« Une éducation ...en poche | Page d'accueil | Le palais des orties »
24/10/2020
Les Lionnes
"...le fait que je n'ai pas vraiment l'intention de m'approcher d'un couguar aujourd'hui de toute façon si je peux l’éviter, peut être demain..."
Les Lionnes, c'est d'abord un pavé impressionnant qui se dissimule derrière la porte d'un frigo jaune pétard, 1108 pages d'un flux quasi continu de pensées qui s'entrelacent, celle d'une femelle cougar et celle d'une femme, mère au foyer qui passe l'essentiel de son temps dans sa cuisine à préparer des gâteaux qu'elle vend à des restaurants.
Timide, pusillanime, ayant tendance à se rabaisser (elle a pourtant enseigné à l'université), cette mère de quatre enfants ne s'est pas remise du décès de sa mère, a survécu à un cancer (elle l'évoque très peu), à un premier mariage , a réussi à élever seule sa première fille , avant que de retrouver l'amour avec Léo. Tout cela nous l'apprenons au fil des pages dans de très longues phrases qui épousent les mouvements de sa pensée, procédant par associations mentales ou sonores (allitérations, assonances), pensée qui digresse et ressasse, pensée non dénuée d'humour.
La femelle couguar et ses petits, la narratrice et ses enfants ,évoluent dans des mondes contigus mais baignés de violence. Comment trouver normal que les armes soient partout à disposition, que cette violence s'exerce principalement sur les Noirs ,les femmes, que même les enfants ne soient pas en sécurité à l'école ou chez eux ?
Les chemins de ces deux mères, aux objectifs quasi identiques, se croiseront fugitivement, mais tout l’art de Lucy Ellmann est de savoir faire monter la tension quand le lecteur, même s'il est hypnotisé par ce flot continu, commence parfois à perdre pied, à balancer, au détour d'une phrase, une révélation qui remet en perspective tout ce que nous avions lu auparavant et de susciter une émotion intense dans la toute dernière partie du roman.
Un livre magnifique et puissant qui fait paraître bien lisses et proprets nombre de fictions.
aussi l'époustouflante traduction de Claro.
Et zou, sur l'étagère des indispensables.
14:25 Publié dans l'étagère des indispensables, Objet Littéraire Non Identifié, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : lucy ellmann, claro
Commentaires
Purée, le pavé, jamais vu sur les blogs, mais évidemment ça m'intrigue!
Écrit par : keisha | 24/10/2020
Je l'ai feuilleté et j'ai hésité devant les très longues phrases. Je me suis demandée si ce n'était pas un peu indigeste et vu le nombre de pages .. mais je peux reconsidérer la question.
Écrit par : Aifelle | 24/10/2020
Aifelle, Keisha,j'ai fait des pauses, eu envie de ne pas me dépêcher pour mieux le savourer, je l'ai traîné un peu partout, j'ai bien failli l’abandonner un peu au-delà de la page 1000 et j'aurais eu grand tort !
Écrit par : cathulu | 24/10/2020
Ton avis est enthousiaste et pourtant, j'ai de la peine à me motiver. J'ai l'impression que ça tourne un peu en rond et je ne suis pas sûre d'accrocher au style. Mais bon, il ne faut jamais dire jamais.
Écrit par : zarline | 25/10/2020
Zarline, c'est le genre de livre où il faut accepter de faire des pauses ,ne serait-ce que pour reposer ses poignets :)
Écrit par : cathulu | 25/10/2020
Je suis contente de lire ton avis, parce que ce roman m'interpelle depuis qu'il est sorti et je me demandais ce que ça pouvait donner ce flux continu de pensées (ça m'évoque Virginia Woolf qui m'a toujours donné du fil à retordre).
Écrit par : papillon | 25/10/2020
Papillon, oui on pense à Virginia Woolf mais en plus rythmé, en plus dynamique.Il n'y avait pas tout ce travail sur les associations du point de vue des sons par exemple. Il y a aussi tout un aspect politique sous-jacent.
Écrit par : cathulu | 25/10/2020
Je signale qu'en VO V Woolf offre des allitérations (intraduisibles)
Écrit par : keisha | 25/10/2020
Keisha, donc Claro devrait traduire WOOLF ! Merci, Keisha.
Écrit par : cathulu | 25/10/2020
J'en ai entendu parler très récemment et j'ai été intriguée. Je me suis demandée si ça ne risquait pas d'être un peu indigeste, mais tu m'as rendue curieuse. En revanche, un roman pareil, ça ne se case pas n'importe quand ! Je ne me vois pas le trimballer dans les transports en commun. Je suppose que c'est là qu'une liseuse aurait toute son utilité, mais je ne peux m'y résoudre...
Écrit par : Melanie B | 26/10/2020
Melanie, pour le coup, je recommanderais plutôt la version papier: c'est aussi une expérience physique :)
Écrit par : cathulu | 27/10/2020
Dommage pour moi, le style ne me dit rien du tout.
Écrit par : Alex-Mot-à-Mots | 01/11/2020
Je suis en plein dedans (à 1% d'après ma liseuse) et je ne me mets pas de pression. Je l'avais commencé en papier mais avais galéré à le lire dans le lit. Sur la liseuse on perd un peu la graphie compacte des longues phrases interminables mais ça a le mérite d'être un un peu moins impressionnant. En tout cas, tout comme toi, je le savoure et me dis que ça risque d'être mon compagnon du confinement !
Écrit par : Mélopée | 02/11/2020
Alex, ça passe ou ça casse, c'est sûr.
Mélopée, bon compagnonnage donc:)
Écrit par : cathulu | 03/11/2020
Les commentaires sont fermés.