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30/06/2014
De tout, un peu, en vrac et pas rangé, ça sent la fin d'année tout ça.
Des livres que j'ai aimés, voire beaucoup aimés mais que j'arrive pas à présenter de manière satisfaisante :
*Comment j'ai appris à Lire d'Agnès Desarthe, où plutôt comment j'ai appris à aimer les livres en éclaircissant mes liens à mon héritage familial. Un parcours singulier. Passionnant. De très belles pages en particulier sur la traduction. Le billet de Cuné la tentatrice.
*Modèle vivant de Carole Fives. Une adolescente qui exprime par ses dessins tout ce qu'elle n'ose pas dire à ses parents divorcé, lors d'un périple estival rencontre un garçon qui va changer sa vie. Poignant, sensible et lumineux.
Des films, pour une atmosphère, des paysages, des seconds rôles charmants, voire un chat rageur ...
Les beaux jours, de Marion Vernoux pour Marie Rivière, Marc Chapiteau, Fanny Cottençon et les plages du Nord.
Quartet, si délicieusement british, une maison de retraites pour musiciens comme on en rêve tous.
Joséphine, pour Marilou Berry et pour le chat Brad Pitt, tour à tour câlin ou éructant, toutes griffes dehors .Un sérieux manque de rythme pourtant.
Une chanson pour ma mère. l'autodérision de Dave ne suffit pas à insuffler de la folie dans cet enlèvement à vocation sentimentale.
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (8)
28/06/2014
L'argent a été viré sur votre compte
"...j'étais le jouet d'une infirmité sidérante qui s'était insidieusement installée au creux de mon être."
Un jeune homme "coincé dans une vie sinistrement terne et léthargique", n'ayant que deux amis et une mère malade, accepte une proposition pour le moins tentante: contre versement de fortes sommes d'argent, son petit appartement servira d'entrepôt pour des meubles qui seront régulièrement livrés chez lui. Une aubaine en apparence mais qui va très vite virer au cauchemar...
Respect de l'entreprise et trop grande docilité vis à vis de demandes de plus en plus absurdes, critique de la société de consommation, soumission à l'argent , sclérose de l'esprit, chacun verra ce qu'il voudra dans cette farce qui tourne au tragique avec un personnage de plus en plus autocentré tandis que dehors la révolte gronde.
Kakfa, Ionesco sont les références qui viennent immédiatement à l'esprit pour ce premier roman magistral et plein d'humanité qui a remporté le prix Athènes de Littérature en 2012.169 pages bruissantes de marque-pages !
L'argent a été viré sur votre compte, Dimitris Sotakis, traduit du grec par Anne-Laure Brisac, Editions Intervalles 2014.
Un grand merci à Antigone, la tentatrice !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : dimitris sotakis
26/06/2014
On a failli être amies
Carole (Emmanuelle Devos) étouffe dans son rôle multitâches d'épouse de chef étoilé. Elle vient donc en catimini consulter Marithé (Karin Viard) , chargée de réorienter les adultes . Une relation ambiguë s'établit entre les deux femmes car , tandis que Carole s'éloigne de son mari , interprété par le trop craquant Roschdy Zem, Marithé ne reste pas insensible aux charmes du cuisinier... Les deux femmes entament donc une relation qui, sous le couvert de l'amitié, s'avère plus intéressée et manipulatrice que prévu.
Trop démonstratif, on nous répète à trois reprises que ces deux femmes sont à la croisée des chemins, frôlant parfois la caricature (Emmanuelle Devos qui lance à Karin Viard qu'elle est "méchante" a pourtant quitté depuis longtemps la cour de l'école primaire), ce film a juste failli trouvé le chemin de mon cœur , malgré une dernière partie beaucoup plus réussie car plus subtile. Pourtant j'avais envie de l'aimer ce film ! En effet, ce n'est pas tous les jours qu'on bâtit un projet cinématographique reposant presque uniquement sur un duo féminin, dont l'interprétation, par ailleurs est en toute en nuances.
06:00 Publié dans je l'ai vu ! | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : anne le ny, karin viard, emmanuelle devos
24/06/2014
Les joies de la famille
"Les joyeux mensonges font les jolis rêves."
Comme le tramway, autrefois disparu, réapparaissant aujourd’hui-"L'homme moderne revenait de ses errements"-trente ans après un départ mal vécu par son cadet, Fabrice, le frère prodigue aux multiples vies , revient à Toulouse. L'occasion de renouer, prudemment, des liens au fil des stations de la ligne de tram que les deux hommes ont empruntée.
L'occasion aussi d'évoquer des thèmes chers à Pascal Dessaint , les relations entre l'homme et la nature, les mœurs particulières des oiseaux, et d'avoir(enfin !) des nouvelles d'un vieil ami autrefois policier à Toulouse.
Texte de filiations réelles et imaginaires , à la fois dense (29 page ) et raisonnablement optimiste, Les joies de la famille joue sur la polysémie du titre et nous procure un grand bonheur de lecture. Du grand Dessaint en petit format !
Distribué gracieusement dans les agences du tramway de Toulouse mais aussi en téléchargement ici !
Merci à l'auteur qui a fait rouler le tram de Toulouse jusque dans le Nord !
06:00 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pascal dessaint
23/06/2014
L'annulaire
"-Ceux qui nous viennent nous voir sont toujours inquiets au départ à propos de leurs objets. C'est comme ça.Les spécimens sont là pour enfermer leur inquiétude".
Suite à un accident de travail qui l'a amputée d'une partie de son annulaire, la narratrice devient réceptionniste dans un laboratoire pour le moins étrange, sous la férule du non moins mystérieux M. Deshimaru. Ce dernier, non content de préserver et de conserver les souvenirs que lui confient des clients, exerce aussi son emprise sur la narratrice...
Grâce à une offre estivale, j'ai renoué avec plaisir avec l'univers fascinant de Yôko Ogawa. Minimaliste tant dans l'écriture que dans le nombre de pages , elle distille une sourde inquiétude , créant avec poésie , délicatesse ,un univers à la fois quotidien et étrange où l'on peut tout à la fois conserver des os de moineau et une cicatrice... Un petit plaisir à (re)lire.
L'annulaire, Yôko Ogawa, traduit du japonais par Rose-marie Makino-Fayolle, Babel
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : yôko ogawa
21/06/2014
La ritournelle
Deux quinquagénaires, ensemble depuis le lycée agricole, voient leur couple partir vers des voies différentes. Lui, gentleman farmer mâtiné de Charles Bovary, ronchonne à qui mieux mieux et ne semble s’éclater que lors des concours de taureaux . Elle, coiffée d'une toque de fourrure sur qui l'assimile plus à une héroïne russe, originale, curieuse de nouveautés, ouverte sur le monde, s’étiole un peu et exprime son stress à coup d’eczéma. Un bon prétexte cette dermatite pour deux jours d'évasion à Paris...
Comédie de remariage, La ritournelle se joue des clichés : non, tous les agriculteurs ne parlent pas patois. Ils sont cultivés, habillés avec élégance, stressés aussi et "montent" à la ville pour s'aérer l'esprit. Je me suis tout à fait identifiée à Brigitte (Isabelle Huppert tout à fait convaincante en éleveuse), riant de certaines scènes qu'on aurait pu croire tournée chez moi ! Les personnages ne sont pas caricaturaux, Darroussin n'est pas qu'un râleur atrabilaire, et comme toujours chez Fitoussi les personnages de femmes sont envisagés avec bienveillance , dans toutes leurs nuances, y compris la fantaisie. Bref , un pur régal !
Inutile de vous dire que je me suis extasiée devant les magnifiques charolais et que je me suis précipitée sur Le chevalier inexistant, d'Italo Calvino , roman révélateur dans le film .
L'avis d'Aifelle
06:00 Publié dans je l'ai vu ! | Lien permanent | Commentaires (11)
19/06/2014
Contrecoup...en poche
"Rien ne m'appartient plus.Je suis une exilée de ma propre histoire. Je n'ai plus de vie, lui dis-je. C'est une vie après la mort. Le contrecoup."
L'image du puzzle court tout au long de cette réflexion sur le mariage et la séparation, sujet universel traité ici de manière ni exhibitionniste ni fictionelle. Nous sommes bien loin de l'auto-fiction doloriste et nombriliste à la française.
Nous sommes ici dans l'après de la séparation et, à travers plusieurs situations de la vie quotidienne, l'on sent que l'auteure est sonnée mais qu'elle réfléchit simultanément à cette situation.
Rachel Cusk, avec lucidité et précision, analyse la répartition des rôles du masculin et du féminin dans lemariage et convoque les mythes anciens pour nourrir sa propre réflexion.
Nous sommes donc dans le domaine des idées mais aussi dans celui des émotions tant la langue est imagée et poétique. Huit textes denses , aux tonalités différentes, pour dire le choc de devoir affronter le chaos, de se sentir mal à l'aise car "L'effort nécessaire pour modeler la normalité est une sorte d'art du faussaire , si laborieux comparé à la facilité avec laquelle l'original a été créé."Le dernier texte, changeant de point de vue, met en scène une jeune femme étrangère engagée par le couple en train de se déchirer, exilée qui trouvera de manière symbolique et douce comment signifier cette séparation.
L'idée de Contrecoup pourrait rebuter mais, une fois ouvert, le style et l'angle choisi par Rachel Cusk font que le lecteur ne se sent jamais voyeur. On est fasciné par l'atmosphère créée mais aussi par l'éclairage si particulier de l'auteure et son analyse des mythes grecs. Un texte piqueté de marque-pages. Une réflexion nécessaire.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : rachel cusk
18/06/2014
Le théorème du homard
"La dynamique émotionnelle était tellement complexe !"
Hyper doué en génétique, Don Tillman l'est nettement moins en relations humaines ! Pour trouver l'épouse parfaite, il met au point un questionnaire des plus sélectifs et rationnels qui lui évitera, pense-t-il ,de nouvelles pertes de temps, un de ses autres obsessions. Évidemment, pour le plus grand plaisir du lecteur Don va rencontrer Rosie qui est l'antithèse parfaite de ce qu'il recherche. Mais est-ce bien si sûr ?
Du décalage entre ce surdoué qui a su aménager ses incompétences sociales et s'efforce d'apprendre les émotions dont il semble dépourvu en visionnant des films et les situations complètement loufoques dans lesquelles il se fourre, naît bien évidemment le rire, ponctué de quelques pointes d'émotion qui ne gâchent en rien l'affaire.
Malgré quelques baisses de rythme en fin de lecture, Le théorème du homard est un roman qui porte une grande attention au langage de ses personnages, réserve de nombreuses surprises et fait remonter notre moral en flèche !
Le théorème du Homard, Graeme Simsion, traduit de l'australienpar Odile Demange, Nil 2014
Merci Cuné !
06:00 Publié dans Humour, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : graeme simsion
17/06/2014
Le génie des coïncidences
" Il semblerait que je sois accablée par les coïncidences, Professeur Post."
Quand un spécialiste des coïncidences- qui prend un malin plaisir à les démonter et à les expliquer de manière rationnelle-rencontre fortuitement une jeune femme dont la vie semble marquée par un "enchaînement cruel d’événements" que se passe-t-il ? Hé bien cela engendre une série de joutes verbales, un maelstrom d'émotions et une flopée de rebondissements entre l'île de Man, l’Ouganda où sévit encore "un homme qui s'est bricolé une foi, un mélimélo de croyances, a décidé que Dieu lui avait parlé, et que tous ceux qui n'étaient pas d'accord pouvaient être abattus, ou amputés."et Londres.
Usant -mais n'abusant jamais -des analepses* et des prolepses**, J.W Ironmonger joue en virtuose avec nos nerfs (deux scènes sont particulièrement éprouvantes), fait monter l'émotion (j'ai plusieurs fois eu les larmes au yeux) avec beaucoup d'empathie et de sobriété. Il ne faut surtout pas en dévoiler plus de ce roman qui joue sur plusieurs registres (romance, thriller, quête d'identité, réflexion philosophique) et nous offre des descriptions plus vraies que nature d'un continent qu'il connaît et aime profondément: l'Afrique. Pour ceux qui n'ont pas peur des montagnes russes émotionnelles. Et zou sur l'étagère des indispensables !
* correspond à un retour en arrière, au récit d'une action qui appartient au passé Il consiste à raconter après-coup un événement. On peut également parler de flasback pour exprimer cette idée, mais ce terme ne s'utilise qu'à propos de cinéma ou de bande dessinée.
* *Clin d’œil à Cuné.
Le génie des coïncidences, J.W Ironmonger, traduit de l’anglais par Christine Barbaste, Stock 2014, 343 pages que j'ai fait durer le plus longtemps possible, gage de réussite s'il en est, et tout piqueté de marque pages bien sûr !
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : j.w.ironmonger
16/06/2014
Incidences
"Avoir l'esprit ainsi envahi par une femme était nouveau pour lui. Non pas envahi par la crainte, le ressentiment, le désir de vengeance ou autres douceurs que lui inspirait sa mère, ou encore par les sentiments sombres et mitigés que sa sœur pouvait faire naître en lui. mais envahi par un fluide agréable qui parfois se mettait à battre comme un torrent incroyablement bon et dangereux. c'était incroyablement nouveau."
Marc, professeur de littérature d'une université nichée dans les Alpes, collectionne les relations avec ses étudiantes, se mettant ainsi sur le fil du rasoir vis à vis de sa hiérarchie et de sa sœur, avec laquelle il vit. Une de ces aventures va tourner court et lui permettra de rencontrer une femme de son âge qui va exercer sur lui une emprise extrême. Mais à trop jouer avec le danger, Marc parviendra-t-il à toujours maîtriser sa vie ?
Comme son héros qui négocie les virages en épingle à cheveu des routes de montagne pied au plancher , Djian nous gratifie de découvertes surprenantes au détour d'une phrase, glisse quelques indices, nous fait accepter les choix de ses personnages pour le moins perturbants et nous gratifie au passage de diatribes enflammées sur les faiseurs de littérature. Mi roman universitaire, mi- thriller psychologique, l'auteur d'Incidences joue sur les ambiguïtés en permanence mais ce que j'ai apprécié par dessus tout c'est le rapport qu'entretient son personnage principal avec la nature et en particulier avec cette faille cachée dans les bois .Un bon roman qui se lit d'une traite.
Disponible en Folio, (244 pages) et je préfère largement la couv' de 2011 (mon édition) à celle de la réédition, suite à l'adaptation cinématographique (que je n'ai pas vue).
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : philippe djian