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11/02/2008
"La désintégration et l'érosion peuvent être inversés"
Il ya quelque chose de pourri dans le couple que forment Julia et Brian depuis maintenant dix ans. Le début du Garçon dans la lune
est d'une acidité réjouissante car chacun des personnages traverse une
mini crise existentielle, se demandant comment il est perçu par les
autres.
"Il se dit: je me demande pourquoi je ne vais pas baiser un mouton mort à l'abattoir du coin
il cligna des yeux. elle se contracta. Il bâilla. Elle éternua. Il jouit. Pas elle.
(...)
il se dit: je pourrais divorcer pour moins que ça.
Elle pensa:en plus , il faut changer les draps."
Cette
crise latente, car non-dite, risque de s'exacerber car le couple,
accompagné de leur fils, Sam doit partir en Irlande chez le père de
Brian, ce que Julia envisage comme "un long purgatoire".Ce sera pire
que cela car un terrible accident va survenir ...
Kate
o'Riordan à
partir de là aurait pu faire sombrer le récit dans le mélo le plus
larmoyant, tirant partie des paysages et de tous les clichés embusqués
dans un coin de notre tête sur l'Irlande. Balayant tout cela d'un
revers de main, elle lance ses personnages défricher le passé de
l'autre, jusqu'à ce que la vérité éclate. En effet, tant Julia que
Brian se sont forgé une image qui ne correspond pas forcément à
la réalité. "Elle se demanda pourquoi Brian, contrairement aux
autres, trouvait si nécessaire de réécrire le passé, et quelle part de
leur vie les autres couples gardaient cachée. Elle éprouva
une pointe de remords pour toutes les fois où elle l'avait
sciemment blessé par ses mots, où elle avait
intentionnelelemnt tenté de l'humilier parce que tant qu'il continuait
à sourire de ce sourire exaspérant, si désinvolte, ses piques ne
pouvaient atteindre leur cible."
Violence
des mots, violence des émotions violence tout court, l'auteure ne nous
épargne pas et montre bien l'ambivalence des sentiments
qui agitent ses personnages. Il serait tellement plus simple que
les bons soient entièrement bons et inversement pour les autres...
Le
poids du passé, le poids des non-dits qui taraudent les générations
suivantes sont aussi au coeur de ce roman, bien plus que la mort d'un
enfant.
Kate O'Riordan sonde les reins et les coeurs,elle fouille
les plaies, jouant avec les peurs de ses lecteurs (qui n'a jamais
paniqué , ne serait-ce que quelques secondes, après avoir perdu de vue
son enfant dans un magasin?) dosant savamment l'espoir et la
désespérance...
Un livre qui vous colle une grosse boule d'angoisse , qui vous poursuit longtemps, mais qui est une expérience magistrale.Un livre qui brûle.
06:03 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (13)
10/02/2008
Un amour de Sissi #2
J'étais toujours debout, les sièges ne manquaient pas dans le
bureau, mais personne ne m'avait invitée à m'asseoir. Sissi y remédia
avec précision: d'un coup de boule elle me propulsa sur une chaise fort
heureusement large et rembourrée et derrière moi.J'envisageai avec horreur le moment
où, dans un grand élan d'affection, elle se propulserait sur mes
genoux quand les maîtres réagirent enfin .
Pour obtenir que Sissi obtempère, il fallut lui lancer quelques bonbons qu'elle goba avec adresse.
N'étant
pas sûre de pouvoir en faire autant, je déclinai l'offre qui m'avait
été faite ,incidemment, de partager le goûter de Sissi.
Celle-ci,
vaincue par le sucre (attention,Sissi, tu ne rentreras bientôt plus
dans ton maillot de bain!), ronflait tranquillement, allongée de
tout son long...fort heureusement loin de la porte, j'allais
pouvoir battre en retraite avec dignité.
06:05 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (17)
09/02/2008
Un amour de Sissi #1
Le garage des champs fait naître au milieu de la campagne d'étranges
fleurs métalliques mais en aucun cas de panneaux indicateurs.
Point nen est besoin : ses seuls usagers sont des autochtones. Il
est donc particulièrement malaisé de les dénicher car, en outre, le
garage des champs pousse dans des zones non répertoriées par les
satellites. D'où un petit goût d'aventure quand on part à sa
recherche.
Il ne reste donc qu'à coincer au bord d'un fossé le joggueur véloce ou à guetter le facteur féroce*...
Le
garage des champs est doté d'un attribut canin haut sur pattes chargé
de l'accueil.Le seul risque en payant son écot de caresses est de
récupérer une main un peu (beaucoup ) cradingue qu'il ne restera
plus qu'à oublier. dans une poche.
Ce jour là l'accueil avait été
particulièrement chaleureux. D'emblée Sissi avait fourré son gros
museau dans mon entrejambes (je jure que mon hygiène corporelle est
irréprochable) et s'était statufiée.Ayant la faiblesse de tenir
autant à ma main droite qu'à ma main gauche,je ne bronchais
pas et continais à discuter avec les "maîtres " de l'adorable
Sissi, Rottweiller d'à peu près 40 kilos, qui semblaient ne rien avoir
remarqué.
06:01 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (13)
08/02/2008
La paix, la paix, maintenant.
"Et j'ai écouté l'histoire de Chaïma. Mon histoire. Notre
histoire. ce que l'on peut trouver dans nos veines. A elle et à
moi." Ainsi parle Camille dans les couloirs de l'hôpital de Toulouse où
est en train d emourir sa grand-mère.
Camille , d'origine juive,
Chaïma, palestinienne réfugiée en France et dont les destins familiaux
sesont croisés bien avant cette rencontre entre les deux ados.
Shalom salam maintenant est un récit plyphonique où s'entrecroisent des voix palestiniennes et israëliennes, dévidant le fil de l'Histoire.
Un récit sensible et touchant, où je me suis parfois perdue mais dont je suis ressortie vraiment émue par ces destins.
Rachel Corenblit par ce premier roman donne déjà envie dedécouvir le reste de son oeuvre.
l'avis de Clarabel.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (8)
07/02/2008
Taguéeda tsoin tsoin
Taguée !
Bellesahi m'a taguée ! Alors voilà il faut...
Ecrire le lien de la personne qui nous a tagué
Préciser le règlement sur son blog
Mentionner six choses sans importance sur soi
Taguer six autres personnes en mettant leur lien
Prévenir ces personnes sur leur blog respectif
Roulement de tambour :
1/ je suis tellement frileuse que je dors parfois avec deux bouillottes remplies de noyaux de cerises.
2/Inversement,
je dors parfois la fenêtre ouverte alors qu'il
fait très froid (faut pas chercher à comprendre).
3/Plus ça vient , moins j'aime conduire.
4/Si
je conduis, il faut que ça avance. D'ailleurs, un
jour de blocage de l'autoroute par les routiers,j'ai préféré
garer la voiture sur un parking et rentrer à pied .
5/Je viens (enfin) de ranger (une partie) de mes livres.
6/Par
la même occasion , j'ai rapatrié sur une étagère les différentes
piles constituant ma PAL (éparpillées un peu partout dans la maison).
Le rayon était plein, ça m'a filé le bourdon...
Au tour de Cuné, N-talo, Clarabel, Ptitlapin, Fashion et Katell !
17:35 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (16)
Cluedo dans la plus grande bibliothèque du monde
La délégation norvégienne, d''Hugo Boris, semble de prime
abord s'inspirer de deux schémas classiques. D'une part des gens, qui,
différents tant par leur nationalité que par leur origine sociale vont
se retrouver dans un espace qui va rapidement devenir clos,
en l'occurence un chalet nordique; d'autre part, un point commun qui
les unit, la chasse, ce qui va donner lieu à quelques récits troublants
, racontés pour se distraire, comme le faisaient les
personnages-prétextes de Maupassant dans le recueil de nouvelles Contes de la bécasse.
Mais
,d'emblée le fantastique confère une toute autre dimension à ce roman.
Cette forêt d'où est issue la majorité des livres publiés en
Europe devient une bibliothèque puis un personnage à part entière
:"Il lui semble marcher entre des piles fragiles de livres élancées
vers le ciel, se surprend à pousser les branches alourdies avec
plus de circonspection, comme s'il avait à coeur de ne pas faire
s'écrouler ces étagères de livres." les chasseurs, dont chaque
sortie ne se déroule pas normalement, seront-ils " digérés et
rejetés " par la forêt?
Livres et forêt, étroitement
imbriqués...L'auteur sème des indices comme el petit poucet et
nosu fait basculer dans un monde où le narrateur principal est
aveuglé par la réverbération de la neige et où le lecteur lui même
devient acteur: à lui d'influer, ou non, sur le cours des
événements en tranchant dans le vif et dans le dernier cahier du livre,
volontairement non massicoté....
Si
Clarabel ne me l'avait pas gentiment envoyé, je doute que
j'aurais sauté le pas vu mon aversion pour les chasseurs.
mais là, bizarrement, mon amour des mots a prévalu et je me suis
régalée avec le vocabulaire technique de la chasse, le style
puissant et efficace de l'auteur. Je me suis laissée prendre au charme
de ce roman qui traite bien plus du pouvoir des livres et des mots
que de la traque des animaux. Une réussite !
L'avis, plus nuancé, de Cuné.
06:02 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (13)
06/02/2008
"Tout était made in Vian."
Louis et Elsa forment un « bébé-couple » qui se connaît depuis 5 ans déjà et « C’est
long cinq ans, à vingt ».
Habituée par ses parents trotskystes
à manier les mots, Elsa ne supporte plus les silences de Louis. Pour mieux nier
l’évidence et/ou ou tenter de le garder, La jeune femme se lance à corps et cœur
perdu dans une histoire d’amour avec…Boris Vian. Boris Vian dont elle range la
bibliothèque et qui lui apparaît à plusieurs
reprises…
Premier roman de la jeune Lou Delachair, Boris Vian et moi fourmille d’invention
langagière et d’énergie. Le monde des parents est traité à la kalachnikof , « Et je songeais que les vieux couples
finissent toujours par communiquer par porosité, comme les jeans les jours de
pluie, quand l’eau monte jusqu’au genou » mais aussi avec beaucoup de
tendresse.
Malgré quelques longueurs et scories
d’écriture (quelques clichés côtoient de superbes images), on suit le sourire au
lèvres, les péripéties de ces amours (débutantes) qui, on le sait bien,
« finissent mal, en général . »Lou Delachair se crée
un univers poétique et dynamique et pas besoin d’être une groupie de l’auteur de
« L’écume des jours » pour apprécier ce très joli premier roman destiné aux
ados. Un talent à suivre.
06:04 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (11)
05/02/2008
Xingu, vous avez dit Xingu ? Comme c'est Xingu !
Xingu , ce nom exotique qui donne son titre à la nouvelle d
'Edith Wharton, claque et rebondit debouche en bouche parmi les
membres du très select "Lunch Club d'Hillbridge".
Seule
échappatoire à la morgeue de la célèbre romancière Osric
Dane, ce nom, qui la déroute, lancé à la volée par la
moins intellectuelle du groupe, leur permet dans un premier temps de
sauver la face, en maintanant un flou artistique sur l'identité
de ce fameux Ingu.
La consultation du livre-sauveur, le
dictionnaire, plongera ensuite ces femmes qui se piquent
de culture, plus dans un esprit de pose et de snobisme qu'autre
chose, dans un désarroi decourte durée...
Edith Wharton, avec un art
d e la formule et de l'image consommé"Mrs Van Vluyck rajusta ses
lunettes comme le bourreau sa cagoule", épingle avec beaucoup
d'humour les travers de cette coterie impitoyable et
pathétique.
Un concentré dhumour acide réjouissant ( pour un euro cinquante !).
Pas eu le temps de chercher vos billets les filles, donnez-les moi, je les mettrai en lien, merci !
L'avis de Papillon
06:03 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (13)
04/02/2008
"Tout est bon chez elle, y a rien à jeter..."
Vous y croyez vous au coup de la fille qui n'a pas
acheté de disque depuis que Kate Bush a sort son dernier album (je
préfère ne pas regarder la date) et qui, à l'écoute d'une
seule chanson à la radio, achète le Cd de quelqu'un dont
elle n'avait jamais entendu parler? Hé bien, c'est moi et franchement,
j'ai été é-pa-tée !
Je laisserai à Ch'ti 31 , quand il aura le
temps,le soin de décortiquer les influences musicales d'Agnès
Bihl,sachez quand même que dans les remerciements, elle cite en vrac,
Jacques Brel,Anne Sylvestre qui l'a portée sur les fonds baptismaux de
la chanson, Charles Aznavour dont elle a assuré la première
partie, Renaud Séchan( Clin d'oeil avec "You are fouting of my gueule"
)...et vous aurez une idée de la lignée dans laquelle elle
s'inscrit.
Quant
aux paroles, c'est un régal ! Pas étonnant que
dans la liste gigantesque de remerciements se niche le nom de
Pierre Desproges dont elle détourne au passage un aphorisme .Elle manie
le zeugma comme une majorette son bâton , "moi qui fais la morale et
la grasse matinée", elle oscille entre l'hystérie et la tendresse dans
"La Complainte de la mère parfaite",
égratigant au passage le père qui dort tranquillement au salon tandis
que la mère débutante s'évertue à chanter"Dodo, l'enfant do,
crise de nerfs , maman limite", balançant entre injures "espèce
d'antiféministe"et la menace "sinon je te déshérite",
celle qui ne se reconnaîtra pas dans ce portrait est une
menteuse ou une chanceuse qui n'entend pas le bébé pleurer ! On
rit mais aussi on pleure (et ce n'est pas une figure de style)
avec une chanson sur l'inceste "Touche pas à mon corps" où Agnès Bihl
réussit le tour de force de trancrire en quelques minutes
tous les sentiments éprouvés par l'enfant violée par son père.
Rien de lourd rien de caricatural quand , tout en évoquant le monde de
l'école avec son prof de maths, sadique (pléonasme, bien sûr),
elle traite mine de rien du problème des sans-papiers,
"Liberté j'écris ton nom mais sans papiers, c'est pas pratique".
Chanteuse engagée oui, mais sans rien de l'aspect
caricatural, l'humour et la virtuosité dans le maiement des mots. sont
à pour alléger le tout.
le monde d'agnès Bihl, c'est
aussi celui des régimes, des histoires d'amour (souvent
ratées), des femmes qui se font belles, tellement libres
que"j'suis libre tous les soirs", énumérant tous les types de garçons
rencontrés, mais aussi débinant avec une perfidie raffinée celle
dont elle voudrait prendre la place : "Après tout elle est trop
modeste, Elle cache si bien ses qualités...Et puis
son âge, comme c'est curieux Vu qu'c'est pourtant ce
qu'lle fait d'mieux". Vous l'aurez compris, Agnès vaut mieux être
sa copine ! :) Et ça tombe bien, j' l'adore !
06:00 Publié dans à vos oreilles! | Lien permanent | Commentaires (20)
03/02/2008
Quand le cinéma guimauve mène à la poésie
Dans son Manuel de poésithérapie, Jean-Joseph Julaud se
proposait avec beaucoup d'humour et d'érudition de guérir
les maux de notre vie avec les mots des poètes.
Je doute fort que les scénaristes de In her shoes ait
lu ce manuel mais ils ont utilisé cette idée de manière
caricaturale dans le film, un poème d'Elisabeth Bishop guérissant en un
rien de temps la dyslexie du personnage interprété par
Cameron Diaz.
J'ignore si les ventes de cette poétesse ont
grimpé , mais j'ai trouvé ce procédé assez malhonnête quand on sait
la difficulté à traiter la dyslexie et les souffrances qu'elle
peut entraîner.
Néanmoins, le poème est très beau,le voici:
L’art de la perte
L’art de la perte n’est pas dur à maîtriser,
tant de choses sont d’un naturel si fuyant,
que leur perte n’est pas une calamité.
Perdez quelque chose chaque jour .Acceptez la contrariété
de la disparition de vos clés, d’un moment absent.
L’art de la perte n’est pas dur à maîtriser.
Puis habituez-vous à perdre, perdez, perdez :
les endroits , les noms, et même la clé des champs.
Rien de cela ne sera une calamité.
J’ai perdu la montre de ma mère. Eh, tiens ! pas la dernière mais
l’avant-dernière de trois maisons que j’aimais pourtant.
L’art de la perte n’est pas dur à maîtriser.
J’ai perdu deux villes, très jolies. Sans compter
des royaumes que je possédais, deux fleuves, un continent.
Ils me manquent, mais ce ne fut pas une calamité.
-Même ta perte (la voix moqueuse, un geste aimé)
ne saurait me faire mentir, c’est évident
l’art de la perte n’est pas trop dur à maîtriser
même s’il apparaît comme (écris-le !) comme une calamité.
08:39 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (9)