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05/07/2011
Léger, humain, pardonnable
Martin Provost est un artiste aux multiples facettes. Réalisateur , entre autres de Séraphine et de Ou va la nuit, il est aussi l'auteur de la fable pleine de verve Bifteck.
Jugez donc de ma surprise quand j'ai entamé ce roman ,visiblement autobiographique ,qui nous raconte la vie d'une jeune garçon du côté de Brest.
La mort annoncée de la mère, près de laquelle sont venus se réfugier un frère et une soeur adultes ravivent les souvenirs d'une enfance pas si rose que cela. Entre un père plutôt rigide mais qui saura faire face avec un amour dont auraient pu douter les enfants à des révélations traumatisantes pour cet homme, et une mère bourgeoise qui s'est mésalliée, la vie était plutôt agitée.
Roman de facture plutôt classique donc, et je poursuivais ma lecture, vaguement ennuyée quand l'auteur m'a littéralement tordu le coeur et amené les larmes aux yeux en racontant la mort de son frère, comme si tout ce qui précédait n'était là que pour enchasser cette scène bouleversante.
Beaucoup d'émotion donc dans ce roman qui avance mine de rien avant de vous flanquer au tapis de manière magistrale.
L'avis de Clara, vile tentatrice s'il en est !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : martin provost
04/07/2011
Avec mon meilleur souvenir
à cause d'un documentaire chopé par hasard à la télévision, à cause d'un livre dont je parlerai prochainement, j'ai mis la main sur ce recueil de texte où Françoise Sagan évoque des moments heureux, brosse le portrait sensible des gens qu'elle a aimés : Billie Holiday, l'ogre Orson Welles qui la trimballait "comme un sac de vêtements à travers toutes les rues de Paris et les Champs Elysées" "sous prétexte qu'[elle] ne [se] fasse pas écraser", Sartre à qui elle écrivit une lettre d'amour/admiration.
Sagan évoque aussi son addiction au jeu, à la vitesse,dans des pages qui nous montrent- si on en avait douté - son talent de styliste. Sans oublier une évocation teintée de mélancolie de Saint Tropez qui n'est pas sans rappeler une autre habitante de cette station: Colette.
Mais c'est à la littérature que l'auteure de Bonjour tristesse consacre ses plus belles pages car elle lui voue un amour"d'une grande supériorité sur l'amour tout court, l'amour humain."car, selon elle, "la littérature en revanche offre à notre mémoire des coups de foudre autrement fracassants, précis et définitifs."Et Sagan de nous décrire avec un entousiasme intact sa rencontre avec les quatre textes qui lui "restent toujours comme des tremplins , des boussoles"dans cette "existence aisément qualifiable d'agitée", existence où elle affirme ne rien avoir appris.
Ces quatre textes ? Les nourritures terrestres (Gide), L'homme révolté (Camus), Les Illuminations (Rimbaud) et Proust bien sûr, dont elle recommande de commencer la lecture par Albertine disparue.
Pour conclure quelques phrases d'un chapitre qui mériterait d'être cité en entier :
"Je découvris que le don d'écrire était un cadeau du sort, fait à très peu de gens, et que les pauvres nigauds qui voulaient en faire une carrière ou un passe-temps n'étaient que misérables sacrilèges. Qu'écrire demande un talent précis et précieux et rare-vérité devenue inconvenante et presque incongrue de nos jours; au demeurant, grâce au doux mépris qu'elle éprouve pour ses faux prêtres ou ses usrpateurs, la littérature se venge toute seule: elle fait de ceux qui osent la toucher, même du bout des doigts, des infirmes impuissants et amers- et ne leur accorde rien- sinon parfois, par cruauté, un succès provisoire qui les ravage à vie." Des mots forts, définitifs et toujours d'actualité...
Avec mon meilleur souvenir, Françoise Sagan, Folio 2010 (1ère édition folio 1985)150 pages délicieuses .
06:03 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : françoise sagan
02/07/2011
La patience de Mauricette...en poche
"Je recycle la souffrance."
Un cahier jaune où elle écrit pour sa thérapeute.Un panier vert dans lequel elle trimballe de drôles de trésors. La tentation serait grande de résumer Mauricette à ces deux objets. Mais quand elle disparaît de l'hôpital où on soigne sa santé mentale, son ami Christophe Moreel va prendre conscience de la richesse de la personnalité de cette femme de soixante quinze ans, beaucoup moins ordinaire qu'il n'y paraît à première vue...
Entrecroisant passé et présent, Lucien Suel brosse le portrait d'une personne, marquée par la souffrance dès l'enfance mais qui trouve refuge dans les mots et dans la poésie en particulier. Débusquant les alexandrins dans les phrases de la vie quotidienne, jouant avec les mots, les triturant, les faisant rouler dans sa bouche, tout comme son "noyau de souffrance. Je le suce et le roule entre les gencives depuis des années. Quelquefois je le prends dans ma main et je la referme. Il est caché dans ma paume je regarde les taches de vieillesse sur le dos de ma main et je remets le noyau dans ma bouche." ,Mauricette recèle bien des trésors et des originalités littéraires...Ses mots partent parfois en roue libre, comme ses pensées, mais l'humour n'en n'est jamais absent : "Le mou des veaux, les mots de vous" et ce n'est certainement pas un hasard si Mauricette avait entrepris une anthologie regroupant les phrases où apparaît le mot "veau" comme un écho au livre de Lucien Suel et Patrick Roy Têtes de porcs moues de veaux (merci, Cath!). L'émotion est aussi au rendez-vous avec cette personnalité aux multiples facettes, qui "se conduisait dans l'univers moderne comme une femme des cavernes. Une femme d'avant l'invention des horloges et des tranquillisants ."Je marche avec les yeux au plafond.""et qui s'estime elle même être son pire tribunal...Ce pourrait être lourd et étouffant, c'est poignant, lumineux et plein de joyeuses surprises car l'écriture de Mauricette est d'une richesse poétique inouïe Un livre aux très nombreuses pages cornées, bien sûr. Un livre qui résonne longtemps en nous et qu'à peine fini on a envie de rouvrir pour mieux le savourer, plus lentement cette fois. Un gros gros coup de coeur !
03:45 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : lucien suel
01/07/2011
Histoire de commencer juillet...
"Chaque matin, il t'appartient de décider :
soit rien n'est grave, soit tout est grave."
Alain Chabat
Phrase commentée par Joann Sfar qui dit entre autres : "Je crois profondément qu lorsque je suis triste, c'est par paresse intellectuelle. Je lutte en décidant de rester joyeux et de ne pas embêter les autres."in Psychologies , juin 2011
06:19 Publié dans Bric à Brac, Je l'ai lu ! | Lien permanent | Commentaires (4)