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23/01/2023
Terminus Malaussène
"(Il ne faut jamais profiter du sommeil des aimés pour retourner vivre tout de suite. Attendre un peu. Le temps qu'il faut. Mon seul principe éducatif. ) "
La Tribu Malaussène est de retour. Est-ce vraiment pour la dernière fois comme semble le suggérer le titre de ce nouvel opus ? Rien n'est moins sûr.
Ce qui est certain en revanche, c'est que les aventures rocambolesques de cette famille hors-normes s'enchaînent à vive allure, avec force retournements de situations liées , ou non, à des situations passées. On y utilise l'analyse de texte pour tenter de brosser le portrait du dénommé Pépère,dont la cruauté et l'intelligence perverse sont inversement proportionnelles à l'aspect bonhomme de son surnom. On y évoque au passage des sujets d'actualité (scandale des Ehpads, pandémie, guerres...) bref, on sent que le narrateur s'en donne à cœur joie, soulignant même le côté " aussi délibérément convergeant de son récit" . Un plaisir de lecture, un peu tempéré par quelques longueurs.
Gallimard 2023.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : daniel pennac
19/01/2023
Moi et François Mitterrand..en poche
"Salut François,
Merci de ton intervention secrète et bienveillante. J'imagine que tu as dû remuer ciel et terre pour que j'obtienne ce CDD de trois mois à La Nouvelle République du Centre-Ouest. "
Amoureux de l'Ouvroir de Littérature Potentielle, de l'absurde et de l'humour en général, précipitez-vous sur cet opuscule d'Hervé Le Tellier qui vient de sortir en format poche. Vous y découvrirez comment un homme lambda est persuadé d’entretenir une correspondance personnelle et amicale avec les différents Présidents de la République française.
Mieux, il attribue à ces hommes le pouvoir de différents changements dans sa vie , changements qui vont de la qualité des huîtres à sa recherche d'emploi.
En creux se lit une vie banale, pauvre en relations amicales et/ou amoureuses. Le tout est illustré par des photographies chargées d'accréditer les assertions du narrateur. Un pur délice.
06:00 Publié dans Humour, le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : hervé le tellier
17/01/2023
Le Roitelet
"" Tu devrais écrire un livre dans lequel rien n'arrive. " J'ai trouvé l'idée d'autant plus séduisante que j'ai sous la main, avec ma vie très banale, une grande quantité de matière à partir de laquelle travailler. "
Quel plaisir de retrouver ici l'auteur du Jour des Corneilles ! Ici, il ne s'agit plus d'un père et de son fils mais principalement de deux frères, dont l'un est écrivain (l'auteur) et l'autre travaille dans une jardinerie. Ah oui, il est aussi schizophrène mais il ne faudrait pas le ramener uniquement à cette maladie qui le fait souffrir et rend son comportement parfois difficilement compréhensible aux autres tant ses remarques sont parfois étonnantes et lumineuses.
Dans ce texte, il est aussi beaucoup question de nature, d'animaux , d'écriture et c'est de manière apaisée, mais sans occulter les difficultés que Jean-François Beauchemin avec une écriture d'une finesse incomparable évoque cette relation fraternelle hors-normes.
Un texte dont les pages se tournent toutes seules et qu'il faut prendre le temps de relire pour encore plus le savourer. Et zou, sur l'étagère des indispensables.
Editions Quebec Amérique.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : jean-françois beauchemin
16/01/2023
Fille en colère sur un banc de pierre
"Profitez de votre enfance, le monde se chargera de vous briser le cœur bien assez tôt. "
Parce qu'elle a été estimée responsable de la disparition de sa petite sœur, alors qu'elle même n'était qu'une enfant,Aïda a été ostracisée par son père et ses deux sœurs ainées, puis exfiltrée par sa mère.
La paria sera néanmoins contactée par ses sœurs lors du décès du père de famille, le Vieux. L'occasion de se confronter au passé et de peut-être trouver la vérité...
L'action se déroule sur une île italienne écrasée de soleil, au sein d'une famille atypique comme les affectionne Véronique Ovaldé, tout à la fois baroque et tragique.
Malgré l'atmosphère très réussie, je n'ai pas vraiment apprécié ce roman dont l'intrigue m'a rappelé celle d'Une souris bleue de Kate Atkinson et j'ai trouvé le temps long.
Flammarion 2023.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : véronique ovaldé
14/01/2023
Reine Rouge...en poche
"Le monde est gouverné par les médiocres, les égoïstes et les crétins. Particulièrement par ces derniers. Or le capitaine Parra semble être une intéressante combinaison des trois."
Un improbable duo (un flic gay, Jon Gutiérrez (plutôt fort, mais pas gros), une femme aux capacités intellectuelles hors-normes, Antonia Scott, un crime atroce aux motivations peu claires, un style enlevé, un art du suspense parfaitement maîtrisé, voilà de quoi blanchir nos nuits tant ce roman est addictif.
Les personnages sont bien croqués, j’avoue que le péché mignon de l'héroïne (collectionner les mots qui n'existent que dans une langue) me l'a rendue sympathique), l'intrigue particulièrement tordue, tout ceci est très efficace . Seul petit bémol: j'ai passé les pages trop descriptives et surtout trop gores . J'attends déjà avec impatience la suite.
Traduit de l'espagnol par Judith Vernant.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : juan gomez -jurado
13/01/2023
Sortir au jour
"Le deuil est devenu une affaire individuelle avec des étapes à franchir. Mais nous ne sommes pas des êtres linéaires. Il y a toujours des retours en arrière. "
Dans une librairie, Amandine Dhée rencontre une thanatopractrice, Gabriele. Pour cette dernière, en quête de sens , ce métier est une reconversion qui suscite bien des étonnements, voire des rejets.
Entre les deux femmes s'instaure un dialogue , entrecoupé par des extraits du verbatim d'une émission : Vis ma vie de thanatopracteur.
Quelle drôle d'idée un livre sur la perte, pourrait-on penser. Mais l'autrice, mêlant ses réflexions sur la mort, mais aussi la création et la volonté de transmission instaure un échange fécond , souvent surprenant, mais riche d'humanité.
Elle y évoque, souvent avec humour, aussi bien le confinement et ses conséquences ,"Ce soir , le président de la République nous pousse à l'intérieur de nos maisons et nous ordonne d'y rester. Il nous invite même à lire, c'est dire si la situation est grave. " que sa famille , "On parle de liens du sang, mais les familles sont d'abord faites de beurre et de sucre, n'en déplaise aux scientifiques et aux diététiciens. "
Le ton se fait parfois plus grave, mais la tendresse règne toujours quand il s'agit d'évoquer ses enfants ou de rendre un hommage à France Gall.
Quant à Gabriele, elle nous permet de voir l'envers d'un décor qui trop souvent est occulté .Elle aussi sait se montrer drôle mais se révolte aussi contre les hypocrisies sociales qui veulent passer la beauté de sa profession à la trappe.
Un livre plein de vie qui ferait presque la nique à la mort.
Éditions La Contre Allée 2023.
13:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : amandine dhée
12/01/2023
#PetiteSale #NetGalleyFrance !
"Demest est semblable à ses champs: froid, dur à la tâche, gelé, animé par des projets plus grands, par des mouvements profonds."
Du 10 au 19 février 1969, la vie des habitants d'un petit village situé non loin du Chemin des dames va être bouleversée: la petite fille de 4 ans du potentat local a été enlevée. Une demande de rançon tombe. Des policiers parisiens sont envoyés en renfort . La dernière personne a avoir vu la petite Sylvie est Catherine. La Petite Sale c'est elle.
Ces qualificatifs expriment bien tout le mépris de classe envers cette jeune femme qui s'active à la ferme et à laquelle personne ne prête attention. Elle a d'ailleurs tout leur d'intérêt dans ce monde d'hommes à ne pas avoir un corps attractif...
Nous sommes donc en 1969 mais nous pourrions être un siècle plus tôt, comme le remarque un personnage, car la modernité ne semble pas être arrivée dans cette campagne où M. Demest fait la pluie et le beau temps , tenant les habitants sous sa coupe, étant le seul à leur offrir du travail. C'est aussi un tyran domestique contre lequel rares sont les membres de sa famille sont ceux qui osent regimber.
Ce nouveau roman de Louise Mey est un magnifique roman d'atmosphère, une plongée dans la boue et le froid, mais aussi un roman policier qui fleure bon les enquêtes à la Maigret, repas au café du village parmi les habitants taiseux.
C'est enfin une magistrale dénonciation du patriarcat, s'exerçant à différents niveaux, dans un monde où les femmes commencent à peine à se forer leur place.
Le style est également magnifique, la construction impeccable et une grande place est accordée à la description des corps marqués par le travail, de ses corps auxquels on ne prête pas attention mais qui pourront peut être un jour se déployer. Du suspense et de l'espoir, un excellent cocktail. Et zou , sur l'étagère des indispensables.
Le masque 2023.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans français | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : louise mey
11/01/2023
#Assemblage #NetGalleyFrance !
"La réponse: l'assimilation. Toujours, cette pression, pile à cet endroit. Assimilez-vous, assimilez-vous... Dissolvez-vous dans le melting-pot. Puis coulez-vous dans le moule. Pliez vos os jusqu'à ce qu'ils craquent, se fendent,jusqu'à ce que ça rentre. Forcez-vous à épouser leur forme. Assimilez-vous, voilà à quoi ils exhortent, à quoi ils encouragent. Puis ils froncent les sourcils. Encore. Et encore. Et toujours, en ligne de basse, sous le vocabulaire insistant de la tolérance et de la convivialité - disparaissez ! "
Elle a travaillé deux fois plus, su faire face à "cette course faite d'obstacles perpétuels", parce qu'elle est femme et parce qu'elle est noire dans un monde fait pour les Hommes Blancs.
Un monde où le racisme est soigneusement nié et où on exhorte les minorités à se fondre dans la masse, même si le vocabulaire , via ses connotations, porte la marque d'une Histoire et de ses préjugés. Un monde où on n'hésite pas à lui dire frontalement que si elle a été promue c'est parce qu'elle permet à l’entreprise de valoriser les minorités. Un monde où un employé d'aéroport, nonobstant le billet de classe affaire présenté, vous oblige à faire la queue au guichet auquel votre couleur de peau vous assigne.
Cette violence larvée la narratrice s'en protège en se tenant à distance de ses émotions ,en apparence, mais la lave intérieure bouillonne et son regard acéré n'épargne personne . Même pas le jeune privilégié qui prétend l'aimer.
Un récit dense, sans concessions, qui file droit sur l'étagère des indispensables.
Grasset 2023, traduit de l'anglais par Jakuta Alikavazovic.
06:04 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : natasha brown
10/01/2023
#Lheuredesfemmes #NetGalleyFrance !
"Oui, pourquoi les femmes ne profiteraient -elles pas de ce formidable élan de vie pour prendre enfin leur place dans cette société en pleine mue ? "
De nos jours, une jeune femme est chargée par une amie éditrice de collecter des informations sur celle qui , à l'heure de la sieste, sut donner la parole aux femmes et surtout les écouter : Menie Grégoire. En 1967, à la radio on dialoguait à propos"de thèmes sociétaux importants dont personne ne parlait publiquement à l'époque. Il y avait la sexualité bien sûr. Mais aussi la contraception, l'avortement , les problèmes de couple, de famille, l'éducation des enfants. Sans parler de l'inceste dans les familles. "
A une époque où les femmes , pour la plupart n'avait aucune éducation sexuelle, aucun accès à la contraception et enchaînaient les grossesses , où l'avortement entraînait la mort de très nombreuses femmes, c'était révolutionnaire.
Et pourtant, Menie était une femme d'origine bourgeoise, capable d'organiser de grands dîners , d’élever ses deux filles et d'écouter avec empathie, sans juger les femmes de toutes origines sociales.
C'est un grand plaisir de la retrouver par le biais de ce roman écrit par sa petite fille, Adèle Bréau. Ni hagiographie, ni portrait à charge, mêlant fiction et réalité, de l'aveu propre de l'autrice, ce roman nous rend Menie Grégoire proche et formidablement vivante. Les récits qui s'entremêlent et donnent à voir le destin de femmes modestes qui croisèrent celle qu'on appelait "La dame de cœur" sont aussi très réussis , un peu moins celui-mettant en scène le personnage principal, car trop démonstratif à mon goût. Une réussite néanmoins qui permettra de (re) découvrir cette grand dame dont la voix résonne encore à mes oreilles.
Jean-Claude Lattès 2023.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : adèle bréau
06/01/2023
Première Personne du Singulier...en poche
"J'éprouve de l'amour pour ce nom lové en mon cœur, caché au secret, juste pour moi. C'est comme une brise tendre qui souffle sur une prairie."
Le thème du souvenir court au long de ces huit nouvelles aux tonalités très différentes et présentées comme autobiographiques. Pourquoi se souvient-on de gens qui, en apparence, ont peu compté dans notre vie ?
J’avoue que certains textes m'ont laissé perplexe, trop subtils ou trop nostalgiques sans doute pour moi, ou trop ennuyeux (celui sur le base-ball) mais quand Murakami s’affranchit de la réalité et se tourne vers la fantastique, là il retient toute mon attention. En particulier avec ce récit du singe qui parle et vole le nom des femmes, un texte à la fois poétique et onirique où Murakami se révèle enchanteur comme à son habitude.
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : haruki murakami