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31/01/2010
long week-end
"C'est à cela que menait la liberté ? "
Qu'est-ce qu'une famille ? Est-ce cette femme, Adele, qui ne peut se résoudre qu'à de brèves incursions dans le monde extérieur et qui vit quasiment retranchée en compagnie de son fils de treize ans , Henry ? Fils qui s'efforce sans cesse de lui redonner le sourire . Est-ce cette famille recomposée qui s'efforce de correspondre aux clichés en vogue en s'imposant des rituels qui ne satisfont personne ? Où est-ce plutôt ce trio improbable constitué par ce preneur d'otages et ceux avec qui il s'est enfermé, Adele et Henry, en ce Long week-end du Labor Day ?
Rien ne se déroule comme prévu dans ce roman sobre, où le suspense tout autant que l'évolution des personnages se révèlent d'une efficacité redoutable . Toute mère d'un ado de 13 ans se devrait de lire ce très joli portrait d'un homme en devenir.
Long week-end, Joyce Maynard, Editions Philippe Rey. 283 pages apaisantes.
Roman lu dans le cadre du programme Masse critique de Babelio; merci à Guillaume et aux éditions Philippe Rey, particulièrement rapides !
A noter que ce roman a bien failli ne jamais paraître, l'auteure ayant été mise au ban des maisons d'éditions américaines. Son erreur ? Avoir publié auparavant un roman où transparaissaient des echos de la vie pour le moins étrange qu'ellle avait menée en compagnie du romancier américain, Salinger. Il ne fait pas bon égratigner les mythes ...
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : joyce maynard, prise d'otages, famille
30/01/2010
les années
"Une coulée suspendue"
"Ce ne sera pas un travail de remémoration, tel qu'on l'entend généralement, visant à la mise en récit d'une vie, à une explication de soi. Elle ne regardera en elle même que pour y retrouver le monde , la mémoire et l'imaginaire de jours passés du monde , saisir le changement des idées, des croyances et de la sensibilité, la transformation des personnes et du sujet."
Annie Ernaux revient à plusieurs reprises dans Les Années sur son projet d'écriture et la nécessité de l'utilisation du pronom "elle". Je n'ai pas été gênée par ce pronom et me suis laissée emporter d'une seule coulée dans le flot continu du texte, scandé par la description de photos de la narratrice, comme autant de balises pour se poser un peu et prendre la mesure du temps passé.
Toutes mes craintes (retrouver les événements déjà traités dans les premiers romans d'Annie Ernaux que j'avais lus à leur sortie, se perdre dans cette évocation d'un passé qui ne m'appartient que partiellement) se sont envolées et j'ai dévoré d'une traite cette évocation d'une vie qui est aussi un peu la nôtre.
Vient de sortir en poche
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : annie ernaux
29/01/2010
Park life
"...il m'a semblé que nous étions intimes , comme si elle avait le double de la clé de ma chambre."
Un jeune employé, seul ou accompagné de son collègue senior, a pour habitude de se ressourcer dans un parc niché au milieu des buildings de Tôkyô. Nous allons l'accompagner au fil de ses rencontres et comme lui frôler les vies des différents personnages plus ou moins pittoresques qu'il y croise.
Ce très court roman (115 pages) est surprenant à plus d'un titre. D'abord parce que l'intrigue est très ténue mais suscite néanmoins notre intérêt de bout en bout. Il est ici question d'un héros -dont l'anonymat ne sera jamais levé- qui éprouve des difficultés à établir des relations amoureuses dans la réalité mais semble davantage doué pour la vie virtuelle, de couples qui, apparemment ne peuvent vivre ensemble, même s'ils s'aiment , mais tout cela est évoqué en pointillés et non de manière pesante.
Que l'action se déroule au Japon est également intéressant car cela nous permet de percevoir les différences culturelles. Ainsi notre salary man feint -il d'entretenir une conversation intime au téléphone portable à voix haute pour gêner et ainsi déloger le couple qui occupe "son " banc"...
Enfin, même si la traduction est parfois ampoulée (Gérard Siary qui signe aussi la postface semble particulièrement friand de verbe "muser"), elle ne parvient pas à dénaturer la délicatesse du style. Bref, un très joli moment de lecture.
Park life, Yoshida Shuichi, traduit du japonais par Gérard Siary et Mieko Nakajima-Siary, Picquier poche, 2010. 115 pages, une petite bulle de délicatesse.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : yoshida shuichi, japon, relations humaines
28/01/2010
Fugues
"Ma vie était soudain traduite, plus facile à comprendre."
Tout le charme (au sens fort du terme) de ces neuf histoires composant le recueil Fugues repose sur l'atmosphère particulière qu'excelle à créer Lauren Groff.
Qu'elle situe son action en 1918 à New-York, de nos jours dans la petite ville de Templeton* ou durant la seconde guerre mondiale en France, qu'elle évoque une vie entière ou un instant fort, Lauren Groff fascine toujours le lecteur par sa capacité à le troubler.Peut être est-ce dû à son style imagé , alternant poésie et rudesse mais aussi à sa capacité à souligner à la fois la force et la vulnérabilité de ces héroïnes. Ces dernières assument leur sensualité tant bien que mal dans une société où la découverte d'un bordel va jeter le discrédit sur toute la population masculine d'une petite ville provinciale...
On ne trouvera pas ici de nouvelles à chute comme souvent chez les français , mais bel et bien un écho des textes si insaisissables de Lorrie Moorre (d'ailleurs créditée dans les remerciements).
On se laisse envoûter. Ou pas. Seul le dernier texte , qui m'a trop fait penser à "Boule de Suif " de Maupassant m'a vraiment déçue,le reste du temps je me suis laissée bousculer d'un univers à un autre, le sourire aux lèvres.
Fugues, Lauren Graff, éditions Plon, 264 pages .
* Déjà évoquée dans son premier roman, billet ici. (sortie au format poche en mars)
Cuné a été déçue.
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : lauren groff, femmes
27/01/2010
Zola Jackson
"L'eau n'allait pas manquer, ça non. L'eau croupie, l'eau corrompue, la pourriture."
Août 2005, delta du Mississipi, l'ouragan Katrina s'abat sur la nouvelle-Orléans. Zola Jackson, modeste institutrice à la retraite, refuse de quitter sa maison et organise sa survie et celle de sa chienne, Lady. Elle n'en est pas à sa première tempête et il n'y a pas grand chose qui lui fasse peur. Mais voilà les digues se rompent et l'eau envahit la ville... En attendant les secours, Zola remonte le temps et évoque sa vie et celle de son fils unique et adoré, Caryl.
Alternant passé et présent, dans une construction habile qui amène progressivement des révélations poignantes sur cette femme pugnace et chaleureuse, Gille Leroy brosse aussi le tableau apocalyptique et charnel de cette Nouvelle-Orléans sous les eaux. Il pointe également au passage les insuffisances et les incompétences des autorités de l'époque ainsi que l'exploitation éhontée de la catastrophe par les médias.
Une écriture très juste, un souffle puissant , qui ne verse jamais dans le pathos mais qui m'a mis les larmes aux yeux. Zola Jackson et Lady, je ne les oublierai pas de sitôt !
Zola Jackson, Gilles Leroy, Mercure de France 2009, 140 pages. Un concentré d'émotions.
Merci à Amanda qui a gentiment su me forcer la main !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : gilles leroy, une mère courage, ouragan katrina
26/01/2010
Le martyre des Magdalènes
"- Je n'ai pas oublié le café, mais le seul résultat que ça donne, c'est un ivrogne bien réveillé."
Jack Taylor a replongé de plus belle dans l'alcool et les drogues, ce qui ne le rend pas très performant pour mener de front deux enquêtes. L'une sur "l'ange des Magdalènes", une femme qui, contrairement aux Soeurs du couvent du même nom, faisait preuve de compassion pour ces jeunes filles mises au ban de la société, que les religieuses torturaient à loisir. L'autre sur une jeune épouse dont le vieux mari aurait un peu trop précipitamment passé l'arme à gauche.
Même s'il met davantage de conviction à se fiche en l'air qu'à enquêter, notre détective amateur de littérature préféré survivra à la destruction de sa bibliothèque et bouclera son boulot de manière brutale et efficace. De la belle ouvrage.
A noter le travail de bénédictin du traducteur, Pierre Bondil, qui, non content de nous fournir les références culturelles ainsi que celles des ouvrages mentionnés tout au long du roman, éclaire aussi notre lanterne sur les allusions littéraires ! Grâces lui soient rendues !
Le martyre des Magdalènes, Ken Bruen, Folio policier, traduit de l'irlandais par Pierre Bondil, 366 pages toniques.
L'avis de Cuné.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : ken bruen, jack taylor
25/01/2010
Tirza
"Je suis le théâtre de marionnettes."
Tirza est la fille cadette de Jörgen Hofmeester, un homme vieillissant qui l'a élevé seul car l'aînée était déjà partie vivre en France quand la mère de famille a rejoint son amour de jeunesse. L'occasion rêvée pour ce père ébloui de placer sa préférée sur un piédestal , qu'elles qu'en soient les conséquences.
La fête de l'obtention du bac de Tirza va coïncider avec le retour de la mère prodigue et la présentation de l'amoureux de la jeune fille au père possessif. Ce dernier conduira néanmoins les jeunes gens jusqu'à l'aéroport d'où ils s'envoleront pour la Namibie. Sans nouvelles de sa fille depuis plusieurs semaines, Hofmeester part à son tour pour l'Afrique.
Tout ceci semble bien lisse, bien ordonné mais la lecture de ce roman a été pour moi une expérience quasi traumatisante. En effet, sous des dehors bien proprets cette famille des beaux quartiers d'Amsterdam se comporte de façon profondément déroutante, voire choquante. Le malaise est d'autant plus insidieux que les informations révélant les perversions des uns et des autres sont instillées quasi incidemment, au détour d'une phrase, comme si de rien n'était. La tension monte progressivement et alors que Jörgen allait presque réussir à nous devenir un peu plus sympathique, tout bascule à nouveau et ce de manière magistrale.
La violence des rapports entre les personnages est plus psychique que physique , mais déstabilise d'autant plus le lecteur. Arnon Grunberg réussit de manière magistrale à nous montrer la torture que s'inflige à lui même cet homme qui veut toujours s'adapter aux situations, souhaite par dessus tout passer inaperçu, recherche le meilleur pour sa fille et finira par payer le prix fort de toutes ces contraintes. Bourreau ou victime , la question reste posée à la fin de ce roman qu'il m'a fallu lire en plusieurs fois.
Tirza, Arnon Grunberg, traduit du néelandais par Isabelle Rosselin, Actes Sud 2010,431 pages qui nous laissent groggy.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : arnon grunberg, rapport père fille, famille disjonctée
23/01/2010
"Vous êtes petite mais venimeuse."
Lemmer a fait 4 ans de prison pour meurtre et exerce maintenant le métier d'"invisible", c'est à dire de garde du corps ,plus efficace que les"gorilles" dissuasifs ,car plus discret. Sa nouvelle mission est de protéger Emma Le Roux, persuadée d'avoir retrouver la trace de son frère censé être mort depuis longtemps. D'abord méfiant et bardé de principes protecteurs,Lemmer va peu à peu accepter de croire les élucubrations de cette femme quand on va tenter de l'assassiner...
Se déroulant sous le soleil d'Afrique du Sud, Lemmer l'invisible joue sur plusieurs tableaux avec habileté. L'histoire apparemment classique s'enrichit du contexte politique de cet Etat en construction où des communautés doivent réapprendre à vivre ensemble maintenant que la donne a changé avec la fin de l'apartheid.Il faut aussi veiller au partage des terres entre réserves destinées à protéger les animaux (et en particulier les vautours, animaux que l'auteur nous présente de manière passionnante)et territoires revenant aux autochtones spoliés.
Les relations entre les personnages principaux sont analysées avec justesse et finesse, Deon Meyer veillant à ne pas se montrer caricatural. Le style est sobre et efficace,les personnages attachants, la narration pleine de rebondissements, que demander de mieux ?
Vient de sortir en poche.
Lemmer l'invisible, Deon Meyer, Points Seuil.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : lemmer l'invisible, deon meyer
22/01/2010
Les canards en plastique attaquent !
Les morts peuvent-ils communiquer avec les vivants ? Il semblerait que oui à en croire le médium Gabriel Lafayette qui vient de débarquer à Glasgow.
Nombreux sont ceux qui sont subjugués par les capacités du mage mais pour Jack Parlabane journaliste et sceptique par nature, ceci relève plutôt de la vaste (et lucrative ) fumisterie. Tout cela aurait pu rester bon enfant si les cadavres n'avaient pas tarder à pleuvoir sur le passage de Lafayette...
Et les canards en plastique -insubmersibles- dans tout cela? Ils désignent les "gens qui veulent croire" au surnaturel. A tout prix.
Alors certes il faut donner l'artillerie lourde pour les convaincre ces "canards", mais fallait-il autant de pages argumentatives indigestes? L'action peine à se mettre en route mais, même si j'avais très vite deviné deux ou trois informations importantes, une fois le récit débarrassé de sa gangue argumentaire, les péripéties se révèlent captivantes (l'auteur nous réserve ainsi une surprise dont il a le secret) et Brookmyre retrouve enfin tout son talent et son rythme dans la dernière partie.
Amputé d'une centaine de pages, ce roman aurait été nettement plus convaincant !
Les canards en plastique attaquent, Christopher Brookmyre, Denoël, traduit de l'anglais par Emmanuelle Hardy, 430 pages dont une centaine de trop.
Ps: à noter que le personnage de Jack Parlabane apparaît dans un autre roman (pas encore traduit en français) et que de nombreuses allusions à son passé font qu'une bonne partie du suspense du-dit roman tombe donc à l'eau...
06:05 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : christopher brookmyre
21/01/2010
Encore !
"Je suis un ermite sociable. Curieux spécimen."
13 albums, 39 films, (dont un où il obtint le César du meilleur acteur), voilà une carrière bien remplie pour celui qui arbore tel un étendard sa légendaire paresse ! Mais il est vrai que Jacques Dutronc, car c'est de lui qu'il s'agit ,s'empresse de préciser : " Ma seule satisfaction , c'est de savoir que je bosse pour être peinard ensuite. C'est le propre du paresseux."
Avec son humour pince-sans rire joyeusement iconoclaste (tendance scato), son goût de la formule :" Je suis pour l'augmentation du goût de la vie", il semble faire le Jacques mais n'en balance pas moins , autant sur lui que sur ses petits camarades :
"L'Eurovision, j'aime ! Les costards des mecs qui chantent sont invraisemblables. Les groupes hollandais par exemple, c'est en général deux mecs et deux nanas, hypersains. On a l'impression qu'ils ont été élevés pour l'Eurovision, et que, à peine la cérémonie finie, on les égorge et on les bouffe."
Il taquine aussi le non sense, surtout pour se débarrasser d'une question-bateau et l'on se dit qu'il ne doit pas toujours être facile à interviewer le bougre ! On le devine tendre et rugueux, goguenard et sensible et on se délecte de ses pensées et répliques !
Encore ! , Pensées et répliques, Jacques Dutronc, Le cherche-midi 2010 , 245 pages aux éclats de rires garantis !
06:00 Publié dans Humour | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : jacques dutronc, et moi et moi et moi...