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10/02/2009
"La branchouillarde et le cul-bénit."
Deux amies perdues de vue depuis longtemps renouent sept ans après que leurs chemins se soient séparés. Recommencent alors leurs drôles de relations, oscillant entre dépendance et désinvolture, amour et haine, voire folie...
Marine Bramly dans ce premier roman, Festin de miettes, s'aventure sur un territoire déjà bien balisé, celui de l'amitié féminine , en y instillant une dose de noirceur réjouissante. Commencé de manière plutôt conventionnelle et primesautière, le récit va progressivement virer à l'aigre quand sera révélé le motif de la brouille qui avait séparé Deva la vierge folle et Sophie la vierge sage.
L'auteure analyse finement la psychologie de ses personnages et fouille avec délectation leurs plaies . Elle les promène de St germain des prés aux quartiers les plus pauvres de Dakar et nous les suivons avec le même enthousiasme car elle a l'art de rendre vivants jusqu'aux personnages secondaires. Dommage que la fin ne soit pas à la hauteur de nos espérances, mais là c'est mon fichu besoin de vraisemblance qui refait surface. !Un fort joli moment de lecture.
Sortira en poche le 11 février mais j'ai craqué sur l'édition "France Loisirs"!
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : festins de miettes, marine bramly, amitié, trahison, folie
09/02/2009
A couper le souffle !
Quittant un mari brutal et un pays , l'Australie, Julia trouve refuge en France dans le château familial, en compagnie de ses deux enfants . Dans l'immense demeure, peu de paroles seront prononcées tandis que se nouera un drame familial.Pas question que je vous en dise plus sur l'intrigue que jamais je n'ai trouvée morbide.
Avec une extrême économie de moyens, Julia Leigh arrive à créer une tension digne du Tour d'écrou de Henry James. On suit le souffle court, fasciné et horrifié, la montée de l'intensité dramatique, et n'était l'utilisation d'un téléphone portable, on pourrait se croire plongé dans un de ces romans noirs anglais du XIXème siècle.
Une oeuvre puissante qui donne le frisson.
Julia Leigh, Ailleurs. Christian Bourgeois éditeur.105 pages dévorées le souffle comme suspendu.
Mon seul regret : avoir mis autant de temps à me décider et pourtant vous avez été nombreuses à me tendre la perche !
Le billet de Solenn qui vous mènera vers plein d'autres .
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (21) | Tags : ailleurs, julia leigh, j'en frissonne encore
06/02/2009
"Une chose n'a pas besoin d'exister pour rendre les gens heureux, pas vrai? "
Rosamond vient de mourir mais a laissé à une mystérieuse Imogen, jeune femme aveugle,une série de cassettes enregistrées où, s'appuyant sur vingt photos dûment sélectionnées, elle révèle un secret de famille courant sur trois générations de femmes.Plus que tout cela peut être, l'objectif est de lui laisser "la conscience de [son] histoire, de (son )identité, la conscience de [ses]origines, et des forces qui [l]'ont façonnée."
Traversée par des coïncidences qui réapparaissent par delà les années, par des scènes qui semblent se rejouer, La pluie, avant qu'elle tombe est sous-tendu par le thème de l'amour maternel déficient et des conséquences qu'il peut entraîner sur plusieurs générations.
Tissant avec virtuosité l'histoire de cette lignée de femmes à celle de l'Histoire, Jonathan Coe nous livre ici une oeuvre sombre mais fluide, qui se lit sans déplaisir, mais qui laisse un peu sur sa faim. le style et la construction sont impeccables mais il manque cette petite étincelle de folie qui faisait tout le charme de la maison du sommeil.
L'avis de Marie.
celui de Lily.
06:10 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (24) | Tags : jonathan coe, la pluie avant qu'elle tombe
05/02/2009
Un roman chaleureux dans l'hiver arctique
Le commissaire Erlendur recouvrant soigneusement d'une couverture le corps d'un enfant assassiné , geste inutile mais ô combien révélateur, voilà l'image que je retiendrai du dernier roman d'Arnaldur Indridason.
Crime raciste? Le petit Elias était en effet le fruit d'un mariage entre un Islandais et une Thaïlandaise.Le couple avait divorcé et si la mère semblait bien s'intégrer, il n'en était pas de même pour son fils aîné, Niran .
Particulièrement préoccupé par cette enquête, Erlendur négloge cette femme qui lui parle au téléphone et qui, croit-il ,a juste quitté le domicile conjugal. Il traite aussi un peu à la légère ses enfants qui, pour la première fois, viennent ensemble lui demander des comptes...
Explorant toutes les pistes, examinant toutes les hypothèses, même les plus horribles, le commissaire met à jour tous les préjugés envers les émigrés dans cette communauté fermée d'Islande, sans manichéisme ni volonté démonstrative .La solution de l'énigme s'avèrera encore bien pire que ce que l'on croyait...
La 4 ème de couverture évoque "un monde à la Simenon"mais j'ai trouvé beaucoup plus de chaleur humaine dans ce roman que chez Maigret qui souvent rudoie ses suspects. Erlendur, lui, s'y prend avec beaucoup plus de délicatesse et d'empathie .
L'avis de Cuné que je remercie chaleureusement pour l'envoi !
Celui de Clarabel
07:35 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (23) | Tags : arnaldur indridason, hiver arctique, émigrés dans une société fermée, préjugés, chaleur humaine
"Ici tout pouvait arriver, sauf la justice."
La frontière entre Mexique et Etats-Unis sépare les hommes mais pas les marchandises. Dans les maquiladoras,sont exploitées par des compagnies internationales des femmes, mains d'oeuvre docile et bon marché. "Nom de Dieu, ce n'était même pas le monde de Zola, au moins il y avait les corons. C'étaient plutôt Les Misérables , d'Hugo Ou mieux encore , le monde ouvrier du dix-neuvième siècle décrit par Dickens, avec ses grisettes jetées dans la prostitution par des maquereaux qui les ramassaient dans des bals populaires.
Il y avait même un Jack l'Eventreur. ou plusieurs."
Cinquante femmes ont été en effet retrouvées assassinées, violées et mutilées à Ciudad Jùarez, ville frontière . Un journaliste madrilène, Toni Zambudio mène l'enquête dans un pays avec qui il a des comptes à régler et où bientôt chacun va s'employer à le renvoyer chez lui, avant qu'il ne soit trop tard...
Patrick Bard se base ici sur des fait réels et démonte les rouages de la double oppression dont sont victimes les femmes: en tant qu'ouvrières mais aussi en tant que "marchandise sexuelle".
On cherche en vain une lueur d'espoir et l'on suit, estomaqué, les rebondissements de l'enquête dans une atmosphère saturée de violence et de chaleur. Une oeuvre dense et nécessaire.
un grand merci à Fashion pour l'envoi !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : la frontière, patrick bard, je ne mettrai jamais les pieds au mexique
04/02/2009
Une enfance enchantée
"Je me pris d'amitié pour ces scorpions.C'étaient, somme toute, des animaux plaisants, sans prétention et qui avaient des moeurs charmantes.", ainsi parle le jeune Gerry Durell, 10 ans, qui est prêt à se lier d'amitié avec tout ce que la nature compte d'habitants à poils ou à plumes , chiens , pies, hiboux, albatros, insectes et autres reptiles qu'il observe avec passion dans la nature édénique de Corfou, mais aussi qu'il rapporte à la maison, occasionnant quelques catastrophes mémorables."-Cette maison est un enfer, je vous assure. il n'est pas un coin qui ne fourmille de bêtes malintentionnées prêtes à se jeter sur vous. Un geste aussi simple, aussi inoffensif que celui d'allumer une cigarette est plein de risques. D'abord, j'ai été attaqué par un scorpion, une bête hideuse qui a répandu du venin et des petits partout. Puis ma chambre a été saccagée par des pies. Maintenant il y a des serpents dans la baignoire et des bandes d'albatros volent autour de la maison avec des bruits pareils à ceux d'une tuyauterie défectueuse.
-Larry, mon chéri, tu exagères, dit Mère souriant vaguement aux invités."
Voilà résumée en quelques lignes la tonalité de ce récit si délicieusement anglais, où une famille d'excentriques s'installe à Corfou pour fuir la grisaille britannique et ne cesse de déménager pour loger les invités trop nombreux du fils aîné ou au contraire fuir l'arrivée d'une parente envahissante ! Évidemment, sur place ils vont se lier d'amitié avec des personnages tout aussi pittoresques et sympathiques qu'eux, amis que le jeune Gerry va observer avec autant de zèle que ses insectes favoris. On ne sait quel animal ou quel humain préférer , tant ils nous font rire (attention livre à ne pas lire en public, sous peine de passer pour une folle dingue !) et jamais des bébés perce-oreilles n'auront été aussi attendrissants que présentés par Gerald Durrell : "Mais c'était une belle couvée de jeunes perce-oreilles, , tout petits, fragiles, comme sculptés dans l'ivoire.(...) C'était un spectacle qui réchauffait le coeur (...) Ma famille merveilleuse s'était dispersée à travers le jardin.Plus tard, je revis un des bébés. il était naturellement plus gros, plus brun et plus fort mais je le reconnus tout de suite. Il était roulé en boule dans un labyrinthe de pétales de roses , en train de faire un somme, et, quand je le dérangeai,il leva ses pinces avec irritation. J'eusse aimé croire que c'était un salut, un joyeux accueil, mais j'étais honnêtement obligé d'admettre que ce n'était que l'avertissement d'un perce-oreilles à un ennemi en puissance. Je l'excusai pourtant. Il était très jeune, après tout, la dernière fois que je l'avais vu." Autant de bonne volonté ne pouvait que me plaire et je suis tombée follement amoureuse de ce livre, l'emmenant partout avec moi, grappillant quelques lignes chaque fois que c'était possible, le cornant éhonteusement quasiment à chaque page, me régalant des descriptions sensuelles de la nature de Corfou et me réchauffant le coeur !
Un livre à conseiller aux dépressifs !
Ma famille et autres animaux. Gerald Durrell. Gallmeister qui pour une fois a troqué la sobriété de ses couvertures pour un orange pétant !
03/02/2009
"Puisque tu poses la question, je crois que la sieste c'est fini pour moi."
Dans la première nouvelle qui donne son titre au recueil, Le crépuscule des superhéros, Deborah Eisenberg nous peint en une soixantaine de pages le basculement irrémédiable qu'ont constitué les attentats du 11 septembre 2001: "Terminé le festival du gaspillage nonchalant, le coeur sur la main."
Désormais les héros privilégiés de ses nouvelles savent que tous les avantages que leur procuraient leur famille, leurs relations (appartements confortables sous-loués, travail intéressant et bien payé, visite guidée d'un pays idyllique) ne leur sont pas acquis, mais juste prêtés car comme l'indique le titre d'un autre texte "le ver est dans le fruit".
Les superhéros sont en train de se "disloquer,de battre l'air des bras, avec tous les rouages et les leviers qui se brisent et se détachent.". Les amis , la famille, tous peuvent être touchés par la maladie mentale, la violence, la pauvreté, ou rattrapés par un scandale et nous aurons beau tourner la tête , les journaux, la télévision ou les chauffeurs de taxi nous rappelleront toujours ce que nous feignons de ne pas voir , ne pas entendre.
Un seul récit, "la fenêtre" ne se déroule pas dans un milieu favorisé mais là aussi, le rêve le plus humble va rapidement tourner à l'aigre.
Deborah Eisenberg, avec son style très elliptique, nous plonge souvent dans une douce et plaisante confusion . Il faut accepter de remplir les vides,d'établir les liaisons que les esprits sur la même longueur d'ondes n'ont pas besoin d'effectuer ou de se laisser flotter au gré de ses portraits pleins d'acuité .
Un grand merci à Cuné pour l'envoi !
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : le crépuscule des superhéros, deborah eisenberg
02/02/2009
Un peu de soleil...
Un mur hérissé de tessons de bouteilles sépare deux jardins: celui de la mère d'un petit garçon qui à deux ans ne parle ni ne marche , celui de leur voisin, qui, l'été, reçoit son jeune fils turbulent.Jamais ils ne seront nommés, créant ainsi une atmosphère à la fois étrange et poétique.
Dans la touffeur estivale de Cagliari, la jeune femme joue avec l'idée de suicide pour "échapper aux difficultés de vie" mais , petit à petit, les tessons disparaîtront du mur pour faciliter le passage entre les deux jardins, entre ces deux univers entre ces êtres à la recherche d'un peu de tendresse et de sensualité...
En une cinquantaine de pages je me suis réconciliée avec l'oeuvre de Milena Agus car ce texte, faussement simple, est une bulle chatoyante qu'on a envie de souffler vers ses amis...Et pour trois euros, ce serait vraiment dommage de s'en priver !
Mon voisin, Milena Agus. Liana Levi, Piccolo.
l'avis de Leiloona
Celui de Bellesahi.
06:02 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : milena agus, mon voisin, bulle de tendresse
01/02/2009
"Pas noté, pas acheté."proverbe cathulien
A grands coups de rasades de tisanes déstressantes (merci Cath) et de carrés de chocolat (merci Fashion), je chemine cahin-caha sur le chemin de l'ataraxie, chemin étroit et qui plus est, tout hérissé de Kévin (c'était l'année des K il y a 16 ans), de Steve et autres Jason (non, je n'enseigne pas dans une classe européenne, la prof d'anglais vous le confirmera, mais dans un établissement dont les élèves sont sous perfusions de feuilletons américains dès le ventre de leur mère).
Parfois, comme un fumeur qui engrange les méthodes pour en finir avec le tabac, ou une gourmande qui collectionnerait les régimes, je me jette avec férocité sur un livre de développement personnel, surtout quand, comme celui-ci, il utilise un mot que j'adore : "listes".
De Dominique Loreau, j'avais déjà lu il y a quelques années, L'art de la simplicité, qui m'avait donné des envies d'armoires et d'étagères vides au moins pendant cinq minutes. Quand on est comme moi une spécialiste de l'entropie, on ne se refait pas mais on peut au moins rêver. J'ai donc récidivé avec L'art des listes, de la même auteure qui vient de sortir au format poche.
Les listes, j'adore ça , comme l'avait déjà démontré ceci. Elles me donnent l'impression de mettre au net les situations, et quoi de plus jouissif que de barrer les éléments d'une liste de tâches ingrates au fur et à mesure qu'on s'en est débarrassé ! Mais là, je dois dire que Dominque Loreau est la reine des listes, elle dresse des listes pour tout , absolument tout,y compris pour se connaître*, des listes de listes, mais nous réconforte au passage: "Une première liste n'est jamais parfaite."Ouf ! je confirme d'ailleurs: ma liste de choses à emporter en vacances évolue en fonction de l'âge des participants et s'allège singulièrement...
Alors, oui j'ai passé un moment agréable , ponctué de citations élégantes, mais pas appris beaucoup de nouveautés: que l'écriture permet de se "laver la tête" des émotions négatives, depuis le temps, on s'en doutait un peu, et je ne suis toujours pas prête à fourrer dans mon sac plein de petites pochettes car le sac extensible à l'infini tout en restant léger et discret, je ne l'ai toujours pas rencontré !
Ce n'est donc pas demain la veille que je pourrai "Simplifier, organiser et enrichir [ma] vie"!qui restera donc un joyeux bazar ! Sur ce , je m'en vais relire Notes de chevet de Sei Shônagon...
* On a intérêt à les planquer, celles-là ! qui sait ce que des mains mal intentionnées pourraient en tirer...
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : l'art des listes, dominique loreau, listes de listes, je chemine vers l'ataraxie