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27/06/2011

Les colocs

La colocation est en vogue chez les jeunes mais cette fois ce sont six amis entre 60 et 85 ans qui ont décidé de cohabiter, près du Bon Marché , à Paris.vincent pichon-varin
Tous sont pittoresques et attachants, même les plus ronchons, et ils font fort à faire pour tenter de sauver le cabaret transformiste de Jean , qu' une société immobilière a décidé de remplacer par un hôtel de luxe.
Alternat moment d'émotions et d'humour, Les collocs est un roman sympathique qui souffre peut être d'un manque de rigueur dans la relecture. On s'étonne en effet qu'une dame ayant de graves ennuis de santé n'utilise pas le fauteuil roulant qui lui avait été conseillé et trotte allègrement ou presque au chapitre suivant.
L'écriture est agréable et j'ai passé un bon moment en compagnie de ces six loustics  qui ne m'ont pas ennuyé une seconde.

Les colocs, Vincent Pichon-Varin, Le Cherche -Midi 2011, 224 pages.

25/06/2011

Stupeur et tremblements/Les myrtilles

Récit d'un harcèlement moral d'une jeune française dans une grande entreprise japonaise, récit d'une fascination aussi entre "maître" et "esclave", Stupeur et tremblements reste un de mes romans préférés d'Amélie Nothomb , qui n'est jamais aussi bonne que quand elle parle d'elle même, à mon avis.
En soutien aux victimes du tremblement de terre du 11 mars 2011, l'auteure et le livre de poche ont décidé de ressortir ce livre et de lui adjoindre une nouvelle inédite, Les myrtilles dans une édition à ne rater sous aucun prétexte.amélie nothomb,japonamélie nothomb,japon
D'abord parce que l'intégralité des bénéfices sera versé à l'association Médecins du monde mais aussi parce que tout dans cet objet est parfait: le coffret de carton avec ses impressions différentes recto et verso ,avec ses découpes laissant apparaître d'un côté le titre du roman et de l'autre celui de la nouvelle.
Deux autres couvertures pour le roman proprement dit qui devient aussi un "flip book" ou "folioscope" car feuilleté rapidement la petite geisha de bas de page s'anime et salue.
Quant à la nouvelle inédite, son objectif est de nous montrer une "parcelle de la splendeur du Japon" et nous relate une rencontre lumineuse et parfaite sur un volcan japonais...Le texte est vraiment très court mais sa pésentation en est si réussie que je ne me lasse pas de l'admirer :un texte présenté sous forme d'accordéon , agrémenté de motifs japonais (grues, fleurs de cerisiers, carpes...) d'une extrême délicatesse.

à  (s')offrir sans plus attendre !

 

24/06/2011

les veuves d'Eastwick...en poche

"Pour revoir la scène de notre fleur de l'âge."

Trente ans après, Les sorcières d'Eastwick sont devenues Les veuves d'Eastwick et reviennent sur les lieux de leurs forfaits, nettement moins séduisantes  et avec des pouvoirs affaiblis. A leur actif autrefois, sexualité débridée et mort provoquée par leurs incantations. pas sûr que leur retour soit apprécié par les autochtones...51ypGU4xkRL._SL500_AA300_.jpg
Ultime roman de John Updike, Les veuves d'Eastwick souffre dun début laborieux. Certes les voyages en Egypte et en Chine permettent d'enviasger la mort sous des formes différentes mais on a parfois l'impression de lire un guide de voyage en à peine moins ennuyeux. Passé ces trente premières pages ,on se laisse enfin charmer par ces sorcières qui ont vieilli mais n'ont rien perdu de leurs fortes personnalités. C'est l'heure des bilans et même si certaines se voilent la face, il n'est guère brillant. Tout à leur envie de liberté, ces femmes ont négligé leurs enfants et une seule sorcière essaiera de combler le fossé qui s'est creusé entre sa fille aînée et elle.
Le propos est sombre, sans concessions, on s'est bien amusé mais les temps ont changé  et les sorcières , à l'image des Etats-Unis, ont perdu de leur superbe. Updike les décrit de manière lucide et presque cruelle ces femmes riches ou moins riches mais jouissant d'une liberté confortable.
Des pages explicatives techniques alourdissent parfois le propos et l'on sort de ce roman inégal un peu désenchanté mais néanmoins ravi d'avoir retrouvé Alexandra, Jane et Sukie.

23/06/2011

La vie sexuelle des libellules

"Des fois elle est chiante la poésie
 Elle arrive sans qu'on l'invite"

 prologue :ouvert au hasard en pleine période toutmetombedesmains *, je découvre ceci :

"Pas envie de lire
sauf une lettre anonyme
truffée d'insultes injures insinuations salaces
que je trouverai dans ma boîte aux lettres un samedi matin
en revenant du marché
C'est sûr je reconnaîtrai l'écriture
puisque c'est moi qui l'écrirai"

J'étais cuite.

Des libellules et de leur vie sexuelle  il n'en sera fait mention qu'une seule fois, au passage. Tant pis pour les odonatologues  **, tant mieux pour les amateurs de poésie, libre et foutraque car Bernard Friot se lâche dans ces textes jouant avec l'espace, avec les mots, y compris les gros, dans une énergie débordante et jubilatoire. bernard friot,amis libidineux passez votre chemin !
Pas de titres, sauf parfois un vers qui se détache et qu'on pourrait considérer comme tel. Pas facile donc de les identifier mais pas grave, on s'en arrange et on avance. Comme on s'arrange de cette vie quotidienne semblable à un théâtre  où  des "morts vivants" sont "trimballés cahin-cahot dans le bon vieux métro brinquebalant". Heureusement que le poète-Créateur est là pour "allumer dans leur cervelle éreintée quelques ampoules / basse tension .
Célébrant l'amitié "allez on continue", l'imagination, Bernard Friot vitupère contre cette société qui fait la part belle aux messages prémâchés de la publicité:
"fraîcheur citron en super-promotion
 donnez-moi ma ration d'illusions"
A chaque page, on glane des vers, des trouvailles, des surprises en pagaille et les "dessins et gribouillis" de Bruno Drouin, sans oublier une couverture  facétieuse qui joue aussi les 4 èe de couv', (gare aux étourdis qui trouveront le texte sans dessus dessous !)contribuent à cette atmopshère créative en diable !

La vie sexuelle des libellules, Bernard friot, Milan 2011, 93 pages*** enthousiasmantes !

 

*Oui, je sais c'est dur à croire vu mon rythme apparent de croisière mais ça sert aussi à ça un blog : embellir la réalité !:)

** scientifiques étudiant les libellules (appris dans un autre livre commencé, et abandonné pour l'instant).

*** dont certaines ont été testées et approuvées par mes élèves !

22/06/2011

Mauvaise pente

"Toute cet étrangeté, et cet amour catastrophique."

Grace Quinn a volontairement écrasé son mari (une pure ordure) , pour mettre fin à une vie de soumission. Elle part rejoindre son fils, Martin, qui fuyant une atmosphère étouffante,  s'était réfugié quelques années auparavant à Dublin.keith ridgway,mèrefils
Là, elle va jouer à cache cache avec un policer compréhensif et ,de rencontre en rencontre, aussi essayer d'échapper à la confusion qui l'habite. Son chemin croisera d'une façon fugitive celui d'une autre très jeune femme que la société irlandaise veut contraindre à subir son destin.keith ridgway,mèrefils
Premier roman paru  en France en 2001, Mauvaise pente est un récit tout en nuances et sensiblité qui nous épargne toute réflexion attendue sur le remords. Grace prend son destin en mains pour la première fois et elle est prête à en payer le prix, si élevé soit-il. Un magnifique portrait de femme qui vient d'être adapté au cinéma sous le titre  Où va la nuit.

Emprunté et lu pour la première fois à sa sortie à la médiathèque, sa relecture m'a laissée tout aussi éblouie !

Mauvaise pente, Keith Ridgway, traduit de l'anglais (Irlande) par Philippe Gerval, phébus 2001, 10/18.

Le film devrait passer par chez moi en juillet, j'ai hâte de voir Yolande Moreau dans ce rôle qui semble fait pour elle !

L'avis de Clara.

Celui de Mirontaine.

keith ridgway,mère fils

21/06/2011

La première fois

"Est-ce que ton petit copain est un Danny ou un Eddie ?"

 Même s'ils sont parfaitement informés de l'aspect technique de la relation sexuelle , les ados, garçons et filles, des nouvelles de ce recueil La première fois , sont néanmoins fort embarrassés quand il s'agit de franchir le pas.
"Mais ce que je ne parvenais pas à déterminer, c'était le moment où c'était devenu une compétition. le sexe et tout. Quelques années plus tôt , on évitait joyeusement les filles.", constate le footballeur héros de "But", la nouvelle de Keith Gray, qui sera confronté à un choix cornélien...burgess,fine,gray,hooper,mc kenzie,ness,rai,valentine
Trouver des conseils auprès des adultes ? Pas question ! Car même s'ils sont plein de bonne volonté, comme le père du héros de Sophie McKenzie, les parents sont souvent maladroits, voire ridicules . Sauf quand une vieille dame, affranchie de toute contrainte par son âge même ,décide de parler de sexe en plein milieu du repas dominical, au grand dam des parents et au grand plaisir des ados  dans" La majorité sexuelle" de Jenny Valentine. On retrouve dans ce texte toute l'empathie et la malice de l'auteure de La fourmilière , qui a le chic pour peindre des personnages attachants qui établissent des liens par delà les générations.
Mais il y a des choses qui ne changent pas. ainsi le pouvoir de la poésie que va redécouvrir le héros de Melvin Burgess dans "Entrée en matière", pouvoir qui ira au delà de ses espérances...Beaucoup d'humour dans ce texte qui aborde le "problème" de la différence d'âge, quelques années qui représentent un gouffre quand on est ado.
Autre question, bien plus complexe, celle du choix sexuel car "ça se passe autrement pour les garçons" vont devoir accepter les héros de Patrick Ness, dans un texte où tous les mots crus ont été volontairement caviardés, sans pour autant ôter efficacité et sensibilité à ce texte.
Plus classique "Charlotte " de Mary Hooper nous rappelle qu'au XIXème siècel, en Europe, la virginité d'une jeune fille pauvre pouvait être une simple monnaie d'échange.
Tonalité plus grave également chez Bali Rai qui nous rapelle qu'une "serviette blanche" peut avoir de dramatiques conséquences pour une jeune mariée en Inde, même de nos jours.
Le dernier mot revient à Anne Fine qui résume la situation avec son "Faire l'amour ou le trouver" mettant en scène un cours d'éducation sexuelle plus vrai que nature, qui rappelle bien des souvenirs à une enseignante chevronnée , qui ne l'a pas toujours été dans certains domaines...
Les grandes plumes de la littérature britannique pour adolescents nous offrent ainsi un panorama complet d'une question qui nous a tarabustés et tarabuste nos ados, alternant les tonalités et les points de vue (j'ai particulièrement apprécié les nouvelles mettant en scène le point de vue des garçons) et dédramatisant la situation, sans pour autant tomber dans l'angélisme. Une réussite !burgess,fine,gray,hooper,mc kenzie,ness,rai,valentine

La première fois, Scripto, Gallimard 2011, traduit de l'anglais par Laetitia Devaux et Emmanuelle Casse-Castric , 245 pages à offrir ou à laisser traîner, mine de rien, dans des endroits stratégiques...

20/06/2011

Mort d'un jardinier

"...tu n'es plus connecté au serveur de la réalité ici et maintenant, tu glisses dans un autre monde, dans les débris de ton cerveau en capilotade..."

Un jardinier, aimant autant les mots que les salades, est frappé d'un accident cardiaque dans son jardin. Tandis qu'il gît sur le sol, envisageant ainsi la réalité sous un autre angle, tous les artistes, écrivains , musiciens qu'il a aimés sont convoqués autour de lui. lucien suel
Mais ce sont aussi les mots, ceux qu'il a écrits, ceux qu'il a lus qui envahissent son corps, accomplissant ainsi une transsubstantiation finale : "ton corps est ton dernier volume."
De grands pans de plusieurs pages, le rythme va en s'amplifiant au fil du roman, répartis en courts chapitres, un flot par lequel il faut se laisser emporter, admirant au passage le travail toujours recommencé du jardinier, usant du vocabulaire imagé du potager mais aussi de celui de la modernité (le jardinier-poète ne se coupe pas de la technicité et accueille tous les mots), voici qui peut dérouter de prime abord. Mais très vite on se laisse séduire par cette vision et par cette écriture qui balaie tout sur son passage.
Un livre d'une densité aigüe, qui brouille les frontières entre roman et poésie.

Mort d'un jardinier, Lucien Suel, La Table Ronde 2008, Folio 2010, 159 pages que j'ai pris le temps d'apprivoiser (dans ma Pal depuis 1 an !) mais là c'était le bon moment et je l'ai dévoré d'une traite !

19/06/2011

L'extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet...en poche

"La médiocrité, c'est la moisissure de l'esprit."

Pour recevoir le prestigieux prix Baird, le cartographe et illustrateur scientifique T.S Spivet doit traverser les Etats-Unis d'Ouest en Est, inversant ainsi le trajet suivi par ses ancêtres. Rien de bien original à première vue sauf que T.S.Spivet n'a que douze ans.
A sa suite, nous entreprenons ce voyage initiatique qui permettra à ce garçon, féru de détails et de précisions ,d'éclairer d'un nouveau jour sa lignée familiale et en particulier les liens pour le moins distendus , en apparence, entre son cow-boy laconique de père et sa scientifique de mère.
T.S. n'a rien d'un "singe savant", c'est un enfant sensible et précoce qui s'efforce toujours d'ordonner le monde qui l'entoure, sans doute pour apaiser les questions qui le hantent et qui ne prennent d'abord place qu'en marge du récit-au sens propre-, dans les notes et dessins qui accompagnent ce texte et en font un objet hors du commun.reif larsen
Le livre est en effet doté d'une couverture et d'une iconographie qui lui donnent à la fois un côté intemporel et désuet que je n'ai pas voulu abîmer, pas de pages cornées donc mais un roman tout hérissé de marque-pages !
L'écriture fluide fait qu'on ne s'ennuie pas une minute dans ce récit fertile en rebondissements, tant au niveau aventures que découvertes psychologiques. Une rencontre enthousiasmante ! Je n'oublierai pas de sitôt ces personnages pittoresques et attachants !

18/06/2011

En avant route...en poche

 "J'avais la foi plutôt méfiante."

Où peut-on rencontrer une Coréenne traînant un caddie rose,des ronfleurs un barbu et son âne sans oublier sept maris qui se plieront en quatre pour une seule femme ? Sur le chemin de Compostelle bien sûr ! 516QK+GiLwL._SL500_AA300_.jpg
Croyante par intermittences, Alix de Saint-André empruntera quand même trois fois ce chemin de pélerinage et dans En avant, route ! (citation de Rimbaud), elle nous relate avec humour ses pérégrinations, ses rencontres et ses découvertes, spirituelles ou ou pas.
Que l'on soit marcheur ou pas, croyant ou athée, ce récit trouvera toujours le moyen d'intéresser le lecteur curieux de découvrir ce qui motive ces gens aussi disparates , du point de vue de leurs motivations ou de leurs aspirations.
Un récit plein d'humanité où nous trouverons aussi de très belles pages ,tant sur les ânes, motivés par l'amour, que sur les chats dont la mort n'a pas voulu ...
308 pages pleines d'entrain, un régal dévoré d'une traite !

17/06/2011

Aphorismes dans les herbes et autres propos de la nuit

En introduction à ses Aphorismes dans les herbes, Sylvain Tesson affirme: l"Si la toxine du calembour l'a contaminé, il faudra le jeter. Ou alors le destiner aux amis indulgents." Prudente manière de se défausser car effectivement nombreux sont les calembours dans cet opus, et pas toujours réussis, hélas.
On aurait aussi éviter certains aphorismes fleurant bon son Gaulois en goguette : "On coucherait bien avec les Afghanes, en plus elles fournissent les draps.", d'un goût plus que douteux.
Il n'en reste pas moins qu'heureusement l'auteur flirte souvent avec l'esprit de Woody Allen : "Le problème avec l'avion , c'est qu'on ne peut pas sortir si l'on n'aime pas le film.", "Je ne connais personne qui ne se fasse autant prier que Dieu", ce qui rattrape quelque peu les lourdeurs précédentes.sylvain tesson
La tonalité est moins buccolique, plus sombre- l'idée du suicide revient à plusieurs reprises- mais il semble que l'exigence ait été moins grande dans cet opus, l'auteur cédant souvent à la facilité du "bon mot" un peu creux, voire vain. C'est dommage car nous avions été habitués à plus de poésie et de finesse, comme le prouve celui-ci :

"Qui s'inquiète de rentrer les arbres quand la neige arrive ? "

Aphorismes dans les herbes et autres propos de la nuit, Sylvain Tesson , éditions des Equateurs 2011, illustrations de Bertrand de Miollis, 103 pages où l'on déniche quelques perles.