et régénère en quelque sorte ses clients , d'une manière délicate et précise.
C'est donc de résilience mais aussi de bienveillance et d'amour des autres qu'il est question dans ce roman dont le titre pouvait laisser craindre le pire : mièvrerie et naïveté. Mais ici le style est poétique et imagé (beaucoup de métaphores culinaires , bien sûr) et Ito Ogawa réussit à créer un univers à la fois poétique et fantasque, avec quelques touches de rudesse , mettant l'eau à la bouche de surcroît !
Une petite merveille de délicatesse et de sérénité ! On rêverait de connaître l'adresse d'un tel restaurant !
Le restaurant de l'amour retrouvé, Ito Ogawa,traduit du japonais par Myriam Dartois-Ako Picquier poche 2015 , 253 pages succulentes.
Le billet d'Hélène .
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, Les livres qui font du bien, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : ogawa ito