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21/12/2007
Un effondrement
Ecrire sur la dépression ,c'est écrire sur le fil du rasoir : ne pas
tomber dans l'auto-apitoiement tout en arrivant à faire partager
aux lecteurs ce que l'on a vécu (je doute qu'on puisse écrire sur ce
thème sans l'avoir approché au plus près).
Ghislaine Dunant ,en évitant le second écueil typique , "Regardez comme je suis plus fort(e)maintenant",n'exhibe pas cet effondrement
comme d'aucuns leur douleur. Elle y revient, presque de manière
clinique, presque comme si elle parlait d'une autre et cette autre
c'est elle même, mais il y a longtemps déjà...
On frémit, en lisant
que dans les années 70 on pratiquait encore en france les
électro-chocs,on a envie de secouer ses soignants qui ne parlent pas ou
presquepas aux malades, qui n'expliquent rien du traitement subi par
les patients.
Une écriture qui, parfois, m'a rappelé celle de
Duras. Une écriture au plus près de cet engourdissement provoqué
par les médicaments, une recherche mais "Comment pouvais-je dire au
médecin que j'avais perdu quelque chose, il me manquait quelque chose
pour faire tout ça et je ne savais pas ce que c'était? ".
Un livre
qui nous entraîne avec lui et que je n'ai pas su lire d'une
traite, éprouvant le besoin de "bouffées d'oxygène". Une écriture très
belle comme assourdie.
L'avis de Cuné que je remercie encore pour cet envoi.
06:32 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (17)
20/12/2007
Le palais de la mémoire
Va et vient entre passé et présent, Les madones de Léningrad
de Debra Dean, aborde à la fois le thème de la mémoire, celle de Marina
qui est en train de se diluer,et celui du passé de nos parents
que nous ne connaîtrons jamais totalement.
Comment
faire coïncider l'image de cette femme âgée,qui se rend au mariage de
celle qu'elle n'identifie même plus comme étant sa petite fille
et celle de la belle jeune fille qui, employée au Musée de
l'Hermitage durant le siège de Léningrad, vit dans les caves d'un musée
dont toutes les salles sont vides mais qu'elle repeuple en exerçant sa
mémoire ?
Marina qui a miraculeusement pu retrouver celui qu'elle
aimait dans une Europe dévastée , maintenant qu'elle vit depuis de
nombreuses années aux Etats-Unis a toujours refusé de
parler du passé. Son mari, lui aussi, s'est abstenu de la
questionner sur la naissance de ce fils dont Marina a toujours
dit que le père était un dieu ...
La beauté de l'art, l'humanité de
gestes simples mais qui prennent toute leur valeur quand on meurt
lentement de froid et de faim, transcendent l'érosion des sentiments
qui apparaît quand la mort est tellement présente qu'on n'y prête
quasiment plus attention...
Opposition
entre la Marina d'hier capable de faire visiter à un groupe de
jeunes militaires un musée vide en leur donnant à imaginer avec talent
les oeuvres mises à l'abri et celles qui , des années plus
tard parle d'elle en ces termes "Je deviens comme le musée.
Tout fuit. C'est horrible" car en effet, "Plus pénible que
la perte des mots, il y a cette façon qu'a le
temps de se contracter, de se fracturer et de la larguer dans des
endroits inattendus."
Opposition
entre tous ces détails de la vie quotidienne, quand pouvoir aller
au sauna devient un petit miracle "C'est comme traverser un nuage et
entrer dans le ciel" et l'espoir suscité par une vie
à venir dans un monde où règne la destruction.
Une
écriture chatoyante pour évoquer les tableaux disparus et célébrer la
beauté d'un monde toujours renouvelée : "Chaque jour le
monde est refait à neuf, sacré , et elle l'absorbe, dans toute
son intensité brute, comme un petit enfant. Elle sent
quelque chose s'épanouir dans sa poitrine-joie ou chagrin, en
définitive, ils sont inséparables. Le monde est d'une si
grande beauté, en dépit de toutes ses horreurs,
qu'elle sera désolée de le quitter".
Emprunté un peu par
hasard à la médiathèque, en dépit de ses descriptions de tableaux
parfois longuettes,un roman attachant et tout en subtilité qui
nous épargne les clichés des hsitoires de familles à l'américaine.
06:16 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (14)
19/12/2007
"les enfants sont formidables"J.martin
Pour une fois, Christophe n'est pas parti en vacances en
famille. Au fil des lettres que lui envoie son petit frère , nous
découvrirons, en creux, les raisons de cet exil
involontaire.
Portrait épistolaire à une seule voix, Les lettres de mon petit frère
aborde avec délicatesse un sujet encore délicat : "A mon avis,
la faute grave, c'est quand cette idiote de Sylvie est allée lui
raconter qu'elle vous avait vus, toi et Florian , en train de
vous embrasser sur la bouche." Et d'ajouter"Bon, Si on n'a plus
le droit d'embrasser ses copains où on veut autant aller en
prison tout de suite." réaction plus naturelle et
rafraîchissante, y a pas.
En attendant, les vacances sans Christophe
tournent au fiasco : maman rate ses coquillettes, papa fait
chavirer le bâteau car il ne sait pas naviguer sans son
fils aîné, sans compter le estivants qui détruisent
le mur séparant la plage de la maison louée et qui engagent une lutte sans merci contre les parents, bien
décidés à défendre leur territoire, fût-ce au prix d'ordures qui
remplissent le jardin. Chacun interprétera comme bon lui semble
ces symboles...
Les parents et les enfants somatisent à qui mieux
mieux et surtout cet exil forcé empêche Christophe de tenir sa
promesse: être là quand son petit frère tombe amoureux...
Heureusement , tout rentrera dans l'ordre,(demanière un peu trop iédéalisée mais bon ) et chacun retrouvera la sérénité.
Un
petit livre (par la taille ), tout en sensibilité et qui montre que
souvent les enfants sont plus tolérants que les adultes... Un gros coup de coeur !
L'avis de In cold blog
06:02 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (19)
18/12/2007
Le cognac, ça rap !
Prenez un avocat, Christophe Leibowitz, exerçant depuis
bientôt 20 ans, un peu (désab)usé, mais, au fond, aimant follement la
faune bigarrée qu'il côtoie et défend. Son humour vachard n'épargne
personne ,y compris lui même.
Trop
souvent imbibé, il doit se
soumettre à une mise à l'épreuve et trouve bien évidemment un moyen
original de "contourner" la thérapie : l'envoi de missives à son
thérapeute, missives déjantées où se donnent à lire autant
des fantasmes "fabriqués" pour plaire au psy que ses idées les
plus folles.
Le destin, bon prince, vient mettre du piquant dans sa
morne existence de défenseur de petits dealers en le faisant hériter...
d'une marque de cognac! Aussitôt son imagination s'emballe : il
veut unir l'univers traditionnel du cognac charentais et celui
blingueballant des rapeurs-dealers. Usant de ses " relations", il
trouve bientôt un rapeur doué qui lui écrit aussitôt un texte prônant
cyniquement l'accession à la richesse par le deal et par la même
occasion vantant le cognac de Leibowitz rebaptisé Ground XO. Et là, la machine s'emballe...
L'auteure,Hannelore
Cayre, elle même avocate, possède un style très visuel et qui
fait mouche. Le récit avance tambour battant mais se termine un peu
brusquement, seule restriction que j'émettrai concernant ce
roman que j'ai dévoré d'une traite, le sourire aux lèvres.
Ce roman
étant le troisième d'une série mettant en scène le joyeusement
cynique Leibowitz, il ne me reste plus qu'à dévorer les
précédents ! (déjà sur ma PAL Toiles de maître)
De quoi passer un bon moment.
06:12 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (15)
17/12/2007
L'art de la chute
Les monstres attirent le regard et, effectivement, le regard est très important dans La collecte des monstres à laquelle nous convie Emmanuelle Urien.
Regard
des autres sur soi qu'on ne supporte plus et qu'on provoque pour mieux
le contrôler. Regard sur la violence du monde qui rend fou.
Pas
de monstres de foire dans cette collecte mais des gens en apparence
ordinaires et qui un jour, par une sorte de fatalité, basculent
soit du côté victime soit du côté bourreau. La frontière
est souvent floue entre les deux car il faut être deux pour danser le
tango...
Mensonges,manipulations, violence physique ou psychologique, la machine à broyer se met en route implacablement.
On
ne sort pas indemne d'une telle lecture et alors que je peux lire sans
broncher (ou presque) les descriptions les plus
sanguinolentes, j'avoue que j'ai parfois différé la lecture d'une
nouvelle ou anticipé en allant voir la fin...
Emmanuelle
Urien excelle à mettre en place des machines infernales,aux mécanismes
parfaitment agencés, qui nous explosent à la figure. Chaque nouvelle
nous fait entrer dans un univers différent, tant par la tonalité que
par l'époque évoquée.Le parti pris d'évoquer des monstres donne parfois
un aspect un peu systématique mais l'auteure maîtrise parfaitement
l'art de la chute, voire de la double chute, et arrive toujours à nous
surprendre. Elle confirme ainsi tout le bien que j'avais déjà écrit ici.
Merci à cath et à Ch'ti 31 de m'avoir offert cet exemplaire dédicacé !
L'avis de Clarabel.
Celui de In cold blog.
Le site de l'auteure
06:15 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (24)
16/12/2007
Un coin d'été en décembre
Imaginez quelqu'un qui ronchonne parce qu'elle est un peu patraque,
et que surtout elle doit partir assister à une réunion hyperinutile qui
en plus nous fera , vu l'heure de sortie, tomber en plein dans les
bouchons. Pas trop difficile n'est-ce pas ?
Et, tout à
coup, coup de théâtre, le facteur fait tinter la cloche et apporte
un colis contenant un morceau d'été sous forme de confiture à l'abricot
à la lavande, faite maison (un régal ! ), deux bouquins
prometteurs et un magnifique sac en forme de chapeau de sorcière, cousu
main lui aussi !
Merci encore , N-talo, pour cette super surprise qui ensoleille mon mois de décembre !
06:05 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (20)
15/12/2007
Abandonnés lâchement...
Contente de ne pas les avoir achetés malgré les excellentes critiques lues dans la presse ,
trois recueils de nouvelles :
-Déjeuner de famille
de John Cheever. A force de vouloir éviter tout pathos, de suggérer
plus que de montrer, l'auteur nous laisse à la porte de ses textes. On
se fiche un peu de ce qui arrive aux personnages aisés qui évoluent
dans des endroits cent fois montrés.Une misogynie de bon ton, sans
oublier des mots oubliés à certaines pages (deux traducteurs se sont
pourtant attelés à ces nouvelles mais apparemment pas un seul
correcteur) ont fait que j'ai abandonné au bout de trois textes.
Je suis encore moins entrée dans l'univers de Charles d'Ambrosio et son Musée des poissons morts
car je ne suis même pas venue à bout de la première nouvelle.
Encore une fois, l'impression de lire un texte déjà vu.
Quant à Elles
de JB Pontalis. Au bout de quelques textes, j'ai jeté l'éponge ne
voyant pas d'intérêt ni au style ,aussi plat que moi , ni aux thèmes abordés.
Peut être ces textes ont-ils pâtis de la comparaison avec un autre recueil dont je vous parlerai bientôt...
06:07 Publié dans je ne regrette pas de les avoir juste empruntés | Lien permanent | Commentaires (23)
14/12/2007
"Lis,apprends, révise, va aux textes.savoir, c'est contrôler"
Toute sa vie, la romancière Joan Didion a ,de son propre aveu,
"développé une technique pour tenir à distance toutes mes
pensées, toutes mes croyances, en les recouvrant d'un vernis de plus en
plus impénétrable". La mort soudaine de son mari va tout
remettre en question et Joan Didion va mettre une année complèteà
remettre en question "toutes les convictions que j'avais
jamais pu avoir sur la mort, sur la maladie,sur la probabilité et
le hasard, sur les bonheurs et les revers du sort, sur le couple,
les enfants, la mémoire, sur la douleur du deuil, sur la façon dont les
gens se font et en se font pas à l'idée que la vie a
une fin, sur la précarité de la santé mentale,sur la vie
même."
L'année de la pensée magique est donc le récit sans
fard de cette recherche sur elle même, de sa manière de refuser la mort
de son mari puis de l'apprivoiser petit à petit grâce à l'écriture et à
la lecture,car elle cherche sans cesse à comprendre dans les plus
petits détails les raisons de cette mort subite.
Elle prend
conscience de la différence entre la douleur et le deuil :
"La douleur était passive. La douleur survenait. Le deuil,
l'acte de faire face à la douleur, demandait de
l'attention."
Elle devient moins dure vis à vis des réactions
des autres face à la mort : "Je me souviens de mon dédain, de ma
sévérité envers sa façon de " s'apitoyer" de "geindre" de "s'appesantir" (...)Le temps est l'école où nous apprenons".
J'ai
beaucoup aimé l'écriture de Joan Didion (je vais évidemment lire
ses romans) et sa ténacité à vouloir faire face, à vouloir mettre des
mots sur ses sentiments et ses croyances les plus irrationnelles.
Un texte magnifique qui vient d'obtenir le prix Médicis essai 2007.
L'avis plus nuancé de Clarabel.
Celui de Cathe
05:09 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (20)
13/12/2007
3,141592653589793238462643383279502884197169399375
Dans La mémoire fantôme , de Frank Thilliez, c'est avec
plaisir que nous retrouvons le personnage de Lucie Hennebelle, promue
lieutenant à la brigade criminelle de Lille depuis l'affaire de La chambre des morts.
La
jeune mère de famille , toujours solitaire, est encore tiraillée entre
son instinct de flic, elle est consciente d'être un "prédateur",
et son amour pour ses adorables jumelles.
Va
faire irruption dan sa vie,une jeune femme, Manon, "prisonnière de
l'instant" car ses troubles de la mémoire font qu'elle oublie aussitôt
ce qu'elle vient de vivre."Tu n'es même pas capable de te rappeler ce
que tu viens d emanger! N'importe qui peut te rouler dans la
farine et toi, tu prétends lutter contre une boucher qui a massacré
sept personnes et qui joue avec la police depuis quatre ans "?
Ainsi, Frédéric ,le frère de Manon résume-t-il la situation. En effet,
le Professeur, qui a assassiné leur soeur aînée , vient de faire sa
réapparition et Manon est bien décidée à entraîner Lucie Hennebelle
dans sa quête...
La lieutenant va rapidement s'attacher à la jeune
femme et devra affronter un assassin "fortiche en mathématiques", tout
en se débattant avec son propre passé qui sera enfin élucidé.
La
dimension mathématique -le nombre Pi se déroule tout en haut des
pages-, les énigmes qui sont proposées à la sagacité du lecteur, les
informations concernant les différents types de mémoire, toujours
intéressantes sans être lassantes, confèrent à ce roman un aspect moins
glauque que dans "la chambre des morts". FrankThilliez a toujours une
imagination aussi fertile, et même si les personnages évoluent parfois
dans "un décor que même le plus tordu des romanciers
n'aurait pu imaginer", même si les tortures sont au rendez-vous, sans
jamais de voyeurisme heureusement, l'intrigue est haletante de
bout en bout et j'ai été happée par ce roman qui se déroule entre le
Nord et la Bretagne, une véritable plongée dans les ténèbres car de
l'aveu même du romancier "jamais le soleil n'éclaire le ciel".
Une réussite !
l'avis de Clarabel
Le site de l'auteur
06:04 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (23)
12/12/2007
"Le premier qui dit la vérité ..."
Les réunions de familles, surtout quand i est question
d'héritge ou de cadeaux, peuvent rapidement tourner au règlement de
compte... le petit Ralph en fera la "cruelle" expérience en passant
la journée de Noël enfermé dans sa chambre.
Il est
vrai qu'il n'a pas de chance car il cumule : sa grand-mère a tout
d'une peste, sa grand tante a toujours une fragilité quelconque
l'empêchant, bien malgré elle d'aider Tansy( la mère de Ralph)
qui a fort à faire car c'est sur elle seule que repose
l'organisation de ce Noël familial.
"-La tradition ? pouffa maman.
Les combats entre ours et chiens aussi, c'était la tradition. Et
puis autrefois, la tradition voulait qu'on se moque des fous Et
que les hommes ne mettent jamais les pieds dans la cuisine.
ce qui
la ramena à la réalité. Elle prit oncle Tristan par la manche pour
qu'il vienne décoller le scotch de la porte du four, arroser la
dinde et vérifier que les pommes de terre ne brûlaient pas
".
Vous l'aurez compris, Anne Fine, dans Au secours c'est Noël se livre à un joyeux jeu de massacre des traditions.
Chacun
se plaira à reconnaître quelqu'un de sa connaissance dans cette famille
bigarrée et sympathique : le grand-père bricoleur qui casse plus
qu'il ne répare, les neveux, Attila juniors qui détruisent
tout sur leur passage sous les yeux indifférents de leurs
parents...Alors forcément avec de tels individus , quand quelqu'un a la
"bonen " idée de jouer à l'équivalent du jeu de la vérité, la
mèche est allumée...
Anne Fine vous aura prévenu : "Vous attendez Noël avec impatience? Méfiez-vous !"
a
glisser dans les souliers à partir de 9 ans pour engendrer les sourires
et détendre l'atmosphère :"Chez nous, c'est quand même plus calme ! ".
PS: pour ceux qui manqueraient d'idées, en prim deux listes de cadeaux de Noël sont offertes par Ralph ...
06:06 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (21)