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18/04/2023
Les grandes occasions...en poche
"Dans la famille, il n'y a pas d'affection. On ne sait pas se toucher. Le corps est absent. Aussi absent que les espoirs. La même peur de décevoir. La même peur du rejet, de l'énervement formidable si on s'approche trop. Chacun doit rester en soi. Se maîtriser. Ne pas donner aux autres la responsabilité de s'aimer. "
Esther, par cette journée caniculaire , veut à tout prix réunir cette fratrie qui se délite autour d'elle et de son mari Reza. Deux garçons, deux filles , leurs enfants aussi, qui, comme d'habitude, sont en retard, voire trouveront des prétextes pour ne pas se retrouver autour de celle qui, patiemment a noué, métaphoriquement, les fils d'un tapis qu'elle espère solide et durable.
L'attente est aussi le prétexte pour revenir sur le passé, les mille et une histoires de cet amour empêché au sein de cette famille.
Je l'avoue, j'ai bien failli abandonner ce récit majoritairement composé de phrases juxtaposées (pour mieux rendre l'absence de liens entre les protagonistes ?) qui ressassait trop à mon goût cette métaphore du tapis.
Mais J'aurais eu tort de me laisser gêner par ce défaut mineur qui disparaît ensuite au premier tiers du livre , pour mieux fouiller les portraits des différents protagonistes, leur donner de l'épaisseur et davantage faire confiance au lecteur, en ne lui donnant pas forcément toutes les réponses.
Un roman qui fouille les plaies, procure parfois une sensation d'étouffement ,mais brosse un portrait de groupe criant de vérité. Un premier roman non exempt de défauts ,et c'est normal ,mais qui augure bien de l'avenir de cette romancière.
Les Avrils 2020 , 249 pages écrasées de soleil.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alexandra matine matine
14/04/2023
#Lemon #NetGalleyFrance !
"Certaines vies sont injustement cruelles, et nous continuons à vivre en les ignorant comme de misérables insectes. "
Un féminicide commis sur une très jeune et très jolie femme vêtue, au moment de sa mort, d'une robe jaune est le point de départ de ce roman à la structure en apparence éclatée.
Il faut accepter, dans un premier temps, de se laisser flotter un peu avant d'identifier les narratrices principales, toutes trois liées à la victime, sa sœur et deux amies , obsédées par ce crime demeuré impuni en apparence...
Roman d'atmosphère, Lemon est aussi un roman qui dépeint une société brutale (voir la scène d'interrogatoire initiale) où ceux qui sortent de la norme sont rejetés. C'est enfin un roman à la structure assurée qui sème des indices et permet au lecteur de se faire sa propre opinion sur les personnages.
150 Pages. Traduit du coréen par Kevin Jasmin Hamard.
Éditions La Croisée 2023
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : yeo-sun kwon
13/04/2023
Deux femmes et un jardin ..en poche
De Mariette nous ne saurons pas grand chose. Quelques indices nous laissent deviner une vie fruste, sans joie, au service des autres. Quand elle hérite de ce qu'elle qualifiera de "maison de poupée"-un logis passablement délabré au fin fond de la campagne, entouré d'un jardin qui a repris sa liberté, elle peine à y croire. Pourtant, elle s'y rend- une véritable expédition- et entreprend de s'approprier les lieux, tout en respectant la sauvagerie du jardin.
Petit à petit va également se nouer une relation avec une adolescente, en vacances dans le bourg voisin et qui va apprivoiser Mariette, sans pour autant percer son quasi mutisme. La relation s'étiolera au fil du temps mais restera marquante pour la jeune femme.
Un titre simple , à l'image de ce récit qui fait le choix de ne pas trop en dire, et c'est tant mieux, avec une autrice qui peint avec délicatesse autant les femmes que les plantes. Un grand coup de cœur.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : anne guglielmetti
12/04/2023
Sainte Marguerite Marie et moi...en poche
"En m'obligeant à la prendre au sérieux, en m'imposant ce parti-pris résolument bienveillant , l'éditrice a sauvé Marguerite-Marie de mes griffes ; et, à la place m'a livrée à elle. Ses inconforts, ses doutes, ses ambiguïtés, moi aussi je suis maintenant forcée de les habiter. "
Rien ne prédisposait une écolo-végétarienne, féministe, capable de réciter la première page de Harry Potter, mais pour qui le Notre Père reste lacunaire ,car agnostique et non baptisée , à écrire sur une sainte, même un peu gore.
Rien, sauf le fait que Marguerite-Marie Alacoque est apparentée à Clémentine Beauvais. De plus, l'autrice de Brexit Romance est enceinte et prend conscience de l'importance de la mémoire. Enfin, le père de son enfant est très catholique,(c'est elle qui souligne) et, par son intermédiaire, elle va devenir amie avec une éditrice d’une maison d'édition très catholique qui va lui suggérer ce projet un peu fou.
Ce livre est donc le récit d'un work in progress, émaillé des réflexions souvent très drôles de Clémentine Beauvais, mais aussi de ses tiraillements car,trouver l'angle juste, le ton juste , ne vont pas de soi quand on ne possède pas les codes d'un univers qui nous est totalement étranger ou presque.
Sans doute parce qu'on sent une grande sincérité, de la part des intervenants , comme de l'autrice, on ne tombe jamais dans une vision trop figée ou au contraire trop "décoiffante" de la sainte en question.
Si l'on m'avait dit que je dévorerais un ouvrage portant sur Sainte Marguerite-Marie, j'aurais bien ri. Et pourtant c'est le cas. Un petit "miracle "dû à Clémentine Beauvais.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : clémentine beauvais
11/04/2023
L'école des bonnes mères
"Le nouveau programme devrait éliminer les erreurs humaines, expliquait un représentant de l'administration. Les décisions seraient prises de manière plus efficace. Moins de subjectivité , moins de partialité. Ils visent à implémenter des références universelles. "
Parce qu'elle a vécu "une journée en enfer", comme elle ne cesse de le répéter, Frida, mère divorcée, a laissé seule sa fille de dix-huit mois plus de deux heures. Dénoncée par ses voisins, la petite Harriet lui est retirée par la police, puis par les services sociaux. Mise à l'épreuve, filmée en permanence chez elle, Frida échoue à convaincre qu'elle est une bonne mère , selon les nouveaux critères de l'administration.
La voilà donc contrainte d'intégrer un établissement de rééducation maternelle, mi- centre de formation, mi-prison, où on inculque aux femmes à gommer tout ce qui est considéré comme du narcissisme (comprendre : le fait de faire passer ses besoins avant ceux de l'enfant) avec des méthodes particulièrement éprouvantes psychologiquement, car aidées par de nouvelles technologies.
Très fouillé, le roman ménage de nombreux rebondissements, analyse le racisme latent qui existe au sein de cette communauté contrainte et tire la sonnette d'alarme sur des sociétés où, sous couvert de préserver les enfants, on bâtit un monde inhumain où l'on évalue la capacité d'une mère à calmer son enfant en la chronométrant...
Ayant regardé des documentaires sur les dérives de certains systèmes de protection de l'enfance, (Norvège, Suède...), j'ai dévoré les 500 pages de ce roman où la tension est toujours présente.
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Anne-Sylvie Homassel
Buchet -Chastel 2023
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jessamine chan